
mides de gazons defféchés, auxquels on met le '
feu avec des brindilles 5 on en répand les cendres
fur la terre, pour les y mêler enfuite par un labour
fait avec le hoyau, ; v .
Après avoir donné une idée de ce qu etqient
les grandes maffes de f o r ê t s fituées fur les frontières
de la France, au midi, à l’oueft 8c au nord,
nous aurions à parler de celles qui exiûent a 1 eft ,
dans les départemens du Rhin, des Y ofges, & c . 5
mais il nous fuffira de dire que ces pays font encore
les mieux boifés de la France, bien qu ils
n’aient pas été exempts de la fatalité qui partout
a pefé fur les f o r ê t s . On y remarque, dans le département
du Bas-Rhin, la f o r ê t de Haguenau, appelée
autrefois f o r ê t f a in t e ( f o r e f t a f a n f â a ) , a caufe
des ermitages 8c des couvens qui s y établirent. II
paroîc que cette f o r ê t avoit une etendue très-confi-
dérable j mais la fondation de la ville d Hague-
nau en 1015 8c l’établiflement d un grand nombre
de communes dans les environs, & furtout les
guerres qui, à différentes reprifes,ravagèrent le
pays, ont confidérablement réduit cette étendue3
cependant elleeft encore dJenv iron 17 ^ooche étares.
M. Bexon, dans fes R é f le x io n s f u r l e s f o r ê t s , imprimées
en 1 7 9 1 , nous préfente le tableau des
réfultats du dépeuplement des f o r ê t s dans quelques
parties des Vofges. « Les flancs de nos montagnes,
dit-il, prefque tous dégarnis de terre par
le dépouillement des f o r ê t s qui y exiftoient, &
par la lucceffion des années qui ont facilité aux
pluies & aux torrens les moyens d'en découvrir
les rochers, ne peuvent offrir i’efpoir d’une végétation
nouvelle. Nous fommes environnés d’exemples
qui ne rendent cette vérité que trop frappante.
Combien de montagnes , autrefois couvertes
d e f o ê t s doublement utiles, n offrent plus
que des terrains vagues , qui ne feront jamais
d’aucune reflource à la contrée , pas même pour
le parcours , tandis que leur aménagement en
préfentoit d’efîentielles , & q ue, fous leur abri,
croiffoit une pâture abondante 1 La terre des Vofges
, naturellement légère, fe deffèche & s’ap*
pauvrit facilement; elle ne peutconferver de fertilité
que par des arrofemens prefque continuels
& un engrais qui répare les pertes que chaque
récolte entraîne ; fans cela elle s’épuife ^rapidement
& les produits en font foibles; d’ ou il faut
conclure que plus les f o r ê t s diminueront en cette
partie , plus l’agriculture en fouffrira, & que ,
mieux on les conlervera, mieux la terre y reprendra
fa fécondité.
„ Les flancs des montagnes qui font encore
couvertes de f o r ê t s offrent de belles habitations,
des habitans aifés & de nombreux troupeaux.
Celles qui font dépouillées de leurs anciennes
f o r ê t s n’offrent qu’une terre aride , fatiguée par
les travaux du malheureux qui ne peut en arra-
cher fa fubfiftance; & les habitations, les hommes
, le bétail, tout y annonce la fécheieffe,
l’épuifement 8t la diferte. »
M. Monnot, dans un Mémoire imprimé en
1B00, fait remarquer que les dégâts commis dans
les f o r ê t s du département du Doubs avoient ap- |
p orté, à cette époque, une grande diminution
dans leurs produits. Selon lui, trente communes
des environs de Befançon, exploitant chaque
année 800 arpens de bois , trou voient, vingt
ans auparavant, dans leur produit, la conformation
qui leur étoit néceffaire, avec un excedant
qui fervoit à payer leurs contributions. Mais,
en 1800 , ce produit étoit infuffifant, fans que
la coniommation fût devenue plus confidérable,
X ’affoibliffement du produit, en vingt ans, avoit
été de plus du quart ; auffi une multitude de
familles étoient-elles expofées à fouffrir périodiquement
des rigueurs de l’hiver. La Société da*
griculture de Befançon, frappée du Mémoire de
M. Monnot, s’empreffa d’appeler l’attention du
Gouvernement fur le torrent de devaffation qui
menaçoit de détruire les f o r ê t s de cette contrée.
Si nous rentrons dans l ’intérieur de la France,
nous y voyons, de même que fur les frontières,
les f o r ê t s en proie à la deftruétion pendant une
longue fuite d’années. Prenons pour exemples
quelques-unes des f o r ê t s qui environnent la capitale,
& qui, par conféquent, auroient du être
mieux confervées.
F o r ê t d 'O r l é a n s . Cette f o r ê t & celle des Ardennes,
dont nous venons de parler, font les
deux plus remarquables du royaume.^ Celle d Orléans
eft célèbre pat fa réputation d avoir été un
repaire de brigands, & par l’immenfe étendue de
terrain qu’ elle embraffoit autrefois & celle qu elle
contient encore aujourd’hui.
Saint-Yon, dans fon R e c u e i l d e s o rd o n n a n c e s fo -
r e f t iê r e s , imprimé en 16 lo , nous dit que la partie
de cette f o r ê t qui appartenoit au Roi contenoit,
dans des temps plus reculés, jufqu’a 120,000 ai-
pens , & qu’ à cette dernière epoque la contenance
de cette partie de la f o r ê t x\ étoit plus que
de 40,000 arpens. Mais ces renfeignemens ne font
point exaèts ; les appréciations plus rigoureufes
que nous trouvons dans le T r a i t é d e s Am en ag e -
m e n s , par Plinguet, ingénieur en chef du duc
d Orléans, imprimé en 1789, nous font connoitre
qu’à cette époque la f o r ê t d’ Orléans contenoit
120,000 arpens de bois tant au Roi qu à la grue*
rie. Nous allons voir que cette étendue renfermoit
un grand nombre de terrains; vagues.
Depuis 1554 jufqu’ à 1602, on aliéna dans
r ê t d’Orléans une grande quantité de terres fur
lefquelles' les bois avoient difparu. Ces terres
ainli aliénées, & qui formoient de 4 à. yoo articles
, fituées dans une f o r ê t de quinze _à fel.ze
lieues de longueur, font évaluées par le terrier
d’Orléans à 16,000 arpens.
De plus, en 1776 , on diftribua , a diverfes pa*
roiffes, des vagues de h . f o r ê t d’Orléans, po.l£
fervir de pâtures à leurs bêtes blanches.^ Ces di
tributions furent faites avec fi peu d’examen,
dans plufieurs endroits, il en avoit été donné |
Suis qu'il n'y en avoit. Cela prouve combien peu
| | attachoit d’impoitance aux bois , puiiqu'on les
sbindonnoit aux moutons, même avant leur del-
ilûion Ces concédions non limitées fotmoient, dans la généralité de la f o r ê t .d’Odéans, un total
de î,t68 arpens. . . .
C'ellainfi que les aliénations 81 les concédions 5
jointes aux délits des riverains, aux incendies fré-
duens, à la médiocrité du fol & aux vices des
‘ aménagemens Si des exploitations, accéléroient la
deitruflion de cette im m e n f e f o r ê t .
On ne fongeoit point alors, maigre les avertif-
femens proclamés par quelques hommes éclairés,
pue la difette du bois pût jamais fe faire fentir;
ou peut-être l'égoïfme du temps fe refufoit-il à
ménager les reflources de la poftérité. On prefé-
roit, dit M. Plinguet, la culture des terres & la
multiplication des beftiaux, objet principal du
commerce de cette province; c’ étoit l'intérêt dominant
des familles; il ne falloit de bois que pour
les befoins du jou r , dans un pays où l'on fe
croyoit alluré de n’en manquer jamais, & dans
un temps oû l'approvifionnement de Paris ne fait
e encore aucune ferifation marquée qui pût influer
fur lé revenu de la f o r ê t d’Orléans. Ce ne fut
que plus tard, lorfque le canal d’Orléans en tranf-
I porta les bois pour le fervice de la capitale, que
l'on fentit toute l’ importance de c e t t e f o r ê t .
L’arpentage qui en avoit été fait en 1671, lui af-
fignoit encore une contenance de 121,000 arpens.
Savoir :
i°. En plein bois, en état de porter du haut
taillis & dfcs baliveaux.................. 40,000 arpens. 2e En récepages, landes &
bruyères.................................- • • • 2 5 >000
30. Bois en gruerie..................... 24,000
4°. Bois tenus par des eccléfiaf-
tiques & des particuliers chargés
degrueries;\ . . . . . . . . . «............ 32,000
Total pareil.................... 121,000 arpens.
Dans cette quantité, Roi étoient compris poulre 6s 5b,0o0is0 daurp etnrés.fonds du
Mais 50 ans après, c’eft-à-dire, en 1711 » une
autre réformation eut lieu, & l’on trouva que la
perte réelle fur les bois du Roi avoit é té , dans
i'efpace de 50 années, de 17,126 arpens, & que
par conféquent la contenance en étoit réduire a
47,774 arpens. M. Plinguet obferve que fi les contours
des bois du Roi (car on n’avoit mefuré que
les contours) ont perdu 17,226 arpens, les vagues
intérieurs fe font agrandis auffi en même proportion
, parce qu’il n’y a point de raifon pour
qu’il en foit autrement, & parce que les memes
caufes de dépériflèment fubfiftent pour un lieu de
la fo rê t comme pour un autre, pour fes bordures
& fes rives comme pour l’intérieur de fes maffifs.
M. Plinguet obferve encore que fi les bois du
R o i, qui contenoient 65,000 arpens, en ont perdu
17.000, les bois en gruerie, qui t n contenoient
56.000, ont dû en perdre en même proportion,
c elt à-dire, environ 15,000 arpens ; d’autant que
ces bois de gruerie ont fouffert une devaluuon
incroyable. , . x .
Ainli, depuis 1671 jufqu’en 1721, voila la contenance
boifée de la f o r ê t d’Orléans réduite de
121,000 arpens à 89.000; ce qui fait une perte de
3 2,000 arpens, c’eft-à-dire, de plus du quart de
la ni a fie totale. , ,
Si la f o r ê t d’Orléans eût continué d’eprouver de
femblables réductions, 150 ans auroient fulfi pour
en confommer la ruine entière. C e tableau fâcheux
fournit matière à de férieufes réflexions
pour l’avenir.
Il paroit que, par la fuite, les pertes furent beaucoup
moindres ; car M. Plinguet porte à 40,000
arpens la contenance des bois du Roi ( en 1709)»
non compris environ 6000 arpens de récepage 8c
de brûlis. , ,
La révolution fut une nouvelle epoque de de-
vaftation pour cette grande/orer. Toutefois, fi elle
reçut des atteintes funeftes dans les premières années
de la tourmente révolutionnaire, elle fu t, des
l’an 9 , l’objet des foins particuliers de 1 adminif-
tration, qui y répara de grands maux & y fit des
améliorations notables.
F o r ê t d e F o n t a in e b l e a u . Cette f o r e t , l une des
plus intéreffantes du royaume par fon étendue,
fa fituation & les reflources quelle fournit à l’ap-
provifionnement de la capitale, eft peut-être auffi
la plus curieufe à étudier pour l hiftoire d e s f o r e t s
& pour l’application des principes de la fcience.
Elle préfente prefque tous les exemples de ce que
peuvent produire, fur le fort des f o r e t s , les influences
du fo l , de la fituation de 1 expofition,
les effets d’un bon ou d’ un mauvais fyftème d aménagement
, & les dommages caufés par les droits
d’u âge & la multiplicité du gibier.
Cette f o r ê t eft auffi irrégulière dans fa forme,
dans fes contours, dans la difpofition & le mouvement
de fon fo l, qu elle eft diverfifiée dans la
nature, la qualité & la quantité de fes produits.
Ici on voit des maffifs d'antiques futaies; à côté,
des déferts arides; là , au milieu des fables, des
taillis vigoureux ; ailleurs, des hauts taillis dépé-
riflans & dont toute la partie fupérieure, vue d’une
éminence, reflemble à une f o r ê t de bois mort;
non loin dé-là, des bois vifs & d une belle verdure,
que dépafleat des rochers nus & efearpés ;
tantôt on voit des repeuplemens de la plus belle
efpérance, & tantôt les foibles reftes d’une plantation
fans fuccès; enfin, l’on remarque une variation
continuelle d’afpeéts, de fîtes, de fertilité
& d’infertilité, de vie & de mort. Le fol, dans quelques
parties baffes, eft de bonne qualité & d une prorondeur
fuffi’.ante pour y nourrir de la futaie ; mais
il eft, pour la plus grande partie de la f o r ê t , très-peu