
CINQUIÈME PA R T IE ,
publics et les Consécrations que la Tuerie d’hommes était chargée
de faire, avaient lieu aux grandes Fêtes religieuses, telles que la
fêle du Solstice d’hiver et celle de l’Équinoxe du printemps. Ces fêtes
étaient ordinairement des jours fixes (cf. lat. fesins.; ail. [est), consacrés
à célébrer le souvenir de quelque Action mythologique de la
Divinité, à lui en témoigner de la joie, de la gratitude, età-lui
adresser, à celte occasion, les prières et les voeux publics. On
croyait que, dans ces jours solennels, la Divinité entrait en contact
plus direct avec les hommes, qu’elle se montrait à ses favoris
et adorateurs, et qu’elle venait en hóle visiter ses protégés pour les
bénir. Aussi ces jours de fête étaient-ils essentiellement des jours
consacrés à la réception à faire à la Divinité,-et c’est pour cette raison
qu’on croyait devoir les célébrer par des sacrifices. Car de même
qu’on honorait l’étranger ou l’hôte, non-seulement par les présents
qu’on lui faisait, mais aussi par des repas qu’on donnait en son honneur,
de même aussi on voulait honorer la visite du Dieu par des
offrandes et par des sacrifices. Les Sacrifices différaient des Offrandes
en ce qu’ils n’étaient pas, comme celles-ci, des présents
d’objets utiles ou agréables à la Divinité , mais des oblations de comestibles
destinés à régaler l’Hôle-dieu. Les Sacrifices publics étaient
donc des repas offerts à la Divinité par la tribu entière, et tous les
membres de la tribu avaient le droit d’y prendre part, tandis que les
Sacrifices privés, faits en dehors des jours de fête, étaient des festins
offerts à la Divinité, au nom de la famille, et il n’y avait que les
membres de la famille et ceux qu’on considérait comme alliés à elle
par le sang, qui pussent y prendre part (v. p. 117). Comme le sacrifice
était un festin, auquel ceux qui le donnaient, aussi bien que
le Dieu-hôte auquel on l’offrait, devaient participer, on ne sacrifiait
que des victimes, ou l’on ne servait que des comestibles , dont on
pouvait goûter soi-même.
La manière d’immoler les victimes et les cérémonies qui accompagnaient
ces sacrifices sanglants, dépendaient, chez les différents
peuples, du mode employé habituellement pour tuer les animaux
et pour préparer les repas ou les festins. Les Scythes avaient la coutume
de tuer les victimes en les étouffant ou en les faisant mourir
par strangulation (cf. ail. würgen, étouffer, tuer), afin que le sang
ne se perdît pas, mais restât entièrement dans la victime offerte
à la Divinité (Hérod., IV, 60; cf. IV, 71, 72). Cependant dans
la suite, et déjà chez les Scythes, mais surtout chez leurs descendants,
la victime était principalement immolée avec le glaive ou le couteau
de sacrifice (cf. norr. skera, couper, immoler; ail. würgen, étouffer,
égorger). Le sang de la victime était ensuite recueilli soigneusement,
par les Femmes Victimaires, dans un chaudron ou bol de sacrifice
(norr. hlaut-bollr), et c’est d’après la couleur, les vapeurs et la coagulation
du sang qu’on prédisait les événements et qu’on proclamait
le Destin (v. § 191).
§ 1 79. l i e s K e j i a s « l e s a c r i f i c e . — Après que la victime
eut été tuée et dépouillée de la peau, on la mit dans un chaudron
pour la cuire, ou bien on la plaça, pour la rôtir, sur un feu qu’on
alimentait avec les os qui avaient été extraits du corps de l’animal
(Hérod., IV, 61). Les viandes étant cuites ou rôties et préparées
pour le repas, on choisit les meilleurs morceaux pour en faire la
part du Dieu (Hérod., IV, 61) ; et pour faire parvenir sa portion à la
Divinité, on la déposait dans un endroit consacré, ou on la suspendait
aux arbres, ou bien encore on la brûlait pour en faire monter le
goût et l’odeur au ciel comme au Séjour des Célestes (Dieux), ou
bien enfin on la livrait aux serviteurs et aux Femmes Victimaires
qui en disposaient au nom de la Divinité. La part revenant à la Divinité
étant livrée, le reste de la victime formait le repas des gens
de la tribu, si c’était un Sacrifice public, ou des membres de la famille,
si c’était un Sacrifice privé. Les peuples nomades et chasseurs,
tels que les Scythes et leurs descendants, sacrifiaient comme
victimes les animaux pris à la chasse ou choisis dans leurs troupeaux.
A chaque divinité on sacrifiait de préférence les animaux
qui lui étaient plus spécialement consacrés. Ainsi au Dieu du soleil
on sacrifiait, dans les Grandes fêtes, des chevaux blancs. Voilà
pourquoi, à Athènes aussi, on sacrifiait annuellement un cheval
blanc à Y Archer scythe nommé le Préservateur (gr. Alkôn) ou YHôle-
Médecin (c’est-à-dire au Dieu du soleil Targilavus ou Skalmoskis),
devant la stèle qui lui était consacrée (v. p. 186). Les sacrifices de
chevaux usités également dans l’Inde (sansc. açva-mêdhâs) furent
aussi en usage chez les descendants des Scythes, les Gèles, les
Slaves et les Scandinaves (norr. hrossa-slâlr). Chez les Gètes, cette
sorte de sacrifice était réservée pour les grandes occasions, et
c’est devant la victime immolée qu’on faisait les voeux publics les
plus solennels. C’est ainsi, par exemple, que, dans la guerre avec