
qu’il .est effectivement, pour le mot latin germani, ayant sa signification
ordinaire de Frères1. [
§ 49. lies traditions généalogiques des Germains.
— Dans l’Àntiquiié, les tribus, les nations et les peuples ont rattaché
généralement leur origine au dieu dont ils avaient institué
chez eux le culte, ou dont le culte leur avait été transmis par leurs
ancêtres. Le but principal de ces généalogies mythologiqucs^ est
de montrer comment, par l’intermédiaire du premier chef, roi ou
héros de la tribu ou delà nation, cette tribu ou nation descend
directement et immédiatement de la divinité; aussi ne se contente-
t-on pas, dans ces traditions généalogiques, d’établir que cette tribu
ou nation se rattache indirectement au dieu par 1 intermédiaire
des chefs de la tribu-mère dont elle s’est détachée. Voilà pom-
quoi, bien que les différentes tribus soient issues les unes des
autres, et qu’elles dussent, par conséquent, dans la série généalogique,
tenir compte des tribus anciennes dont elles étaient issues,
les généalogies mythologiques remontent rarement à la tribu-mère,
mais elles représentent chaque tribu comme étant une tribu primitive
e t se rattachant immédiatement, par ses héros, à la divinité.
Aussi les traditions généalogiques, renfermées dans lés généalogies
mythologiques des peuples de l’Antiquité, ne nous apprennent presque
rien sur leur généalogie réelle ou historique. Cependant elles
ont une certaine importance pour l’histoire, en ce sens qu elles
fournissent à la critique le moyen de déterminer l’âge relatif des
1 Notre maître à tous, M. Jacob Grimm, ayant pris l’expression de Tacite
ob metum (par crainte) comme signifiant pour inspirer la crainte, en a induit
que le nom .de Germani avait été inventé, parce que, par sa signification,
il devait inspirer de la terreur à l’ennemi. Mais, sentant bien qu’un peuple ne
Se rend pas redoutable à ses ennemis rien qu’en se donnant un nom, quelque
terrible qu’en puisse être la signification, et que les Germains eussent été des rodo-
monts ridicules, s’ils s’étaient donné eux-mérnes ce nom prétendu terrible, l’ü-
lùstre savant suppose que ce nom leur a "été donné par les Gaulois terrifiés. I
suppose donc que c’est là un nom keltiqué /ayant une signification à peu près
semblable à celle du mot français brailleurs, ou du mot hollandais krakeelers.
Mais comme Tacite, tout au. contraire, dit que le nom de Germani a. été invente
par le vainqueur (victore)' d’èst-à-dire par les Germains, M. Grimm n’hésite pas
à changer, dans le texte vulgaire, le mot victore en viclo. Ainsi- que M. Grimm,
M. Zeüss croit que Germani est un mot kelte; il-suppose qu’il signifie, -voisins.
Du moins cette explication présente un sens qui n’est pas en contradiction avec
la circonstance dans'laquelle le nom est censé s’ètre formé; mais, sous tous
les autres rapports, elle est tout aussi inadmissible que la précédente.
tribus, d’après l'âge relatif du culte des dieux. Ainsi sachant, par
exemple, que les Svîes (v. p. 60), en se détachant de leur tribu-
mère, ont établi chez eux, comme le prouve leur nom, le culte du
dieuSm, qui est identiquewecVodins; sachant,d’un autre côté, que
Vodins est le dédoublement d’une divinité plus ancienne, savoir
deTius (Ciel; norr. Tyr), et qu’il n’a eu cette importance religieuse
dans le culte que chez les tribus de la branche gèle, on peut en
conclure, d’abord que les Svîes, les adorateurs d’Odinn [Vodins),
proviennent des tribus de cette branche gète, et ensuite qu’ils sont
postérieurs à ces tribus, ou tout au plus leurs contemporains;
mais qu’ils ne sauraient avoir existé antérieurement à elles.
La réciproque est également vraie. Connaissant l’âge, c’est-à-
dire la date de l’origine de la tribu, on peut en déduire l’âge du
culte de la divinité qu’elle adorait. Sachant, par exemple, que les
Gotes sont sortis de la branche gète, à peu près au cinquième siècle
avant notre ère, on peut en conclure que le nom et le culte du
dieu Got adoré par les Gotes, ne sauraient avoir existé antérieurement
à la branche gèle, et qu’on chercherait vainement le nom de ce
peuple et de ce dieu chez les Scythes-Skolotes, les ancêtres des Gètes.
Cette méthode employée par une critique à la fois sage et sagace,
peut porter la lumière dans le dédale chronologique et historique
du culte des dieux, et éclaircir l’origine et la filiation des tribus
dans l’histoire des peuples primitifs.
§ 50. Traditions sur la parenté des tribus. — Outre
les traditions généalogiques qui rapportent l’origine mythologique
de telle ou telle tribu, il y en a d’autres qui énoncent, non l’origine
d’une seule tribu, mais la parenté de plusieurs tribus entre
elles, ou leur commune origine. Cette dernière espèce de traditions
est généralement moins ancienne que la précédente, par la raison
que ces traditions reposent sur la connaissance, plus ou moins
; réelle ou imaginaire, des rapports de parenté qu’on croyait exister
entre certaines tribus, et que cette connaissance est naturellement
| postérieure à l’établissement même de ces rapports de parenté,
lesquels ont eu besoin d’un certain laps de temps pour se former.
| Comme expression de la science ethnologique chez ces peuples
; anciens, ces traditions généalogiques ne valent que ce que peut
valoir en général la science ethnologique des anciens, Or, cette
science, aux yeux de la critique, se réduit à presque rien, si l’on
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