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de la province. Dans le plus grand nombre, le
droit eft de trente fols par tonneau de vin , à
l ’entrée , non compris le devoir de célerage ,* qui
eft de douze deniers ; dans d’autres, comme à Saint-
B rieux, à le-Legué, Daoue t, il n’eft que de vingt
fols.
Tout ce que l’on peut remarquer dans la pancarte
, malgré fon obfcurité,, c’eft qu’elle diftingue
les lieux où fe perçoivent les droits, 8c les divife
en vingt-deux diftriéls.
C e font Vannes., Ruis , A u ra y , Hennebon ,
Bedon j Mufillac , la riviere de Villaigne , Cox-
noailles^Quempercorendn, Pont-l’Abbé 8c Penne-
marck, Ponteçroix, Gong :8c Foefeant, Quimpe-
xel'lé» Treguier 8c M o r la ix , Lanicm , la-Roche-
deirien , Treu 8c l’Entreguier , Pontrieu , Pem-
poul 8c Bénie , toutil’évêché de Léon ; lavoir ,
B re ft, Landerneau, le-Fou ,D ou la s , Abergrach,
Saint-Brieux, le-Legué 8c 8c Daouet.
On trouve dans l’article qui regarde chacun de
Ces dillriâs:en particulier , à-peu-près ies mêmes
efpèces de marchandifes., quoique dans tous elles
ne foient pas t a r i fe s fur le même pied.
Dans quelques-uns, tels que ceux de Vannes
& d’Auray , les marchandifes qui entrent font tar
ifées féparément de celles qui Torrent. Dans quelques
autres, l’entrée 8c la fortie nefont point du
tout exprimées , ou font confondues de maniéré
qu’il eft impoffible que la perception fe faffe , conformément
aux vrais principes du commerce , 8c
relativement à fes véritables intérêts.
Quelque foin que l’on apporte à l ’examen de la
pancarte dont il s’ag it, on ne peut trouver la bafe
fur laquelle la proportion des droits a été af-
fife.
A la fin de Par ride du diftridt, intitulé la riviere
de Villaigne , on trouve : « Et toutes autres mar-
» chandifes conduites par eau doivent le vingtième de
»? ce qu elles font vendues fur le lieu , excepté les
» laines qià font franches, & ne trouve-t-on point
>3 quil foit rien levé d*efperons ni de harnoys, & étoit
*> accoutumé- autrefois être levé la moitié deftits de-
p Voirs a l’ijle. »
" A la fin de l’article de Treguier 8c M o r la ix ,
on lit : et Et des autres marchandifes que l'on fait
» entrer & ijjir par mer d* ladite recette , l’on prend
$ le vingtième.
L e chapitre de Pontrieu, Pempoul & Bénie eft
terminé par ces mots ; « Pour chanvre hors tonneau
» ou pipe 9 l’on prend le vingtième de la valeur .y
» s’i l eft en pipe . cinq fols par pipe. De felles, pa-
» nie rs , forciers , & tqutes autres marchandifes &
ï> denrées qui fe vendent hors tqnneau, on prend le
p vingtième de la valeur. >?
Ges divers articles fembleroient indiquer que le
taux général des devoirs des ports 8c havres eft le
vingtième du prix des marchandifes ; mais le. plus
grand nombre ne fait pas mention de ce vingtième.
Au refte , entreprendre de donner ime idée jufte
8c précife d’une chofe auffi confufe , auffi incertaine
8c auffi embrouillée que l’ell la pancarte de
ces devoirs, ce feroit s’expofer à n’ être pas entendu
; mais pour faire connoître combien la forme
de cette pancarte doit inévitablement occafionner
d’abus 8c de conteftation., il fuffit de donner l’ a-
nalyfe de l ’inftance élevée , il y a plus de cinquante
ans , entre les Etats de Bretagne 8c la ferme
générale.
Cordier , adjudicataire des fermes , ayant reconnu
, en 172/ , qu’il s’étoit g lifte du relâchement
8c de l’inexaditude dans la perception des
devoirs des ports 8c havres, preferivit à fes pré-
pofés de fe conformer à la pancarte de 1 767 3 dé-
pofée aux archives de la chambre des comptes de
Nantes.
jv Mais les marchands 8c négocians de cette v ille ,
étant dans l’ufage de ne payer aucun de ces droits
négligés , prétendirent que cette poffeffion abufîve
leur donnoit un titre de ne plus payer.
L e régiffeur fe pourvut en la jurididion des
traites de Breft ; il ÿ fut débouté.
Il eut recours à l ’autorité du Confeil, qui , par
arrêt du 6 mars 172.7 , ordonna que les droits ,
fpécifiés dans la pancarte du 27 juin 1767 , fe-
roient perçus p ar le s receveurs des fermes , fur
toutes les marchandifes 8c denrées y dénommées ,
foit à l’entrée, foit à la fortie.
Les négocians de plufieurs villes de Bretagne
formèrent oppofition à cet arrêt ; ce qui donna
lieu à une inftance , dans laquellë~intervinrent les
députés 8c procureur-général-fyndic des Etats de
la province. -
On n’entrera point dans le détail de ces diffe*
rentes-' requêtes , parce qu’il n’eft pas ici queftion
de fairè un récit de procédures ; mais de rap-
peller les raifpns pour 8c contre les pancartes des
devoirs des ports 8c havres de la prévôté de
Nantes , en expofant fommairement, d’un côté, les
objections des Etats de Bretagne contre ce? tarifs
, -de l’autre , les réponfes des fermiers?-géné-
raux. On verra que les Etats 8c les négocians
n’arguent pas feulement le taux général de ces ta-?
rifs , 8c la quotité de chacun article ; mais encore
qu’ils fe plaignent hautement du peu d’authenticitç
de la jûèce même.
Le titre , difent-ils, que l’ on qualifie de pancarte
, ne mérite pas toute l’attention que l’on vou-
droit lui procurer.
Ce regiftre eft compofé de fix cahiers féparés ,
contenant, en parchemin, quarante-cinq feuillets,
-non compris celui qui fert de couverture , fans
fignature en aucuns de,s feuillets.
Çes fix cahiers font reliés enfembîe avec des
lacs de parchemin. En tête du premier feuillet
reélo , oh lit les mots fuivans , qui font connoître
que cette pièce , telle qu’elle exifte , a été fûremenç
écrite depuis l’union de la Bretagne à la
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Çy-âpre s eft la déclaration des devoirs dus & appartenons
au roi & duc de Bretagne , en chacun port
& havre dudit duché, félon les tables y déclarées ,
& ainfi qui enfuit.
On ne trouve , ni au commencement de ce regiftre
, ni au commencement des chapitres qu’il
contient, aucun procès-verbal ni préambule^ pour
annoncer ce qui fuit , 8c pour faire connoître le
nom du tribunal ou du commiffaire qui l’a rédigé ,
les motifs 8c le droit qu’on a eu.de le former.
On ne voit , ni à la fin du regiftre , ni à la fin
d’aucun chapitre, une fignature du greffier , ou autre
perfopne quelconque , qui doit l’avoir é c r it ,
copié , ou compulfé ; aucune ordonnance pour
rendre exécutoire tout ce qui précédé ; aucun
aéle de collation ou compulfoire qui indique le
titre original, ou la copie fur laquelle cette pièce
a été inferite ; aucune date au commencement ou
à la fin, qui puiffe inftruire du tems auquel ce regiftre
a été fait 8c dreffé ; aucun a été de dépôt ,
aucune déclaration ni obfervation quelconque en
aucun endroit du regiftre, qui annonce par quel
ordre, de quel d ro ite de quelle autorité, ni à
quelle fin il a été fait ; il eft de trois ou quatre
écritures différentes, qui paroiffent auffi être de
différens tems , tout rempli de blancs , de ratures,
d’interlignes, d’apoftilles, 8c de néant en marge
de quelques articles ; il contient même plufieurs
lignes effacées 8c grattées qu’on ne peut lire.
Il paroît par une infinité d’articles , que les
vingt-fîx premiers chapitres ont été originairement
faits 8c rédigés avant la réunion de la Bretagne
à la couronne, qui fut une fuite du mariage
d’Anne de Bretagne avec Charles V I I I .
I l fuffit, difent les Etats, de faire l’analyfe de
cette pièce informe , pour tirer de fon propre
fonds, la preuve de fa défeéluofité, 8c qu’elle ne fut
jamais un tarif, ni une pancarte émanée d’aucune
autorité publique.’
Toutes les déclarations, ordonnances, mande-
tnens 8c commiffions du duc François I I , étoient
intitulées de la maniéré fuivante.
François , par la grâce dé Dieu, duc de Bretagne ,
comte de Montfort & de Richemont , de Eftempes
6’ de V^ertus , a tous ceux qui ces préfehtes lettres
verront y falut, a nos âmes féaux confeillers , &c.
Les motifs de ces ordonnances, commiffions 8c
mandemens , y étoient toujours rapportés.
Les lieux où le duc les avoient rendues y
étoient marqués.
On y trouvoit la date du jo u r , du mois 8c de
l ’année ; elles étoient lignées du prince , fcellées 8c
contrefignées par un fecrétaire de la chancellerie,
& l’ on y faifoit parler le prince , avec la dignité,
la décence 8c les termes convenables à fa fouve-
raineté , félon les différentes conjonctures ; point
d’articles où l’on obfervât plus de précautions 8c
de formalités , que fur celui des impofitions.
I l paroît} au cçairaire, par le ftyle indécent ÿ
fâ f \
familier, hiftorique de cette pancarte, 8c par les
tranfpofitions qui régnent d’un bout à l ’autre de
cette pièce, que ce n’ eft autre chofe , au fond ,
qu’une relation ou mémoire peu exact 8c 'mal
digéré, de quelqu’un qui faifoit des obfervations
8c des recherches fur les droits qui fe levoient
alors , 8c s’étoient levés en différens tems, dans
les ports 8c havres de Bretagne ; 8c qui ne travaillant
apparemment que pour fa curiofité ou fon
inftruction particuliere , ou peut-être pour former
quelque projet de nouvelles impofitions , écrivoit
fans aucun ordre ni arrangement, 8c fans chercher
des expreffions convenables à la dignité du prince ,
qu’il nommoit quelquefois le duc a’apréfent,, quelquefois
monfeigneur, 8c, plus fouvent monfiéur , n’imaginant
fans doute pas que cet ouvrage do-
meftique dût jamais devenir public.
En un mot, difoient les Etats, les quatre derniers
chapitres font d’une écriture fi differente des
vingt-fîx premiers , qu’il y a tout lieu de croire
qu’ils ont été copiés long-tems après, fur lés feuillets
blancs qui reftoient dans le même regiftre ,
ou bien même fur des feuilles de même grandeur
qu’on a pu joindre enfuite à ce regiftre.
A cette critique de la pancarte , les Etats ajou-
toient que l’arrêt de la chambre des comptes du 27
juin 17Ó7, a mal-à-propos été adapté à la pancarte
des ports 8c havres ; qu’il n’y a qu’ à jeter
les yeux fur l’original, au feuillet 5 4 , verfo, après
le chapitre intitulé Daouet, que l ’on n’y trouvera
aucun veftige de çet arrêt , de même que dans
tout le refte du regiftre.
Que l ’on a pris cet arrêt dans un autre regiftre
dé parchemin qu’on a mis fur la couverture du
premier regiftre, 8c qu’on a coufu fore adroitement
à un des bouts de ce premier regiftre.
Qu’ il n’ y a qu’à lire avec attention cet a rrêt,
pour voir qu’il regarde uniquement les droits de
la prévôté de Nantes, 8c non les devoirs des ports
8c havres.
D e tous ces faits , 8c de plufieurs autres allégués
par les fyndics des Etats, ils concluoient affirmativement
que tout étoit fuppofition , impofture 8c
fauffeté dans l’expofé , 8c dans les pièces donc
s’étoit fervi le fermier pour furprendre les arrêts
des 6 mars 17 2 7 , 8c 9 novembre 1728..
Et comme les fermiers avoient cité., en leur
faveur dés extraits des regiftres de plufieurs années
; c’eft-à-dire, qu’ils avoient prétendu prouver
la juftice du droit , par le paiement du droit
même ; les Etats répondoient qu’un abus n’eft pas
légitimé par fon exiftence ; qu’il eft impoffible
de juftifier que les droits font dûs, fi ce n’e ft,
i ° . par un titre authentique portant établiffemenC
de ces mêmes droits ; 20. par une poffeffion immémoriale
non conteftée , ni interrompue.
Ils ajoutoient, que Jorfque le fermier prétend
faire valoir un titre informe 8c demeuré fans exécution
depuis plus de deux ficelés , c ’étoit une