
CINQUIÈME PA R T IE ,
prédilection pour les nombres trois et cinq, qui l’un et l’autre
étaient pour eux les nombres par excellence. C’est ainsi que, d’après
la tradition, le dieu Targilavus avait trois fils, Hleipo-skdis,
Arpo-skaïs et Kola-skaïs. Selon Anacharsis la vigne portait trois espèces
de raisins : le raisin de l’ivresse, le raisin de la volupté et le
raisin du repentir. Les rois des Scythes envoyèrent à Darius des
présents consistant en trois animaux et cinq flèches. Mnésippe,
discutant avec le scylhe Toxaris (Skotaris) sur l’amitié, se contente
de cinq exemples (v. Lucien, Toxaris). Selon la tradition, le roi
SMlourus«avait cinq fois dix fils, et l’on choisissait cinquante des
principaux serviteurs du roi pour les sacrifier sur sa tombe (v.
p. 282). Les Fêtes scythes à Babylone duraient cinq jours (v. p. 280).
Le Zoganès ou la victime consacrée dans ces fêtes était mis à mort
le cinquième jour. Les G êtes, continuant l’habitude de leurs pères
les Scythes, avaient également une prédilection marquée pour le
nombre cinq. Aussi Ménandre le Comique, dit-il dans son Misogyne,
pour ridiculiser cet usage.:
« En un seul jour nous faisions cinq sacrifices.
éCinq esclaves dansant en choeur frappaient les cymbales, etc. »
Tous les cinq ans les Gèles célébraient les grandes Fêtes qui
avaient de l’analogie avec les Sakéennes ou Fêtes scythes. C’est à
ces fêles qu’eurent lieu, comme chez les Scythes, non-seulement
des consécrations, mais aussi de grands sacrifices accompagnés de
voeux publics, (ci. Les sacrifices de chevaux, p. 277).
§ 185. lies Consécrations; les Funérailles ; la SSe-
naissanee. — Chez les Gèles, les Consécrations étaient usitées et
pratiquées de la même manière que chez les Scythes. Les guerriers,
dans des moments critiques, se suicidaient, c’est-à-dire se consacraient
eux-mêmes à leurs divinités. De même que, chez les Scythes,
Spargavisis, le fils de Tornyris, se consacra au Dieu du soleil, son
Aïeul, pour échapper à l’esclavage qui l’attendait après sa défaite
(v. p. 281^, de même nous voyons, chez les Gèles, les chefs Ifapugs
et Tarsa se donner la mort ou se consacrer à leurs dieux avec un
grand nombre de leurs compagnons (Tacit., Annal., 4, 50). Aux
grandes Fêles, célébrées tous les cinq ans, les Gèles consacraient
un homme qui était censé être envoyé comme messager dans l’autre
monde pour transmettre à Skalmoskis (v. p. 191) les voeux de la
nation. Les peuples de la branche gète, chez lesquels le culte du
Dieu du soleil prédominait sur le culte de toute autre divinité,
préféraient consacrer les morts au Dieu du soleil plutôt qu à la
Déesse de la terre; et c’est pourquoi sur l’ancien usage de les enterrer
prévalut peu à peu celui de les brûler. Les Golhs brûlaient
les morts sur des chars, comme anciennement les Scythes avaient
brûlé les divins consacrés au dieu Soleil (v. § 19-1), ou comme,
plus tard, les Scandinaves brûlaient les corps des rois de mer sur
des navires qu’on abondonnait aux flots de l’océan. Les Gètes conservèrent
aussi généralement l’usage, déjà suivi par les Scythes, de
consacrer la femme du défunt, en la brûlant avec le cadavre de son
époux (Mêla, II, c. 2 ; Stephan. de Byz., s. v., Gelia).
Les Scythes croyaient, comme la plupart des peuples de 1 Antiquité,
que les défunts continueraient à vivre d’une existence à peu
près semblable à celle qu’ils venaient de quitter, et que, pour cette
raison, il fallait les pourvoir, dans leur tombe, de toutes les choses
qui leur avaient été nécessaires ou agréables dans ce monde. Les
Gèles partageaient celte croyance de leurs pères les Scythes. Mais
étant entrés en rapport avec les Thrâkes et les Keltes, les Gèles apprirent
de ces peuples la doctrine druidique de la métempsychose
ou mélasomatose, et c’est pourquoi quelque divin ou prêtre de
Skalmoskis &e prit à enseigner, au nom de ce dieu, que non-seulement
les défunts continuaient à vivre dans l’autre monde, mais que
leurs âmes, revêtues d'un nouveau corps, reviendraient dans cette
vie, et que, moyennant certaines incantations (norr. galdrur), on
pouvait faire revivre, ou, comme disaient les Grecs, rendre immortels
(athanatizeïn) les trépassés. Comme les Gètes ne voulaient pas
ajouter foi à cette nouvelle doctrine, le divin de Skalmoskis (que la
tradition évhémériste a confondu avec ce dieu même), s’avisa d’un
moyen singulier pour prouver à ses compatriotes le retour des défunts
dans cette vie. Il se creusa secrètement une loge souterraine
communiquant avec la fosse du tombeau qu’il s’était fait préparer.
Puis, s’étant fait passer pour mort et ensevelir dans la fosse, il s’établit
dans la loge et s’y tint caché aux regards des hommes pendant
trois ans. Enfin il se montra à ses compatriotes étonnés, leur
prouvant ainsi ostensiblement qu’après son décès il a non-seulement
continué à vivre, mais qu’il a pu revenir dans cette vie. Prévoyant
cependant qu’il ne pourrait pas toujours leur donner celte
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