
vase sacré, et comme tel, c’était un objet dont on faisait convenablement
un présent honorifique aux dieux ou aux princes. De même
que les Grecs plaçaient, comme anathèmes, dans les temples , de
grands trépieds, qui, originairement, n’étaient que des chaudrons
de sacrifice placés sur leur trépied (v. Chants de Soi, p. 181), de
même le roi scythe Ariantas fit ériger dans un carrefour, ou comme
disaient les Scythes, dans une rencontre de chemins (scyth. vek-
saman; norr. veg-saman), un grand chaudron d’airain, qu’il avait
fait faire avec le métal provenant de la fonte des pointes de flèches
de ses sujets. Ce carrefour était consacré au Dieu du soleil Vaitu-
skurus (v. p. 180) ou Targitavus (v. p. 181), comme l’ont été plus
tard, chez leurs descendants les Germains, certains carrefours
consacrés au Dieu du soleil Irmin (v. p. 193). C’est aussi comme
instrument de divination que ce chaudron était consacré au Dieu
du soleil, qui, ainsi qu’Apollon chez les Grecs, présidait à la divination
(v. p. 195); et il avait été fait avec le métal provenant de
pointes de flèches, parce que la flèche était le symbole des rayons
du soleil, et par suite le symbole du Dieu du soleil lui-même (v.
p. 184). Ce chaudron étant sacré, rendit aussi sacré (scyth. paihus,
vaihus;,goth. veihs) tout ce qui l’entourait; et c’est pourquoi la
place du carrefour, ainsi que la source qui s'y trouvait, étaient
nommées, l’une et l’autre, la Sacrée du Carrefour (scyth. Vek-sa-
man-paihus; Hérod. Hek-sam-païos).
La divination par les flèches ou la bélomancie se pratiquait au
moyen de baguettes (norr. .stafir) ou flèches faites de lamariske, de
coudrier ou de hêtre, ces espèces d’arbres étant particulièrement
consacrées au Dieu du soleil présidant à la divination. D’après les
caractères runiques (v. p. 144), dont ces baguettes ou flèches jetées
sur le sol retraçaient fortuitement la figure, on conjecturait ou on
lisait (cf. lat. sorti-legus) l’avenir, et l’on donnait la réponse en conséquence.
Quand, chez les Scythes, le roi tomba malade, parce que, comme
on le supposait, quelqu’un de ses sujets avait fait un faux serment
(v. p. 228), on faisait venir, selon l’usage, trois devins qui devaient
faire connaître, par la bélomancie, l’homme dont le parjure
avait attiré au prince sa maladie. Si l’indication, faite par ces trois
premiers devins, fut encore confirmée par la déclaration de trois
autres, appelés en second lieu, l’individu ainsi dénoncé par eux
comme parjure, fut mis à mort, c’est-à-dire qu il fut consacré (v.
p. 289) et sacrifié à la déesse Tavili, la vengeresse de la justice publique
(v. p. 282), et les devins se partageaient entre eux la fortune
du coupable. Mais si la dénonciation, faite par les premiers
devins, fut déclarée fausse par les trois autres, ceux-là furent consacrés
ou sacrifiés, avec toute leur descendance mâle, au Dieu du
soleil, dont ils avaient été les faux interprètes, et à la déesse Tavili,
dont ils avaient violé la justice; ils furent brûlés sur un char
attelé de boeufs et chargé de fagots, auxquels on avait mis le feu
{Hérodote, IV, 69). D’après un mythe Scandinave, les Ases percèrent
de lances (norr. geirum studdu) la Devineresse ou la Louve
(slave Volchova; norr. Vôlva) des Vanes (Slaves), et la brûlèrent trois
fois, parce qu’ils croyaient qu’elle en avait menti trois fois (v.
Poèmes islandais , p. 192).
Les Scythes paraissent aussi avoir tiré des pronostics du hennissement
des chevaux consacrés, qui paissaient dans les pâturages du
Dieu du soleil (v. p. 179). Peut-être n’a-t-on pas entièrement tort
de rapporter à ce vif intérêt religieux que prenaient les Scythes
à ces hennissements significatifs et prophétiques, le mot que rapporte
Plutarque (Plutarch., Apophthegm., t. VI, p. 666) du roi
scythe Aléas, qui, ayant entendu le célèbre joueur de flûte Ismé-
nias, pour lors son prisonnier, jouer de cet instrument, assura
qu’il éprouvait un bien plus grand plaisir à entendre le hennissement
(prophétique?) de son cheval (cf. p. 126).
b. La Divination chez les peuples de la branche gète.
g 192 l e s In s p ir é s ascètes. — Chez les Gèles se rencontre
non-seulement la Divination, comme chez les Scythes,
mais encore la Prophétie et Y Inspiration. Il y avait, chez eux, des
hommes qui, à ce qu’ils prétendaient, vivaient en commerce intime
avec la Divinité, et se faisaient passer pour Prophètes et Inspirés.
Cette classe d’hommes ne s’était pas formée spontanément
chez les Gètes, mais elle était née sous l’influence qu’exerçaient sur
ce peuple les Thrâkes et les Keltes, dont la religion était à la fois
sacerdotale, mystique et ascétique. L’Ascétisme, qui est originaire
de l’Inde (v. Les Chants de Sôl, p. 141), s’était répandue, dès je
septième siècle avant notre ère, parmi les peuples kimméries et