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ordinairement vers la mi-juin. On les renouvelle i
un mois après , & on lie de nouveau les bourgeons
qui ont befoin de l’être.
Un fécond binage fe donne alors. On attend,
pour le troifième,que les railïns commencent à
noircir.
L’ancien journal de Bar- fur-Ornain, compofé
de 54 ares 34 centiares, doit contenir 1200 ceps,
& recevoir tous les ans 12 à 1500 foffes de provignage.
Le vin des v ig n e s de Bar-fur-Ornain eft léger &
chaud , mais il a un goût de terroir qui n’eft pas
agréable à ceux qui n’y font pas accoutumés. J’ai
inutilement cherché quelle pouvoit être fa caufe
dans le terrain, qui ne diffère pas de celui des v ignobles
voifins, ainfi que dans les variétés, qui
font les mêmes que celles de ces vignobles.
Beaucoup de v i g n e s , expofées la plupart au
midi, "fe voient dans les environs de Verdun. Elles
font plantées dans une argile remplie de petites
pierres calcaires, les unes dures, provenant de la
roche du fommet de la montagne, les autres tendres,
provenant de l’efpèce de craie qui lui fert
de noyau.
Dans ces vignobles, il fe fait des vins rouges
& des vins blancs, tantôt avec des raifins rouges-,
tantôt avec des raifins blancs. Tous font agréables
& recherchés. Les féconds font plus délicats , 8c
les troifièmes plus fpiritueux. Sa culture, eft abfo-
lument la même que celle du vignoble de Bar-fur-
Ornain.
J’y ai vu une v ig n e perdre fes feuilles du jour au
lendemain, par fuite d’ un labour inconfidéré pendant
la chaleur.
C ’ eft le feul vignoble où j’ai été dans le cas de
m’affurer que I’Isa ir e & le Puceron l a n igère
, ou autre voifin, caufoient du dommage aux
v ig n e s . V o y t \ ces mots.
Les variétés que j’ ai étudiées & décrites dans
ce vignoble, font :
Le p in e a u , b la n c ou b la n c d e C h a m p a g n e y produit
d’exceilent v in , mais il eft peu commun.
U a u x o i s ou p in e a u g r i s . Il y a des v i g n e s qui
en font exclufivement plantées. Son vin eft, comme
partout, au premier rang pour la qualité, & fe
garde fept à huit ans. S’il n’eft pas plus, généralement
cultivé, c’eft probablement parce que fes
grappes font petites 8c peu nombreufes.
Le l i v e r d u n n o i r . Il m’a paru que c’étoit le
b o u r g u ig n o n des autres vignobles. Il produit beaucoup,
mais fon vin eft dur. Il ne fouffre pas l’ arqure.
La co u g n e t te n o ir e y c’eft le p u l f a r e du Jura. 11
eft rare, & c’eft fâcheux, parce que ie fol lui
convient, qu’il donne abondamment, 8c que fon
vin eft bon.
Les g o u a i s n o i r & b l a n c , la f t g n o le t t e n o i r e &
b la n c h e , la v a r e n n e n o ir e , le g o u a i s v i o l e t , le m e u n
i e r , appelé b la n c h e f e u i l l e , le t e in t u r ie r ou t e in t e -
v i n , font rares, 8c donnent des vins de mauvaife
qualité.
y 1 g
Le vignoble de Commercy eft peu étendu,
comparativement aux deux précédens. Il eft placé
fur des coteaux expofés au midi & au levant, dont
le fol eft une argile rougeâtre, furchargée de petites
pierres provenant de la roche calcaire primitiv
e , qui forment la bafe de tous ceux du pays.
On y cultive principalement le b o u r g u ig n o n , q u i,
ici comme à ’Verdun, donne un vin dur, fort
coloré, qui fe garde long-temps.
Les autres raifins que j’y ai vus, mais en petite
quantité, font les p in e a u x d e B o u r g o g n e n o i r 8c b la n c .
Il en eft de même du h a m e y e , qui ne m’a pas
paru différer du g a m e t .
La culture de ces vignobles ne s’écarte pas fen-
fiblement, d’après mes obfer varions, de celle des
derniers cités.
D é p a r t e m e n t d e l a H a u t e -M a r n e .
Les vins de ce département font peu connus
â Paris, mais il en eft de très-bons, qui tiennent
en même temps de ceux de Bourgogne & de ceux
de Champagne.
Le vignoble de Saint-Dizier, auquel, il faut
joindre celui d’Ancerville, 8c probablement celui
de Vaffy, è c c . , font en plaine , dans un attériffe-
menc de la Marne. Les ceps y font tenus élevés
de trois pieds, & fe cultivent, fe taillent, & c . ,
comme il a été dit à l’occafion des v i g n e s groffes
du département de l’Aifne.
Les variétés qui s’y cultivent,font : le b o u r g u ig
n o n , le f a ç o n ou f o c a n , peu diftinÔt du p in e a u
b l a n c , donnant du bon v in, mais en petite quantité
} le g a m e t n o i r , le g o u a is b la n c y toutes déjà
citées. On les mêle toujours pour former trois
fortes de vins , félon que l’une ou l’autre domine.
Ce font le c l a i r e t , l’ o r d in a i r e 8c le g r o s . Je les ai
tous goûtés 5 le premier feul eft palfable, mais
poffède un goût de terroir dont je n’ai pu recon-
noître la cau fe ..
Le vignoble de Joinville eft d’une grande étendue,
& fe lie avec ceux de Ribaucourt, Bour-
mont, Chaumont, Château-Villain, que je, con-
nois tous.
On cultive dans ces vignobles, en proportions
diverfes,
Le p in e a u d e B o u r g o g n e , qui donne le meilleur
vin , mais en petite quantité.
Le g r o s p in e a u b l a n c , qui m’a paru être le f a ç o n
de Saint-Diziër.
Le g r o s g a m e t , qui eft le b o u r g u ig n o n du même
vignoble.
Le p e t i t g a m e t , qui eft le véritable g a r n i t de
Bourgogne.
Le g e n t i l b l a n c , qui donne un fort bon v in , &
qui eft moins fenfible à la gelée que les précédens.
Le p in e a u g r i s , les g o u a is n o i r & b l a n c , dont j ’ai
parlé, 8c que j’ ai caraétérilés plus haut.
Le d a m m e r y , que je n’ai pu voir.
Les raifins de toutes ces variétés fe mêlent ordinairement
pour en faire un feul vin ; mais les propriétaires
riches, qui font vendanger leurs pineaux
à part, en obtiennent que j’ai plufieurs fais confondus
avec des vins de Bourgogne.
La culture de ces v ig n e s eft la même que celle
de Bar, excepté qu’on laiffe le cep s’élever un peu
plus.
Mais c ’eft au midi de Langres, dans l'arrondif-
fément de Montfaugeon, que fe cultivent les meilleures
v ig n e s de ce département. Le vin qu’elles
fourniffent eft un peu plus foible que celui de la
côte de Bourgogne, mais quelquefois plus délicat,
quand il eft bu à point.
Les communes d’Aubigny, de Prothoy, de
Montfaugeon, de Vaux, de Rivière-les-Foffes,
de Heuilly-Coton, font, félon le rang que l’opinion
leur donne, celles qui fourniffent le meilleur.
J’ai féjourné dans toutes.
Ces v ig n e s font généralement expofées au levant
, mais il en eft beaucoup qui le font au midi,
& quelques-unes au nord.
La plus réputée, la p r in c e j f e , commune d’Aubigny,
eft au midi. Long-temps j’ai été abreuvé
par elle.
On ne compte que fix variétés dans ces v i g n e s fo
donc voici les noms, dans l’ordre de leur qualité :
en rouge, le p in e a u d e B o u r g o g n e , le m a l i n , le
g a m e t y en blanc, le p i n e a u , le m e lo n b la n c 8c le
p a r i f i e n , que je crois être le même que le m o r i l lo n
OU f e u i l l e r o n d e .
Quant à la culture, elle ne diffère en aucun
point de celle des v ig n e s de la Côte-d’Or 5 j’y
renvoie en conféquence le leéteur.
D é p a r t e m e n t d e l ’ A u b e .
Les v ig n e s de ce département y occupent 21,000
hectares. Celles des coteaux expofés au midi, &
cultivées en pineaux tenus bas, donnent des vins
de bonne qualité j mais celles en plaine , de gouais,
de gamet, & c . , tenues hautes, en fourniffent qui
font extrêmement durs, & qui ne peuvent fe
boire qu’après plufieurs années.
Le fol des coteaux eft une marne argileufe q u i,
dans les vignobles de Bar-fur-Aube, de Muffy-
Lévêque, des Ryceis, & c . , repofe fur la pierre
calcaire primitive, & dans les environs de Troyes,
de Méry., & c . , repofe fur la craie.
Le fol des plaines eft une argile femblable, mais
plus fertile, mêlée de cailloux calcaires roulés,
provenant des coteaux ci-deffus.
Le vignoble de Bar-fur-Aube eft expofé en plus
grande partie au midi ; cependant il y a des pièces au
levant & au couchant. On plante les ceps en lignes
dirigées en montant, mais cette difpofition ne fe
conferve que quelques années, parce qu’on eft
dans l urage de provigner les fouches en rond,
foit qu’il ^agiffe de regarnir les places vides, foit
qu’on veuille rajeunir tous les ceps, qu’on tient
toujours fort bas 8c affez écartés les uns des
autres.
Les labours font rarement au-deffus du nombre
de trois, 8c fe font avec une pioche à fer triangulaire
très-long & étroit.
Les opérations de l’ébourgeonnement, de la
rognure 8c de l’émondage font très-rigoureufes >
auffi ces v ig n e s font-elles toujours foibles & donnent
elles des récoltes peu abondantes.
Les variétés cultivées dans ce vignoble, font :
Le p in e a u ro u g e d e B o u r g o g n e , peu productif,
mais donnant le meilleur vin.
Le f r a n c p i n e a u , ou g a m e r y r o u g e , donne des
grappes plus groffes & plus nombreuses. Son vin
eft très-bon. On le cultive beaucoup.
Lq f r a n ç a i s , ou b a c h e t r o u g e , paffe pour donner
du vin médiocre, excepté a Colombey-la-Foffe ,
où je ne fuis pas allé , de forte que je ne fais pas
pofitivement fi c’eft la même variété qui s’y
•trouve.
Le g a m e t n o i r . C ’ eft le plant de prédilection ,
parce qu’il fournit beaucoup 8c coule rarement 3
mais, fon vin n’ eft ni bon ni de garde.
Le g o u a i s n o i r ; même obfervation. Cependant
fon vin fe garde mieux qu’aucun autre de ce département,
& devient bon apres 1 y à 20 ans de cave.
L ’a r b o n e , ou a r b a n e b la n c . C ’ eft celui qui fournit
le plus de vin & le meilleur. Il ne fe vendange
qu’après la gelée.
Le p i n e a u b la n c eft très-rare.
Le g a m e t b la n c 8c le p u r io n donnent du mauvais
vin.L
e f r o m e n t é v io l e t . C ’eft le p in e a u g r i s . Son vin
eft très-délicat, mais on en fait rarement à part.
Les vignobles de Muffy-Lévêque , de Bar-fur-
Seine, font au nord ou au levant. Leur culture eft
la même que celle des Ryceis, qui eft de l’autre
côté de la même montagne.
C ’eft dans ces vignobles que j’ai vu tranfporter
dans les v ig n e s des preffoirs roulans de fix pieds
carrés, pour y faire le vin blanc avec plus d’ économie,
& pouvoir enterrer de fuite la gêne 1
pied des ceps. Je n’ai pu qu’applaudir à cette pci «
tique, f^oyei P r e s s o i r .
Les coteaux qui bordent la Laigne au levant &
au couchant conftituent le vignoble des Ryceis ,
dont le vin eft très-digne d’eftime ; mais il y a
autant de v ig n e s au midi qu’ à ces deux expofitions.
La plus eftimée eft au fud-eft.
Le fol de ces coteaux eft une argile rougeâtre,
furchargée de fragmens de la pierre calcaire primitive
fendillée, qui en fait le noyau. £
C ’ eft en lignes écartées de trois pieds que fe
plantent les v ig n e s . Elles ne font jamais arrachées,
mais renouvelées par ie provignement tous les fix
à fept ans. Ce provignement s’ exécute dans des
foffes creufées jufqu’au rocher, & fort larges ;
l’intervalle de deux foffes s’appelle un à -d o s . Les
v ig n e s qui s’y trouvent font expofées à couler. On
repouffe l ’emploi du fumier, mais on lève les ga