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croyait (v. p. 236), des eaux célestes, et que le Dieu des eaux célestes
se nommait Varounas (le Cercle, la Sphère, v. p. 177; gr.
Ouranos), ce dieu devint également et le Dieu des Eaux célestes et
le Dieu de la Mer. Dans les Védas, Varounas est encore presque
exclusivèment le Dieu des Eaux célestes, c'est-à-dire des Nuages; ce
n’est que plus tard qu’il devint exclusivement Dieu des eaux terrestres
et de la mer. Les peuples de la famille hellénique réservèrent
le mot de ouranos pour désigner seulement le ciel; ils ne l’employèrent
point comme les Hindous pour désigner également le
confluent des eaux terrestres. Frappés d’étonnement à l’aspect de
l'immense plaine (cf. p. 170) que présente l’Océan, ils lui donnèrent
le nom de Pontos (Epandu ; lat. pandere ; cf. lat. oequor, plan ;
aqua, plane). Mais voyant que cette plaine liquide était sans cesse
agitée par les vagues, ils donnèrent aussi à l’Océan le nom plus
général deAgité (Ogèn, p. Vagèn; Ogènos; Okéanos; sansc. aughas,
p. vagas; norr. vcigr, v. Alvismàl, str. 25).
§ 160. Signification «lu n om «le T liam i-in asad a s. —
Les Scythes qui ont conservé généralement, dans leur langue, les
termes primitifs (v. p. 134), ont désigné la Mer par l’ancien mot
Tamis ou Thami (Redoutable). Ils croyaient, avec les autres peuples
iafétiques, que la mer était formée par les eaux du ciel; que cette
descente des eaux célestes se faisait à l’est de la terre (Hérodot., IV,
8), et que la terre (apia, aquatique, v. p. 170) était sortie de l’océan
et, par conséquent, entourée par lui comme d’un cercle. Les Scythes
croyaient également que la mer était encore alimentée par les rivières
et les fleuves qui prenaient leur source (vrindus, v. p. 237) dans des
lacs, et c’est pourquoi ces lacs furent appelés non-seulement
Sources des fleuves, mais aussi Sources de la mer (scyth. Tama-
vrindus; Plin., H. N., Teme-rinda). A l’époque où les Scythes apprirent
à connaître l’océan, ils n’étaient déjà plus dans la période
de la conception intuitive, d’après laquelle certains objets de la nature
furent considérés directement comme des dieux. Aussi l’Océan
ne fut-il plus conçu lui-même comme un dieu; mais les Scythes, étant
entrés dans la période del'intuition rationnelle, conçurent un dieu présidant
à l’océan. Ce dieu, dans l’origine, n’était non plus zoomorphe,
mais tout d’abord anthropomorphe ; et il eut, comme personne divine,
le même nom de Thami qu’avait l’élément auquel il devait
présider. Ce dieu anthropomorphe Thami, la plus jeune, par ordre
DIVINITÉS ADORÉES. — THAMI-MASADAS. 249
de conception, de toutes les divinités scythes, passait pour être
plutôt terrible et redoutable que bienveillant et bienfaisant. Aussi
les Scythes de la mer Caspienne et de la mer Noire mettaient-ils la
pêche et la navigation maritime heureuses, non dans les attributions
du Dieu redoutable Thami, mais dans celles du Dieu et de la Déesse
Vrindus (v. p. 240). Cependant quelques tribus scythes de la mer
Caspienne paraissent aussi avoir adoré Thami, et l’avoir considéré
même comme la souche de leurs rois. En effet, les Masa-Gèles qui
se disaient issus du Soleil (v. p. 27) avaient pour reine Thamyris ou
Tomiris, dont le nom signifiait probablement Océanide ou Fille de
Thami (cf. sansc. tamara, fleuve; gr. Thamyros, Thymbros, Thy-
bris; lat. Tiberis, fils de Neptune), et qui appartenait sans doute à
une famille de rois qui avait pour Aïeul le Dieu de l’océan Thami.
Les Scythes royaux, établis sur les bords septentrionaux de la mer
Noire, et qui mangeaient des poissons de mer, sacrifiaient au dieu
Thami, que Hérodote (IV, 59) a désigné par le nom équivalent grec de
Poséidon. L’eau, cet élément clair et limpide, étant le symbole de la
clarté de l’intelligence (v. p. 238), et là mer, par sa profondeur,
son étendue et son ancienneté, rappelant la profondeur et les mystères
de la Tradition antique (cf. Saga, p. 449), le Dieu de l’océan
passait également pour être en possesion d’un trésor de science,
d’autant plus que son nom (Thami, Étourdissant) était presque
synonyme de celui du breuvage étourdissant (sansc. madhu; gr.
methu; norr. miodr) ou enivrant, auquel les peuples anciens attribuaient
la propriété d’exciter les facultés intellectuelles (cf. gr.
thambos, étourdissement, ivresse) et d’inspirer la science et la près,
cience (v. p. 238). Aussi les Scythes donnaient-ils au dieu Thami
l’épithète de Maza-dâs (zend. maz-dào), qui signifie Beaucoup-bril-
lant ou Beaucoup-sachant, ou ce que les Latins désignaient par le
mol de Genius (cf. scylhe Okta-masa-dâs; norr. âtt-vættr, Génie de
la Contrée ; zend. Ahuro maz-dâo, Soleil Beaucoup-sachant). Chez
les Hindous et chez les Thrâkes, le Dieu de l’océan beaucoup-sachant
était même mis en rapport avec la poésie. C’est ainsi que d’après
la tradition hindoue, le poète Valmîki, l’auteur du Bamâyana, était
fils de Varounas, le Dieu de l’océan, et que, d’après la tradition
thrâko-grecque, le poète thrake Thamuras était fils de Poséidon, le
Dieu de la mer.
§ 161. ü e S erp en t de l ’Océan. -- L’Effrayant Beaucoup