
Cependant, je dois vous en faire l’aveu, lui non plus,
Messieurs, ne p u t reconnaître la main de l’homme dans
ces grossiers essais. J ’y voyais des haches, et je voyais
ju ste , mais la coupe en éta it vague et les angles émoussés;
leu r forme aplatie différait de celle des haches polies,
les seules que l’on connut a lo rs; enfin, si des traces
de trav ail s’y révélaient, il fallait réellement, p o u r les
v o ir, av o ir les yeux de la foi. Je les avais, mais je les
avais seul : ma doctrine s’éten d a it peu ; je n ’avais pas
un seul disciple.
Il me fallait d’au tres preuves, dès-lors d ’au tres re cherches,
et pour les étendre je pris des associés. Je ne
les choisis point parmi des géologues, je n ’en a u ra is pas
tro u v é ; au seul mot de haches et de diluvium, je les
voyais so u rire. Ce fut donc chez les o u v riers que je
cherchai mes aides. Je leu r montrai mes pierres-, je leu r
fis v o ir aussi des dessins qui les rep résen taien t telles
qu ’elles devaient être av an t d ’av o ir été émoussées p a r
le frottement diluvien.
• Nonobstant ces soins, il me fallut plusieurs mois pour
former mes élèves^mais avec de la patience, des p rimes
distribuées à propos, et su rto u t la découverte de quelques
morceaux n ettement taillés, que, sous leurs yeux,
je re tira i des bancs, je p arv in s à les ren d re to u t aussi
h abiles que moi, et, av an t la fin de 1840, j ’avais pu vous
offrir et soumettre à l’examen de l’In stitu t une vingtaine
de silex où la main humaine éta it manifeste.
m o n t, L. C o n fier , V a la n c ie n n e s , d e B la in v ille , J om a rd. Ce d e rn ie r ,
q u e lq u e tem p s a p r è s, s e r en d it à A b b e v ille a v e c M. Constant
P r é v o s t e t y v is ita les ban cs e t ma c o lle c t io n . M. d e B la in v ille y
v in t p lu s ta rd , ma is il s ’o c cu p a sp é c ia lem en t d e s to u rb iè r e s.
M. Brongniart ne douta p lu s ; M. Dumas, son g endre,
adopta son opinion. A p a rtir de ce moment, j ’eus des
prosélytes. Le nombre en fut petit, comparativement à
celui des opposants. Ma collection qui s’accroissait r a pidement
et que, dès le principe, j ’avais ouverte au x
curieux, en a ttira quelques-uns; mais les hommes p ra tiques
dédaignèrent de v o ir; disons-le: ils en avaient
peur ; ils c raig n aien t de se ren d re complices de ce qu’ils
appelaient une hérésie, presqu’une mystification: ils ne
soupçonnaient pas ma bonne foi, mais ils dou taien t de
mon bon sens.
J’espérais que la publication de mon liv re des antiquités
antédiluviennes, qui p a ru t d ’abord sous le ti tr e : D e
l’I n d u s t r i e p r im i t i v e , d issip erait tous les doutes : ce fut
le contraire. Sauf vous, Messieurs, chez qui j ’ai tro u v é
un constant appui (1), personne n ’y c ru t. En 1887, on
avait accueilli la théorie sans tro p de difficultés; quand,
se ré a lisa n t, cette th éo rie d evint un fait que chacun
pouvait v é rifie r, on n’y voulut plus c ro ire , et l’on
(1) Parmi le s m em b re s d e la S o c ié té à qu i je d o is su r to u t d e s
r em e r c îm e n ts , je c ite r a i feu le d o c teu r R a v in , q u i m ’aida à
établir le s c o u p e s de te r r a in s; MM. Ed. Pan n ie r e t Os. Macqueron
qui, a vec u n e o b lig e a n c e pa r fa ite e t un ta len t in c o n t e s ta b le , o n t
dessiné e t lith o g r a p h ié to u te s le s p la n ch es ; M. H. T ro n n e t, q u i a
revu to u te s mes é p r eu v e s a v e c u n s o in e t u n s a v o ir q u i m ’a é té
bien u t ile ; MM. Louandre père e t lils , D u s e v e l, d e Marsy, F lo rentin
Lelils, qu i o n t p u b lié p lu s d ’un a r tic le p ou r d é fen d r e mon
livre; MM. H ecq u et d ’O rv a l, Fe r e t, le baron de Cle rm on t-Ton n e rr e ,
Bâillon, B u t e u x , Y io n , le com te d ’H in n isd a l, le baron de Girar-
dot, D i-P ie tro , l’a bb é C o c h e t, l ’abb é D e c o r d e , l’abb é C o rb le t,
Marcotte, P in sa r d ,C h . Go inart, le c om te d e Maitly, d rL. D o u ch e t,
Garnier, Go ze, e tc .