fuppofée par Duhamel. D’ailleurs, les arbres .en
plein air reçoivent les rayons de la lumière dans
toutes les parties de leur furface, & même beaucoup
plus vers leur cime que plus bas, & cependant
l’inclinaifon des branches inférieures eft
toujours plus confidérable.
« C ’ eft probablement , continue Duhamel|
cette même raifon ( celle qu’il a indiquée ) qui
produit le parallélifme des-branches des arbres
qui font plantés fur une colline, fuivant l’obferva-
tion de M. Dodart j ou l’on voit qu’un arbre planté
fur la croupe d’une montagne élève fa tige fuivant
une ligne perpendiculaire, & que fes branches
font à peu près parallèles au terrain. Comme les
brandies oppofées-à la montagne doivent plus
profiter que celles qui font du côté même de la
montagne, & comme elles doivent fe porter en
dehors , elles forceront les branches d’en bas
de baiffer, au lieu que cette caufe ne fubfifiant
pas du côté de la montagne, il en réfultera le
parallélifme que ce natura.ifte a remarqué.
w Une observation encore bien fingulière,
c’ eft qu’un arbre qui vient de femencé élève fa
tige fort droite ; il en eft de même d’une bouture
qu’ on feroit d’une tige droite ; mais celle qu’on
feroit avec les branches latérales & des jets courbes
fur l’arbre, fe courbe beaucoup, furtout fi
c’ eft un arbre dont le bois foie fort dur. »
Cette dernière obfervation feroit de quelqu’importance
pour l’objet qui nous occupe, fi le
chêne & l ’orme fe reproduifoient. de bouture ;
car elle donneroit les moyens de muftipiier à
volonté les bois courbes de petite &r même de
moyenne dimenfion. Je dis de petite diménfion-,
parce qu’ il eft reconnu que les arbres provenus de
boutures ne font jamais aufli forts que ceux qui
proviennent de femence. Mais ce moyen de reproduction
ne leur convient pas , quoique plu-
fieurs auteurs, & nommément Va’renne de Fe-
nille , annoncent que l’orme vient de bouture.
Çet arbre fe reproduit très-bien de rejets qu’on
appelle croffettes , & c’eft même par ce -moyen
qü’ on multiplie l’orme tortillard, dont les femences
ne reproduifent pas toujours cette variété. Je fuis
perfuadé qu’une plantation faite de-rejetons, pris '
parmi ceux qui préfenteroient quelque courbure ,
fourniroit beaucoup plus de pièces courbes pour
la marine & le charronnage, qu’ une a titre qui
feroit faite avec des plants de femence.
Je renvoie au Traité de la phyfque des arbres
de Duhamel pour la fuite des expériences & des
obfervations faites par cet habile naturalifte &
par Bonnet. On y verra que les plantes en général
fe dirigent conftamment vers la lumière; que plus
elles font dans Pobfcuricé, moins il y a de tranf-
piration, & plus elles font étiolées ; que les tiges
rie font pas les feules parties qui s’inclinent vers -
le jour; que certaines plantes penchent leurs fleurs,
du côté du foleii; qu’elles quittent leur perpendi-
effarité & s’inclinent par leur fommét, de'façon !
qu’elles préferitent leur difque à cet aftre ; que
pour cet effet les fleurs changent de fituatibn
comme le foleii; que le matin elles regardent
l’orient, à midi le fud, & le foir l’occident : mouvement
qu’on appelle nutation des plantes , & qui
fe fait, ajoute Duhamel, non par une torfion de
la tige, mais par une nutation réelle, ou parce que
les fibres de la tige fe' raccourciffent du côté de 1 aftre. On y reconnoîtra également que les épis de
blé q u i, en s'inclinant par le poids des grains,
forment ce qu’on appelle le cou d’oie, ne penchent
presque jamais du côté du nord ; mais qu’ils ne
^s’ inclinent que depuis le point du levant jufqu’au
couchant ; que les feuilles des arbres piéfentent
leur face fupérieure au c ie l, & que fi on les tourne
vers la terre, elles ne tardent pas à reprendre leur
pofition naturelle ; enfin, que la chaleur 8c l ’humidité
ont peu ou point d’influence fur le phénomène
dont il s’agit, & que c’eft: principalement
à la lumière qu’on doit attribuer les differentes
nutations.
M. Teflîer a fait fur ce fujet des expériences cu-
rieufes, rapportées dans les Mémoires de VAcademie
des fciences en 1785, , & mentionnées par
M, Bofcdans le Nouveau Cours dl agriculture. M.Te’f-
fier en conclud que l’inclinaifon des branches ,
dans ce cas, eft en raifon dé leur je un elfe, de leur
dillance à la lumière , de la couleur des corps placés
devant elles, de la facilité plus ou moins grande
des tiges pour fortir de- terre.
L’ ii.fluence de la lumière fur les arbres ne fe
borne pas aux effets dont nous venons de parler ;
elle augmente la denfîté du bois, & par conféquent
fa force & fa pelanteur. Quant aux autres eff. ts
oqu’ elle produit fur les. plantes en général, comme
a augmenter leur vigueur , d'affurer leur fécon-
i dité, de donner de la faveur à toutes le ure parties,
| d’en tirer le gaz oxigène en décompolant l’acide
carbonique, nous n’en parlerons pas ic i, attendu
qu’ ils mont pas.un'rapport dire# avec la queftion
que nous-traitons.'
A l’égard des autres obfervations, elles font
très-importantes pour l’économie foreftière -, par
les conféquences qu’on peut en déduire & les applications
qu’on peut en faire à l’éducation des
arbres deftinés à la marine. Il en réfulte,, en effet,
que toutes .les fois que des arbres feront privés
de la lumière d’un c ô té , ou qu’ils en recevront
moins que d’un autre, ils fe courberont & étendront
leurs branche s vers l’ air libre ; que leur în-t
clinaifon fera en raifon de l'intènfité de la lumière
, & par conféquent plus forte du côté du
midi que du côté du nord ; plus .grande dans les
endroits fpacieux que dans les endroits rdfenés ,
.& plus fennble dans les jeunes arbres que dans
les autres. Ainfi, d ns les forêts , les arbres qui
en formeront les lifières, qui borderont les routes
& les clairières , ceux qui fe trouveront fur ies
penchans des collines, & tous ceux qui ferons
appuyés fur des- murs ou dominés par quelqü’élé-“
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vation , fe courberont vers les lieux qu’ils trouveront
libres, & ils y étendront leurs branches,
& par conféquent leurs racines dans la même proportion
;-car on fai.t qu’ il exifte un rapport intime
entre ces deux productions. De plus, les arbres
crûs ifolément ou convenablement efpacés, &
qui jouiront des bienfaits de l’ air & de la lumière,
produiront un bois plus foiide. :
. Ges arbres en général offriront donc les formes
& les qualités recherchées pour la marine : les
formes, parce qu’ils préfenteront beaucoup dé
courbes, foit dans leur tige, foit dans leurs branches;
& les qualités, parce que leur bois fera plus
ferme, plus denfe , moins corruptible & par conféquent
plus.propre aux conftruétions navales, que
-celui des arbres crûs en maflifs .ferrés, dont le
-tiffu eft ordinairement lâche & toute la contexture
imprégnée d’une quantité confidérable de
fluides fermentefcibles.
C h AP. IX. Réfumé de la dijfertation contenue dans
celte première partie.
On a fait voir que le mode d’exploitation par
expurgt de, éclair cijfement ou coupes fuccejjtves, pour
les futaies pleines, eft le plus favorable à la croif-
■ fance des arbres, a la qualité des bois, & au repeuplement
naturel des futaies; que fi les difficultés
.qu’il préfente, dans une grande adminiftration, ne
permettent pas de l’admettre indiftin&emenr pour
toutes K s futaies & dans toutes les localités, on
ne doit pas non pius le proferire. généralement,
& qu’ on doit au contraire en permettre l’ application
toutes les fois qu’elle aura paru avantageufe
a l’adminiftration générale ; mais que les particulie
rs foigneux & intelligens ne peuvent fèdifpen-
■ fer de l’admettre dans leurs bois; que les arbres
'crûs en maffif de futaie .font ordinairement d’un
■ bois.plus tendre & plus-léger que celui des arbres
qui ont joui de l’air & de la lumière;' q ue, quoi-
• qu’ils préfentent des formes moins utiles pour la
marine, on tire cependant du milieu des futaies
■ pleines des pièces de longueur, difficiles à trouver
.dans tout autre endroit ; qu’on en tire auffî des arbres
droits &r d’ une légère courbure, des bois de
rfente, de charpente, de mer.uiferie , & beaucoup
d’autres qui font propres à une infinité d’ouvrages
qui exigent delà flexibilité ; que cependant
nos principales reffources en bois courbes réfident
dans les/futaies fur taillis, dans les arbres épars,
' fes bordures & les lijieres; que ces reffources aug-
- tenteront à mefure qu’on apportera plus de foins
I dans le choix & l’efpacement des baliveaux, &
; que l’exploitation des taillis fitués en bons fonds
|fera retardée jufqu’à 30, 40, 50 & 60 ans, fui-!
-va.Rt fes terrains ; que les reproches faits aux fu-
^ taies fur taillis font fondés, furtout par rapport
I aux taillis fitués en mauvais fonds qu’on exploite
de 10 à 15 ans; qu’il ne'faut faire de réferves dans
!■ ces fortes de bois que pour en affurer Je repeuplement
& abriter le jeune taillis; que^ dans les tail-
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lis coupés à 2 y ans &au-deffus, les futaies ayant
beaucoup moins de largeur de tête & une tige
plus élevée,.elles n’offufquent point autant le jeune
bois & fournilfent beaucoup de pièces utiles ;
qu’on ne peut cependant difeonvenir du tort
qu’elles font aux taillis , furtout quand l’aménagement
eft trop rapproché & le nombre de s réferves
trop grand; qu’on ne doit pas trop multiplier les
baliveaux .dans les endroits humides & privés
d’air, parce que les taillis y deviennent bien plus
endommageables par les gelées; que les réferves,
foit en bordures, foit en petits maffifs, propofées
par Duhamel pour tenir lieu de baliveaux, d’arbres
modernes & anciens, produiroient certainement
de très bons bois de marine; mais qu’elles
ne feroient point fuffifantes, & qu’on dort dans
les bons fonds, non-feulement faire ces réferves
en bordures, mais encore conferver & même augmenter
le nombre de baliveaux preferic par l’or-
donnan.ee, malgré le tort qu’ ils feront aux-taillis,
attendu que c’eft le meilleur moyen d’affurer des
reffources à la marine.
Toute cette .dijfertation fe réduit donc à prouver
ces vérités : les baliveaux font quelquefois du
tort aux taillis, mais ils font indifpenfables pour
le repeuplement des coupes, & pour fournir des
bois propres aux conftruétions navales; plus les
terrains font bons & les coupes éloignées, plus
ces arbres font utiles; néanmoins on ne doit pas
trop les multiplier, lut tout dans les endroits humides
& privés d’air ; il eft néceffaire de les abattre,
à des époques rapprochées dans les terrains
maigres où ils ne profitent point : s’ils font utiles
dans ces terrains & d .ns ceux biffés par le foleii,
c’eft: furtout pour abriter le jeune taillis & favori
fer le repeuplement,'Un bon moyen de fup-
pléer à 1’mluffifan.ee des baliveaux, confidérés
comme bois de conftruétion, c’eft de-- conferver
des bordures, & même des bouquets de futaie.
Ajoutons une vérité Importante qui fort naturellement
des, obfervatious ci-ieffus : pour avoir
de beaux baliveaux propres aux uCages de la marine
, il faut les réferver dans des taillis de 2j , 30»
40 & jg ans ; les particuliers ne peuvent aménager
leurs bois qu’à 18 ou 20 ans, parce qu’ils pei -
droient fous le rapport des produits pécuniaires
s’ils attendoient davantage pour les couper; donc
il n’y a eue les bois tenus par le Gouvernement
oui puiffent offrir des reffources réelles à la marine
& aux conftruéiions.
D E U X I È M E P A R T I E .
Des futaies de chênes et de hêtres $ de leur
aménagement.
C h A P. Ier. De V utilité des futaies pleines en général
, & de V avantage, de ce genre d’aménagement
pour lesgrandes,confr actions & pour le panage.
Nous allons appuyer par des calculs la théorie