
uns dans une île située dans la Vistule et appelée Prés des Sacrés
(Gavaiht-avias ; Jornandès, Gepît-oios), les autres dans une île
située dans la mer Baltique. Longtemps après, à la troisième ou
quatrième génération, ces Sacrés voulurent revoir le pays d’où
étaient sortis leurs ancêtres; aussi lorsque des émigrés gotes, venant
de la Scandinavie pour retourner dans la Golhie sur le contin
e n t, abordèrent dans l’îie des Sacrés, quelques-uns d entre eux
s’embarquèrent également pour naviguer de conserve avec ces
Goles leurs frères. A cette' époque le mot de gavaihlai avait
déjà pris la signification défavorable de maudits, et désignait
plus particulièrement les idiots et les paralytiques. Aussi lorsque,
sur mer, le navire des Sacrés resta pendant quelque temps en arriè
re , les Goles impatientés et raillant les Gavaihlai sur leur nom,
les appelèrent Paralyliques-0\i Sacrés Traînards. Les Grecs qui ne
connaissaient la signification du nom de Gavaihlai, ni dans le sens
favorable de Sacrés, ni dans le sens défavorable de Maudits, rendaient
ce nom par Gapaithai ou Gapaidai, et pour y trouver au
moins quelque sens plausible, ils allèrent jusqu’à le changer en celui
de Gè-paides (Fils de la Terre). Les Latins changèrent le grec Ga-
peidai en Gepîdæ, et les clercs anglo-saxons, ignorant également
que Gepîdæ dérivât de Gavaihlai, mais sachant que ce nom avait
la signification de Dévoués,- rendirent le latin Gepîdæ par l’anglo-
saxon Gifdas (Donnés, Dévoués)1. Jornandès, bien qu’il fût alano-
gole, ne connaissait pas le nom gole Gavaihlai ;..du moins il ne le
connaissait que sous la forme grecque de Gepeidai, dont naturellement
il ne savait pas s’expliquer la signification; mais ayant appris
la tradition populaire dans laquelle on donnait au nom de
< Les verbes de p r em iè r e formation ont, dans les idiomes gétiques, leur participe
passif en n et non en t. Ex. goth. g ib a n s , anglos. g i f e n , ail. gegeben.
Les verbes de s e c o n d e formation, au contraire, c’est-à-dire ceux qui sont dérivés
de substantifs ou d’adjectifs, forment leur participe passif en t et non en n.. Gifdas
(p. g ifô d a s , gifedas) est le participe passif de g ifi.au, dérivé de g ifu (don). En
allemand gib te pour gab serait monstrueux ; il faudrait au moins dire g a b te ; car,
en allemand, il n’y a pas de substantif gibe (don), mais un substantif gabe (don),
dont on pourrait, à la rigueur, former un verbe dérivé. L’anglo-saxon G ifd a s ne
saurait donc, en aucune façon, être la forme saxonne identique du goth Gavaih-
ta i ; et le latin Gep îdæ ne saurait non plus dériver du verbe g ifa . G ifd a s est donc I
la transcription de G ep idoe , et ce nom propre a été introduit dans la langue anglo
saxonne par l ’é r u d i t io n , comme tant d’autres noms propres historiques et
mythologiques (cf. N em r o d , anglos. N e - f r ô d , Im-prudens) qu’on rencontre dans
cette langue.
Gèpides la signification de paresseux, il crut, sur le témoignagede
quelque auteur grec, que les Gépîdes tiraient leur nom de leur embarcation
lente. Or, dans la langue gote, le mol signifiant lente était
gavânila (attendue, se faisant attendre; cf. v. h. ail. gowànit, at-
, tendu), dont la transcription grecque était gepania; et voilà pourquoi
Jornandès, ou son original Cassiodore, prétend que le nom
de Gepeidæ est dérivé de gepania (lat. pigra sc. navis) l.
§ 39. Résumé de l’Histoire ethnologique des Gé-
jûdes. — Dans l’origine, les Gépides étaient une fraction des
I Goles, comme les Goles étaient originairement une fraction des
I Gèles. Revenus du Nord dans le pays qu’avaient quitté leurs an-
I cêlres, les Gépides s’y accrurent au point qu’ils parvinrent à la
I domination sur leurs frères les Gètes et les Goles (v. p. 43). Vers
I 145, ce furent principalement les Gépides qui forcèrent les Bur-
I gondes à s’expatrier et à aller s’établir dans la Gaule. Vers le milieu
I du cinquième siècle, Ardarik, chef des Gépides, se trouvait à la tête
I desqoeuples qui brisèrent le joug des Huns. Après leur délivrance,
I les Gépides eurent à lutter contre leurs cousins les Langobardes.
I A la fin, les Langobardes, aidés des Avares, d’origine tatare, défi
membrèrent le royaume puissant des Gépides. Une partie des Gé-
I pides accompagnèrent leurs vainqueurs les Langobardes dans leur
I expédition qu’ils entreprirent contre l’Italie. Une autre partie
I émigra sur le territoire romain, et le reste se soumit à la domina-
I tion des Avares et se confondit peu à peu avec, ce peuple tatare.
C’est ainsi que les peuples de la branche gète, les Gèles', les
I Dâkes, les Goles et les Gépides, après avoir joué, successivement
I pendant près de dix siècles, des rôles assez importants dans l’his-
' J o r n a n d è s , H is to ir e d e s G o tlis, chap.'l7 (collection N isa rd ) : «Les Gépides,
9 «voyant les Gètes possesseurs tout à coup d’un grand butin et partout vainqueurs,
J «se laissèrent entraîner par leur jalousie et prirent les armes contre eux, malgré
«leur parenté. Or, comment les Gètes et les Gép id e s sont-ils parents? Si vous
«désirez le savoir, je vous le dirai en peu de mots. J’ai dit, en commençant,
I «vous devez vous le rappeler, que les Goths étaient sortis de l’île Seanzia avec
I « leur roi Bérich, et que sur trois vaisseaux seulement ils avaient abordé aux
| « rivages en deçà de l’Océan. Un de ces trois vaisseaux allant plus lentement que
«les autres, comme il arrive, fit donner, assure-t-on, le nom de Gépides à ceux
| “ qui le montaient ; car, dans la langue des Goths, p a r e s s e u s e se dit g e p a n ta ......
h «De là vint qu’avec le temps et par corruption, les Gépides tirèrent leur nom d’un
! «terme de reproche. Il est, du reste, hors de doute que les G épides ont la même
« origine que les Goths ; mais, comme je l’ai dit, g e p a n ta signifiant ce qui est p a r e s ■
*seux, l e n t , ce terme de reproche, donné sans intention, est devenu leur nom. »
A