
Elles fe trouvèrent chargées de plus gros
capitaux de dettes après la chûte du fyftê-
me qu’auparavant, parce que les billets
de mille & de dix mille livres furent déclarés
a (liions rentières, dont le roi répon-
doit.
En 17 18 , les revenus & la dépenfe
étoient au pair ; en 1721 , la dette fe trouva
d’un milliard .fept cents millions fept cents
trente-trois mille livres. Il fallut de nouveau
augmenter les impofitions : oii rédui-
fit auffi l ’intérêt des contrats au denier
quarante, & on fit encore -divers retranchement
fur "les dépenfes que l’on avoit
rétablies , pour parvenir à la libération
de l’Etat ; mais. la plaie qu’il avoir reçue
étoit trop profonde pour être fi-tôt guérie.
On peut même alîurer que les crifes qu’il
relfent encore de nos jours , ont toujours
le même principe.
Suivons les opérations de finances
qui fuccéderent au fyftême de Law. Le
dixième , qui avoit été fupprimé en 1718 ,
fut remplacé par le cinquantième en 1715.
La déclaration du 5 juin ordonna qu’il
feroit levé en nature fur tous les biens-
fonds , terres , prés , bois & autres biens
produilant revenus pendant douze années,
pour finir au premier oétobre 1737. Son
produit devoit fervir au rembourfement des
rentes affignées fur lés fermes & fur les
tailles, à ceux qui voudroient le recevoir,
avec une remife fur le capital.
L ’année fuivante, une autre déclaration
du i l juin révoqua la perception de cet
impôt en nature , & la convertit en argent
, par impofition ou par forme d’abonnement
: elle ne fubfifla que jufqu’en 1728.
La guerre de 1733 ramena dans les finances
le plan ancien &. vicieux qui avoit été
fuivi fous le règne précédent. On abandonna
les refies du bail des fermes de 171S,
moyennant une fomme fi peu praportion-
, née à leur objet , que l ’auteur des Recherches
& confidératïons fur les finances
dit que cette opération coûta foixante
millions à l’Etat. Qn revendit les offices
fur les ports au tiers de leur valeur ; on
rétablit le dixième : puis on créa des rentes
fur la ferme des gabelles , fur celle des
aides, fur les tailles , fur les portes : on
ouvrit auffi des tontines , des emprunts
viagers ; on érigea une loterie royale. Ces
d^fiférens moyens fournirent. aux befoins
jufqu’à la paix. La fuppreffion du dixième
fuivit de près la fignature des préliminaires
arrêtés le 3 oétobre 1735. Mais on
continua d’ufer des mêmes expédiens que
ci-devant, pour acquitter les dettes de la
guerre. On n’étoit pus près d’arriver à cet
heureux but, qu’une nouvelle guerre ob-
ligea, en 1740, de chercher de nouvelles
reffources.
On en trouva dans les mêmes moyens
que nous venons de voir mis en pratique.
Le dixième fut rétabli en 1741 , & étendu
fur l’induftrie. On n’érigea pas alors de
nouvelles charges , mais on taxa Igs anciennes
, c’êft-à-dire , qu’on affiijettit, en
1744, les titulaires à payer des fupplémens
de finance. Celui des fecrétaires du roi fut
de vingt-cinq mille livres ,. les -autres à
proportion de la valeur des charges , &
fixés à-peu-près au cinquième de leur prix.-
L ’année fuivante, on revint au fyftêtiïe
de création d’offices, avec le titre d’inf-
peâeurs & contrôleurs, des maîtres & gardes'
du corps des marchands , des jurés
des communautés, d’arts & métiers ; mais
ces corps aimèrent mieux fournir la finance
de ces charges, que de les voir établir , &
ils fe chargèrent de percevoir les attributions
qu’on y avoit attachées. Dans la fuite,
on ajouta deux fols pour livre au dixième ,
pour être perçus même après la fuppreffion
de cette impofition ; on mit quatre fols
pour livre fur la capitation 3 or» augmentai
les droits d’entrée & d’oétroi des villes ,
la taille , îuftenfile , & enfin on affujettit
à un nouvel impôt les cires, les fuifs, le
papier , la poudre à poqdrer & le carton;
je droit de marc d’or fur les charges &
offices, tant cafuels qu’héréditaires , fut
établi dans le même tems. G’efl: ainfi qu’on
parvint à l’heureufe époque de la paix de
1748. Elle ne dura que huit ans, & une
nouvelle guerre força de rétablir une partie
des impôts, dont la fuppreffion avoit fuivi
Je dernier traité.
Mais comme depuis, trente années les
vrais principes du gouvernement, oublies
ou écartés dans les momens de detreffe &
de crife, avoient été remis en vigueur de
tems en tems, ils avoient r’ouvert & multiplié
les fources de l’aifance publique, foit
en protégeant le commerce, foit en facilitant
fes opérations extérieures ; & toutes
les claffes de l’Etat avoient plus aifément.
fupporté leurs charges, quoique très-pe-
fantes.
On avoit d’abord commencé à réduire
de moitié les droits de fortie fur les étoffes
de fil, poil ou laine mêlées de foie, enfuite
fur les chapeaux & les papiers. La pêche
avôït auffi reçu des encoüragemens, par
l ’affranchifTement abfolu accordé aux huiles
de poiffon qui en proviendraient. Tous
les droits impofés fur la vaiffelle & les ouvrages
d’orfèvrerie J ’or & d’argent exportés
du royaume , avoient été modérés.
Le commerce de l ’Inde, celui des îles de
l ’Amenque , la traite des noirs, avoient
également reçu des faveurs. Mais la plus
étendue & la plus fenfible fut celle qui
date du 13 oétobre 1743. Elle confifloit
dans une exemption entière des droits fur
les étoffes & tiffus de toute efpèce, en laine,
poil, coton, fil, ou mêlés de ces différentes
matières, fur les toiles, fur les ouvrages
de bonneterie & les chapeaux des fabriques
du royaume, & qui en feraient exportés
(90).
(90) On ne doit pas omettre de c ite r , au iujet
de cette fuppreffion de droits, un trait de définté-
reffiemerit de la part des fermiers-généraux, parce
que les exemples de l’amour du bien publiç peuvent
en tout tems trouver .des imitateurs.
Le roi avoit annoncé, par fon arrêt du 13 octobre
1743 , que cette fuppreffion de droits auroit
lieu au premier oélobre 1744, époque d’un nouveau"
bail des fermes. Les fermiers-généraux, cautions
de Forceville, repréfenterent qu’il étoit à craindre
que jüfqu’à ce tems cette exemption ne f ît un effet
contraire aux vues de fa majefté.par une fufpen-
fion de commerce, laquelle, quoique momentanée,
Mais ce" n’étoît pas afTez d’exciter ainfi
le débouché de nos fabriques. L ’année qui
fuivit la paix , vit également affranchir entièrement
toutes les matières premières qui
leur étoient propres, Comme les laines non
filées, les cotons en laine , les chanvres &
les lins en malle, les poils de chèvre & de
chameau (91). *•
pourroxt caufer du dérangement ; que pour l’éviter ;
ils penfoient que les fabricans ne pouvoient jouir
trop tôt d’une grâce auffi intérefïknce pour le commerce.
Dans cette v u e , ôc afin de donner des marques
de leur zèle pour le bien public ôc pour le
fervice de fa majeilé , ils confen tirent que cette
immunité eut lieu dès le premier novembre x743 ,
fans demander aucune indemnité. Ces offres furent
agréées par l’arrêt du 13 oétobre.
(pî) Cet anranchilfement ne devoit avoir lieu •
qu’au premier -oétôbre 17 /0 , Ôc le règlement qui
l’accordoit étoit publié au mois de novembre 1749.
Les cautions de l ’adjudicataire la Rue imitèrent
leurs prédéccfleurs. ils demandèrent qu’il commençât
dès le premier janvier fui van t , ôc fe défiffcerent
de toute indemnité. Quelle différence entre cette
conduite ôç celle des cautions de Templier, qui
fe trouve confignée dans l ’arrêt du £ avril 1701.
Ceux-ci refuferent de fe prêter à une fuppreffion
6c diminution de droits fans indemnité ; cette
• réfîftance mal entendue obligea le gouvernement
à fufpendre, en grande partie, cette faveur ,
qui devoit avoir lieu au premier janvier îy o z ,
jufqu’au premier oébbre 1703 , qui étoit le terme
de leur bail ; 6c les» conjonctures empêchèrent en-
fuite qu’elle ne fût accordée jufqu’en 1743.
C ’eft aux fermiers-généraux qu’ on doit la con-
fervation du Palais-Bourbon , qui fait un point de-
vue fi agréable pour la place de Louis X V . On en
trouve la preuve dans l’arrêt du confeil du 30 août
- 1774. Il ordonne l’exécution de la délibération des
fermiers-généraux, cautions de Bocquillon, du £9
juillet précédent ; délibération portant qu’ ayant
été informés que la démolition de l ’hôtel appellé
le Palais-Bourbon avoir été projetée, ils ont arrêté
, dans la vue de confier ver un édifice propre
à contribuer à I’embelliffement du monument que
la ville de Paris fe propofe de faire é r ig e r , pour
tranfmettre à la poftéricé la mémoire des conquêtes
du ro i , 6c donner à fa majefté des preuves de leur
zèle , ils fourniront la fomme de neuf cents mille
liv re s , qu’on leur a dit être nécefîaire pour l ’ac-
quifirion de ce palais, dont trois cents mille livres
ne feront jamais rembourfées, & les autres fix ccncs-
mille UvreS leur feront rendues en fix ans, & fans
intérêt.