
On eflaya de foutenir les allions en réglant,
pour l’année 172.0 , un dividende de quarante
pour cent, fur trois cents millions ; ce qui ne
faifoit pas deux pour cen t, fur le pied où circu-
loient les fix cents mille aclions. Le public jugea
impoffible cette répartition ; il en prit de la défiance
, 8c l’ardeur de réalifer ne s’amordflToit
point. Les marchands, de leur côté , s’obflinoient
à exiger le double 8c le triple de leurs marchan-
difes , lorfqu’ on les payoit en billets. Plulîeurs
faifoient convertir leurs billets en efpeces à la
banque, en faifant demander le paiement pat petites
fommes , 8c par diverfes perfonnes.
Les moyens odieux dont on fit ufage pour fou-
tenir encore la circulation des billets , foit en défendant
tout tranfport d’efpeces d’or 8c d’argent
hors de Paris, 8c des villes où il fe fabrique des
monnoies., foit en ordonnant que les billets de
banque auroient cours dans tout le royaume, foit
enfin en permettant des vifites dans les maifons ,
pour s’aflùrer s’il ne s’y trouvoit pas des vieilles
efpeces , dont la garde étoit défendue, 8c dont la
faifie étoit adjugée en entier aux dénonciateurs,
ne firent qu’aig r ir 'le mal. Cette violence, faite à
la propriété 8c à la confiance, intimida quelques
perfonnes ; mais fon effet général fut d’ effrayer les
efprits- 8c d’aliéner les coeurs.
U n nouvel arrêt * du 30 janvier 172,0, faifoit
remife des quatre fols pour livre ajoutés aux droits
des fermes, à ceux qui les acquiteroient en billets,
8c ordonnoit de les exiger de ceux qui paieroient
en efpeces ; c’étoit vingt-cinq pour cent d’avantage
en faveur de billets , à caufe des cinq pour
cent de prime qu’ils emportoient. Ces billets n’en
aquirent pas plus de confiance.. Elle n’ eft pas de
nature à être forcée par des réglemens. Tout crédit
eft fondé fur l’opinion. I l devient n u l, fi on
tente de la contraindre.
Bientôt les matières fe trouvèrent manquer à
Fempreflement des réalifeurs. A tout prix ils échan-
geoient leurs billets contre des perles , des' diamans
8c de l’argenterie , malgré la défenfe d’ en porter ,
qui furvint alors. Les joualliers envoyèrent leurs
billets en province, pour les faire payer aux caiffes
qui y étoient établies. Les orfèvres, qui a voient
vendu leurs ouvrages à des prix exceflifs, achetèrent,
avec leurs billets, aux hôtels des monnoies,
des matières qu’on ne pouvoir leur refufer, 8c les
gardèrent jufqu’à ce que les affaires euffent pris
de la Habilité.
Dans une fituation auffi embarraflante , on
eflaya' d’employer la Voie de la perfuafion , par
de fages difpofitions cdnfignées dans l’ arrêt du
23 février. Elles venoient trop tard. L a défiance
alloit toujours croiffant. Les billets de banque
étoient trop répandus, 8c en trop grand nombre ,
pour que le public pût les préférer à l’argent, dont
la nature eft inaltérable. L a défenfe de garder plus
de cinq cents livres chez fo i, tant eoefpeces qu’en
matières d’or ou d’argent ; celle dé fabriquer Sc
de vendre de la vaiffelle, faites l’une 8c l ’autre p
le 27 février , annonçaient l’extrême embarras
de l ’adminiilrateur des finances.
L ’arrêt du y mars fuivant, acheva de répandre
une alarme générale, par diverfes difpofitions qui
attaquoient encore la propriété 8c la liber té, 8c
qui excitoient la méfiance , en encourageant les
dénonciations. Enfin, un autre arrêt du 21 mai
ordonna la réduction des billets de banque à moitié
de leur valeur, avec la claufe cependant qu’ils
feroient reçus pour leur valeur entière, au paiement
des impolitions , jufqu’au premier janvier
17 2 1 ,8 c en acquifitions de rentes viagères.
Malgré cette double faveur attachée de nouveau
aux billets de banque, le bouleverfemen t fut terrible^
8c dans la capitale , 8c dans les provinces. Chacun
s’écria que la foi publique étoit v io lé e , 8c s’imagina
perdre la moitié de fon bien, fans être affuré
de conferver l’autre.
Cependant, fur les remontrances du parlement ,
l’arrêt du 21 mai fut révoqué par celui du 27.
Ce qui avoit été préfenté comme un remede,
porta le mal à un excès incurable ; lès billets de
banque perdirent bientôt moitié, 8c enfuite tombèrent
au dixième de leur valeur. Expérience fu-
nelte 8c trop commune, dit l’auteur des Recherches
fur les finances , qui prouve que la fcience des
loix , n’eft pas fouvent unie à îa fcience de l’ad-
miniftration.
Jufqu’au mois d’oéiobre .fuivant, on tenta toute
forte d’expédiens pour ramener la confiance àt
l ’égard des billets de banque ; , mais elle étoit
éteinte , 8c l’arrêt du 27 mai avoit détruit tout
efpoir ; car il en étoit réfulré une baiffé bien plus;
confidérable que celle qui avoit été réglée le 21 .
Celle - ci eût pu être maintenue à ce taux,
en brûlant une quantité de billets propre à n’en
laiffer qu’en proportion de la quantité du numéraire
, qu’on pouvoir augmenter de moitié, pour
un tems , en portant le marc d’argent à cent vingt
livres , au lieu de foixante , où. il fut fixé. C e
moyen , fans doute, étoit violent 8c deftruéiif du
commerce étranger ; mais ne valoit-il pas mieux
fâcrifier une partie , que de perdre le tout, par
le renverfement des fortunes , 8c par une convul-
fion dont l’état devoiPencore , ïong-tems après,
reffentir les fuites..
On v i r , par l’arrêt du y oélobre , qu’il avoir
été fabriqué pour plus de trois milliards de billets ,
puifqu’il en reftoit dans le commerce pour un
milliard cent foixante-neuf millions foixante-douze
mille liv ré s , quoiqu’il en eût été brûlé 8c remis1
dans les’ caiffes royales pour un milliard huit cents
trente-fept millions trois cents vingt-fept mille
quatre cents foixante livres.
il fut ordonné qu’à compter du premier novembre
, les billets de banque ne pourroient être
donnés-, ni reçus en paiement , pour aucune?
B I L b 1 t
-Gaule, que de gré à gré ; 8c que du jour de
la publication de l’arrêt, ils ne pourroient être
admis en paiement dans les bureaux de recettes
; que paffé le 30 novembre , ce qui relier oit
de billets de banque, ne pourroit plus être conv
erti qu’en actions rentieres, ou en dixième d’actions.
Mais le 24 du même mois , la compagnie
des Indes offrit au roi un don gratuit de vingt
millions , en quatre paiemens , à condition qu’ on
recevroit aux hôtels des monnoies , des efpeces
dans billets de banque , 8c fur un pied qui lui
affuroit un bénéfice de quatorze pour cent.
Telle fut la malheureufe fin de ce déplorable
fyftême de crédit de finance , dont les partifans
attribuèrent le mauvais fuccès à la légéreté 8c à
la précipitation. Ce fut un mal fur-tout, que de
voir l ’autorité fe compromettre, pour effayer de
foutenir ce fyftême , parce que c’étoit fe jouer
du bonheur public ; car la confiance repofant fur
l ’opinion qu’on a des maximes du gouvernement
8c du caraélere des adminiftratcurs , ils doivent.,
de leur côté , à peine de fe rendre coupables du
malheur général , plier leurs combinaifons, 8c accommoder
leurs réglemens à îa nature morale de
la nation qu’ils gouvernent.
Les billets des fermes, dont il nous refte à parle
r , font de la même nature que ceux qui fe
renouvellent chaque année auprès des tréforîers
ou . des receveurs-généraux , 8c fervent aux mêmes
ufages.
En 1770, après fept années de p a ix , les dé-
penfes excédant toujours de beaucoup les revenus,
8c fe multipliant fans, celle, le crédit fe trouvoit
épuifé. Il ne fourniffoit pas de quoi faire le fervice
ordinaire des départemens ; ou il falloit recourir à
des expédiens ruineux. Cette fituation embarraf-
fante détermina à fe fervir d’un moyen funefte
*iu crédit public. Ce fut de fufpendre , par un
arrêt du 18 février , le rembourfement des ref-
criptions 8c des billets des fermes, à compter du
premier mars fuivant , en ordonnant néanmoins
le paiement des intérêts On fe récria fur cette
violation de la bonne-foi 8c de la propriété ; mais
il fallut bien céder à la néceflïté.
Il exiftoit pour environ foixante millions de
Ces billets ; un arrêt du 13 novembre ordonna qu’ils
feroient rembourfés par voie de loterie, à commencer
du premier février 1771 , à raifon de
trois millions fix cents mille livres par année ,
jufqu’à leur extinction , dont l’adjudicataire des
fermes fut chargé.
Cette loterie eut en effet lieu jufqu’ en 1782 ,
& de voit ne finir qu’en I78 y; mais les fermiers-
généraux , délirant donner une preuve de leur
zèle pour le fervice de l’état , comme le porte
le préambule de l*arrêt du 7 décembre 178a ,
offrirent d’éteindre tous ces billets, fans y procéder
par voie de loterie, 8c dans le cours d’une
&ule année, à mefure qu’expireroit le terme de
1 1 ;
chacun de ces effets, ou de la reconnoiffance délivrée
pour les .remplacer. Ces propofitions font
conlignécs dans l’arrêt qu’on vient de rappeller ,
8c qui en confirme l’exécution.
Pollérieurement à 1771 , il a été fait de nouveaux
billets des fermes, dont la négociation, au
pair de leur valeur , annonce qu’ils ont entièrement
regagné la confiance publique.,
B IL L E T SOMMAIRE, nom que l’ on donne,
en Normandie , à un aéle par lequel les commis
aux aides déclarent aux perfonnes qu’ils ont fur-
pris en fraude , qu’ils vont dreflèr leur procès-
verbal de cette fraude, dont la nature ÔC l ’efpecc
font exprimées fommairement.
Le billet fommaire n’eft d’ufagé que dans le
reffort de la cour des aides de Rouen , qui l’a
autorifé par arrêt du 12 juin 1708. Ce réglement
difpenfe les commis de repréfenter l’ original des
billets fommaires ; mais le procès-verbal dreffé à
la fuite doit l’être dans le même jour que le billet
fommaire, 8c faire mention qu’i l a été délivré aux
parties faifîes.
B IL L E T IE R , f. m. C ’eft le nom que Foft
donne, à Bordeaux , aux gardes fédentaires attachés
aux portes de la ville. Ils font au nombre de
trente-huit , diftribués aux ’quinze portes de la
v i lle , 8c commandés par deux lieutenans , fous
l’infpeélion du capitaine général.
Les fonctions de ces billetiers font d’être afiïdus
à leurs p oft e s , pour obfer ver tout ce qui entre
8c fo r t , d’examiner fi chaque partie de marchan-
dife eft accompagnée d’une billette -, d’un permis
ou acquit de bureau, 8c à défaut , d’en déclarer
la faifie ; de vifîter les malles 8c valifes des voyageurs
, 8c d’ enrégiftrer toutes les billettes ou acquits
de paiement , 8c à caution , qui leur font
préfentés , tant à l’entrée qu’à la fortie. A cet
effet , ils font obligés de tenir deux regiftres ,
l’un pour les marchandifes qui entrent, 8c l’autre
pour celles qui fortent.
A quelques-unes des portes de la v ille , un de
ces billetiers eft chargé de recevoir les droits dûs }
fur les fels qui fortent en ceuillerées ou demi-
ceuillerées , mefure équivalente à un boiffeau ou
demi-boiffeau. Tous les famedis , ces billetiers
portent le montant de leur recette , au receveur
de la porte de Bourgogne , qui , de fon côté ,
compte au receveur de la douanne de fortie*
B IL L E T S OU PASSE-DE-BOUT , f. m. C e
font des efpeces de paffe-ports que l’on prend
aux portes ou aux barrières d’une v ille , à l’entrée,
pour être repréfentés à la porte par laquelle on
fo r t , dans le cas ou la marchandife que l’on cou*
d u it, a une deftination ultérieure.
Voyei Passe-a v a n t , Passe- de - bout *
P i i