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Second mémoire de M . Lint£.
Nous avons imprimé ce Mémoire dans nos
Annales forefiières de l8 l2 .
L’auteur y traite ces deux queftions :
1° • L amenagement des forêts doit-il avoir pour
objet la- connoijfçznce de leurs produits en nature?
l°> La d.vifion en coupes' annuelles des futaies
( traitées d apres la théorie du repeuplement naturel')
prêfente-t-elle les mêmes avantages que pour les taillis?
L ’auteur penfe que la recherche des produits
en nature, des futaies3 eft indifpenlable pour affurer
la fuccejjion égale & confiante de ces produits. C ’eft
d’après ces obfervations qu’il définit Xaménagement
: Le travail qui a pour but d'établir un-mode
de culture & d'exploitation raifonné 3 dont Vapplication
ajfure les produits les plus avantageux dans
une fuci. effion égale & confiante.
U aménagement des taillis , dit-il, eft à peu de
chofe près reftreint dans les bornes étroites d’une
opération géométrique. Le fo l , le climat, les
effences & quelques autres circônftances accef-
foires déterminent leur révolution. Leur produit
préfumé étant facile à trouver, la divifion en
.coupes annuelles fe fait fans aucune difficulté.
Leur étendue fuit la raifon inverfe des produits.
La fuite non interrompue des exploitations eft
trop avantageufe pour s'en écarter. Si même,
comme il arrive fréquemment, on fe voyoit obligé
de remettre des parties exploitables 3 d’entamer
de foibles renaiflans, & de paffer ehfuite aux
taillis plus âgés $ ce petit défordre , inféparable
des premières opérations régulières, difparoîtra
à la fécondé révolution , qui procurera une belle
férié décroiffante.
il n’en eft pas de même à l’egard des futaies,
dont le rapport & Vaménagement font d’un ordre,
fupérieur. Je commence par obferver qu’ il n’ eft
prefque jamais poffible d’établir dans ces forêts
une fuite d’exploitations non interrompue, fans
faire violence à la nature & fans éprouver des •
pertes fou vent irréparables. En effet, quel eft le
foreftier q u i, ayant obfervé une futaie , ignore I
qu’elle fe .compofe ordinairement de parties qui
s’éloignent autant les unes des autres par l ’âge ,
qu’elles diffèrent entr’elles par la confiftance ? Si
cette irrégularité eft quelquefois l’image de l’â-
bondance, elle eft auffi très-fouvent le réfultat
d’un vice dans le traitement de la forêt. Cette di-
verfité eft infinie : on voit des futaies exploitables
à côté de recrus qui font encore loin de
leur maturité, & des parties qui diffèrent autant
par l’âge qu’elles font rapprochées par leur fitua-
tion locale. Vouloir établir une exploitation fuc-
ceffive dans ces bois, foit en réfervant les parties
les plus âgées jufqu’ à la coupe des parties les plus
jeunes, foit en coupant le jeune bois lorfqu’il
eft encore incapable de fe reproduire par les femis
naturels, ce fer oit abandonner les bois âgés au
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dépériffement, &r, à l’égard des autres, facrifîej
1 efpoir de la poftérité, en contrariant les vues!
de la nature.-
Ce qui vient d’être d it, fuffit pour prouver quel
la fuccejjion locale des coupes dans les futaies feroim
très-dêj'avantageufe3 & que ces divifîons ne doivent!
fuivre aucun autre principe que celui de l’«.|
ploitabilité ( i).
| Ou fait que l’exploitation des futaies ( traitées|
d après la théorie du réenfemencement naturel)!
fe fait, non compris les nettoiemens, en trois!
coupes , dont la première s’appelle coupe <fcl
reenfemencement ou coupe ferrée , la fécondé, coupM
d‘éclairci fie ment, & la t roi fié me, coupe fiefinitivt, I
On fait auffi que , fous un climat tempéré,!
abftra&ion faite des modifications apportées pat
la nature de chaque effence dont la futaie fe;
compofe, par l ’état plus ou moins ferré de la coupe1
de réenfemencement & par l’expofition , il faut-
ordinairement , dans nos futaies de chêne & de
hêtre, fix à fept ans avant que les jeunes plants
foient en affez grand nombre & affez forts pour
qu’on puiftTe enlever une partie des arbres laifles '
lors de la coupe ferrée.
La nature, qui fuit des lois particulières, dontl
nous ne connoiffons que les effets, ne s’embarraHeB
guère des divifîons annuelles que nous traçons furl
les terrains, dont nous abandonnons le repeuple!
ment à fa fécondité 3 & il arrive fouvent quel
.telle coupe qui -vient d’être exploitée en réenfe!
mencement fe trouve être parfaitement repeuplée!
iorfque d’anciennes exploitations font encore d !
pourvues de toute recrue j mais le foreftier f a !
que les coupes fecondaires, qu’on ne peut r e !
ferrer dans les limites que la géométrie leur au ro!
tracées, font d’ un rapport important & d’un pro-H
duit deux & trois fois plus fort que celui de !
coupe ferrée.
A quoi ferviroit donc de déterminer d’avance!
d’année en année, les coupes de réenfemence!
ment , Iorfque ces divifîons ne feront d’aucune|
utilité pour les coupes fecondaires ? De q u e l!
utilité feroit d’ ailleurs cette indication des coupe!
annuelles à aflèoir dans les futaies ?
Le produit annuel, fuivant l ’idée que nous avon!
de Xaménagement 3 doit être égal & confiant ; dllfl
moins on doit chercher à s’y procurer cette égalité!
de produits annuels, autant que poffible, & M
s’en écarter que lorfqu’on y eft forcé par les c i r !
confiances : o r , le produit des coupes claires en!
définitive ne peut pas être déterminé d’avance, & !
la détermination fur une étendue donnée feroit!
une indication fàuffe & illufoire.
(1) U exploitabilité & la maturité des bois , quoi qu'anale I
gués dans leur acception , ne font pas fynonymes.
première eft réglée;par l’art , tandis que ç’eft la nature
.qui fixe le terme ,dc l’autre^
J’obferverai
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■ | J’ôbferverai en dernier lieu que l ’employé qui
.» e Lroit pas foreftier, & auquel les connoif-
, fonces de fon état ne feroient pas familières, ne
ie trouvera pas plus foulagé dans l’exercice de fes
fbnélions, qui font celles de conferver & d’améliorer
les forêts, Iorfque Xamênàgement lui apprendra
qu’il faut opérer dans tel numéro de la
fuite dés coupes annuelles, que fi on eût confié à
'fon expérience & à fa- fagacité, la variation des
.’/exploitations dans tel ou tel diftriét, ou dans telle
Éivifîon.
J /! Dans le dernier c a s , fes opérations feront
à’accord avec la nature & les 'circônftances tan-
'm is qu’étant lié par l’ordre des exploitations an-
tjuellês, il fe verra fouvent obligé de propofer
' une coupe ferrée, lorfqu’il fera certain , par l’ inf-
«eétion des lieux, que c’eft une éclaircie qu’il
faut faire, ou bien il fera forcé d’opérer unè
coupe fecondaire avant que la nature ait pourvu
au réenfemencement qui doit précéder cette ex-
- |loi cation.
M M . Lintz fait obferver enfuire, relativement à
l’avantage de fe procurer des produits égaux dans
une fucceffion confiante, que'ce but ne peut pas
être atteint dans une forêt irrégulière, & qui
iepuis long-temps n’auroit pas été traitée avec
tfiéthode, mais qu’on ne doit pas moins tendre à ,
arriver à ce réfultat.-
S II infifte fur l’importance de .former l’état maté-
|iel des produits , comme étant une condition in-
difyznÇtâAe-'dQXaménàgemefit 3 & il s’ attache à dé-
• dîonrrer que la fuccejjion égale ■ & confiante de ces
produits ne peut être un des réfultats de X amena-
■ %.nicnt. qu’autant que Xefiimation en fera ajoutée à
la divifion géométrique dès futaies.
^ | Je .fais bien , dit-il , que les parti fans du fyftème
de la divifion des forêts en parties , foit égalés
'entr’ elles par leur étendue, foit proportionnelles
lu x moyens productifs dû foi (fyftème qui féduit
par fa firnplicit-i ) , prétendent qu’ il eft beaucoup
.plus facile de comparer deux terrains entr’eux &
;de régler l’étendue des exploitations, fuivant
"m qualité du fo l, que de rapporter tous les calculs
à i’a.ccroijfement des bois } ils ont l’air de douter de
la certitude des produits futurs , - & en cela
■ ifsjfont- pas tout-à-fait to r t , parce qu’ il n’y a pas.
calculs q u i, dans la pratique , ne fubiiîent
quelque modification 3 mais je demande s’ il eft
fu s facile à l'eftimateur , chargé de régler les
jxploitations fuccelfives d’une.forêt', de découvrir
les rapports productifs entre plufieurs diltriéts,
par la fimple infpeétion de -la qualité des terrains
& des bois fur pied, que de parvenir à ce but,
én .con fui tant les produits de l ’exploitation des
parties de bois coupées à leur maturité ,* & q u i,
par leur nature & leur confiftance, font femblables 1 celles foumifës à l’examen ?
! demande encore s’il n’eft pas confiant que le ;
iéfultat d’obfcrvations fondées fur des’ faits cer-
lams, n’a pas plus de droit à notre confiance qu’un
I Dict. des Arbres & Arbufics.
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j tâtonnement vague & infuffifant, qui n’a rien en
î fa faveur que la fimplicité de fon procé.ié.
Sans doupe qu’une théorie fimple, mais profonde
, qui part d’un premier principe, auquel fe
| rattachent tous les faits particuliers que l’on ob-
| ferve, mérite la préférence fur'une méthode dont
l’appjicatioh fera difficile & compliquée., furtout
fi fes réfultats ne font pas plus heureux f mais lorf-
que cette méthode eft puilee dans la nature même,
loifque ce n’eft que par elle qu’ofi approche de la
v érité, alors les difficultés attachées à une telle
entreprife ne peuvent être un motif pour l’aban-
; donner.
La connoiftance des produits ne peut donc être
retranchée de s opérations de Xaménagement fans
détruire l’objet de cet aménagement lui-même.
Sans cette connoiftance, la ftariftique foreftière.
qui eft une des branches principales de la ftatifti-
que politique , fera très-incomplète 5 fans elle , la
fucceffion égale dès produits ne peut pas être af-
furée , & les cahiers d’aménagement feront ref-
treinesdans les bornes d’un bulletin purement def-
crîptif, intérelfant pour les apprentis, mais qui
n’obtiendra jamais Ja confidérationparticulière qui
eft la récompenfe des travaux auxquels le bien public
eft intérefîe.
Maintenait que je crois avoir mis en évidence
que la recherche des produits eft inféparable des
aménagemens , qu’elle doit être léunie à la divifion
î-du terrain, Ik que les indications des exploitations
dans la futaie ne peuvent être annuelles, il
refis à s’entendre fur les exploitations fuccefiv'es. "
Ce que nous avons dit des futaies doit fuffire
1 pouf prouver que l’on ne-peut indiquer à j ’avance
les années où devront fe-faire les coupes fecondaires
5 que c’ëft la nature qui en règle les. époques,
& qu’ il n*y a que le produit total, provenant
: de Lima fie des exploitations de.réenfemencement
d’éclairciftement & définitive d’un diftrià ou
d’une .divifion de diftriéfc d’une contenance con-
nue, qui puiffe erre déterminé.avec certitude.
, Les règles de l’art doivent fixer d’avance le
moment auquel l’exploitation d’un diftriéî: doit
être commencée, en y établiflant la coupe ferrée
5 les mêmes règles doivent encore faire connaître
dans quelle année la dernière coupe définitive
y doit être affife.
Les exploitations fucceffives doivent donc au .
moins comprendre autant d’années qu’il en faut
depuis l’affiettê de la coupe de réenfemencement
jufqu’à' la coupe définitive, & l’étendue de ces
coupes doit fournir, par la n\afie des exploitations,
un produit égal à celui annuel, multiplié par lé
nombre de ces années. ' -
Je crois que, prefq ue dans tous les départemens
dé la France, le terme moyen du temps qui s’é coule
entre une première & dernièré coupe, eft
de dix ans. Ôn feroit donc tenté de croire que les
exploitations fucceffives peuvent être déterminées
, par époques décennales $ mais fi on confidère
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