
que les traits individuels de leur religion, de leurs moeurs et de
leur idiome. Mais tandis que les Scythes, établis en Asie, n’ont joué
en histoire qu’un rôle passager et insignifiant pour nous, les fractions
de ce peuple, qui ont passé en Europe, ont développé dans
cette partie du monde les qualités essentielles et le génie propre à
leur ra c e , et y ont donné naissance à des nations qui comptent
parmi les plus remarquables dans l’histoire du monde. Tandis que
les peuplades scythes, qui ont formé la branche s a k e et la branche
p a r ih e , après avoir quitté leur berceau primitif, se sont dirigées
les unes vers le Sud-Est, les autres vers lé Sud-Ouest, il y avait
d’autres peuplades de la même race qui passèrent d’Asie en Europe,
à des époques qu’on ne peut plus préciser, mais qui certainement
sont antérieures au septième siecle avant notre ere. Ces peuplades
se sont répandues, les unes, dans les plaines de la Russie actuelle,
les au tres, sur les bords septentrionaux de la mer Noire.
Les premières ont formé ce que nous appelons la b r a n c h e s u rm a te
des Scythes o c c i d e n ta u x , dont nous traiterons spécialement dans
un ouvrage à part; les secondes ont formé la b r a n c h e g è l e , dont
nous aurons à nous occuper ici plus particulièrement.
B. L e s S c y th e s o c c id e n ta u x .
§ 1 8 . lies Scythes passent en Europe. — L’Histoire n ’a
pas gardé le souvenir des nombreuses migrations des S c ijth e s qui
ont passé d’Asie en E u ro p e , antérieurement au septième siècle
avant notre è re , mais elle fait mention de la migration qui eut lieu
au milieu de ce siècle et qui fut peut-être la derniere et la plus
grande de toutes. Elle ne s’est pas opérée d’une manière paisible
(voy. p. 66), mais elle a eu le caractère hostile d’une véritable irruption.
En effet, des tribus scythes établies au nord de la mer
Caspienné et dont quelques-unes étaient soumises aux Medes,
furent poussées vers l’ouest par les I s s é d o n e s , peuple nomade d o-
rigine ta ta r e . Ces tribus scythes, parmi lesquelles il y avait certainement
des G è le s , des D a v e s et des D e r v in k e s , passèrent le Tanaïs
et allèrent s’établir sur les bords septentrionaux de la mer Noire,
d’où elles expulsèrent les K im m é r ie s qui'étaient de race k a m a r e - 1
Voy. Les Peuples primitifs, etc., p. 37.
et qui avaient occupé ce littoral au moins depuis le dixième siècle
avant notre ère. Une fois en mouvement, quelques-unes de ces
tribus scythes, laissant leurs frères s’établir sur la mer Noire,
poursuivirent les K im m é r i e s fuyant à travers le Caucase, et ainsi
entrèrent dans la partie nord-est de l’Asie mineure. Là, après
avoir vaincu leurs anciens dominateurs les M è d e s et entraîné avec
elles des tribus mèdes et chaldes, elles pénétrèrent vers 620 avant
j Jésus-Christ, et sous la conduite de M a d u a s 1, fils de P r o to tu a s , d’a-
: bord dans la Mésopotamie et la Babylonie, puis dans la Syrie, la
Palestine et jusqu’en Égypte. Ces Scythes, presque partout vainqueurs,
maintinrent leur domination sur une partie de l’Asie occidentale
pendant vingt-huit ans, de 624. à 594. C’est par suite de
[ cette invasion et de celte domination des Scythes venus du Cau-
I case et de la mer Noire, que les lô n e s ou Grecs asiatiques sont
I entrés pour la première fois en rapport avec ce peuple et ont ap-
I pris à le connaître. Les Babyloniens et d’après eux les Hébreux
I donnaient à ces Scythes le nom de M â -G ô g et de Go#2. C’est aussi
I sans doute pendant la durée de cette domination scythe que des
| tribus d a v e s se sont établies en Samarie, et qu’une autre tribu soeur
est allée occuper en Palestine la ville de B e th -S é a n que, depuis, les
Grecs asiatiques ont appelée S k u th o p o lis (voy. p. 26).
a) La Branche Skolote des Scythes d’Europe.
§ 19. E e s S k s s te s e t l e s S k o lo t e s . — Les peuples auxquels
I les Babyloniens donnaient le nom de M â -G ô g , se donnaient à eux-
! mêmes, devant les Grecs asiatiques, le nom de S k u ta i . Si ce nom,
I qui dans leur langue signifiait B o u c lie r s 3, a été dès l’origine un
I nom commun à tous les Scythes occidentaux, il n’a pu être qu’un
■ nom h o n o r if iq u e et a dû avoir la signification m é ta p h o r iq u e de
1 D é fen seu rs et de P r o t e c t e u r s par excellence. Si, au contraire, S k u -
I hû a d’abord été le .nom d’une tribu avant d’avoir été celui de,
1 Ce nom n’a sans doute rien de commun avec celui de Matoas qui signifiait
■ Incessant (gr. asinès) et qui était l’ancien nom du Danube. Maduas semble être
■ la transcription grecque d’un mot scythe matava-s (ivre), jlérivé de matu (hy-
■ dromel; cf. sansc. madhu, lith. medus). Prototuas {p. Prototavas) semble signifier
Fils du Prudent (cf. norr. frôduthr, doué de prudence). - .
2Voy. Les Scythes, p. 10.
3 Cf. lith. skyda, bouclier; vieux slav. schichyt.