
loppées avec autant de nobleffe que de
clarté dans le préambule de l’édit du
mois de feptembre 1664 , auquel eft
joint le tarif des droits d’entrée & de
fortie qui devoit avoir fon exéeution par
tout le royaume.
Flufieürs provinces s’obftinèrenf à ne
pas. vouloir admettre ee tarif, & préfé-
fërent de conferVer ceux qui y étoient
établis. M. Colbert, qui- n’avoit en Vue
que le plus grand avantage des provinces
, ne crut pas devoir ufer d’autorité
pour vaincre cëttè réfiftance. De-là vint
la diftinâion qui fubfifte aujourd’hui.
Les provinces qui acceptèrent le tarif
de 1664, font connues fous la dénomination
des provinces des cinq greffes fermes
, parce que les droits auxquels elles
âvoient été anciennement fujeites, corn-
pofoient cinq fermes particulières.
Celles qui s’y refusèrent , furent appel-
lées provinces réputées étrangères , parce
qu’elles étoient effectivement étrangères
au tarif dont les autres l’uivoient la loi.
Trois années après la publication de
l’édit de 1664 , on s’apperçut que les
droits impofés à l’entrée fur certaines
marchandifes de fabrique étrangère , & à
la fortie fur quelques matières premières ■
étoient trop foibles. Il parut intéreffant
d’écarter les unes, & de eonférver les
autres , non-feulement dans l’étendue des
cinq greffes fermes , mais même dans les
provinces réputées étrangères.
En conféquence , une déclaration rendue
le 18 avril 1667 , impofa un droit
confidérable & uniforme , tant à l’entrée
qu’à la fortie du royaume, fur les ef-
pèees de marchandifes qui y font dé-
Îîgnées. C ’eft ce qu’on appelle le tarif
de 1667.
Quoique lés deux tarifs de 1664 &
1667, euffent été combinés avec les égards
que méritoient la culture des terres, les
intérêts du commerce , & lés progrès de
nos manufacturés, oh êh étdit alors au
point qu’il falloir ménager les liàifons
politiques que nous avions avec des puiffânees
étrangères , & ce dernier objet
n’avoit pas été rempli.
Les Hollandois avoient d’abord pris
dés inquiétudes au fujet du tarif de 1667 ,
parce qu’ils nous fourniffoient la plus
grande partie des marchandifes fur lef-
quelles les droits y étoient augmentés. Us
s’en vengèrent en 1671 , en défendant
chez eux l’entrée des vins, des eaux-de-
vie & des manufactures de France.
Cette interdiction fatisfaifoir à la vérité
la vengeance- politique de l ’Etat ;
mais elle nuifoit à . lès fujets , en leur
Faifant acheter plus cher, & ailleurs que
dans nos ports, dés denrées de France ,
qui étoient pour eux de première nécef-
ficé ; & elle nous rendoit un plus grand
fervice, en nous mettant dans le cas de
porter nous -mêmes, à diverfes nations
du Nord , celles qu’ils étoient dans l’habitude
(89) de recevoir de la Hollande.
Il eût été à fouhaiter que cette réflexion
, que le commerce de la Hollande
ne pouvoir diminuer , fans que le nôtre
en reçût des accroiflèmens , eût foutenu
l’exécution générale de la déclaration de
1667. Mais la guerre vint déconcerter
toutes lés réfolutions du miniftre.
Lés inllances des Hollandois pour la
révocation de ce tarif , ayant redoublé
dans les conférences tenues à Nimégue
pour la conclufion de la paix l’arrêt du
confeil , du 30 août 1678 , anéantit le
tarif de 1667 à leur égard, & rétablit
pour eux , fur les articles qu’il comprend,
(89) Aüffi l’on voit quç-, dans le période de tems
qiïi remplît l’intervalle de 16 67a 167 8, l ’infatigable
Colbert fit tons fes efforts pour établir un commerce
direél avec les nations du N o rd , & dans
la mer Baltique. ï i eft feulement inalhèureux qu’il
ait choifi une compagnie à qui il falloit un privilège
èxc-lufif. Les 'encouragemens qui Iu-i furent
prodigués , 6c qui ne purent empêcher fa décadence
dans la guerre de T 672, auroient eu de très-
grands füccès , s’ils euffent accompagné la liberté
de ce_commerce , & f i , au lieu d’avance de fonds
que l’Etat fit à cette compagnie , il fe fût contenté
de protéger les particuliers , en envoyant des e.f-
cadres dans'Ces mers où la navigation m’ eft ouverte
qu’ en certaines faifons.
la feule perception des droits du tarif
de 1664.
Les ordonnnaces des mois de mai oc
juin 1680, celle de 1681, & celle du
mois de février 1687 , toutes faités fous
Colbert , poferent des principes folides
pour régler l’exercice du privilège exclu-
fif de la gabelle & du tabac, pour fixer
la perception des droits d aides oc des entrées
de Paris ; & enfin, pour affujettir
la manutention des douanes, & la levée
des droits qui y font dûs, à des formes
qui puffent être aulfis familières aux redevables
qu’aux percepteurs.
Toutes les autres parties de la finance
attirèrent également fon attention, & l’agriculture
elle-même, qu’on accufe ce miniftre
d’avoir négligée , lui dut des encouragemens.
C ’eft fous ce point de vue que
fe préfentent la réduélion des tailles & le
fameux édit du mois de novembre 1666,
en faveur des mariages. Il ordonna que tous
fujets taillables, qui feroient mariés avant
ou dans la vingtième année de leur âge,
demeureroient exempts de toutes contributions
aux tailles, impofitions & autres
charges publiques , fans pcmvoir y être
compris avant l’âge de vingt-cinq ans accomplis.
La même exemption fut accordée
à tout père de famille qui auroit dix enfans
vivans , non prêtres ou religieux, avec des
penfions en faveur des gentilshommes, &
des citadins des villes franches, qui auroient
auflî dix enfans vivans.
S’il s’agiffoit de faire l’éloge de ce mi-
niftre immortel, il faudroit rappeller en
détail tout ce qu’il fit pour améliorer les
finances ; il faudroit parler des grandes
routes qui furent ouvertes , de celles qu’il
répara, du fuperbe canal de Languedoc ,
qu’il entreprit, & de celui de Bourgogne
, qu’il projeta. Toutes ces opérations
font préfentées dans fon éloge , couronné
en 1773 , avec des couleurs dignes
à la fois du miniftre qui les a exécutées ,
& de l’homme d’Etat qui devoit bientôt
devenir l ’émule de fa gloire. Ainfi , en
étendant, en ranimant la marine , la pêche
, le -commerce, les colonies, les arts
& les manufactures , c’étoit, comme lé
dit fon panégyrifte, donner à la terre de
nouveaux hommes à nourrir, & aux propriétaires
de nouveaux objets de jouiffance.
S’il ne permit pas la fortie générale &
illimitée des bleds ; c’eft qu’en favorifant
la population par les lo ix, & en l'encourageant
par de nouvelles manufactures, il
falloit bien en même tems affurer la fub-
fiftance des travailleurs qui fe multi-
plioient, & dès ouvriers de toute efpèce
qu’il avoit attirés dans le royaume , fans
déranger les nouveaux rapports qui fe
trouvoient entre la récolte & la conforn-
mation. Dans ces conjonctures délicates,
il ne pouvoit qu’autorifer momentanément
& localement l’exportation ; car il n’étoic
pas poflîble de favoir avec exactitude, on
commenceroic la fortie du néceffaire , &
où finiroit celle du fuperflu.
On a vu les finances rétablies par Sully,
retomber dans le défordre & la confufion
fous fes fucceffeurs. Elles prirent, par les
foins de Colbert , un nouvel éclat qui
éblouit encore quelque tems après fa mort,
arrivée en 1683 ; mais l’oubli des principes
fuivis par ces grands . miniftrés , le
défaut de méditation & de connoiffances
fur les fources & fur la nature des impôts,
fur leur aCtion réciproque des uns contre
les autres ; la négligence de l’ordre & de
l ’économie dans la diftribution des fonds
publics , précipitèrent une fécondé fois
les finances dans une fubverfion & un
bouleverfement dont un demi fiècle a pu
réparer à peine les fâcheux effets.
Le mouvement qu’un commerce animé,
fous Colbert, avoit procuré à la circulation,
continuoit encore , quoique ce miniftre
fût perdu pour la France , comme on voit
un corps fe mouvoir long-rems après l’im-
pulfion qu’il a reçue. Mais en 1684, la
guerre avec l’Efpagne , la dépenfe du bombardement
d’Alger & de Gênes, la difette
de grains multiplièrent tellement les be-
foins, qu’il fallut recourir à des reffources
extraordinaires , à- des moyens forcés,
dont les vices font aujourd’hui vivement
fends , autant par leurs funeftes confé--