
Quoique cette nouvelle déclaration fût calquée
fur celle de 169 ƒ , & qu’elle en rappeïlât les dif-
pofitions , on changea celles qui regardoient plu-
fieurs corps.; ils- furent autorifés à faire eux-
mêmes la répartition de la capitation fur leurs
membres.
De ce nombre furent i ° . , le parlement de
Paris , 8c les autres cours fupérieures du royaume,
le premier président, deux députés «Scie procureur-
général de chaque compagnie, formèrent les.rôles ,«
& on y Comprit les greffiers , les avocats <3c les
procureurs.
2°. Le châtelet, & les jurifdiélions fubalternes
ou inférieures de Paris ; les chefs arrêtèrent également
les rôles , de concert avec deux députés 8 c
le procureur du roi.
Dans les provinces, les intendans eurent ce
loin , conjointement avec les officiers de chaque
jnrifdiétion.-
Enfin, tous les corps & métiers fournis à la
jurifdiéiion du lieutenant-général de police de
P a r is , furent taxés par ce magiftrat, 8c le procureur
du roi.
Le paiement de la capitation fut diftribué en
deux termes ; le premier , à la fin de mars , le
fécond à la fin de feptembre, à peine , pour ceux
qui n’auroiènt pas acquitté dans: ces délais ,. de
payer moitié en fus , de la fomme dont ils feroient
reliquataires.
L à comptabilité fut réglée comme en 169y ;
c ’ eft-à-dire qu’on attribua la connoiflance des
conteftations relatives' à la matière , aux intendans
, à l’exception néanmoins de tout ce qui pour-
roit concerner les officiers des cours fouveraînes ,
dont le jugement en première & derniere inftance
fut attribué à ces compagnies/'■ <:
Les états de répartition dévoient être envoyés
au confeil, par ceux qui avoient été chargés de
leur eonfeéiion , 8 c il devoir , en conféquence de
ces états , être arrêté des rôles qui dey oient' être
rendus exécutoires ; mais comme la formation de
ces états exigea des délais plus confidérables qu’on
ne l’avoit penfé ; le 19 avril 1701 , un arrêt du
confeil déclara ces états même exécutoires par
provifion. .
Comme le produit de la capitation ne fuffifoit
pas encore aux dépenfes de la guerre , un arrêt
du confeil du $ mars 1705*, revêtu de lettres-
patentes dûement enrégiftrées le 4 feptembre , y
joignit, par addition , la levée de deux fols pour
livre du dixième du montant de cette impofition.
Ces deux fols pour livre ont engendré les quatre
fols pour livre qui fe lèvent encore actuellement.
Il fut .ordonné la même année, qu’à l’avenir les
gens de campagne feroient impofés au marc la
liv r e , de la taille qu’ils paieroient.
. Quoique la déclaration de 1701 eut afîiiré que
la capitation cefferoit fix mois après la paix , fans
que le quartier qui feroit commencé p4t être convpris
dans ces fix mois , cependant cette impofition
fut prorogée indéfiniment par déclaration du 19
juillet iy\y. On révoqua même les exemptions
qui avoient été promifes en 1708 8c 1709, à ceux
qui acquerraient des rentes de la création des
années précédentes»?
Trois années après , un arrêt du 24 décembre
1718 ? dans la vue de faciliter la reddition-& l’ap-
purement des receveurs de la capitation 3 ordonna
si que les redevables qui auroient obtenu l’année
précédente des modérations ou décharges de leurs
taxes, feroient obligés dé les remettre aux pré-
pofes à la recette de la capitation avant le premier
mars prochain , finon , qu’elles fer.oient milles
^ nuJ effet ; que les particuliers qui fe préten-
droient impofés-ailleurs , <§t ne jùftifieroient pas
de leur quittance dans le mois de la demande , fe-
: roient contraints au paiement des fommes portées
par les rôles, fans efpérance d’aucune réduction,
ni compenfation.
, _ S il, eft de l’intérêt du fouverain qu’une impofition
pafle diredement de la main de fes peuples
dans fon tréfor, il l’eft auffî qu’elle foit répartie
avec la plus grande égalité ; mais une diftribution
par vingt claffes n’étoit pas propre à remplir ce
dernier objet.
La contribution du pauvre eft forcée, & celle
du riche eft modique ;. car la même qualité , le
même état, la même profeffion, ne donnent pas
cette égalité- de moyens & de fortune, qui eft fi
gratuitement fuppofée. D ’ailleurs en admettant
cette égalité dans la recette ,, peut - elle exifter
dans la dépenfe. N ’eft-il pas plufïeurs . circonf-
tances, comme celle d’une famille nombreufe ,. de
parens à foutenir , qui aggravent la dépenfe &
rompent cet équilibre d’aifance fur lequel repofe
l’uniformité de la capitation par claffes.
Un pareil impôt, dit un écrivain qui mérite
d’être cité avec éloge, ( l’auteur des Confidérations
Jur les finances , tom. 4 , pag. 1 iq ) , eft très-propre
à fuppléer à une néceffité extraordinaire , a parce
33 qu’il fe perçoit fans beaucoup de frais, & qu’il
33 rentre promptement , s’il eft principalement
:■ 33 réparti fur lès riches. Pendant la p a ix , il eft
33 moins avantageux aü public , qu’un impôt réel
33 fur les biens , parce qu’il tient trop de l’arbi-
! 33 traire ,•& qu’à la longue le riche eft déchargé,
3? & le pauvre furchargé.
33 Les dé trèfles Fréquentes de Pétat, depuis-î’é-
• 33 tabliffement de cet impçt, ont encore contribué
. 3>tà le répartir plus inégalement. Prefqué toutes
39 les charges ont été taxées à une capitation,
33 8 c , par une maxime qu’on appclleroit plus
33 juftement un fophifme, on ne peut être fournis
33 à deux capitations y de façon que plus un homme
3? eft riche, plus il eft; affûté de., payer peu d,è
33 capitation en achetant une charge.
33 II paroît cèpendant que l’efprit primitif de
33 la loi étoit d’affeoir fimpôç en ^alfçn des,
facultés.
39 facultés. En général, toutes chofes dégénèrent
33 facilement en ufage parmi nous & elles fub-
33 liftent enfuite long - tems ; parce ;.que c ’eft
33 l ’ufage.
» L a même inégalité s’eft introduite parmi les
33 compagnies qui paient la capitation en corps ;
33 c’eft-à-dire , que le plus riche paie - autant que
» le moins riche. S’il eft une de ces compagnies
3» où cet abus foit remarquable, c’eft parmi les
33 financiers. Quelle que foit leur fortune Ou leur
33 portion d’intérê t, la capitation de chacun eft 3» égale. •
33 La'France feroit trop puiffante , fi la répar-
» tition des impôts étoic faite également. Que
33 l ’on compare la maniéré dé vivre des riches
» de la capitale , ôc des principales villes du 3ï royaume , au plus- fort de la guerre,.avec
33 les changement qui arrivent alors dans les 3» campagnes , on fera furpris , d’un cô té , que
33 l ’état foit fi peu fecouru , & que de l’autre il le
33 foit autant.
33 T e l impôt qui ne retrancherait pas dix pif-
33 tôles fur le je u , ou fur les déperifes les plus
39 frivoles , dans chaque famille aifée , eut fuffi
33 quelquefois ,. avec les revenus coürans , pour
33 faire la guerre , fans que le laboureur en en-
39 tendît parler ailleurs , que dans les prières pour
39 demander la paix. . .
* Autant notre nation eft eftimable à beaucoup
33 d’égards, autant'elle mérite de reproches fur
33 l’intérêt que l’on doit prendre à la gloire &
33 au maintien de la focîété 33. "
Un autre écrivain plus récent, & dont nous
avons emprunté le dialogue fur les aides ,
>( voye% cet article) , ne s’exprime pas avec moins
de force au fujet de la capitation. C ’eft s’embellir
que de citer fes expreflions. . . .
- cc E f t - i l rien de plus arbitraire qu’un pareil
33 impôt ? L ’affeoira-t-oh fur des déclarations ?
33 Mais il faudroit entre le monarque & les
33 fujecs, une confcience morale qui. les liât l ’un
33 à l’autre par un mutuel amour du bien gé- 33 neral , ou du moins une Confcience publique 39 qui les raflùrât l’un envers l’autre, par une
33 communication fincere & réciproque de leurs
33 lumières ,& de leurs fentimens. • Or comment
33' établir cette confcience publique qui ferviroit
33 de flambeau, de guide & de frein dans la marche ,
33 des gouvernemens ? ,
33 Percera-t-on dans le fanduaire des familles^
* dans le cabinet du citoyen , pour furprendre
39 & mettre au jour ce qu’il ne veut pas révéler , 3» ce qu’il lui importe même fouvent de tenir 3* caché ? Quelle inquifîtion ; quand même on paras
viendroit à cônnoître les reflources de chaque 3» particulier, ne varient-elles pas d’une année à
» l ’autre , avec les produits incertains 8c pré-
?» caires de l’induftrie ? Ne diminuent-elles pas
Finances. Tome L
33 avec la multiplication dès enfans, avec le dépé-
33 riffement des forces par les maladies , par l ’âge,
33 & par le travail.
' 33 Les facultés de l’humanité, utiles 8c labo-
» rieufes, nç changent-elles pas avec les vicifli-
33 tudés que le "tems apporte dans tout ce qui
. 33 dépend du tems & de la fortune. La taxe per-
33 fonnellé eft donc une vexation individuelle fans 33 utilité commune , & fans profit pour l’étaty>r.
Hifioire Pii. D. D. 1. édition de 1780 , tom. 4 ,
in-4°* Pfig-638*
Quels que foiént les effets de la capitation , on
ne peut pas accorder à l ’écrivain que nous venons
de citer , qu’elle foit fans profit pour T etat , quand
il en retire près de trente pillions , 8c qu’eiie'devient
d’ailleurs impofition réelle 8c territoriale dans les
' campagnes , puifqu’elle y eft impofée. au marc la
livre de la taille. C ’e ft, fans doute, faute d’avoir
bien connu cette diftinéiion dans ce genre d’impôt,
que l’on a tiré la conclufion , qù’elle étoit fans
profit pour l’état.
Au furplus , c ’eft la déclaration de 1701 qui
fort de réglé a la levée de la câpitation perfonnellc.
L e miniftre des finances prend chaque année les
ordres du roi à ce fujet. Il en.fait part tant aux
chefs des compagnies fupérieures de Paris 8c des
provinces , qu’aux intendans^,aux chefs des ju -
rifdidions inférieures de Paris; à M. le prévôt
des marchands, pour l’impofition; des habitans , <3c
à M. le lieutenant-général de p olice, pour celles
des communautés d’arts’ & métiers.
La lettre qui eft écrite par le miniftre aux chefs
des compagnies-, pour leur faire connoître les
intentions du roi , ne contient point la fixation de
i’impqfition. Cette fixation eft toute faite par le
tarif de 1701 , avec l’augmentation d’ un tiers eir
fus de chaque taxe*
Pour les provinces, il eft arrêté au confeil un
état de ce que chacune doit- fupporter, & fie miniftre
annonce aux in tendons la fomme fixée pour
la capitation dé leurs départements refpedifs.
On doit obfervér que dans la maffe totale dé
cetfe impofition , la capitation que paient la no-
blefle & les privilégiés , forment dans les provinces'
l ’objet le m'oins confiderable. La portion
la plus forte eft celle qui eft répartie entre les
taillables 8c les non privilégiés, au marc la livre
de la taille.
Comme la capitation eft fujette à des diminutions ,
foit par les décharges ou modérations que l’on eft
obligé d’accorder à ceux qui font impofés au-delà
de leurs facultés, fo it à caufe des non-valeurs qui
furviennent, par le décès de ceux qui meurent avant
l ’échéance des termes de paiement, on eft toujours
obligé de demander une fomme plus forte que
celle qui eft fixée pour le tréfor-royal.
LeS inte-ndans étant plus 'à portée que ié confeil
d’éyaluer la fomme qui .pouvoit être néceflairc
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