
relie j c’ eft le terme marqué pour y appliquer la
cognée. Il eft donc néceifaire, avant d'ordonner
rex/7/oztauon d’ un bois,'de s’allurer lî fon état elt dû à
des caufes naturelles inhérentes à fa constitution
phyfique, ou à des caufes accidentelles qu'on peut
détruire. Nous avons dit que cette différence étoit
facile à faifir par le praticien } en effet, il y a des
traits particuliers qui, dans les végétaux comme
dans les animaux, diftinguent la vieilleffe réelle &
l’ épuifement naturel, d'une langueur accidentelle.
Parmi les lignes qui font connoître qu'un bois
végète bien , ou qu'il eft parvenu à fa maturité,
il en eft qui font fenfibles: tels font, dans le premier
cas, des poulfes annuelles fortes & alongées, un
feuillage abondant & large, une écorce unie &
brillante, des jeunes branches ordinairement relevées
près du tronc, fouples & couvertes d'une
écorce foncée 5 enfin, un air de fanté & de vigueur
dans toutes les parties de l'arbre. C'eft furtout par
les poulfes plus ou moins fortes de l'année , qu'on
peut juger du degré de la végétation. Quand ces
poulies, qui Ce diftinguent toujours par une verdure
plus tendre, font d’une certaine longueur
relativement à la croi fiance naturelle de l'arore,
elles prouvent que le taillis continue de croître en
hauteur & en groffeur. Mais lorfqu elles n alongent
plus Us branches que de La longueur du bourgeon3 il n’y |
a plus, ou prefque plus d’accroilLment en hauteur
ni en diamètre, & le bois eft arrivé à la maturité*
Cette remarque, qui eft suffi importante
qu’elle" eft (impie, fe trouve confignée dans le
premier volume de ['Exploitation des bo:s 3 par
Duhamel, qui dit que les arbres ne font plus
que de foibles productions, quand les jets font
très^courts } elle fe trouve auffi dans l'ouvrage de
M. de Perthuis, qui a fondé fon fyftème d’ aménagement
fur la profondeur des terrains, &
fur l'alongement des pouffes annuelles ; elle a été répétée
par M. Fanon, qui paroît n'avoir pas eu
connoiffance qu'elle eût été faite avant lu i, &
qui l'a préfentëe comme un moyen neuf & infaillible
de conftater l'état de la végétation de$ bois.
Nous ayons vérifié nous-mêmes cetre obfervation
dans des taillis de différens âges & fitués fur diffé*-
rens terrains, & nous avons toujours reconnu que
ç'étoit un excellent moyen de s'affurer du degré
de la végétation. H fuffic pour cela d'abaiffer les
principaux des brins cépées dans plufieurs endroits
_ & d’examiner la pouffe'terminale-des branches.
Tant que cette pouffe aura une certaine longueur,
©n fera certain que le bois continue de profiter.
Cependant il faut favoir faire une application rai-
fonnée de cette règle : par exemple, il y a des
années d’une végétation extraordinaire ; ce font
celles où régnent des temps chauds & pluvieux ; il
y en a d'autres où la végétation eft prefque nulle, à
çaufe des froids, des féchereffes, ou des infeétes
qui dévorent les feuilles. Telles font les circonf-
tances qu'on doit apprécier} car autrement, on
poiirroit prendre pour une vigueur ou une longueur
habituelles, ce qui ne feroit que l’effet d'une caufe
momentanée. Nous penfons auffi qu’ on ne doit pas
en faire une application générale dans les futaies
pleines, parce que les arbres qui croi fient en nVaiTif
ferré, s'élèvent d'abord avec rapidité, & qu’une
fois arrivés à leur hauteur naturelle, ils ne donnent
plus que de foibles pouffes, quoiqu’ils-continuent
de groffir encore pendant long-temps. Quant aux
arbres épars &aux baliveaux fur taillis, ils.alongent
leurs branches tant que dure leur accroiftement en
diamètre. . |
Au fu rp lu s f i ce caractère feul ne fuffit pas
pour procurer la connoifiance qu'on déliré, on
doit s’aider des autres indices^que fournit la nature
& qui font indiqués pa» Duhamel, page 133 de fort
premier volume de Y Exploitation des bois. M.
Dralet en a donné l'analyfe fuivantè, dans laquelle
il a compris celui dont nous venons de parler:
« Lorfqu'un taillis, dit-il, a ce fie dè s’élever &
de groffir, fa tête eft arrondie ; les pouffes annudfa s
n‘alongent plus les branches que de la longueur du bour>
geon y fi l’on coupe une de ces branches, on remarque
que les couches concentriques peuvent-à
peine fe compter, tant elles ont peu d’épaiffeur,
& que l’aubier ceffe de fe convertir en. bois dur ;
1 le tronc fe charge de raouffes, de lichens, d’agarics
& de champignons} l’écorce le détache du bois;
elle eft marquée de taches noires ou touffes; elle
fe fépare par des gerçures qui occafionnent l'ecou-
lement de la fève ; les branches les plus directes de
la cime fe deffèchent} les branches latérales s’inclinent
vers l’horizon} enfin , les feuillesparoifient
de bonne heure au printemps} celles du bas font
plus vertes que celles du haut; elles jaunifTent
avant le temps ordinaire. Suivant que ces divers,
effets font plus ou moins, fenfibles , le bois elt en
parfaite maturité, ou il tombe en dépériffement,
& il ne faut plus en retarder la coupe. «
L’inclinaifon des branches versl’horizofi fournit
des indices affez fûrs dans les arbres ifolés, & pn
a même confidéré les différens degrés de cette in-
clinaifon , comme indiquant rigoureufement ceux
de la végétation d’ un arbre. On a d it , par exemple,
qu'un arbre étoit dans toute fa force, lorfque les
branches décri voient un angle'de 46 à 50 degrés ;
qu’ il fe foutenoit, lorfque l’ angle étoit de ;o à
60; qu’il déclinoit, lorfque les angles s’abaifibient
à 70 degrés, & que rarement il duroit jufqu'au
parallélifme de Tes branches avec le-90e. degre.
Cette affertion peut être fondée en général ; mais
il y a des exceptions pour les arbres dont les branches
s'alongent beaucoup & s'abaiffenc promptement,
comme le hêtre, le cèdre ; pour ceux dont
les branches font chargées de feuilles perfiftanr's,
comme les pins , les fapins ; pour les arbres, enfin»
dont les branches font très-flexibles, comme le
bouleau, le faule de Babylone , &c.
L ’âge ouda maturité des arbres foreftiers, &
furtout du chêne^ fe reçonnojc encore par unç
fécondité particulière. In fcneltâ fertiliffime glandtde
henfemble des indices cr-d; (Tus, & de
l’.vamen des autres circonftances lo ca les, comme
J , nature & de la profondeur du terrain , de 06 . . m . l’pYnnfïrinn . &C. . QU on doit
fHAP II- —■ D<? la faifon la plus favorable à la
coupe des bois , fous le double rapport de la durée
des bois quon abat, & de la reproduction des
• fouckts.
Dans toutes les fciences, comme dans toutes les
matières qui intéreffent la fociété, on ne doit admettre
qu’avec une grande réferve & qu'après un
îrûr & long examen, les conféquences qu'on déduit
li’txoéiiences nouvelles & de raifonnemens
qui tendent à renverfer des principes depuis longtemps
établis. Quels que foietit, en effet, les
progrès des connoiflances humaines & de l'art de
raifonner, on eft forcé de reconnoître dans les
ufages confacrés par les fiècies, un caractère de
recommandation qui nous fait un devoir, linon de
refpeàér aveuglément ces ufages féculaires, du
moins de ne Us attaquer.ou de n'admettre de
principes contraires, qu’avec la plus grande prudence.
Autrement en s'expofe à des erreurs dont
les fuites font Couvent irréparables, & on fe
voit dans l’obligation .de revenir à des idées que
notre légèreté ou notre orgueil nous avoit fait
regarder comme des préjugés populaires. Ces ob-
fervations ont une application directe à la matière
que nous allons traiter.
De tout temps & dans tous les pays on a été
dans l’ufage d'abattre les bois pendant l’hiver &
hors le temps cù la fève eft adlive. On croit corn-
• immément, dit Pline, que tout bois qu'on veut
équarrir, ne doit fe couper qu'après qu’il a porté
ion fruit. Le chêne rouvre, fi on le coupe au prin~.
timps, eft fort fujet à devenir vermoulu} mais fi
on le coupe vers je folfticë d'hiver , il ne fe gâte
point, i.rne fc courbe} au lieu que coupé dans un
aime temps, il é-ff fujet à fe déjeter & à fe fendre
Vutgo fa i i s putant obfervare , neque dcdolanda arbor
fternaïur ante editos frucius. Robur vère ccefum tere-
dinem fentit ■: brumà autem, neque vitiatur, neque
pandatur, a/tas obnoxium eiiam ut torqueat fefefin-
datque. Voici la raifon que V itruve a donnée fur la/
deienfe de couper les arbres en temps de fève :
Vere enim omnes arbores fiunt prégnantes , & omnes
fus, proprietatis virtutem efferunt in frondes anniver-
furiosque frucius. Cum ergo inanes & humide, tempo-
rum neceffiiate fuerint, vans, fiunt 3 & raritetibus
■ imbecHh f V ' V- ' • ' *
Cet ufcigë qui s’eft établi de lui-même, comme
tout ce qui tü fonde fur la raifôri & l’expéiiehce ,
£ft devenu par la fuite l’objet de difpolitions réglementaires,
contre lefquellts il ne s eleva au-,
cune réd.imation.
L'article i de l'ordonnance de Henri I I I , de
l'an 1583, parlant des ufagers, défend de couper
aucun bois fans permiflion des officiers. 8c
autrement que dans les temps & faifons convenables.
Un réglement de la Table-de-marbre du 4 fep-
tembre 1601 ( 1 ) , défendit aux adjudicataires des
ventes. & autres per fonnes quelconques. de couper
aucuns bois dans les forêts en temps de fève;
favoir. depuis la mi-mai jufqu’ à la mi-feptembre,
fous peine de confifcation. Cette difpofition, nous
dit Saint-Yon, dans fon Recueil des édits & ordonnances
en matière des forêts . etoit fondée fur
ce qu’on avoit reconnu que le bois coupé en fève
n’étoit point auffi bon pour être mis en oeuv re.
& que les arbres ne faifant que fortir de fève ou
bien y étant encore-, il arrivoit que les fouches
demeurant découvertes durant les grandes chaleurs
de l'é té , il fe (aifoit une perte de fève telle,
qu'elles n'avoient plus la force de poufier des rejets.
L'expérience avoit fi bien démontré 1 avantage
de ne .point couper les bois en fève , qu il
n'avoit point fallu de loi pour le défendre, & que
l'afage univerfel de les couper hors fève s'étoir
j établi de lui-même. Mais comme la fève eft plus
! ou moins avancée ou retardée fùivant les années
8c les climats, on ne pouvoit point fixer une époque
générale à laquelle il fût permis à tout adjudicataire
de commencer les coupes. Cela a toujours
été laiflé à la détermination des officiers fo--.
refliers, 8c il n'cft intervenu de réglemens particuliers
fur cet objet, que d'après leurs observations.
Par exemple, les ufagers des forêts de Chizé
8c Âulnay, s'étant permis de couper leurs bois
d’üfage en temps de fè v e , il leur fut défendu ,.
par réglemèns des 14 8c 23 juin 1601 ( 1 ) , de les
couper depuis le 1 " . mai, jufqu'à la fin de fep-
tertibre, parce que fuivant les obfervarion» des
officiers foreftiers de la maîtrife, la fève étoit
déjà avancée au 1“ . mai.
Un arrêt des juges en.dernier reffort, du 18 fêp—
tembre '1634, défendit de couper 8c d'abattre
aucuns bois en temps de fè v e , c'eft-à-dire,' depuis
la mi-mai jufqu’ à la mi-feptembre, fous-
peine de confifcation; ce qui fut confirmé par
l’àrrêc du Confeil d'Etat du 26 février 1689, portant
réglement pour l’exploitation des bois deflr-
nés pour les falines de Moyen vie, par lequel .il
eft dit que les bois pourront être coupés 8c abattus
jufqu'au IJ rmi.de chaque année, lequel
temps paffé, S. M. fait défenfes d'en couper.
L'article 7 du titre H du livre 13 de l'ordonnance
pour les-armées navales & arfenaux de marine,
du IJ avril iéB'9 , fait 3éfenfes d'abattre tes bois
en temps de fève.
/ i ) Saine-Yon, pag. ioaô.. fcÿlèid:; p g . i o b '4 - .