
Si nous n ’admettons pas de cataclysme ou de formation
convulsive et subite, et si nous reconnaissons que ces
bancs sont le p ro d u it d’une eau calme et de sédiments
successifs, cette absence de débris organiques dans les
couches su périeures, se ra it plus difficile à expliquer.
Pourquoi ces eaux tran q u illes n’auraient-elles laissé aucun
mollusque, aucune plante p ro p re à p ro d u ire la
to u rb e, et comment concevoir que, d u ra n t ta n t de siècles,
n u i ê tre v iv an t n’y a it été en tra în é , c a r les couches
limoneuses, argileuses, ni celles de marn e et de silex
b risé s, n ’en offrent pas la moindre trace.
Ici la conclusion la plus plausible est que, pendant un
temps indéfini, la te rre des Gaules, p a r l’effet des glaces
e t des neiges qui la couvrait, et du froid excessif qui s’en
su iv ait, a été complètement im p ro p re à la vie: qu ’aucun
végétal n’y a crû, qu ’aucun animal n ’y a vécu. Lorsqu’au
dégel final les to rren ts la balayèrent, ils ne pouvaient
donc ren co n tre r de résidus organiques su r une surface
depuis si longtemps stérile et qui, av an t cette époque de
s té rilité , av ait déjà été labouré p a r un ou plusieurs
déluges. Les couches argileuses, limoneuses, crayeuses,
postérieures à la période g laciale, couches dont les
plus tourmentées sont le résu lta t de la débâcle neigeuse,
et les au tres de la fonte plus lente des glaces, ne devaient
donc offrir que des matières in ertes, v a rian t selon la
n a tu re des te rra in s que les eaux p arco u raien t, mais toutourbe
bocageuse, composée d’arbres et de plantes terrestres, il
en était une autre formée de plantes ne vivant que dans l’eau. Il
doit exister aussi une tourbe sous-marine, résultat des détritus
des premiers végétaux marins. Les êtres dont on trouverait les
débris dans ces tourbières primordiales, son t, sans contredit, les
aînés de la création.
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jours dépourvues de d étritu s végétaux et animaux, sauf
peut-être quelques ra re s coquilles marines, a p p a rte n a n t
à l’époque secondaire, restes des fragments de craie roulée
et brisée.
C’est donc av an t cette période de glace que vivaient
les animaux et les hommes dont nous retro u v o n s les
traces dans les bancs de diluvium les plus profonds ou
d’une formation an térieu re à celle des glaciers. Ces
hommes et ces animaux peuplaient n o tre pays d u ra n t
cette époque d’une tem p ératu re moyenne qui, p a r un r e froidissement
probablement trè s-le n t, a remplacé celle
où croissaient dans les Gaules le palmier et toutes les
plantes de la zone to rrid e . C’est ce refroidissement qui,
de siècle en siècle, est a rriv é ju sq u ’à la neige continue
et à ce degré de froid qui ren d it toute végétation im possible,
que nous avons nommé : p é r i o d e g la c i a l e .
Cette longue sté rilité des Gaules qui a pu s’étendre su r
l’Europe en tière, et même su r une grande p a rtie du globe
terrestre, y dépeuplant aussi les lacs, les riv ière s et les
mers devenus un immense glaçon, explique cette absence
de débris animaux dans ces couches qui en recouvrent
d’autres où ils abondent, et tend à pro u v er cette a lte rnative
de vie et de mort, de population et de solitude
qui p a ra ît avoir été et devoir être encore le so rt de chaque
face de notre planète. A une période to rrid e a succédé
un climat modéré, amenant, p a r un refroidissement lent,
la période glaciale, qui, elle-même, nous a p ro g re ssiv e ment
ramenés à la tem p é ra tu re moyenne, laquelle nous
conduira de nouveau, ap rès une succession de siècles, à
la chaleur tropicale (1).
(1) C’est aux astronomes à décider si notre système solaire est