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112 TROISIÈME PARTIE.
sionnés que les Grecs. L’empereur Maximin, qui était Gote d’origine,
ne croyait pas déroger à la dignité impériale en se mesurant avec
de simples soldats à la lutte et à la course à pied et à cheval (Jor-
nandès, ch. 15). Les combats singuliers, comme simulacre de la
guerre, passaient pour des jeux tellement amusants et dignes d’un
héros, que, selon la Mythologie Scandinave, les Guerriers bienheureux
de la Halle des occis (norr. Valhôll) n’avaient pas de plus
grande jouissance que de se battre l’un contre l’autre les armes
à la main.
Chez les Scythes, les Goths et les Germains-Scandinaves, les
festins étaient, comme chez quelques autres peuples de l’Antiquité,
des compotations (gr. sumposia; héb. mischkèh; norr; drykkr), où
le boire l’emportait sur le manger, et qui, comme amusement,
portaient également un caractère plus ou moins guerrier. En effet,
ces festins étaient donnés, chez les Scythes, par les Nomarques
(v. Hêrod., IV, 66), et chez les Goths et les Scandinaves par les larles
(Comtes) et les Herses (Seigneurs), qui tous ne connaissaient d’autre
occupation honorable que celle de la guerre. Nul Nomarque ne pouvait
prendre parta ces compotations, s’il n’avait tué, dans l’anuée,
un ennemi, et s’il n’en pouvait montrer la chevelure arrachée ou le
scalp (Hérod., IV, 64). A ces festins, les Nobles trouvaient l’occasion
de raconter ou de chanter leurs propres exploits (v. Poèmes, isl.,
p. 323) et de faire voeu d’accomplir tel ou tel haut fait. Comme tous
les jeux devaient être, aux yeux de ces peuples guerriers, un
moyen d’éprouver la force physique (v. p. 111), on jugeait aussi de
la constitution robuste des convives d’après la plus ou moins
grande facilité qu’ils avaient de vider leur coupe d’un seul trait.
Enfin, pour que tout dans ces festins rappelât les combats , on ne
buvait pas toujours dans des coupes ou tasses ordinaires (norr.
skala, bordker), ou dans des cornes pointues (goth. stickls; v. saxon.
stikil), on préférait.boire dans la tasse faite du crâne (ail. Hirn-
schale) de l’ennemi qu’on avait vaincu et tué fSnorra Edda,
p. 142; Paul Warnef., I, chap. 27; Hérod., IV, 66; Plin., II. N.,
Vil, 2; Slrabo, VII, p. 206; Tit. Liv., lib.. 28; Amm. Marcel,,
lib. 27 ; Volundarkvidà).
l ’h o n n eu r . 113
b) L’Honneur.
g©1?. lia force p h y siq u e h ase de l ’h o n n e u r. — Les
Scythes, les Gètes et les Germains-Scandinaves, de même que la
plupart des peuples de l’Antiquité, plaçaient leur honneur principalement
dans la force physique. Ce qu’ils admiraient le plus dans
l’individu, c’était une grande taille et la vigueur du corps. C’était
une honte d’avoir une complexion faible et chélive. Aussi, comme
les pères, en tant que propriétaires et maîtres des membres de
leur famille, pouvaient faire tuer ou exposer leurs enfants nouveau-
nés (v. p. 101), ce malheureux sort frappait surtout les enfants ché-,
tifs (cf. Paul Diac., I, 15), quoique légitimes. Les femmes étaient
d’autant plus respectées qu’elles pouvaient rivaliser avec les
hommes par leur constitution robuste (v. Chants de Sol., p. 150).
Les vieillards tâchaient d’échapper à l’ignominie attachée à leur
faiblesse par une mort volontaire ou par la consécration (v. § 187).
L’honneur et la gloire consistaient à faire preuve de forces physiques
supérieures, en remportant la victoire sur son adversaire; et
comme la force physique donne à l’homme cette assurance qui
ressemble au courage, et souvent en lient lieu, le courage et la
bravoure étaient honorés bien plus comme indices de la force physique
que comme témoignages de l’énergie du caractère moral. La
lâcheté constituait l’ignominie par excellence. Le maniement des
armes ou la lutte étant pour l’homme le meilleur moyen de déployer
sa force et sa bravoure, la guerre était non-seulement l’occupation
principale, mais encore la plus honorable; de sorte que tout
homme libre, qu’il fût nomade, ou laboureur, noble ou manant, regardait
comme son plus grand honneur d’être toujours armé (v. p. 97)
et prêt à se battre. Les mots de destructeur (sansc. kchayas; scyth.
skaïs), de lueur (norr. skali), étaient synonymes de héros, de prince;
et les expressions poétiques, juridiques et généalogiques servant à
désigner l’homme étaient empruntées au nom de l’épée (cf. ali.
Schwerdt-mage, parentde l’épée, c’est-à-dire parent du côté du mari).
Les Nobles, bien que leurs privilèges fussent la conséquence de la
distinction de leurs familles, ou de la pureté de leur sang, plutôt que
de leur courage personnel (v, p. 107), sentaient instinctivement qu’ils
ne pouvaient maintenir leur rang qu’en surpassant les Manants en