
CINQUIÈME PARTIE.
reinno, rheno (renne) et au lithuanien baronas (bélier); que le
scythe idrartèas (renne), dérivé du même thème que vrindus, correspond
au norrain thrândr (sanglier) ; que le sanscrit vrichas (taureau)
correspond au scythe vriskas (bélier), au grec brios (p. krifos,
frikos, bélier) et au latin fircus (bouc) ; que le grec kapros (sanglier)
correspond au gète hafurs (bouc) et au gote ifurs (verrat). Voilà
pourquoi aussi le bélier (norr. saudr ; scyth. vriskus), consacré anciennement
au Soleil, resta encore plus tard l’animal consacré au
dieu solaire Heimdall; que thrândr (verrai) et iôfur (verrat), qui
correspondaient au scythe larandus (renne) et au latin aper, devinrent
les noms même du dieu solaire Hagimeis (norr. Hoenir), auquel
fut substitué plus tard Freyr (v. § 116) ; et celui-ci , adoré1 en
Norwége sous le nom de Thrândr (Verrat), fut considéré sans doule
comme le Père des Thrændir ou des habitants du district de Thrônd-
heim (aujourd’hui Throndhjem), dont il a été anciennement le Dieu
éponyme.
Lorsque la déesse Soi eut remplacé l’ancien Dieu du soleil, les
attributions de ce dieu ainsi que les mythes se rapportant au soleil,
se conservèrent dans la tradition, et furent rapportés les uns à la
déesse Sol, les autres aux dieux épiques qui étaient les héritiers et
les dédoublements de l’ancien Dieu du soleil Targitavus. Les principaux
d’entre ces héritiers étaient Ballhus, Skalmoskis, Irmuns
et Ifurings. L’ancien dieu-héros Targitavus (Brillant par la large)
avait pris le nom épithétique de Balthus (norr. Baldur, Force, Courage)
ou Ballhags (Doué de force; cf. anglos. Büldag); et ce nom
épithétique finit par effacer l’ancien nom propre scythe. Balthus fut
ainsi substitué à Targitavus et devint l’héritier de la plupart de ses
attributions et de ses mythes. Voilà pourquoi on se figurait Ballhus
comme l’on s’était représenté Targitavus, savoir comme un héros
(skali, skaïs) et comme un excellent archer (skotaris; cf. norr.
Vidarr), que les Grecs comparaient à Héraklès.
Par la même raison, Balthus, ayant été substitué à Targitavus,
passait aussi, comme ce dieu scythe, pour être le fils du Dieu Suprême.
Or, Vâthans (norr. Odinn) ayant remplacé Tivus comme Dieu
Suprême (v. p. 162), Balthus dut être considéré, non plus comme
le fils de Tius, mais comme le fils de Vâthans. De même que le
dieu-héros Amal (Le Fort; cf. norr. Afl), dont le nom avait été
un nom épithétique de Targitavus, devint le père éponyme de
la famille noble des Amales chez les Austro-Goles (Jorn., 5,14, 69),
de même Balthus devint le père éponyme de la famille noble des
Balthes chez les Visi-Gotes (Jorn., 5, 29).
§ 115. lie «lie» Sltalmosliis. —-, Un autre nom épithétique
de l’ancien Targitavus avait été celui de Skalmuskis. Soit qu’il existât
déjà, chez les Scythes, un mythe racontant que Skotaris (l’Archer)
avait tué un ours et s’était revêtu de sa peau, mythe dont il resterait
encore quelque légère trace dans une tradition norraine du
treizième siècle (v. Snorra Edda, FormâJi p. 12), soit que plus tard
seulement les Gèles aient attribué à Skotaris la peau de lion, en imitation
de celle du Héraklès grec, toujours est-il que les Gèles se
sont figuré Skotaris, l’ancien Targitavus, comme revêtu d’une peau,
et pour cette raison ils l’ont appelé le Dieu à la peau. Dans la langue
gète, le mot skalmus (sansc, tcharmas;'\ieux ail. schelm *), que les
Grecs prononçaient salmos ou zalmos (v. Porpliyr., Vie de Pythag.,
§14, 16)».signifiait peau. Par l’addition de la terminaison skis (v.
p. 61, note), comme dans les noms de Cheru-sks, de Tiu-sks, de
Svinn-sks, les Gètes, ou déjà leurs pères les Scythes, ont formé le
nom de Skalmoskis (à la peau) que les Grecs ont rendu par Zalmo-
ksis (p. Zalmo-skis; cf. Zarmi-zegethousa, p, 140), De même que,
dans le Héraklès grec, le Dieu du soleil s’était confondu avec le Dieu
de forage (v. p. 167), de même Skalmuskis, l’héritier du Dieu du
soleil Targitavus, se confondit en partie avec le Dieu de l’orage
Virgunis (v. p. 160). Aussi, d’après la tradition gète, c’est l’Archer
(Skotaris), ou le Dieu à la peau (Skalmuskis) qui, pendant Y orage, lance
ses flèches contre ses ennemis, lesThurses et les Itnes; et les Gèles
lui prêtent assistance dans ce combat en tirant également des flèches
contre ces monstres (v. § 166).
'Skalmoskis et Ballhus, substitués à Targitavus, passaient comme
ce dieu pour être les Pères de la Nation. Voilà pourquoi presque
toutes les tribus des peuples de la branche gèle ont rapporté leur
origine soit à Davus (v. p. 26), soit à Gela (v. p. 27), soit à Svinlhs
' Ce qui prouve que, dans le vieux haut-allemand aussi, schelm avait la signification
Vie peau, dépouille, c’est que le verbe scheïmeù, qui en e'st dérivé, signifie
encore aujourd’hui, dans les patois de la Bavière et de la Franconie, peler, dépouiller.
La forme grammaticale qui, en allemand, correspondrait au gèteskal-
noshis, serait schelmischér. fin nom propre forme d’une manière analogue est
celui de Lâmiscio (p. Hlâmiski, Lacustre; norr. hôlmiskr), qui était le nom d’un
roi d'es Lombards (Paul, Dicte., I, c. 15)t. .