
à sa profondeur et à la masse de ses eaux, bien autre
qu’elle n’est aujourd’hui.
Par cet accord des espèces entr’elles et de chacune
d’elles à la localité (1) et aux ressources qu’elle comporte,
on voit que la présence d’une famille, en révélant
une autre famille et en même temps les substances végétales
ou animales dont l’une et l’autre devaient se
nourrir, peut nous guider dans cette revue rétrospective;
puis, par le rapprochement des espèces avec lesquelles
l’homme vit aujourd’hui et les conditions sans lesquelles
ni elles ni lui ne pourraient vivre, nous montrer celles
avec qui il vivait autrefois. Des mêmes causes sortent
les mêmes effets, le temps n’y fait rien ; et quand on
trouve leurs traces dans des terrains et des conditions
semblables, il n’y a pas plus de raison de croire à la
nouveauté de l’homme qu’à l’ancienneté de l’animal.
Alors, pour être conséquent, il faut reconnaître qu’ils
sont tous deux nouveaux ou qu’ils sont tous deux
anciens.
Si vous n’admettez pas ceci, que voyons-nous? — La
surface terrestre couverte de toutes ces bêtes, y vivant
depuis un temps immémorial comme elles y vivent encore,
les unes en se nourrissant de végétaux, les autres
en donnant la chasse aux espèces plus faibles. C’est au
milieu de cette multitude, reine du sol et s’y disputant
(1) On peut aussi calculer la nature et la température des eaux
par les plantes, les coquilles et les êtres de toute espèce qui y
vivent ou y ont vécu. On n’a pas fait, à cet égard, assez d’expériences
comparatives. Dans un espace assez resserré, on rencontre
souv ent des eaux très-diverses par leur composition et leur température
: c ’est une indication qui n’est pas à négliger dans les
études géologiques.
la suprématie de la force, que serait tombé l’homme nu,
l’homme seul, l’homme enfant! De quelle façon y aurait-
il été reçu? — Probablement comme l’est aujourd’hui,
par les tigres et les lions, le passant qui s’offre à eux
sans défense, et le premier-né de notre espèce eût ainsi
cessé d’exister dès son apparition sur la terre.
Puisqu’il n’en a pas été ainsi, c’est que l’homme est né
avant les carnivores (1), ou lorsque toutes les créatures,
dans leur innocence native, se nourrissaient de fruits et
de racines : telle est la version de l’Écriture, et c’est
la plus logique, car si l’homme n’est pas né le même
jour que les animaux, il est né le lendemain : enfant avec
eux, il a crû avec eux, et ils n’ont pas été assez longtemps
ses aînés pour qu’ils pussent devenir ses maîtres.
Cette contemporanéité que la géologie nous indique,
prouvée par la tradition, l’est aussi par le raisonnement.
Mais en admettant même cette innocuité des animaux
et supposition faite que l’abondance de la nourriture leur
permettait à tous de vivre sans se la disputer, il faut
reconnaître que les débuts de l’homme sur cette terre
encore mal affermie et dans une atmosphère chargée
d’électricité et dès-lors plus sujette aux tempêtes (2),
(1) Si la plupart des races animales sont nées avant l’homme,
rien ne prouve qu’aucune ne so it née après. Sans doute nous n’en
connaissons pas de nouvelles quant au type, mais nous en pouvons
citer plus d’une s’il s’agit des variétés : l ’homme, par des
croisements, a fait sinon des espèces, du moins des formes nouvelles.
(2) Il existe autour de la terre une zone de corps que nous
nommons aérolithes et qui d o it, dans l’e sp a c e , ressembler à
l’anneau de Saturne. Nous v o yons, de loin à loin, de ces corps
pénétrer dans notre atmosphère et arriver sur la terre. Il est pro