
S c y th e s et leurs descendants se sont portés du Sud-est au Nord-
ouest, avant de prendre ensuite la direction opposée; cela ne doit
préjudicier à rien de ce que nous pourrons encore dire, pour expliquer
par d’autres motifs plus ou moins historiques le but et la
direction de telle ou telle migration en particulier. 11 est inutile de
faire remarquer que les peuplades en migration, tout en s efforçant
de suivre toujours une direction déterminée, ont été souvent
détournées de leur chemin par des obstacles physiques. C’est ainsi,
par exemple, que les A r le s primitifs se sont portes vers 1 Est, mais
arrivés au pied de l’Himalaya, ils ont pris forcément à droite et se
sont établis dans la Pentapolamie. Le cours des fleuves détourne
aussi les émigrants de la direction généralement suivie. C est ainsi
que les tribus sarmates et gètes se sont portées au Nord en suivant
le cours des principaux fleuves de la Russie et de 1 Allemagne.
§ 5 . L e s p e u p l e s d e l ’A n t i q u i t c s e c r o i e n t a n t o c l i -
tl a o n e s d a n s l e n r j î a y s . — Comme chez les peuples primitifs
les migrations ont eu g é n é r a l em e n t pour cause non la passion de
faire des conquêtes, mais le besoin naturel de s’étendre, elles
se sont opérées par des marches successives et lentes; la meme
masse d’hommes n’a probablement jamais été plus longtemps en
route que la durée d’une saison, et après chaque voyage le point
d’arrivée n’a pas été à une très-grande distance du point de départ.
Ces points d'arrivée formaient des stations où se fixait chaque fois
une partie de l'émigration. L’autre p a rtie , ordinairement composée
d’hommes plus jeunes, après quelques années d’établissement, prenant
la dernière station pour point de départ, se remettait de nouveau
en roule, et mettant ensuite fin à son voyage, s’arrêtait à son
tour à une nouvelle station. C’est ainsi que les migrations des-races,
continuées pendant plusieurs siècles et embrassant dans leur ensemble
de grands espaces d’Orient en Occident, ont laissé sur leur
route, de temps à autre et de distance en distance dans les différentes
stations, des peuplades plus ou moins nombreuses qui sont quelquefois
devenues la souche de peuples marquants dans l’histoire,
et qui, par leur succession dans l’espace, représentent le
plus souvent les générations de la race qui se sont succédé dans
le temps. La propagation des races dans le temps et leurs établissements
dans l’espace peuvent etre comparés à la croissance du
figuier de l’Inde dont la souche produit des branches horizontales,
NOTIONS ETHNO-GÉNÉALOGIQÜES.
desquelles descendent à terre des jets radicants qui s’enracinent
dans le sol et finissent par former une infinité de troncs semblables
à la tige originaire. Aussi arrive-t-il que les peuples, ne connaissant
plus leur souche primitive et voyant seulement les plus proches
rameaux qui se sont enracinés dans le sol, se croient a u to c h lh o n e s
sur ce sol et se figurent que leurs ancêtres aussi ont habité de
tout temps leur pays natal. C’est ainsi que les H e llè n e s se rappellent
parfaitement bien les dernières branches de leur race et leurs différentes
migrations dans les îles et sur les continents delaHellade,
mais ils n’ont plus le plus léger souvenir de leur origine asiatique.
C’est ainsi encore que les G e rm a in s du temps de Tacite savaient
bien que leurs différentes tribus s’étaient bien souvent déplacées
entre le Rhin, le Danube et l’Oder, mais ils se figuraient que leurs
ancêtres avaient de tout temps habité la Germanie et que leur
race était a u lo c h th o n e dans ce pays.
§ 6 . I t e l ’e x t r a e t i o n p a p r a p p o r t a u x i n d i v i d u s e t
p a r r a p p o r t a u x p e u p l e s . — Une observation importante à
faire sur la filiation des peuples, c’est qu’il y a une différence essentielle
entre la manière dont un peuple dérive d’un autre et la
manière dont s’établit pour l’individu le rapport du père au fils.
L’individu, par cela même qu’il est individu, ne peut pas se dédoubler
physiquement, il peut seulement se propager, et l’individu
engendré n ’est pas le résultat du dédoublement de l’individualité
du père, mais c’est un produit sorti du père. Un p e u p le , au contraire,
n’est pas un individu physique pouvant engendrer un autre
individu physique ou un autre peuple, lin peuple ou une individualité
ethnique, étant une réunion d’individus, ne peut pas se propager
en tant que peuple, mais seulement en tant que réunion
d’individus. Une individualité ethnique ne résulte donc pas d’une
autre individualité ethnique par voie de génération unique, mais
elle en résulte par le moyen du fractionnement ou du dédoublement.
En un mol, la descendance généalogique des peuples, par
exemple des Scythes, des Gètes et des Germains, ne repose pas
tant sur la génération ou l’extraction des uns par rapport aux
autres que sur le fractionnement ou le dédoublement de la souche,
dont une partie restera souche et dont l’autre p artie, quaut à son
origine tout aussi ancienne que la souche, formera le rameau ou le
rejeton. Voilà pourquoi les noms qui expriment les rapports généa