
chez les Scythes-Hellènes, le nom équivalent grec de Hestia, nom
par lequel Hérodote l’a aussi désignée.
Les Scythes qui, dans l’origine, étaient généralement nomades et
n’avaient pas de demeure fixe (cf. lat. Vesta), considéraient comme
leur domicile la place où ils avaient momentanément établi leur
foyer familial, c’est-à-dire leur pierre focale {taviti ; gr. hestici; cf.
norr. hlôd; arin-hella; boear-hella) qu’ils avaient 1 habitude de transporter
avec eux, dans leur char, d’un endroit à l’autre. Ce foyer
domestique portatif était sacré et inviolable, d’abord comme symbole
de la famille, et ensuite comme servant d’autel dans les sacrifices
domestiques. Cette espèce d’autel était sous la protection de
Taviti, considérée comme Déesse protectrice de la famille. Le roi
étant le père ou le chef de la grande famille, c’est-à-dire de la tribu
ou de la nation, son foyer était aussi pris pour l’autel publie (gr.
hestia koïnè ; hestia prutannitis) ét servait, comme tel, dans les sacrifices
publics. Cet autel national était sous la protection toute spéciale
de Taviti, considérée alors comme Déesse de la nation, et
c’est pourquoi Taviti portait elle-même, chez les Scythes-Hellenes,
le nom de Hestia koïnè (Vesta publique; v. p. 192).
De même que, chez les Grecs et les Romains, jurer par Hestia ou
Vesta, c’est-à-dire par la religion, le nom et la majesté du peuple,
était un serment plus solennel que celui qu’on prêtait par Hercules,
le Dieu du feu céleste ou de la foudre vengeresse (v. p. 167), de
même jurer par le foyer du roi, c est-a-dire par 1 autel public ou pai
la déesse Taviti, passait pour le serment le plus sacré chezies Scythes.
Voilà pourquoi lorsqu’un serment ainsi prêté était faux ou qu’il fut
violé, celapassaitpour une profanation non-seulementdu foyer public,
c’est-à-dire de la majesté du peuple, mais encore pour une violation
du culte sacré de Taviti. Aussi cette déesse protectrice de la nation
devait-elle venger cette injure ; et comme le roi, en sa qualité de
chef, à la fois politique et religieux, de son peuple (v. p. 108), était
responsable de toute infraction a la loi (v. § 173) et de toute profanation
du culte et des moeurs, c’était sur lui que la déesse outragée
se vengeait en l’affligeant d’aine maladie grave, jusqu’à ce
qu’il eût trouvé et puni le parjure {Hérod., IV, 68).
b. La Déesse du feu et ses Héritières dans la religion des Peuples de la
branche gète.
§ 143, Noms du feu dans les langues gètes. — Les
peuples d’origine scythe, étant entrés, pendant cette seconde période,
en contact avec les Grecs* les Thrâkes et les Relies, ont subi l’influence
des idées de ces nations qui étaient plus civilisées qu’eux; et c’est
pourquoi il s’est opéré aussi, dans leur religion, un développement
et quelques changements notables. L’ancien nom d’ugnis (mordant,
v. p. 225), par lequel on désignait le feu, se changea en ôhns
(goth. auhns), et prit peu à peu la signification de foyer et de four
(v. ail. oven; cf. gr. ipnos,p. iknos, feu, four), et se substitua ainsi à
l’ancienne expression de taviti, qui prit de plus en plus la signification
exclusive de nation. L’autre nom du feu, savoir ailurs (dévorant,
v. p. 225), se changea en eit et eitr, et finit par prendre la signification
de venin. Le troisième nom furi (purifiant) dont la forme prévalut
sur celle de fun (cf. ail. fun-ke, petit feu, étincelle), continua à
être employé pour désigner le feu en tant qu’élément purifiant (cf.
neot-fyr, v. p. 232). Un quatrième nom, qui semble s’être formé dans
cette période, est celui de eldir qui avait, peut-être, dans l’origine
la forme de indis, et correspondait sans doute au sanscrit indhas
(brûlant, cf. gr. aith-èr), mais qui plus tard fut pris dans le sens de
vieux. Ce sens semblait indiqué par l’étymologie dans les langues
germaniques et répondait à l’idée qu’on avait alors sur l’origine
du feu. En effet, d’après les idées cosmogoniques qui se développèrent
dans cette période (cf. p. 218), le feu fut considéré comme
l’être primitif de la création. De là , encore chez les Scandinaves ,
les locutions proverbiales de: plus ancien que le feu (eldri eldslr) ;
vieux comme le feu (eld gamall). Ensuite, de même que le feu était
considéré comme le Principe do toutes choses, on croyait aussi qu’il
serait le Destructeur de toutes choses à la fin du monde. On imagina
donc un feu souterrain qu’on personnifia dans une espèce de Vulcain
nommé Svarlus (Noirci; norr. Surtur), et dont on supposa, selon la
mythologie germanique et Scandinave, qu’il viendrait, à la fin des
siècles, brûler le ciel et la terre, comme Agnis ou Kâlas, surnommé
le Mangeur du monde (sausc. Djagad-bakchakas) dans la mythologie
hindoue, ou comme Dush-ak (Mal-portant) dans la mythologie