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Il convient d’ajouter ici que ces fournifleurs &
minotiers , quoique nommés par l’adjudicataire
des fermes , ne jouiffent pas des privilèges accordés
aux employés & commis ; fans doute parce
que leur exercice n’a lieu que les jours de l’ouverture
des dépôts ; 6c fe rapporte plus à l’utilité
de leurs concitoyens, qu’à la conservation des
produits de la ferme du roi.
On a vu ci-devant, comment il avoir été réglé
que fe fer oit la vente du fel dans les dépôts , 6c
à quelles heures elle auroit lieu. L ’ordonnance
des gabelles , article io du titre 16 , a ordonné
que ces dépôts feroient ouverts tous les jours de-
marché , à commencer du premier mars jufqu’au
premier oétobre , depuis fix heures du matin juf-
qu’à midi, & depuis deux heures de relevée jufqu’à
fe p t , 8c le relie de l’année, depuis huit heures du
matin jufqu’à midi , 6c depuis deux heures jufqu’à
quatre; elle a ajouté que le felferoit, chacun de ces
jou r s , tiré du dépôt par les marchands , pour être
par eux expofé en vente fur la place du marché, en
la maniéré accoutumée.
L ’article 2 du même titre porte d’ailleurs que,
dans les lieux où il n’y auroit pas de marché , les
jou r s , heures & places feroient réglés, avec les
habitans 6c le commis du fermier, par le juge du
dépôt.
L ’article i j a ajouté que, pour la commodité
des artifans & du menu peuple , les dépôts feroient
encore ouverts les dimanches 6c fêtes, autres que
les fêtes folemnelles ÔC de celles du patron , depuis
fept heures du matin jufqu’à neuf, 6c depuis
midi jufqu’à deux ; mais que, dans ces jours , le
fel ne Teroit expofé' en vente , qu’à la porte du
dépôt feulement.
Enfin, l’article i x , enjoint aux marchands, de
rapporter à la fin de chaque jour dans le dépôt,
les feîs non-vendus , pour y être renfermés fous
la cle f ; ce dont il fera fait mention fur le regif-
tre du commis du fermier.
Depuis que la déclaration du 22 novembre
1722. , a réglé le nombre des minotiers , marchands
de fel en chaque dépôt , fuivant l’objet
de la confommation de fon reffort ; c’eft dans
l’intérieur même du dépôt que la vente fe fait.
C et arrangement évite aux marchands , les embarras
ÔC les déchets auxquels ils étoient expofés
lorfqu’ils tranfportoient chaque jour de - vente
leurs fels fur le marché où ils reiloient à l’air pendant
tout le jo u r , ôc qu’ils le rapportoient le foir
au dépôt ôc en même teins, donne moins de
facilités pour les abus.
Dans quelques dépôts, les minotiers ou marchands
, forment enfemble une même mafle qu’ils
renouvellent auffi fouvent que l’exige leur débit,
ôc tout eft alors commun entre eux.
Dans d’autres dépôts , chaque minotier fait fes
approvifionnemens particuliers, ôc vend concurremment
avec fes confrères ; mais le dépôt eft
toujours commun à tous ceux du même lieu. Il eft •
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divife en autant de cafés qu’ il fe trouve de minotiers
; en forte que chacun vend féparément
dans fon magafin particulier.
L ufage de plufîeurs autres dépôts où les mi-
notiers font en grand nombre , eft que chacun vend
1 alternativement jufqu’ à la concurrence de cent
foixante-quinze minots. Lorfque cette quantité
eft débitée, un autre minotier ouvre fon magafin^
1 & ainfi de fuite, jufqu’à ce qu’ils aient vendu l ’un
1 après l’autre la même quantité.
L ’ordonnance des gabelles n’ayant pas prefcrît
la forme des mefures dont les minotiers dévoient
fe fervir ^ pour le débit de leurs fels , chacun
d eux avoir adopté celles qui lui avoient paru les
plus commodes. Afin d’établir l ’uniformité , l’article
14 de la déclaration de îy i z , a ordonné,
qu’à compter du premier janvier fuivant, le boif-
feau des dépôts feroit fixé au quart du minot,
mefure de P a r is , avec défenfe de fe fervir d’une
autre mefure, à peine de deux cents livres d’amende.
La cour des aides de Clermont a prefcrit
l’exécution de cette obligation dans fon reiïort,
par arrêt du 11 mai 1 7 6 1 , & a fait procéder à
la confection des matrices néceftàires pour étalonner
les mefures ordonnées.
Conformément à l’article 1 ƒ de la déclaration
de 1722 , les minotiers ne doivent mefurer leur
fel qu’à pelle renverfée , c ’eft-à-dire , en rem-
plilTant le boifleau avec la pelle , & non à pello
forcée , à peine de deux cents livres d’amende :
mefurer à pelle forcée, c’eft jeter dans le boifleau
le fel pour qu’il s’y entafle , ou I’ cntafler en le
frappant de la pelle. Cette maniéré de mefurer
étant convenue entre le minotier & l’acheteur, four-
niroit à celui-ci un excédent de confommation
dont il lui feroit facile enfuite d’abufer , en le
vendant en pays de gabelles. C ’eft par ces motifs
que la loi s’ eft occupée des moyens de prévenir
cette connivence.
Le prix du, fe l, dans les dépôts, n’avoit pas
été fixé en -i<58o par l’ordonnance;, parce qu’ à
cette époque, il exiftoit un trop grand nombre
de marchands, pour craindre qu’ils ne conçertaf-
fent le monopole. Mais lorfque le nombre des
minotiers eût été régléôc réduit à ce qu’exigeoit
l’arrondiflement de chaque dépôt , il leur étoit
facile de s’entendre pour haufier arbitrairement
le prix de leurs fels. Les officiers de la juridiction
du dépôt de Châtelierault, s’apperçurent les
premiers du projet des minotiers. Ils le déconcertèrent
par une ordonnance qui fixoit ce p r ix ,
en fe réfervant de le changer ultérieurement fuivant
les circonftances , ôc elle fut approuvée par
la cour des aides de Paris.
Cet exemple ne tarda pas à être fuivi par toutes
les juridictions des autres dépôts, & elles font
aéluell ement toutes dans I’ufage d’arrêter chaque
année , le prix que les reflortiflans doivent payer
le fel. Pour le fai re en connoiflance de caufe,
ils prennent des informations exactes fur les va-
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rîations qu’éprouve la valeur du fel dans fes
falorges où les minotiers font leurs achats , en
ajoutant, à cette valeur , les frais de voiture,
le montant des droits payés dans ce tranfporx, ôc
enfin le bénéfice honnête qu’il eft jufte de leur
accorder.
Si cette police met les intérêts du public en
fûreté’, les lettres-patentes du 10 avril 17 4 P ,
ont auffi pourvu aux moyens de préferver la ferme
des gabelles de tout abus dans la confommation des
reflortiflans aux dépôts : chacun d’eux étant obligé
de prendre un permis ou bulletin du contrôleur
du dépôt, prépofé par le fermier, dans lequel eft
énoncée là quantité du fel qui doit lui être délivrée.
Il eft défendu aux minotiers d’ en livrer
davantage , à peine de cent livres d’amende, pour
la première fois , par chaque contravention ; &
en cas de récidive , d’être pourfuivis comme faux-
fauniers. Les mêmes lettres-patentes, article 4 ,
portent que les contraventions de cette efpèce
feront conftatées par des procès-verbaux lignés de
deux commis de l’adjudicataire,lefquels feront foi
jufqu’à infeription de faux ; & font défenfe aux
juges de modérer les amendes dans les cas de cette
efpèce, à peine d’en répondre èn leur propre &
privé nom.
Au furplus , l ’ordre qui s’obferve aujourd’hui
dans les dépôts , pendant la vente , ne permet
guère aux minotiers de délivrer aux relfortilTans
des quantités fupérieures à celles qu’il leur a été
permis de lever , & à ceux-ci, de fe faire faire
deux livraifons fur un feul bulletin.
Lorfqu’un particulier , domicilié en pays de
dépôt 3 veut faire fa provifion de fel , il fe rend
au bureau du contrôleur ; il lui préfente fa, feuille
de gabelles , qui contient l’indication du nombre
des perfonnes dont fa famille eft compofée, 6c lui
déclare en même tems ce qu’il defire de . fel.
L e contrôleur, après avoir vérifié l’expofé de la
fèuille , calcule fi la quantité de fel demandée n’ex-
cede pas la proportion d’un minot par an pour
fept perfonnes , Ôc la provifion de fix mois , auxquels)
doit être reftreinte celle de tout habitant
du pays de dépôt. Après cette opération , il inferit
au dos de la feuille de gabelle, que la livraifon
de tant de fel peut être faite.
Le contrôleur remet enfuite ce bulletin à un
employé chargé de la garde du dépôt ; lorfque
celui-ci reconnoît l’inftant où le reflôrtiflant peut
fe préfenter pour recevoir fa livraifon, fans apporter
aucun trouble dans le fervice du mefurage ,
il l’appelle 6c le fait entrer dans le dépôt, en lui remettant
fon permis, pour qu’il le préfente au minotier.
Ce dernier , après avoir vu la quantité du
fel accordée, la livre , 6c rend l’expédition.
A la porte du dépôt, fe trouve encore un vérificateur
, qui juge de l’oeil fi la livraifon eft exacte.
En cas de foupçon, il conftate la quantité par un
contre-mefurage , ÔC verbalife, s’il y a lieu , finon
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il ligne le vu fortir du dépôt, ÔC remet le permis
au particulier.
Parmi les formalités auxquelles font fujetres les
ventes de fel"^ dans les dépôts , il faut d’abord
placer l’obligation des collecteurs de la taille , de
délivrer au contrôleur du fermier , au plus tard
dans le mois de février , une copie de leurs rôles ,
à peine de quarante livres d’amende: l’article 17
du titre 16 de l ’ordonnance des gabelles y eft formel.
L ’expérience ayant appris que ces difpofi-
tions étoient infufïifantes, parce qu’elles ne fixoient
pas la forme de ces rôles , l ’arrêt de la cour des
aides de Clermont y pourvut, dans fon reflort,
le 2 août 1692 ; un arrêt enjoignit aux collecteurs
d’inférer le nombre ôc la qualité des perfonnes
dont chaque famille feroit compofée , fans y comprendre
les enfans aü-deflôus de deux ans , ni
les mendians ôc vagabonds qui n’auroient pas de
domicile fixe , à peine d’être refponfables en leur
propre ôc privé nom, des faufles livraifons qui
pourroient être faites ; il fut défendu en même
tems . aux contrôleurs des dépôts, de donner pour
l ’ufage de chaque enfant au - deflus de deux ans
jufqu’à fep t, plus que la quantité de trois livres
de fel pour l’année.
L a déclaration du 22 novembre T722 , eft venue
enfuite rendre ces obligations générales pour tous
les pays de dépôts , & même les étendre , en ordonnant
de comprendre dans un chapitre féparé , les
chapitres eccléfiaftiques , les communautés régulières
, les nobles & officiers d’épée 6c de jullice ,
avec leurs domeiliques , avec défenfe d’exagérer
le nombre de - perfonnes dont chaque famille ©u
communauté feroit compofée, à peine de dix livres
d’amende pour chaque perfonne.
L a cour des aides de Paris s’eft conformée à cette
jurifprudence en différentes occafions , notamment
par fon arrêt du 16 mars 1764. Mais elle n’admet
les enfans dans les rôles qu’au-defïus de huit ans;
d’ailleurs , comme aucun des règlemens qu’on a
cités n’obligent les collecteurs à ligner les copies
des rôles qu’ils remettent aux contrôleurs des dépôts
3 c’ eft à ceux-ci à fe donner d e s ’foins pour
les avoir exacts, en les comparant aux rôles des
années antérieures*
On a vu que tous les habitans domiciliés dans
l’arrondiflement d’un dépôt, ne peuvent aller lever
leur fel dans un autre. L ’article 10 de la déclaration
du 22 novembre 1722 , a renouvellé cette
défenfe, à peine de cent cinquante livres d’amende,
& l’article 12 défend aux commis des dépôts de
leur délivrer, fous quelque prétexte que ce foit-,
aucuns paflavans , foit pour aller aux falorges ,
foit pour aller en d’autres dépôts , nonobftant ce
qui eft porté par l’article 18 du titre 16 de l’ordonnance
de 1680 , auquel il a été exprefîement
dérogé.
La même ordonnance, article y du même t itre ,
défend également à ces reflortiftans d’avoir chez