
y> s’accoutume à confondre ces deux idées, &
force quelquefois l ’adminiftration la plus éclairée
» à s’écarter des bons principes , ou à opérer le
» falut public avec un air de dureté. »
On attendcit un fecours fi prompt de l’impoli-
tion du dixième, que dès le x décembre 1 7 10 ,
une déclaration ouvrit un emprunt de trois millions
, dont le rembourfement fut affïgné fur les
deniers qui proviendroient de la levée du dixième.
Elle portoit que ceux qui prêteroient cent mille
liv r e s , feroient réputés nobles; qu'à cet. effet il
leur feroit expédié des lettres de noblefle. Mais
cette noblefle acquife à prix d’argent, ne fut pas
de longue durée , d’autant que les prêteurs étoient
bien dédommagés des intérêts de leur argent par
le denier dix qu’on leur accordoit.
Le clergé obtint, au mois d’oélofere 17 11 , une
déclaration du roi , qui exempta les biçns ecclé-
fiaitiques du dixième à perpétuité , au moyen d’une
ibmme de huit millions qu’il donna pour les be-
foins de l ’Etat.
L e dixième reçut d’abord des modifications en
17 16 ; on accorda des remifes confidérâbles fur
cet impôt ôc fur la capitation. L ’année fuivante
i l fut entièrement fupprimé. On ne peut fe dif-
penfer de rapporter un précis du préambule de
l ’édit qui ordonna cette fuppreffion ; c’ efl: un monument
précieux de la tendre affeétion du fou-
verain pour fes peuples , ôc un modèle pour de
Semblables circonfiances.
« Quoique le foulagement de nos peuples épui-
y9 fés par les efforts que notre royaume a été .
» obligé dé faire pour foutenir, prefque fans in-
s» terruprion, deux longues & fanglantes guerres,
» ait été le premier objet de nos voe u x , dès le
» commencement de notre régné, nous n’avons.
pu y parvenir auffi promptement que nous l’au-
3? rions defîré , foit à caufe de la multitude ÔC de
» la diverfîté des engagemens que la néceffité des
jyi tems avoit fait contrarier, foit par la difficulté
ï» de connoître à fond la véritable fîtuation de
ot> nos revenus , ôc de fixer la maflè des dettes de
y» toute nature dont notre royaume étoit chargé,
s» foit enfin par la confufion qui fe trouvoit dans
» les differentes parties de nos finances & de nos
revenus qui étoient prefque tous confommés
a> par des afïïgnations anticipées , fuites inévita-
35 blés du malheur des tems , qui ne permettoit pas
3> de penfer à établir un meilleur ordre , pendant
y> qu’on étoit uniquement occupé à chercher les
y> moyens de foutenir la guerre, ôc de procurer
3> à cè royaume une paix avantageufe.
» Nous n’avons pas laifTé cepéndant de pour-
35 voir aux befoins les plus preffans , d’accorder
33 des remifes, des diminutions ou des compen-
33 fa fions à toutes nos provinces , de jeter les
» fondemens de la libération de l’Etat par des
39 fuppreflions de charges onéreüfes ou inutiles ,
» ôc par des liquidations de dettes qui pouvoient
» feules nous faire connoître la grandeur du mal 53 ôc Ja nature des remedes convenables.
53 L e retranchement de plus de quarante mil-
53 lions par an fur l’état de nos dépenfes, l’aug-
33 mentation de plufieurs de nos fermes particu-
33 lieres , ôc la diminution des changes , l’ordre 3» Ôc l ’arrangement que nous avons commencé d’é-
33 tablir dans nos recettes ôc dans nos fermes ;
33 enfin les paiemens effectifs qui ont été faits en
33 argent comptant , foit en notre tréfor-royal 3> ou à l’hôtel de notre bonne v ille de Paris, ÔC
33 qui ont monté à plus de deux cents quarante
33 millions en moins de deux années, ont été les
33 premiers fruits de nos foins ôc de l’adminiftra-
33 tion que nous avons établie.
33 Nous avons même été plus loin encore, ÔC
33 ne confultant que notre affeéiion pour nos peu-
33 pies , fans attendre l ’arrangement entier de-
33 nos finances , nous leur avons déjà accordé un
33 foulagement confîdérable par la remife des
33 quatre fols pour livre fur les droits de nos
33 fermes, ôc par la fuppreffion ou la réduction
33 de pliifïeurs autres droits également onéreux;
*33 mais nous n’avons regardé tout ce que nous
33 avons fait jufqu’à préfent, à l ’avantage de nos
33 fujetS, que comme une fimplc préparation pour
33 nous mettre en état de leur procurer de plus
33 grands biens , ôc de former un plan général *
33 pour l’adminiffration de nos finances , qui pût
33 en aflurer l ’ordre , en fimplifier la régie , pré -
33 venir le divertiflement des fonds , faire cëfler
33 les caufes de l’obftrudion du commerce ; ôc par
33 une plus grande confommation, augmenter nos
33 revenus fans augmenter les impofitions, Ôc en
33 foulageant même nos fujets de toutes celles qui
33 ne font pas abfolument néceffaires pour a c -
33 quitter les dettes de l’Etat.
33 C ’efl: dans cette vue qu’après nous être fait
» rendre un compte exaét, dans notre confeil,
33 de la fîtuation où étoient nos finances au I er-
33 feptembre de l’année 17 i y , des opérations qui
33 ont été faites fur toutes les parties qui y ont
33 rapport, ôc de tout ce qui compofe les revenus ,
33 les charges ôc les dépenfes de notre royaume;
33 nous avt)ns fait auffi examiner avec la même
33 attention tous les moyens que l’on pouvoit
» prendre pour parvenir à la fin que nous nous
3» étions propofée ; Ôc après la difeuffion qui en
33 a été faite , nous avons cru ne devoir pas
33 différer plus long-tems d’accomplir une partie
33 de nos voeux , en fouïageant nos fujets d’une
» des deux impofitions extraordinaires, dont ils
33 font chargés , par la remife du dixième du re-
jj venu des fonds de terre, ôc des autres immeu-
» blés qui étoient fujets à cette impofîtion.
33 L e fonds que l’Etat en a retiré depuis 1710 3
33 fera remplacé , pour la plus grande partie, par
33 le retranchement de nos dépendes, dont il n’y
» a aucun article que nous n’ayions réduit' en
B 1 x D 1 x
6 commençant, par ce qui regarde notre per-
» fonne , ôcc. &C. »
L a guerre qui fut déclarée au mois d’o&obre
ÎÏ735, donna lieu au rétablifleraent du dixième,
par la déclaration du 17 novembre fuivant ; ôc
l ’arrêt d’enregiftrement fixa le commencement de
cette impofîtion au 1er. janvier 1734* ne
dura que jufqu’au Ier. janvier 1737> qu’elle fut
de nouveau fupprimée.
Comme la, déclaration du 17 novembre 17*3
affujettifloit à la levée du dixième tous les fujets
du roi , privilégiés ou non privilégiés ; le clergé ,
pour fe rédimer de cette impofîtion , paya au
r o i , par forme de don gratuit , une fomme de
douze millions pour tenir lieu du dixième, en
forte que l’exemption qui fembloit lui avoir été
accordée à perpétuité, n’eût pas lieu.
L a derniere occafion , où le dixième a été rétab
li, eft la guerre de 1741. La levée fut ordonnée
par la déclaration du 29 août de la même
année, à compter du Ier. octobre fuivant.
Un édit du mois de décembre 1746 ordonna
la levée des deux fols pour livre du dixième ,
pour commencer au Ier. janvier 1747 , ôc finir
au dernier décembre 17/6.
Par un autre édit du mois de mai 1747 » le roi
ordonna la ceffation du dixième , à compter du
Ier. janvier fuivant ; mais le vingtième fut fubfti-
tué à cette première impofîtion , avec l’accefloire
des deux fols pour livre du dixième établis par
l ’édit de décembre 1746. VoyeT^ V ING T IEME .
Afin d’avoir une idée de la maniéré dont fe
percevoit le dixième, il convient de rappeller les
principales difpofîtions de l’édit de 1741.
Il ordonne que tous propriétaires , nobles ou
roturiers , privilégiés ou non , même les apana-
giftes ou engagiltes payeront le dixième du revenu
de tous les fonds, terres , prés , bois , vignes ,
marais , pacages , üfages , étangs , rivières ,
moulins , forges , fourneaux ôc autres ufines ;
cens , rentes , dîmes , champarts , droits feigneu-
r ia u x , péages , paffages , droits de ponts , bacs
ôc rivières ; droits de canaux , ÔC .généralement
pour tous autres droits ôc biens de quelque nature
qu’ils foient , tenus à rente, affermés ou non
affermés.
On devoit auffi payer le dixième du revenu des
maifons de toutes les villes ôc fauxbourgs du
royaume , louées ou non ; ôc de celles de la campagne
q u i, étant louées , procurent un revenu au
propriétaire , ôc même pour les parcs ôc enclos
de ces maifons étant en valeur ; de maniéré que
le dixième ne devoit être levé qu’ eu égard au revenu
; déduéfion faite des charges fur lefquelles
les propriétaires ne pouvoient pas retenir le
dixième. A l ’égard des forges , étangs ôc moulin
s , le dixième ne fepayoit que fiir le pied des
trois quarts du revenu.
L e d it portoit auffi que le dixième du revenu
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dè toutes les charges, emplois ÔC commiffions ,
foit d’épée ou de robe , des maifons royales, de*
v ille s , de police ou de finance, compris leur*
appointemens , gages , remifes , taxations Ôc droits
y attribués , de quelque nature qu’ils fuflent, continueront
d’être perçu fur tous ceux fur qui.on
le percevoit alors , ôc encore actuellement ; qu’il
feroit pareillement levé fur ceux fur qui on au-
roit oublié de le percevoir, ou qui en , auroient
été exempts ; le roi dérogeant , pour cet effet ,
à toute loi contraire.
Il ordonnoit auffi la retenue du dixième de toutes
les rentes fur le clergé , fur les ville« , provinces
, pays -d’Etats Ôc autres, à l ’exception des
rentes perpétuelles ôc viagères fur j ’hôtel-de-ville
de Paris , ÔC fur les tailles ; des quittances de
finance portant intérêt à deux pour cens , employées
dans les Etats du r o i , ôc des gages r é -
duits au denier cinquante.
L e dixième fe le voit auffi fur toutes les rentes
à conftitution fur des particuliers, fur les rentes
viagères , douaires ôc penfions, créées ôc établies
par contrats, jugemens, obligations ou autres a êtes
portant intérêts, ÔC auffi.fur tous les droits, revenus
ôc émolumens de quelque nature qu’ils fiif-'
fent, attribués , tant aux officiers royaux qu’aux
autres particuliers, corps ou communautés , foie
qu’ils leur euflent été aliénés ou réunis. Il e»
étoit de même des oéfrois ôc revenus patrimoniaux
, communaux ôc autres biens , ÔC héritage*
des villes , bourgs , villages , hameaux ÔC communautés
; droits de meflageries , caroflcs ÔC coches,
tant par terre que par eau; Ôc généralement
de tous les autres biens de quelque nature
qu’ils fuflent, qui produifent un revenu.
Et comme les propriétaires des fonds ôc héritages
, maifons ôc offices , qui dévoient des rentes
à conffitution , rentes viagères, douaires, penfions
ou intérêts , payoîent le dixième de la totalité
du revenu des fonds fur lefquels les rentiers , pen«
fionnaires ôc autres créanciers avoient à exercer,
ou pouvoient exercer leurs créances; le dixième
dû par ces rentiers , penfionnaires ou autres
créanciers , étoit à la décharge des propriétaires
des fonds ; à l’effet de quoi ils étoient autorifés,
en payant les arrérages de rentes , penfions ou
intérêts, d’en retenir le dixième, en juftifiant par
eux de la quittance du paiement du dixième des
revenus de leurs fonds.
Il en étoit de même des particuliers, officiers,
corps ôc communautés qui jouiffent des droits 9
revenus ôc émolumens , oétrois, revenus patri-
j moniaux , communaux Ôc autres biens ÔC héritages,
Ôc droits de meflageries, carofles , coches
ôc autre« : comme ils payoient le dixième de la
totalité du revenu, il leur étoit auffi permis de
retenir le dixième des charges.»
Les particuliers, commerçans ôc autre«, dont
la profeflùm eft de faire valoir leur argent, de*
C c c c ij