
force el en bravoure. Dans le Nord, il y avait parmi les Manants des
hommes qui poussaient l’ambition guerrière et la bravoure jusqu’au
fanatisme et à la rage. Ils portaient le nom distinctif, et même quelquefois
distingué, de Pures-Serges (norr. Ber-serkir; v. Les Chauts
de Sôl, p. 50), parce que, dépouillés de toute cuirasse et arme
défensive, ils se précipitaient au combat n’ayant que leur épée et
revêtus seulement de leur blouse ou serge. Semblables aux Thugs
de l’Inde, ils luttaient avec fureur, et rien ne pouvait leur résister
lorsqu’ils étaient dans leur accès de rage (norr. berserks-gangr).
La religion et la poésie exaltaient encore l’honneur qui se rattachait
à la force physique et à la valeur guerrière. Chez les Scythes le
dieu suprême était le dieu de la guerre, et portait le nom de Glaive
(Gaizus, v. § 92). Les Scandinaves assignaient le premier rang
parmi leurs divinités à Odinn, le dieu des combats; etlaplupait
de leurs dieux passaient pour des héros-guerriers ou des destructeurs.
La religion et la poésie enseignaient que seulement les
hommes forts et vaillants entreraient dans le Séjour divin de te
Halle-des-Occis (Valhdll), tandis que les hommes faibles, lâches ou
morts de maladie et de vieillesse passeraient dans le Séjour triste
de l’e'mpire de Hel (v. § 131).
§ <*8. b ra v o u re et 1» lo y au té . — La bravoure étant
considérée comme la vertu par excellence dans l’homme (cf. lat.
virtus et wr>rdcs autres qualités morales n’étaient guère estimées
chez ces peuples, à l’exception de la loyauté, c’est-à-dire de la
bonne foi et de la fidélité à respecter ce qui constituait, selon eux,
le droit (norr. rêttr). Toute leur morale consistait donc à être brave -
pour soi, et loyal pour les autres. On regardait comme une action
honteuse plutôt que coupable, de manquer aux obligations,
soit naturelles, soit contractées; et la loyauté n’avait pas seulement
une sanction religieuse dans la foi promise ou jurée, mais
aussi une sanction purement morale dans l’honneur personnel. Le
caractère loyal des Scythes, des Goths, des Germains et des Scandinaves
se manifestait surtout dans leurs rapports avec leurs
supérieurs ou leurs maîtres. C’est à cause de leur fidélité, même
envers des étrangers, que les esclaves scythes. (v. p. 104) et les
pédagogues gèles ou daves (v. p. 26) étaient estimés en Grèce et
surtout à Athènes. Les Nobles de la Gaule aimaient également a
s’entourer de serviteurs germa'ns (lat, ambacli; goth. andbahis,
cf. fr. ambassade). Les Slaves poussaient cette fidélité et ce dévouement
à l’égard du maître jusqu’à la servilité, au point qu’au Moyen
âge on employait comme synonymes les noms de Serbe et de serf,
et ceux de Slave et d’esclave. A Rome, les papes appelaient l’Allemagne
une terre cl’obédience, à cause de la soumission docile des
Allemands. Si la loyauté était tenue en honneur chez les Scythes
et leurs descendants, il y avait cependant beaucoup de cas où ces
peuples ne croyaient pas déroger à l’hotineur en substituant la ruse à
la droiture (v. p. 76). Une obligation contractée envers un étranger
n’était jugée valable que lorsqu’elle était stipulée selon les formes
juridiques et sanctionnée par certaines cérémonies symboliques ( cf.
lat. açius legitimi).Mu\s, de même que ces peuples, comme tous les
barbares, dans tous les temps, avaient la superstition de croire
qu’une formule ou un acte symbolique possédait, comme tel, un pouvoir
magique et liant, de même ils supposaient aussi, d’après leurs
idées superstitieuses, et par suite matérialistes, que ce pouvoir
magique était anéanti du moment que, dans un intérêt de famille,
de tribu ou de nation, on pouvait se soustraire à ses obligations,
en interprétant les conditions au pied de la lettre, et non dans le
sens et selon l’intention des contractants (cf. Gylfaginning, 1). C’est
ainsi que, dans les rapports internationaux des peuples dans l’Antiquité,
et même au Moyen âge et dans les temps modernes, la ruse
et la mauvaise foi qui, la plupart du temps, ne sont autre chose
que l’intelligence mise au service de la lâcheté et de l’égoïsme,
passaient non-seulement pour excusables, mais encore pour légitimes.
c) Le Droit.
§ 69. L’idée «lu ilroit, — De même que l’idée de ce qui était
honorable se confondait souvent avec l’idée de ce qui était agréable,
de même aussi l’idée du droit se confondait le plus souvent, chez
les Scythes et leurs descendants, avec celle de l’honneur ; on croyait
que cê qu’on jugeait honorable pour l’individu était aussi juste; et
cest pourquoi la force physique, qui constituait l’honneur, passait
aussi pour constituer le droit. Le droit que s’arrogeait le plus fort
sur la personne et la propriété de l’adversaire plus faible, était un
droit généralement admis et reconnu comme légitime. Fils de la
Nature bien plus que de l’Esprit, les peuples barbares agissent