
qu’il fût devenu héréditaire dans elles, ne put engendrer la caste, et
resta, en quelque sorte, une fonction civile ou laïque. Comme, d’après
l’opinion généralement répandue dans l’Antiquité, ceux qui
avaient fondé le culte de quelque Divinité étaient, non-seulement
ses prêtres, mais passaient aussi pour être les fils ou les descendants
de celte Divinité, ces familles nobles et sacerdotales furent
encore considérées comme divines ou issues des Dieux, au même
titre que les familles royales. Aussi les chefs de ces familles nobles
prirent-ils le nom de Divins (lat. divi; norr. dîav; cf. goth. gudia1).
Ils s’attribuèrent même le nom spécial ou épithétique du Dieu dont
ils se disaient les descendants, et ce nom, par extension., fut
aussi appliqué dans la suite à toute leur descendance, et quelquefois
même à la tribu ou à la nation entière. C’est ainsi, par
exemple, que chez les Austro-Goles, Amal (L’Actif, v. p. 190), le nom
épithétique du Dieu du soleil, après avoir été d’abord le nom de
la famille princière qui avait institué le culte de ce dieu, devint ensuite
encore celui de toute la tribu des Amales. Chez les Gèles de
la Thrace (Plin., A, 11) il y avait la famille sacerdotale des Diobesses
(Ours-de-Tius; norr. Ty-bassi, Tys-biôrn) qui étaient probablement
les prêtres de leur prétendu Aïeul le dieu Tius (scyth. Tivus;
norr. Tyr). Le chapeau que portaient les Nobles chez les Scythes ,
et par lequel, sous le nom de Porte-chapeaux (Lucien, Pilo-foroï;
norr. hâtt-berandï), ils se distinguaient des roturiers libres nommés
Octopodes (v. p. 105), devint, chez les Gètes, presque un attribut
de la prêtrise, et resta encore, dans la suite, le signe distinctif du
dieu Odinn surnommé Sidhottr (Chapeau-rabaltu). D’après Dio Cas-
sius et Petrus Patricius , les Dâkes et les Gèles se distinguaient en
hommes libres laïcs nommés Chevelus (gr. Komètai; goth. Haz-
dingôs ; norr. Haddingiar; v. Grimrn , Mythol.) , et en Nobles sacerdotaux
nommés d’abord Révérends (gr. Tarbusleoï de tarbuzeïn;
lat. Tremendi) et appelés plus tard Porte-chapeaux (v. Jornandès,
De rebus get.).
c. Le Sacerdoce chez les Germains et les Scandinaves.
§1^5. lies Laies prêtres sacrificateurs. — Les tribus
germaniques et Scandinaves, s’étant séparées de leurs pères les
1 Dans lornandès il faut lire DU au lieu de Pii.
peuples de la branche gèle, à une époque où l’influence sacerdotale
des Thrâkes et des Keltes ne s’était pas encore fait sentir sur
elles, le sacerdoce, dans la Germanie et dans la Scandinavie, a
gardé son caractère traditionnel de simplicité patriarchale. Aussi
Jules César a-t-il été frappé des grandes différences qu’il y avait
entre les Druides des Keltes et les Prêtres-laïcs des peuples germaniques
(De bello gall., VI, 21). Toutes ces différences se résument
en ce que les Keltes étaient un peuple sacerdotal, dont les prêtres formaient
une caste, tandis que les Germains étaient un peuple laïc
qui considérait la prêtrise comme une fonction purement sociale
ou politique. Chez les peuples germaniques et Scandinaves, le Chef
de tribu était ordinairement secondé par un ministre de la religion,
qui était chargé à la fois des affaires du cidte, de l’administration
de la justice et de Yexéculion des décisions judiciaires du peuple
(Tacil., Germ., c. 7, 11). Ce ministre était pour le chef germain
ou Scandinave ce qu’était le brahmane (v. Lois de Manou, liv. 8,
9-11) pour le roi hindou, savoir son confident, son conseiller', son
assesseur au tribunal, et, en général, le soutien de son autorité;
c’était „ordinairement, un homme d’un âge avancé, le plus souvent
choisi'dans les familles les plus anciennes et les plus nobles; aussi,
chez les Burgondes, portait-il le titre de Sinistus (Le plus Ancien ;
goth. sinista, superlat. desms; lat. senis, senex; senior ; cf. séné-chai).
Comme ministre issu de la Divinité, il portait le nom de Divin (gudia;
norr. godï); comme desservant du sanctuaire, il était appelé Sanctua-
rien (germ. harugari), et s’il desservait un temple avec une enceinte
(hof), on le nommait le Divin de C Enceinte (norr. hofgodï) ; enfin
comme présidant aux sacrifiées* il avait le nom de Consècraleur
(germ. pluoslrarï) ou de Homme de consécration (norr. blôt-madr).
Dans la république d’Islande, où le gouvernement avait été ramené
à sa simplicité patriarchale, le Chef de district était a la fois préfet
et pontife; mais il portait communément le titre de Divin (Godi),
qui rappelait plutôt son caractère sacerdotal accessoire que son
caractère principal d’administrateur civil. D’un autre côté, comme
chez les peuples laïques, la loi civile se confondait avec la loi religieuse,
le prêtre, comme juge et comme divin, était aussi le gardien
de la loi, et c’est pourquoi, encore au Moyen âge, en Allemagne,
il était quelquefois désigné sous le nom de Garde-loi (eo-
wart; v. Grimm, Mylh., p. 79).
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