
les propriétaires , & qu’il y a des ouvrages très-"
utiles ; mais de telle nature qu’eux feuls font en
état de s’en charger ?
Si l’on ne voit ajacun engagille.fe porter à de
pareilles entreprifes , fi tous font retenus par la
qualité de leur poffeffion précaire , quoiqu’illimi-
t é e , & que fouvent elle fe proroge à un grand
nombre d’années , qu’efpérera-t-on du fermier
qui n’a que fix récoltes à faire ? Sur ce foible produit
des terres domaniales , que l’on déduife d’une
part les intérêts des capitaux , qu’ il faudroit employer
au rembourfement des engagiiles , & de
l ’autre, les rentes qui feroient éteintes par la réunion
des domaines engagés, quel fera le bénéfice
de cette réunion ?
Enfin , les grofles réparations des châteaux &
des fermes ne pourront , ni être prévenues par
l ’oeil vigilant du maître , ni être faites par économie
, Ôc leur prix doublera par des formalités
inévitables 3c ruineufes , par les frais des procès
verbaux de vifites, d’adjudication, de réception
; ainfi , il doit demeurer pour confiant, que
les terres domaniales rentrées dans les mains du
xpi , 3c comprifes dans le bail de fes fermes , ne
ijpourr oient que dépérir-, 3c que le dépérifîement
fer oit également prompt 3c fenfible.
Au refte, l’écrivain qu’on réfute a bien compris
lui-même que fa fpéculation étoit imparfaite, j
qu’elle n’embrafloit pas complettement fon objet, 3c q u’en un mot, il y avoit des obftacles^prefque
invincibles à l ’ entiere réunion des parties diftraites
au tout. Si l’on veut, d it- il, par confidération pour
les perfonnes de crédit, ne pas réunir leurs pof-
fc-ffiohs domaniales , il paroît jufte de leur faire
payer un fupplément de finance ; mais outre que
des exceptions, fondées fur des égards arbitraires,
annoncent toujours un fyftême défeélueux , c’eft
fe contredire en un point effentiel.
I l avoue que les reventes en rentes font plus
avantageufes au r o i , que les reventes en deniers
comptans ; 3c cependant, au préjudice de l’arrêt
du 13' mai 172.4, qui réprouve celles delà dernière
efpèce , il veut qu’on fe contente de faire
payer un fupplément de finance aux perfonnes
de crédit. C ’eft une inconféquence manifèfte , à laquelle
il ajoute une erreur qui ne l’eft pas. moins.
L e remede qu’i l propofe ne va point à la fource
du mal.
Quelle fureté les pofleffeurs des terres domaniales
trouveroient-iîs dans le paiement d’un fupplément
de finance ? Comment fergit-il de leur
întérê-t d’y fouferire î Comment leurs fuccef-
feurs feroient - ils par - là exempts d’être recherchés
par la fuite pour les réunions ?; Le titre
de leur poffeffion cefferoit-il d’être un fimple engagement
révocable à perpétuité par fon effence ?
Une perfonne de crédit pourroit en tout tems
être dépofledée par une autre perfonne plus
riche , 3c d’ un crédit encore plus puiffant , qui
rembourferoitles anciennes finances , 3c qui fe fou-
mettroit à payer une rente plus confidérable au
domaine.
Les recherches fur les»'finances préfentent des
vues plus intéreffantes 3c plus approfondies. On
y remarque que l’auteur , craignant de heurter de
front le préjugé régnant , fe contente de mettre en
queftion , s’il eft avantageux à l’Etat que le roi
poffede les domaines en fonds ; mais on voit aflez
qu’il tient pour la négative , s’appuyant fur les
mêmes motifs qu’on a ci-deflus expofés , 3c dont la
folidité doit frapper en effet tous les efprits qui
auront la force de fecouer le joug de la prévention.
Il propofe des inféodations pour cent ans, par
portions de huit ou neuf cents livres , 3c il en
exclut les bois, qu’il croit mieux dans la main du.
roi que dans celle des particuliers.
Les inféodations pour cent ans fe concilient
pleinement avec le principe de l ’inaliénabilité ,
à quelque époque qu’on veuille le faire remonter ; 3c cependant , elles tranfmettent un ufufruit d’affez
longue durée , pour engager les pofleffeurs à faire
toutes les améliorations qu’on eft en droit d’attendre
d’un bon pere de famille. Ce double avan—
tage eft précieux 3c digne de la plus grande attention.
On ne prétend pas difeonvenîr que l’Intérêt de
l’Etat ne foit de multiplier le nombre des propriétaires
des terres, fur-tout de ceux qui cultivent
par eux-mêmes avec ai fan ce ; 3c par eonféqtient *
que les inféodations par portions médiocres y
n’aient un véritable objet d’utilité. M a is, pourquoi
s’en faire une loi de néceffité ? D e fembla-
bles divifions font-elles praticables fans inconvénient
dans tous les domaines ï
Parmi les citoyens qui font en état d’en acquérir
, ou de conferver ceux qu’ils tiennent déjà à
titre d’engagement, combien yen a-t-il qui feroient
attirés par la grandeur des, poffeffion s,, 3c qui feroient
rebutés par leur médiocrité ?. Y auroit-il
de la prudence "à les exclure ï Ce qu’il y a d’important
pour le roi 3c pour l’E ta t, c’ eil que les,
redevances foient proportionnées à la valeur réelle 3c a&uelle des domaines.
Par ces mots , on.n’en tend pas> desrentes équivalentes
aux revenus effectifs des. domaines,. Ce ne
feroient plus, dealnféodations., ce feroit des baux
à ferme. On entend des, rentes qui approchent du.
produit réel des grands; domaines, fixé, non fur
ce que le roi en retire a&uelîement ; mais fur des.
états exaéls 3c; çirconitanciés des fonds 3c héritages
de toute efpèce dont ils font compofés., &
relativement- à leur valeur , fuivant les différens
pays où ils font fituésfc
L a divifion par portions médiocres doit être
«ne reflource pour faciliter les inféodations , 3c
non pas une règle pour y .procéder.
Il feroit à defirer , pour l’uniformité de l’opération
, 3c afin de pouvoir établir fur tous les domaines
inféodés , une rente ou redevance fixée
proportionnément à leurs produits refpeétifs , que
les finances payées par les engagiiles fuffent éteintes
3c rembourfées ; mais s’il paroît plus convenable
de remettre ces rembourfemens à un autre
tems , l’exécution du projet des inféodations pour
cent ans, n’en feroit pas moins avantageuf© dès.
aujourd’hui , même par rapport aux domaines qui
font tenus par engagement. II n’en eft aucun qui
ne puifle fupporter une rente plus ou moins forte,
foit pour tenir lieu de fupplément aux finances
qui ont été payées en deniers comptans , fans
aflujettiflement à aucune redevance annuelle , foit
par augmentation de celles, qui ont déjà été établies
lors des reventes. Les engagiiles s’y prêteront
, non-feulement parce qu’on doit préfuraer
que de fideles fujets 3c de bons patriotes feront
taire l’intérêt perfonnel, par zèle 3c par amour
pour le bien public ; mais encore , parce que ce
zèle recevra une prompte récompenfe, qui formera
bientôt un accroiffement de richeffes pour
le royaume.
On ne fauroit douter que tous les domaines ne
foient fufceptibles d’améliorations , 3c conféquem-
ment , d’augmentation dans les produits. Qu’on
faffe ceffer la crainte trop bien fondée qui lie les
mains aux engagiiles , tous fe porteront avec ardeur
à des travaux 3c à des dépenfes , dont ils
feront afliirés de recueillir les fruits pendant un
fiècle. !N’y trouveront - ils pas un ample dédommagement
de la redevance à laquelle ils fe feront
obligés pour le même efpace de tems ? Quel plus
puiffant moyen d’ailleurs , pour faire fleurir l ’agriculture
, pour ranimer le goût du travail par la
certitude du falaire , pour occuper tant de bras
qui n’attendent que de l ’emploi , pour faire naître
l’abondance des denrées de première néceffité
, pour fournir aux arts 3c au commerce , tant
intérieur qu’extérieur , , les matières que l ’induftrie
perfectionne , de même que celles dont le débit
eft appellé par des befoins fans ceffe renaiflans ;
enfin , pour favorifer les mariages 3c la population
par l’aifance, fuite naturelle 3c infaillible de
ces di ver fes caufes réunies 1
L ’auteur des recherches fur les finances, obferve
d’autres points d’utilité évidente, dans la régie des
domaines par inféodatiôns pour cent ans ; fimpli-
cité 3c invariabilité de la recette ; épargne de
toutes réparations , fuppreffion de tous petits
détails économiques, toujours onéreux au prince;
profit certain pour l’Etat dans les nouvelles adjudications
, qui fe feroient 'aux enchères-après
la révolution de ccnt années , 3c dans Jefquellcs
le roi jouiroit des améliorations qui auroient été
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faites , 3c du furhauflement des baux, tel que l’abondance
de l’argentN, 3c le plus haut prix des
denrées l’auroit procuré.
Mais ne feroit-il pas poffible de trouver encore
un autre avantage bien plus grand , dans les in féodations
dont il s’agit ?
Il y à long-tems que la néceffité d’un terrier-
général du domaine dans tout le royaume a été
reconnue. Louis X IV ordonna en idy y , 16f6 ,
id / 7 3c i <5j 8 , qu’il y feroit inceflamment procédé.
Par une déclaration du %6 mars 1 <5/9 , ce
prince régla les formes qui dévoient être gardées
pour y parvenir, 3c fufpendit l’exécution des terriers
de tous les feigneurs particuliers , jufqu’au
parfait acçompliflement du terrier univerfel. Il avoit
même établi une chambre fouvera’ine au bailliage du
palais à Paris , pour juger les eonteftations que la
confection de ce même terrier pourroit occa-
fionner.
L ’entreprife peut-être trop vafte , de trop longue
haleine , 3c trop difpendieufe , n’ayant pas
été fui vie avec les foins 3c l’aCtivité qu’elle au-
roit exigés’ , le terrier univerfel eft encore à
faire. Il y a été en quelque façon fuppléé par
des états qui , dès 1669 , furent demandés au fermier
des domaines , qui furent enfui te dreffes , 3c
dont les doubles furent dépofés dans les bureaux
des finances , en eonféqnence des ordres très-
précis que M. le Pelletier , alors contrôleur-
général des finances, avoit donnés à ce fujet en
1684 & 1686.
Les receveurs-généraux des domaines, ayant été
créés en titre d’office , par édit du mois d’avril
168 y , il leur fut enjoint de faire mention de dix
ans en dix ans , dans les états au vrai des comptes
qu’ils rendroient, de la confiftancc en détail de
tous lès biens 3c droits dépendans des domaines ,
dans leurs généralités 3c départemens.
Par autre édit du mois de décembre 1701 , ils
furent déchargés de cette.obligation ; mais on leur
impofa. celle de remettre, aufli de dix ans en dix
ans , aux chambres des. comptes , un état en détail
par eux ligné , de la confiftance de tous les
domaines du r o i , tant en cens , rentes , mouvances
, qu’autres droits 3c revenus en dépendans ,
lequel état feroit donné en papier non timbré ,
fur ceux qui leur feroient fournis , tant par les
fous-fermiers , que par les engagiiles des domaines.
Un troifieme édit du mois de juin 1727, ordonna
que les états en détail des domaines , feroient
à l’avenir rapportés fur les comptes des
receveurs-généraux tous les cinq ans , à commencer
en iyz6 ; 3c . pour les exciter à plus d’ exactitude
, il leur fut attribué mille livres tous les
cinq ans pour lefdits états.
L ’auteur qui rapporte les difpofitions de ces
ïo ix , attelle qu’elles n’ont pas été ponctuellement