
cre ; & lorfqu’on en avoit quatre , on n’en
payoit aucune. Il paroît que ce peuple, qui
recevoit une éducation fi propre à former
des foldats, étoit peu habile dans la fcience
des finances. L ’expédient dont il fit ufage,
pour payer aux Samiens les fubfides qu’ils
demandoient , n’a pas trouvé d’imitateurs,
& probablement n’en aura jamais.
Comme il n’y avoit point de tréfor public
à Sparte, & qu’on étoit fans moyens pour
faeisfaire à cette demande , il fut ordonné
que tous les citoyens , leurs familles &
leurs troupeaux, jeûneroient pendant un
jour, & que la dépenfe qui auroit eu lieu fans
ce jeûne, feroit donnée aux Samiens (i i).
.Si nouspalfons à l’examen des finances des
Romains , nous reconnoîtrons que c’eft a
ce peuple conquérant, qui parvint à former
un empire à-peu près aulîî étendu que
l ’étoit alors le monde connu, que l ’Europe
doit les principes & la légiflation
qu’elle fuit en matière d’impofitions.
Quoique la plus grande partie des écrivains
attribue la décadence de ce fameux
empire à des caufes qui femblent étrangères
aux finances, cependant il n’eil pas
moins vrai que leur défordre y contribua
Beaucoup. On apperçoit aifément des liai-
fons & des rapports entre le fafte & la cupidité
, entre une dépenfe défordonnée &
les vexations, enfin , entre la tyrannie &
le relâchement de tous les liens de l ’état.
C ’eft un fpeélacle digne de tout homme
public, de voir que jamais- l’empire Romain
ne fut porté au plus haut degré de
fplendeur que fous les règnes, de Céfar &
d’Augufte. Ces empereurs, à l’exemple de
Servius Tullius, qui le premier avoir ordonné
le dénombrement de fes fujets , fe
procurèrent une connoiffance exaéle & détaillée
des forces & de la richelfe de leur
-empire, & c’eft ce qui compofa lerationaire
(rT)Lacedemonii eùm Samïi ah ipSs pctcrer.r ut
'pecunias. fîbi conferrent recuperaturis patriam,
Icitum fecerunt, un a die debere, 8c dominos, & fami-
Bam & jumenta jejunare , .& quantum infumpfiflet ?
linon jejunaretux, quifque tantum tribuere Samiis.
JÏriJl* economic a ^ val, %,. %ag»
romain. Ce cadaftre les mit en état de faire
une fage difpenfation des revenus publics,
dont la diffipation entraîna fous leurs fuc-
ceffeurs la ruine de l ’Etat,
Mais n’anticipons point fur les événe-
mens. Il paroît que fous les rois de Rome,
les impôts confiftoient en une efpèce de
capitation ou taxe par tête , & dans des redevances
exigées furies objets du commerce
maritime, & qu’oit peut-appeller droits de
douanej ainli qu’on les a vus dans la Grèce.
Tite-Live. le donne, à entendre , en difant
que l’expulfion des rois délivra le peuple
des contributions qu’il payoit (n ) .
Il paroît cependant que les impôts continuèrent
de. fublîfter, puifque-Valerius,
Publicola ou Poplicola ,, troifième conful,
en accorda l ’exemption aux veuves , aux
pauvres & aux orphelins. Ce fut ce même
conful qui ordonna que le trefor public
feroit dépofé dans le temple de Saturne,
pour que le peuple Romain put avoir con-
noi(Tance des dépenfes auxquelles, il fourni
(Toit.
Jufqu’à la trois cent cinquantième année
de la fondation de Rome , les foldats ne furent
point foudoyés par la république ; ils al-
loient à la guerre à leurs f r a i s & ce ne fut
qu’au liège de Veyes que les troupes commencèrent
à recevoir une folde. Lorfque
les. Romains avoient vaincu une nation, ils
ne lui aceordoient jamais la paix qu apres
avoir pris une partie du territoire, des vaincus
, & il étoit incorporé à celui de la république.
Une partie de ces champs conquis
fe vendoit pour indemnifer l ’Etat des
frais de la guerre; une autre fe diftribuoit
gratuitement aux foldats & aux pauvres du
peuple ; quelquefois on en donnoit à cens
au profit de la république, & des patriciens
avides fe- les faifoient adjuger , pour les
céder- enfuite moyennant une redevance-
confidérable, & indépendamment du cens
dû au domaine.
Les armées étoient nombreufes, &nean-
( 12.) Portoriis quo que & tribute plebe libexata,
dit cet historien , lib., a,, cap. ÿ .
moins les impôts étoient modiques. Le
bon ordre & l’économie du gouvernement,
les rieheffes de Carthage , de la Sicile &
des villes d’A fie, qui furent portées dans
les tréfors, fuppléerent aux contributions
du peuple: Les généraux d’armée n étoient
alors que les dépofîtaires du butin conquis
£iir les ennemis. .
Quintus , Flaminius, Cornélius Lentulus
,, Lucius Tertinius, Quintus Mi-
nucius, Titus Quintus Flaminius , Aci-
lius, Scipion l’Africain , Lucius Scipion ,
Cneius Manlius, Caton^d’Utique , & plu-
fieurs autres , firent entrer dans le tréfor
public, des fommes immenfes après leur
conquête de la Macédoine „ de l’Efpagne,
de la Grèce-, de l’Afrique , de l’Egypte , du
royaume de Pont & de l’Arménie.
Celles que Paul Emile apporta après la
défaite du roi Perfée ,. furent fi prodigieu-
fc s , qu’au rapport de Plutarque , on ne
leva aucune forte d’impôts depuis ce rems
jufqu’au confulatde Hirçius &de Panfa (.13).
Marius, Sylla , Pompée , Céfar ,, Lu-
cpllus, furent les premiers qui commencèrent
à s’attribuer une partie des dépouilles
(des peuples vaincus auxquels on impofoit
pour principale condition , celle de payer
les frais de la guerre.
Ils étoient encore obligés de fournir aux
armées romaines des tributs &.çoutes fortes
de denrées, même des. vaiffeaux de guerre
ôc des bâtimens de tranfpor,t ; ainfi, lorfque
les armées étoient hors du territoire de la
république, elles lui coûcoient.peu. On en
voit une preuve dans la réponfe laconique
que Portius Cato , qui commandoit l’armée
d’Elpagne ,, fit aux commiftaires des
vivres que la république avoir envoyés
pour pourvoir à- la fubfiffanee des troupes.
, (13:) T ite -L iv e & .Plutarque, rapportent que ce
conful, après avoir vaincu Ant*ochus& les Eto-
liens, obtint les honneurs du triomphe ; qu’on y
v it quatre mille cinq cents marcs d’argent en malle,
près de huit mille marcs d’àrgent monnoyé, deux
cents quarante-huit mille ciftophores , une grande
quantité de vafes d’argent cifelés' d’un grand poids,
& quaranie-lùt couronnas, d’on,. 8cc. ôcc».
Ce général les congédia, en leur difant :
Bellumfe alit ; & à fon retour, il fit porter
vingt millions dans le temple de Saturne.
Les hiftoriens ne font plus mention de
taxes ni d’impôts que fous le confulat de
Cornélius Dolabel-la & M. Fulvius Nobi-
lior, l’an de Rome 595 ; 15,9 ans avant
l’ère chrétienne.
Tite-Live dit que ces confuls établirent
beaucoup d’impofitions , & nommément
des droits de douane ( 1 4 .) c’eft-à-dire
les' marchandifes.
Quarante ans après , Câïu's Gracchusj,
devenu tribun du peuple , & auteur de la.
fédition des Gracches , impofa des droits'
confidérabl'es fur les marchandifes qui fe-
roient apportées dans les ports du royaume’
dePergame , ou qui en feroient exportées :
royaume que fon .fouverai'n Attale avoit
légué à: la république par teftament.
A mefure que les Romains foumettoieht
des nations, ils y établifloient des impôts-
du même genre ; on les voit en Sicile ,
en Efpagné, dans les Gaules , dans la
Grande - Bretagne & l’Ecoflê.
Les triburs de tant'de contrées formoient
un revenu qui fuffifoit aux dépenfes de 1 a
république. Cette confidération, jointe aux
plaintes qu’occafionnoit la perception des
droits de douane en Italie, fit propofer leur
fuppreflîon par le préteur Metellus ; & la
loi qui l'ordonna environ un fiècle avant
notre ère, fut reçue avec des applaudif-
femens univerfels. ,
Il ne reftoit plus à Rome & dans toute-'
l’Italie d’autre impôt que le vingtième du.
prix des efclaves vendus ou affranchis par
leurs maîtres, créé deux cents cinquante
ans auparavant, fous le confulat de C . N.
Manlius & Caïus Martius , pour former un '
tréfor public, deftiné à des ( 15.) dépenfes’
preflànres ou extraordinaires.
(14) Fortoriaquoque & veftigalia rault-a iniiitue^-
runt, lib. 40, cap. y r .
(ry) Tire-Liv. Iib. 7 , cap. rfi, 5cm lib.
cap. i l , où il appelle cet impôt aurum •viçejima*'
rium..