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cc D ’ici à l ’époque de la paix , ôfi difcuîerà de I
» nouveau toutes les idées qui peuvent être relatives j
» à la nature des droits dy aides en général ; 8t comme
dd. ce font des droits purement locaux, dont la modi*
a? fication ne dépend p as , comme les gabelles , d’une
dd légiflation générale , on pourra faire quelques
d» effais p artiels, & les adminiftrations provinciales '
d> feront en état de féconder, à cet égard , les vues
» bienfaifantes de votre majefté dd.
M . de Boulainvilliers donna en 1716 un projet
pour fupprimer les aides 3 & les remplacer par un
droit de bouchon, dont il imaginoit que le produit
pouvoit monter à vingt-quatre millions, prefque
fans frais ; bien entendu que la vente en détail des
boiflons feroit réfervée exclufîvement à ceux qui
&uroient obtenu le privilège de tenir cabaret.
V o ic i fon calcul. I l compte en France 48112
paroifles , dont moitié à la campagne & moitié dans
les villes clofes. Parmi celles de la campagne , il
s’en trouve beaucoup où il n’y a point de cabarets,
& beaucoup auffi en ont trois ou quatre. Il eftime
en conféquence qu’on peut fans erreur en compter
vingt mille.
A l’égard des 28114 paroifles de v ille , il y place
quarante mille cabarets ; ce qui fait foixante mille
en tout. Suppofant que dans quelques-uns de ces
cabarets, far-tout à Paris, on vend jufqu’à deux
cent muids de vin , pour lefquels les droits font
de fept à huit mille livres , il propofe de ne faire
payer au plus fort cabaretier que quatre cents liv.
& au plus foible , cinquante livres.
En conféquence il forme fix clafles de tous ces
cabarets , 8c les taxe dans l’ordre fuivant.
D ix mille cabaretiers à yo liv . . . yooooo liv.
Idem, . . . . à 100 . . 1000000
i j . . . . . IJOOOOO
U . . . . . à 200 . . 2000000
U . . . . . à 300 . . 3000000
Jd. . , . • à 400 . . 4000000
t2000000
En doublant ces taxes,les pïus foibles paieroient
Cent livre s, 8c les plus forts huit cents livre s , 8c il
en réfulteroit vingt-quatre millions.
Mais ce projet, dans fon exécution, s’ écarteroit
des principes de la juftice. Sans parler des privilèges
des provinces, des v ille s , des corps, communautés
& particuliers auxquels il n’eft fait aucune
-attention, comment former un plan général 8c commun
fur une confommation qui dépend de tant de
eirconflances ?
La fîtuation d’ un cabaret » l’intelligence & l’activité
du cabaretier lui attireront un débit prodigieu
x, tandis qu’ un autre dans la même v ille , dans
.la même paroiflè, mais moins^avorablementplacé,
n’aura qu’un débit très-médiocre , 8c cependant
paiera la même fomme , parce qu’il fera dans la
même cia fie. On ne voit ni proportion ni sûreté
dans cet arrangement. Ceux qui gagueroient à ce
marché paieroient exactement;ceux qui ne feroient
qu’un médiocre bénéfice paieroient mal ; ceux qui
perdroient ne rendroient rien du tout.
L ’objet du produit des. aides eft trop intéreffant
pour le confier ainfi à l’incertitude 8c aux difficultés
du recouvrement.
1 M. Du p in , fermier général, homme très-inf-
truit 8c rempli de bonnes vues, donne un autre
projet de réforme des aides dans fes Économiques,
ouvrage en 3 vol. in-40. imprimé en 1 7 4 6 ,8c dont
il n’a été tiré que vingt exemplaires.
Ce financier, très-zélé pour le bien public, convient
que la multiplicité des droits à*aides, la variété
dans leur quotité exigent une forme.coûteufe,
compliquée, contentieufe, 8c qui donne des entraves
au commerce 8c à la confommation. Il rappelle
ce qu’ en dit M. Melon dans fon Ejfai politique
fur le commerce. Quelle -funefte fcience que
celle qui ne pouvant s’apprendre qu’avec tant de
difficultés pour les fermiers, laiffë de malheureux
redevables qui ne favent pas li r e , accablés d’ua
monftrueux affemblage de procédures ?
Excité par cette réflexion à préfenter un remede
à ce mal, voici,le plan que propofe M. Dupin.
Le commerce du v in , de l’eau-de-vie, de la
biere, du cidre, 8cc, a deux objets. La confommation
intérieure, 8c la vente au dehors. L ’un 8c
l ’autre font confidérables , 8c une des grandes
fources des richeffes de l’état. Pour en tirer tout
l ’avantage poffible , i l convi^ndroit :
i° . Quant à la confommation intérieure, au lieu
de cette multitude immenfe de différens droits, de
les réduire tous à un feul, uniforme, raifonnable »
& tel qu’il ne pût nuire à la culture des héritages,
8c au defir que chacun a de travailler 8c de faire
produire à la terre tout ce qu’elle eft- capable de
rendre.
2°. Impofer ce droit ainfi réduit, feulement fur
la vente en détail, en prenant les précautions convenables
pour empêcher la fraude, 8c làiflant fub-
, fifter les droits d’oélrois 8c autres qui fe perçoivent
Ffur les boiflons à l’entrée des villes fermées. <
30. Affujettir à ce nouveau droit les provinces
où les aides n’ont point eu cours jufqu’à préfent,
nonobftant tous ufages 8c privilèges' contraires.
Je fens les objections que fon peut faire fur cette
: propofition, 8c particuliérement fur le dernier article.
Mais on doitfentir pareillement les avantages
qui réfulteroient de cette uniformité-. Il faudroit
faifir les tems 8c les circonftances convenables, 8c
procurer aux provinces nouvellement aflujetties
aux aides, une diminution proportionnée fur les
autres impôts, dont on pourroit trouver le remplacement
fur lés provinces qui gagneroient au nouvel
ordre de chofes.
Il s’en manque bien que ce projet doive être
regardé comme impraticable. Il faudra toujours
moins de génie pour changer cette impofîtion en
| un droit Ample, qu’il n’en a fallu pour créer Sc
! imaginer toutes les loix qui fubfiftent aujourd’hui.
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Ce qui vient d’être dit pour le v in , pour roit de
même avoir lieu à l ’égard de l’eau-de-vie 8c du
cidre. .Quant'à la biere, comme les brafleriescon-
fomment une grande quantité de grains qui pourroit
être plus utilement employée, 8c que la confommation
de cette liqueur nuit à celle du v in , il feroit
à propos de régler le droit qui fe paie à la fabrication,
en raifon de la valeur des grains, au mois ,
de janvier de chaque année ; enforte que dans les
années- abondantes le prix de la biere fe trouvât
augmenté d’un tiers ou d’un quart, 8c que dans les
années de difetre.le droit fût affez fort pour empêcher
de braflèr.
Quant au commerce du dehors, il doit être fa-
vorifé autant qu’il feroit poffible, en le débarraf-
fant de toutes les entraves auxquelles il eft aflii-
je t t î, 8c en rédüifant lçs droits de fortie, tant par
terre que par eau 8c par mer, à un droit uniforme
8c modique. La maxime fondamentale du commerce,
eft de procurer, par toutes voies, l’exportation des
denrées du cru qui font furabondantes, 8c celles
de l’induftrie, avec la précaution d’écàrter tout
ce que l’art 8c la nature donnent à ce même état
en quantité fuffifante.
Auffi-tôt qu’une denrée ou marchandife eft pouffée
au-delà de fa valeur naturelle, par l’effet des impôts;
la confommation ceffe ou diminue fcnfîble-
ment, 8c le produit de l ’impôt relient le ^même
coup. On ne fauroit donc avoir trop d’attention
à entretenir cette jufte proportion , fans laquelle
le commerce ne peut fubfîfter. Les cultures s’affoi-
bliffent. Les revenus de la nation diminuent dans
toutes les parties, parce qu’ elles ont entre-elles
une liaifon intime 8c indilïbluble ; la richeffe du
prince s’anéantit, parce qu’il n’en a pas d’autre
que celle de fes fujets.
L a légiflation de la partie des aides, eft fixée par
l ’ordonnance du mois de juin 1680, qui a été fuivie
de plufieurs réglemens interprétatifs. Les principaux
font les édits de feptembre 1684, décembre^
i 58ô, la déclaration du 4 mai 1688, pour le droit
de gros.
L a déclaration^du 10 octobre 1689, les édits de
février 1704 , 8c octobre 170^, pour la jauge-
courtage , les droits d’infpeéleurs aux boiflons 8c
aux boucheries ; celle du 23 oéïobre 1708, pour
les droits de courtiers-jaugeurs,8cc, Voye% chacun
de ces mots.
Un écrivain très-eftimable 8c très-inftruit, a
donné fur la légiflation des aides, 8c notamment
fur l’ordonnance de 1680 , des obfervations qui
peuvent être utiles lorfqu’on s’occupera de la modification
de cet impôt. C ’eft un motif pour les
configner ici. Recherches & confidérations , fur les
Finances, par M. de Forbonnais, édition in-12 ,
I7f3> *om. 5 , pag. 146.
Les divers droits d’aides furent Amplifiés 8c même
réduits de quelque chofe. C ’étoit un grand avantage
fans doute ; mais l’opération ne fut pas com-
plette, parce qu’ on ne corrigea pas la diverfité de
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l’impôt entre les diverfes généralités, entre les
élections même 8c les particuliers.
L ’origine de ces différences vient de ce que quelques
uns des droits avoient été rachetés dans certains
cantons. C ’eft une juftice fans doute de les faire
jouir d’un engagement contracté avec eux , mais il
n’en eft pas moins vrai que les communications
fouffrent de cet embarras, 8c que les loix uniformes
font toujours utiles à l ’état en général.
Seroit-il donc injufte d’examiner comment ce
rachat a été fait ? Si c’eft par Vétabliflement d’une
autre impofîtion, comme il en eft peu dont la répartition
foitplus égale 8c plus douce que dans celui-
ci , s’il eft modéré 8c fi le commerce étranger n’en
fouffre pas, il ne fembleroit point impoffible de
revenir contre ces compenfations.
Si le rachat a été fait moyennant une fomme d’ar»
gent , il ne paroît pas jufte qu’il foit perpétuel.
L e prince a toujours la faculté de rembourfer oti
de faire rembourfer par fes fermiers, en leur abandonnant
pour un'temsia. jouiffance des droits.
Il femble qu’on en pôtirroit dire autant des privilèges
particuliers, toujours accordés aux riches.
Rien de plus contraire à l’efprit de la juftice diftri-
butive, qui eft. le premier devoir des légiflateurs %
Pâme 8c le lien des fociétés.
L ’augmentation des produits ne feroit pas le feul
avantage d’une exaéle uniformité d’impofîtion entre
les provinces 8c les fujets ; elle mettroit tous les
lieux 8c tous les concitoyens dans un équilibre
naturel pour Iç commerce, pour la vente de leurs
denrées , 8c pour leur contribution aux charges
publiques.
Il fe préfente de puiffantes objections contre ce
fyftême, 8c il eft très-douteux que cette uniformité
de droits fur les vins, fût généralement a van tageufe.
Si le droit étoit fixé par muid, feroit-il jufte que
les vins qui par une qualité fupérieure font fufeep-
tibles d’un grand commerce extérieur, ou deftinés
à la confommation des riches, ne payaffent que le
même droit que les vins dont la qualité médiocre
exige qu’ils foient confommés dans la province ,
fur le territoire qui' les a produits ?
Si le droit eft réglé par la valeur du v in , quelle
fource intariffable, de difficultés pour le percepteur
, de fraudes de la part du redevable... Voyez
ci-après au mot ALSACE , combien l ’uniformité
d’impofîtions dans un état auffi étendu 8c aufli varié
que la France dans fes productions, peut entraîner
d’inconvéniens. Voyeç aujfi DROIT DE GROS.
L ’ouvrage que nous venons d’analyfer, préfente
enfuite des réflexions très-fondées, fur l’efïet de
quelques réglemens, en matières d'aides, nuifibles
au commerce des vins en Normandie.
Il femble que l’on ait étudié les moyens d’empê-
cher la fortie des vins de cette province pour l ’é tranger.
Au H av re, les droits font les mêmes fur
des vins qui y relient ou qui paffent . debout. A
Rouen, l’ordonnahee les affujettit à cinq livres
quinze fols onze deniers en paffant debout, fan*
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