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’ Voyeç l’article 7 des lettres-patentes portant
bail de la ferme 'générale , au mot Ba i l .
B E A U C A IR E eft une ville du Languedoc,
fur le Rhône, fameufe par la foire qui s’y tient
tous les ans le 22 de juillet , ôc qui dure trois
jours , non compris les fêtes.
Nous allons çonfîdërer cette foire dans fa' conf-
titudon, ôc dans les immunités qù’èlle procure ; dans
fes produits pour la ferme générale , Ôc dans fes
effets par rapport au commerce particulier des
provinces qui l ’avoifînent, 8c au commerce avec
l ’étranger.
Nous l’envifagerons enfuite du côté de l’ufage
où eft la ferme générale , de faire affilier un de
fes membres à cette foire, pour examiner fi cet ufagè
n’ a pas dégénéré de Ton inftitution primidve.
Les marchandifes 8c denrées qu’on apporte à
la foire de Beaucaire, foit du pays étranger, Toit
de l’intérieur du royaume, ne jouïffent d’aucune
exemption.
Il n’ en eft attaché qu’aux marchandifes qui en
fortent. L ’immunité même , en ce cas, ne porte
que fur les anciens droits de foraine, & fur les
appréciations ou augmentations qu’ils ont reçues
jufqu’en 1632; époque où il fût fait à ces droits
une nouvelle addition , qui fe lève fur toutes-lies
marchandifes fufceptibles de ce d ro it, conformément
à l’article 292 du bail de Forceville.
I l a voit été ordonné , dit M . d’Agueffeau ,
dans le procès - verbal de fes opérations , en qualité
de commijfaire du confeil 3 en Lyonnois 3 au
chapitre de la foraine 3 par un arrêt du confeil du 12
juillet 1608 , que les marchandifes fortant de la
foire de Beaucaire , pendant les trois jours que i
dure fa franchife, paieroient le cinquième denier
des anciens droits de foraine, pour les gages des
officiers , ainfî qu’il fe pratique aux foires de Lyon.
M a is , par un autre arrêt du confeil du 26 mars
1611 , ce cinquième denier a été abonné à la
fomme de quinze cents livres par an, dont la ville
de Beaucaire a été déchargée , par les lettres de
confirmation des privilèges de cette foire , du mois
de feptembre 1632 , quoique cette fomme foit com-
prife dans le 240e article du bail de Fauconnet.
L a franchife de cette foire a reçu une atteinte,
par la perception que les fermiers du roi y font,
de laquelle le fieur Marmion a été l ’auteur, dans
Je tems qu’il a eu la direction des fermes en Languedoc
ôc Provence, V o ic i quel en a été le
fondement.
I l étoit porté par un des articles du bail des
fermes de ce tems-là , qui a -été rappelé par le
241e article du bail de Fauconnet, que les marchandifes
qui auroient été déballées Ôc vendues à
la foire de Beaucaire, jouiroient de la franchife ;
fous ce prétexte, on a voulu obliger les marchands
à déballer effectivement leurs marchandifes dans
la foire. On les a fatigués d’abord par des faifies
cjes pourfuites qui troubloient leur commerce,
& on les a réduits ainfî, à fe rédimer de la néceffité
de déballer leurs marchandifes, par un abonnement
qui.étoit très-modique dans les commence*-
mens, 8c qui a été augmenté peu-à-peu , jufqu’au
taux où il eft à préfent, depuis quelques années ;
favoir :
Pour la draperie, couvertures de laine, burats
d’Auvergne,8c bouracans fil 8c laine, 1 liv . z f. d.
Pour la mercerie . .. . . . » 8 6
Pour les toiles crues . . . . » 11 »
Pour les toiles blanches . 1 2 »
Pour les ouvrages de foie . . 3 » »
Pour les ouvrages d’or ôc d’argent 6 » »
Pour les dentelles du Puy . . z » »
Pour le verdet ou verd-de-gris Z » »
L e tout par chaque quintal.
Cet abonnement fe renouvelle tous les «ms à
chaque foire , 8c produit , depuis 1 <582 , qu’il a
Commencé , environ fept mille livres.
M. Dagueffeau écrivoit en 1689. Ce fait pou-
roit donner lieu à beaucoup de réflexions. I l eft
du moins une preuve qu’en matière d’impofition ,
il eft effentiel que les loix foientk. aflez claires,
aflez précifes, pour prévenir toute induétion, 8c
fe refüfer à l’extenfîôn.
Ce droit d’abonnement, ajoute cet illufire magistrat
, doit être regardé comme une chicane
qu’on a faite aux marchands , fur un mauvais fondement;
car il eft certain que ce mot de déballées,
qu’on a mis dans les baux depuis celui de 1 66y
feulement, à ce qu’on prétend, n’eft point dans
les lettres , arrêts 8c réglemens concernant cette
foire, qui portent Amplement, que toutes les marchandifes
amenées , vendues 8c débitées à cette
foire , jouiront de la franchife.
Quoiqu’il en foit de la légitimité de ce droit ,
dont le tarif vient d’être rapporté , l ’arrêt du 3
bétobre 1702 ordonna par l’article n , qui conf-
titue les privilèges de la foire de Beaucaire f que
les marchandifes qui en proviendrofent paieroient,
à la fortie du Languedoc, les droits de la réapré-
ciation en entier , avec les augmentations, en-
femble les droits d’abonnement pour les marchandifes
non déballées, 8c les droits locaux de l’intérieur
du royaume.
Malgré ces difpofitions, il s’eft toujours é le v é ,
de tems en tems, des difficultés fur la perception
de ce droit d’abonnement, ainfî qu’on le voit par
l’arrêt du confeil du 12 juillet 1723 , qui ordonne
expreflement l ’exécution de l’article 11 de l’arrêt
du 3 oétobrë 1702.
L ’article 292 du bail de Forcev ille, & qui fub-
fifte dans toute fa force, puifqu’il n’y en a pas
eu d’autre fait en détail depuis 1738 , rappelle
encore les deux arrêts qu’on vient de citer, comme
des titres qui affiirent la perception du droit d’ abonnement.
Cependant, foit par la difficulté de diftinguer
dans une immenfîté de marchandifes dépofées dans
les magafins des négocians, celles qui n’y font
conduites
B E A
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tOflduîtei que pour profiter de la franchife de la
foire , fans être déballées ni commercées ; foit
qu’il ait été reconnu que le foible produit de ce
droit ne méritoit pas que l’on prît toutes les
précautions propres à en afliirer le paiement,
parce qu’il en feroit réfulté , pour le commerce
, des gênes 8c des fatigues qui auroient pu
dégoûter les négocians de cette fo ire , 8c préjudicier
ainfî au produit des autres droits que l’on
y perçoit; il eft certain que le droit d’abonnement
ne fe perçoit plus , 8c qu’en 17 7 f > fuivant la
tradition établie à Beaucaire même, il y avoit plus de
«rente à quarante ans qu’on ne Favoit vu acquiter.
Nous avons dit précédemment que toutes les
marchandifes apportées à la foire de Beaucaire ,
foit, de l ’intérieur du royaume , foit du pays
étranger , doivent tous les droits d’entrée, 8c
de route , jufqu’à cette deftination.
Celles qui en fortent, font fujettes à trois dif-
férens droits , fuivant leur deftination 8c leur
nature. Ces droits font ; i° . L a foraine dûe généralement
fur tout ce qui fort du Languedoc 3
comme droit de fortie de cette province.
2°. L a domaniale à laquelle font aflujetties quelques
efpèces de denrées exportées à l’ étranger feulement
; comme les vins, les toiles blanches 8c crûes ,
des fabriques étrangères, les beftiaux de charge ôc
de labourage.
Voyei D om a n ia l e .
3°. L a douanne de Lyon due fur certaines
marchandifes , allant par terre en Franche-Comté,
Suifle, Piémont, comté de N ic e , Savoie , Italie
Allemagne , ôc principauté de Dombes , fur le
motif que l’arrêt du confeil du 23 mars 1603 ,
y aflujettit .les marchandifes fortant du Languedoc,
pour ces differens endroits.
Les foieries Sc les étoffes de fo ie , portées de
la foire de Beaucaire en Rouffillon , par terre ,
ne doivent que la moitié du droit ordinaire de
la douanne de Lyon , ou à raifon de deux
8c demi pour cent.
Ces diverfes perceptions font comprifes dans
un tarif particulier ; extrait du tarif général de
la foraine & de la douanne de Lyon , imprimé
exprès , en 1771 , à Montpellier, pour l’inftruc-
tion des commis appellés extraordinairement à
Beaucaire, pendant la foire.
Ce feroit^ peut-être ic i le lieu d’examiner fi
les difpofitions de l’a rrêt de 1603 , doivent
avoir leur exécution à la foire de Beaucaire, ôc
fi la levée de la douanne de Lyon , fur les
marchandifes envoyées par terre en Rouffillon,
eft également fondée. On pourroit objeéter contre
ces perceptions , l ’article X I de l’arrêt de
1 7 0 2 ,8c l’article 292 , du bail de Forceville,
qui ne font mention que des droits de foraine,
comme les feuls dûs fur les marchandifes, fortant
de cette foire. Cette reftriétion n’eftpasàla vérité
Finances, Tome 1%
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formellement prononcée ; mais elle eft une confé-
quence naturelle des expreffions de ces réglemens.
Au refte, les étoffes Ôc toute efpèce de tiffiiS
des fabriques nationales , jouiffent d’un affran-
chiflement abfolu à leur exportation : cet affran-
chiflement a lieu à Beaucaire , comme par-tout ,
en rempliffant les conditions fous lefquellcs il a
été accordé.
On obfervera qu’à l’égard de la principauté
de Dombes , qui ie trouve mife dans la clafle
du pays étranger , loin d’être actuellement un
petit, état féparé , elle a été réunie à la Brefle ,
ôc fait partie des cinq groffes fermes. Cette confî-
dération, doit donc la faire traiter à Beaucaire ,
ôc dans tous les bureaux où fe perçoit la foraine ,
comme cinq groffes fermes.
Toutes les fois qu’une marchandife enlevée à la
foire de Beaucaire, pour le pays étranger, eft impo-
fée à la fortie du royaume, a un droit plus foible
que celui du tarif : c’eft le foible droit qui doit
être p erçu, par la raifon que les vues du lé-
giflateur , font de favorifer l’exportation de cette
marchandife.
Indépendamment des droits exigés par l’adjudicataire
des fermes, il en eft encore dû un particulie
r , au maître des ports , comme attribution de
ion office de juge des fraudes aux droits des fermes.
Voye1 M a î t r e d e s P o r t s .
L a quotité de ce droit, qui eft très-rare dans
le royaume, n’ eft pas déterminée par la valeur ,
ou la qualité de la marchandife; il eft fixé par
chaque nature d’expédition , à raifon de cinq
à fîx fols ; 8c le maître des ports eft obligé de
ligner l’ expédition.
Le produit annuel de la foire de Beaucaire ,
s’élève à c e n t , ou cent vingt mille livres.
Si l’on confîdère cette foire dans fon influence
particulière fur le Languedoc, ôc générale fur
le commerce étranger, on ne trouvera pas des
réfultats auffi avantageux que pourroit le faire
croire l’idée qu’en donne fa célébrité.
Elle ne femble utile au Languedoc, qu’en ce
qu’elle eft un marché très-confîdérable pour les
fo ie s , ôc qu’elle occafionne une grande confom-
mation par le concours nombreux qu’elle ral-
femble ; car pour I’exporration des ouvrages de
fes manufactures , en tout tems elle jouit d’une
franchife abfoluë, ôc la foire de Beaucaire n’ ajoute
rien à cette faveur.
On remarquera même que les habitans du Lan-
gùedoc , en fe. fourniffant à cette foire , de
quantité de denrées ôc marchandifes qui y font
a rr ivé es , en remontant le Rhône , par Arles ,
paient des droits qu’elles n’auroient pas dû , fi
elles euflent été importées directement dans la
p ro v in c e , par Cette ou A g d e , 8c qu’elles ont
pax-là éprouve un renchériffiement de quatre pour