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35 fon apport ; & fur les vives inftances que fît
» alors M. de Chateauneuf, ambaffadeur de votre
» majefté en Anglete rre, les' défenfes ayant été
» levées , auffi-tôt après fon départ elles furent
» renouvellées plus vigoureufes qu’auparavant ».
^ On a vu ci-devant que les cartes avoient été
divifées en trois clafles , fur chacune defquelles
les droits étoient differens ôc proportionnés ; des
lettres-patentes , en forme d’é d it , donné au mois
de feptembre 16 6 1 , réunirent les divers droits en
un feul, qui fut porté à deux fols fix deniers par
jeu , dont dix-huit deniers furent attribués à Phô-
pital-général de Paris ; ôc les quinze deniers de
ce dro it, qui avoient été aliénés à René Roudier,
furent réduits à douze ; en forte que le roi ne
retiroit plus rien de cette impofîtion.
Ce parti fut did é', vraifemblablement, par le
defîr de faire cefler tous les inconvéniens qui
avoient accompagné jufqu’ alors la perception du
droit dont il s’agit. (3n penfa qu’en intéreflant en
quelque forte tous les pouvoirs, en faveur de ce
d ro it, ôc en afledant la plus grande partie de fon
produit, au foulagement des pauvres, tous les ordres
, de citoyens fe feroient un fcrupule de favorifer les
abus, ôc tous les tribunaux feroient plus féveres
fur ceux qu’on leur déféreroit.
Rien ne fut omis dans le préambule de l ’é d i t ,
pour afliirer l ’exécution du nouvel arrangement,
& redoubler les précautions contre les fraudes,
en les préfentant comme un larcin fait à la ju b -
lïftance des pauvres. Cependant ce règlement ne
fut enrégiftré au parlement que le y feptembre
1662-, & deux jours après,cette cour rendit un
arrêt qui nomma un confeiller pour connoître des
contraventions , avec pouvoir de fubdéléguer ,
enjoignant d’exécuter ce qui feroit ordonné par ■
lui ou fes fubdélégués, nonobftant oppofitions ou
appellations quelconques, & fans préjudice d’i -
cel/ès.
Ce fu t, en quelque forte , une jurifdidion en
première inftanee, dont l’établiflement paroiffoit
d autant plus néceflaire , que les procédures en i
pareille matière étoient incompatibles avec les
formes , les longueurs & les frais qu’entraînent
les conteftations que l’on porte devant les tribunaux
fupérieurs.
Malgré ces nouvelles mefures , les inconvéniens
ne ceflerent pas encore. On trouva dans les maîtres
carriers des adverfaires opiniâtres. Ils préfen-
Are(p ê te au confeil, & demandèrent que îe
Mroit fur réduit en tout, à trois livres par grofle
ou yingt-quatre'fixains ; ce qui ne fâifoit que cinq
deniers par je u , au lieu de trente ; mais l’arrêt
du confeil du 25 août 166$ , mit leur demande
au néant,ôc leur défendit de fe pourvoir contre
les règlemens 6c arrêts rendus, fqus peine de trois
mille livres d amende , ôc de tous dépens.
^ Il y a lieu de croire que les carriers ne fe rendirent
pas à ces difpôiîrions , puifque l’hôpital
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paffa avec eux , le n avril 1664, une tranfaiflion
par laquelle, il confentoît qu’ils ne payaient que
douze livres par greffe de canes ; c’eft-à-dire ,
vingt deniers-par jeu ; avec la claufe que cette
réduction - n’auroit lieu que jufqu’à ce que l ’édit
eut ete enregiftré au Parlement de Rouen , dans le
reljorr duquel le droit n’étoit pas perçu.
L e parlement de Paris homologua cette tran-
. faâipn ; mais fans doute que les carriers en exé-
cutoienr-feuls les conditions ; car le parlement leur
enjoignit, par arrêt du 10 août 1664, de fe rendre
dans le jour au bureau commun,pour y travailler,
oc non ailleurs.
A-peu-près dans le même- tems, il fut adreffé
des lettres de jufSon.au parlement de Rouen, pour
enrégiftrer 1 édit de 1661 , 6c la connoiflance de
tous proces 6c differens mus à ce fu je t, fut. attribuée
au parlement de Paris , qui ,1 e 19 décembre
1Ô64, renouvella les difpofîtions des précédons
règlemens, ôc^ permit d’informer des abus par la
voie des monitoires.
a-L hôpital-général , après jttvoir régi par ïui-
menie^ la perception du droit qui lui appartenoit
jufqu’en 166$ , I’afterma^ur une fomme modique,
mais les fermiers ne purent foutenir leurs baux.
Il en abandonna la moitié aux grandes villes où
il y avoit parlement 6c hôpitaux, afin d'engager
les cours fouveraines a protéger la perception.-•
Tandis que l’hôpital-général travailloit ainfi à
étayer fa propriété chancelante 6c peu frudueufe-,
la cour des aides réclama fon ancienne jurifdic-
tion. Le 3 mars i6 6 f , elle défendit, par arrêt,
aux directeurs de l’hôpital, de fe'pourvoir dans
les conteftations relatives au droit fur les cartes,
ailleurs que pardevant les officiers de l’éledion,
en première inftanee, 6c pardevant la cour , en
caufe d’appel.
Elle porta la prétention plus loin encore en
1669 ; elle défendit, par fon arrêt du 16 fév rier,
de percevoir le droit établi par l’édit de 1661 ,
finon en vertu de lettres-patentes à elle adreffées
6c enrégîftrées.
Le parlement voulut alors foutenir fa compétence.
Il s’éleva un conflit entre cette cour 6c
celle des aides. Les conteftations reftoient indéciles
, les fraudes fe multiplioient. L ’hôpital-général
dégoûté vraifemblablement par tous ces
inconvéniens, 6c fatigué des efforts inutiles qu’il
avoit faits pour* foutenir un droit auffi difficile à
percevoir, prit le parti d’abandonner la datation
ftérilequi lui en avoit été faite. En conféquence,
un arrêt du premier avril 1671 , ordonna qu’il
feroit furfîs à la levée du d ro it, ôc procédé à la
liquidation de ce qui pouvoir être dû aux anciens
engagiftes.
T e l fut le fruit que l’hôpital-général recueillit
d’une impofîtion qui, par fa nature 6c fon efpece,
eft la plus légere que les fujets du roi puiffent
fupporter ; qui n’ eft prife fur aucun befoin de la
V ie , que le pauvre ne paie jamais, & que le riche
ne paie que pour fon plaifir ; dont le produit enfin
étoit deftiné au foutien d’une maifon întereliante
pour l’humanité en, général, & pleine .d’avantages
pour la fociété en particulier.. . H H
Les chofes fubfifterent en cet état jufqu en 1701,
que les befoins de l ’éta t, épuifé par de longues
guerres , déterminèrent le roi à ƒ établir e roi
fur les cartes , par fon édit du mois d oflobre , en
le fixant à dix-huit deniers par jeu , 8c en attribuant
, pour deux ans feulement, la connoiflance
des conteftations relatives , a P a r is , au lieutenant
général de police, 8c "dans les provinces,
aux intendans. Cette attribution fut enfuite prorogée
jufqu’eh 1 7 1 9 , qu’elle ceffa avec le droit.
On né voit point que les parlemens ôc les cours
des aides aient, pendant cet intervalle , réclamé
contre cette attribution. L a perception fe fit alors
tranquillement, par des fermiers , jufqu’en 1703 ,
qu’elle éprouva une modification. ^ ^
La déclaration du 1 7 mars , réduifit le droit à
douze deniers par jeü , ôc fon préambule annonce
les motifs de cette diminution. Il y eft dit: « Que
» le droit fe trouvant exceffif, par rapport à la
» valeur des cartes , dont il légale prelque le p r ix ,
» les carriers ont fait leur s efforts pour frauder
» les droits , ôc quelques foins qu’ait donné celui
» qui s’eft chargé de la ferme , qui a été faite
» defdits droits , il n’a pu remedier a ces fraudes,
» attendu le profit confidérable que les car-tiers
» ont trouvé à les continuer ; ôc d’ailleurs le prix
» des jeux de caries étant beaucoup augmenté, la
. » confommation en eft diminuée , ce qui a fait
a» fouffrir ce Commercé, ôc mis les fabricans dans
» le cas de s’indemnifer par les abus ».
Après la publication de ce règlement , il fut
fait un nouveau bail du droit pour fîx années , à
raifon de cent cinquante mille livres pour les deux
premières , ôc de deux cents mille livres pour les
quatre dernieres. ’
L ’année précédente , les cartes ôc les cartons
avoient été affranchis d etous droits de fortie à
leur exportation pour le pays étranger , par les
arrêts des 2 avril Ôc 3 odobre 1702. Çetie faveur
fut confirmée par l’arrêt du 23 o(Sobre 1703 ,
Ôc étendue par celui du 23 décembre 1704, aux
' 1 car tes Ôc cartons deftinés pour M e ts , Toul ÔC
Verdun. Cet encouragement ranima ce' commerce
& c’eft de cette époque que l ’on peut dater les
progfês; qu’il a faits.
’ Mais il eft bon d’obferver à l’egard des motifs
de la réduction du .droit, énoncés' dans la déclamation
de 1703 , que l’expérience a prouvé, que
c’eft moins la quotité du droit qui excite ôc fomente
la fraude , que l’incertitude des moyens
propres à la contenir.
Que dans le tems que le droit appartenoit
à l’hôpitai-généf a l , ôc aux anciens aliéna-
taires , il n’étoit que de trente deniers par jeu ,
ÔC rendoit très-peu de choie. Aujourd’hui q u il
appartient à une regie active ÔC éclairée , ôc qu’il
eft de quarante deniers auffi par je u , il donne un
produit de treize à quatorze cents mille livres , ôc
cependant le commerce des cartes ne parôît jamais
avoir été auffi étendu qu’ il l’ eft aujourd’hui.
On a dit que le droit dont il s’agit fut fupprimé
en 17 1p . Il paroît que cette fuppreffion fut dûe
à la compagnie des Indes , q u i, le 17 feptembre, v
propofa au roi de lui prêter cent millions , à
trois pour Cent, pour rembourfer lés cent millions
des premières adions d’occident, dont l’intérêt,
à quatre pour cent , étoit affigné fur le tabac.
Cette compagnie fupplia en même-tems fa majefté,
d’accorder le million qu’elle gâgnoit , en foulagement
au public , par-la, fuppreffion des droits fur
les fuifs , fur les' huiles ôc fur les cartes 9 ôC toutes
ces demandes furent accordéès.
Le droit fur les cartes fut de nouveau rétabli
en 1747 , par la déclaration du 16' février ; ôc
celle du 21- o&obne 1746 , preferivit des règles
pour la perception ôc la fabrication. Les cartes
exportées hors. du royaume, furent expreffément
affujetties aux droits.
La régie, du droit avoit été mife dans les
mains d’un fermier particulier. Les obftacles qu’il
éprouva , le portèrent à demander la ré filiation
de fon bail. Elle lui fut accordée par l ’arrêt du
30 juin 1748, ôc le droit fut réuni à la régie de
plufieurs autres , dont Bocquillon étoit chargé ,
jufqu’en \y$ 1, qu’il reçut une nouvelle conftitution.
L ’école militaire, venoit d’être établie par l ’édit
du mois de janvier ? le roi , pour première dotation
, lui accorda lé droit fur les cartes, ÔC la déclaration
du 13 du même mois le porta à un denier
par carte, dont les jeux feroient compofés. En-
fuite intervint, le 23 janvier , un arrêt qui attribua
la connoiflance des contraventions au lieutenant
général de police à Paris , ôc aux intendans
dans les provinces, fauf l’appel au confeil.
Deux autres arrêts du 23 ja n v ie r , Ôc du 30
a v r i l , ordonnèrent, l’un,que les inventaires chez
les fabriquans ôc débitans , pour l’établiflement
du nouveau d ro it, feroient faits à la diligence
du régifleùr ; l ’autre, que ce régifleur nommé
par l’école militaire , feroit mis' en pofleffion , à
compter du premier avril de. l’année fui van te ,
pour adminiftrer fous les ordres du miniftre de la
guerre.
L ’infuffifance des mefures précédemment prifes
pour obvier aux fraudes, fit imaginer un moyen
nouveau qui. changea tout le fyftême de la régie
ôc de la perception du droit ; ce fut d’afliijettir
les carriers, à ne fabriquer les cartes , qu’avec le
papier qui leur feroit fourni par le régifleur du
droit. , _
Ce changement donna lieu de raflembler dans
un feul ÔC même règlement, tout ce que les.difpofitions
des; loix antérieures pouvoient avoir de
relatif au nouveau plan de régie , ôc l ’on y ajoura
les autres formes que les circonftances actuelles