
luvien, cette patine d’un blanc terreux qui résulte d’un
long séjour à l’air.
Si on admettait l’affirmative ou leur séjour prolongé
sur le sol ou dans quelqu’autre banc plus ancien que
celui qui les renferme aujourd’hui, on pourrait croire
qu’enfouis au même instant que ces os et par l’effet d’un
même courant, ces haches et les hommes qui les avaient
fabriquées n’appartiendraient pas à une même période
et dateraient d’une époque bien plus reculée: contemporains,
je suppose, de Velephas antiquus et de la cyrena
fluminalis, ils ne l’auraient pas été de Velephas p rim i-
genius, et, de même que le premier, ils auraient cessé,
depuis un temps immémorial, d’exister dans ce climat
refroidi. Ce ne pourrait donc être qu’accidentellement
qu’on y retrouverait les os de ces hommes, comme on y
retrouve de loin à loin ceux de Velephas antiquus, de
Vhippopotamus major, etc., confondus avec ceux del’e/e-
phas primigenius, et ce serait dans des bancs plus anciens
ou antérieurs à l’époque où vivait ce dernier pachyderme
qu’il faudrait chercher des êtres humains.
Quant aux silex taillés enfouis dans de plus vieux
gissements ou épars sur le sol avec le petit nombre d’os
échappés au cataclysme précédent, ils y seraient restés
jusqu’au jour où ils ont été entraînés par ce dernier
déluge. Mais le courant qui a pu ramasser de nombreux
silex ouvrés et non ouvrés, a dû rencontrer peu d’os de
la même période, parce que ces os n’avaient point la solidité
des silex, et qu’exposés à l'air, à la dent des bêtes
féroces et aux pieds des éléphants, ils avaient été anéantis
depuis longtemps.
D’après ceci, notre pays aurait subi une suite de révolutions,
dont trois semblent bien caractérisées:
Durant la première, il était très-peuplé en hommes;
Pendant la seconde, il l’aurait été en grands animaux,
les hommes s’étaient éloignés;
Enfin durant la troisième, les animaux eux-mêmes
avaient disparu, et ce sol, si longtemps animé, n’était
plus qu’un désert.
Voilà sur quoi j’établissais mon opinion :
Que trouvons-nous à Menchecourt? — Immédiatement
au-dessus de la craie, à une profondeur de neuf à douze
mètres au-dessous de la superficie, une couche de gros
silex peu ou point roulés, recouverts d’un lit de sable
gris-blanc dans lequel sont des os, des haches et des
coquilles fluviales et marines. Au-dessus de cette couche,
laissant les subdivisions, nous trouvons celle de sable
jaune dit g ra s; puis successivement les couches d’argile
marneuse, de limon, de glaise ferrugineuse, de craie
roulée et de silex brisés entourés de marne blanche ou
terreuse, d’humus mêlé d’argile, enfin d’humus pur ou
terre végétale noire. (Voir, ci-après, la coupe réduite du
banc de Menchecourt).
Dans la couche de sable gras, on rencontre des os,
parfois des silex taillés en couteaux, rarement des
haches, jamais de coquilles marines ni fluviales.
Quant aux autres couches, elles n’offrent ni os, ni
haches, ni coquilles.
Toutes ces couches — sable gris-blanc, sable jaune,
argile, limon, marne, glaise, silex et craie roulée — sont-
elles le produit d’un seul déluge ou bien de trois ou
quatre cataclysmes différents, séparés par des siècles?
Ou sont-elles des dépôts produits d’année en année
par une inondation périodique, une crue progressive,
puis une eau tranquille s’apurant en sédiment?