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ration qu’on voudroit en faire, o'ccuperoif un
Volume confidérable. Car indépendamment des
droits qui appartiennent au roi , il en eft une
infinité d’autres que perçoivent de grandes charges
, comme celle d’amiral , fous une multitude
de noms différons ; des communautés, des particuliers
à titre de feigneurs, foit dans les halles ,
foit dans les marchés , fur la terre , fur les eaux.
Ce font autant d3impofitions locales qui frappent
fur la confommation , mais qui , par leur modicité
originelle, auroient à peine été fenties, fi,
d’après des principes nouveaux inventés en 1771 ,
le fifc ne fût venu agraver leur poids, en y ajoutant
huit, enfuite dix fols pour livre à fon profit.
Voyei S o l s p o u r l i v r e .
Il n’eft pas entré dans le plan de cet ouvrage
de faire connoître tous ces droits , & on s’en eft
expliqué dans l'avertijfement. Ceux qui font
une portion des revenus du roi , & qui font
affermés ou régis pour fon compte , ont attiré
notre unique attention. Nous nous fommes attachés
à n’en .oublier aucun , 8c dans la nomenclature
que nous eh avons donnée , & dans les notions
qu’on en trouve à la place alphabétique qui
eft affignée à chaque droit par fon nom.
C ’eft dans cette vue qu’au mot BAIL, on trouvé
dénommés dans le plus grand détail tous les
droits qui compofent la ferme générale.
Au mot DOMAINE, on a détaillé également
ftous ceux qui font régis par Tadminiftration générale
de ce nom.
" On en ufera de même pour les droits qui forment
la corillitution de la régie générale, fous le
mot Ré g ie .
L ’article DROIT fera terminé par l’extrait du
règlement qui a compofé trois régies de tous les
droits du roi. ..
On a pu remarquer que tous les droits de la
ferme générale font divifés en trois clafles.
La première renferme le droit exclufif de vendre
du fel dans le royaume ; & les droits particuliers
qui fe lèvent fur cette denrée.
Parmi ces derniers , font principalement les
droits manuels qui ont fucceffivement formé une
augmentation de trois livres , 8c de près de quatre
livres par minot de fel confommé en pays de
"grandes gabelles.
II eft curieux de voir quelles vicififtudes ils
ont éprouvées, & comment le befoin , toujours
jenaiffant, fait profiter, des exemples paffés, pour
fatisfaire au moment préfent , qui dès-lors n’a plus
-de fin.
On traitera des droits manuels, après avoir parlé
des droits de traites.
La fécondé comprend le droit exclufif de la vente
du tabac.
Dans la troifieme , font placés les droits fur les
denrées & marchandifes , qui fe perçoivent tant &
l’entrée 8c à la fortie du royaume, qu’au paillage
d’une province en une autre.
Tous les droits de cette derniere claffe, à l'exception
de ceux qui fe perçoivent aux entrées 8<C
dans l’éledion de Paris , font diftingués par le
nom de droits de traites , qu’on peut appelle.r auffi
droits de douanes.
La multiplicité de ces deniers, le nombre im-
menfe des loix qui les concernent , 8c la confufioa
qui règne dans les tarifs qui fervent à leur perception
, a fait dire, que dans les difeufiions qui
s’élèvent entre les redevables 8c les percepteurs ,
les premiers reffembîent à des aveugles qui prennent
querelle avec des fourds.
Tous les droits de douane peuvent être conçus
fous les trois dénominations fuivantes.
Les droits des cinq greffes fermes.
Les droits locaux.
Les droits uniformes.
Comme leur perception porte fur toutes les productions
de la nature 8c de l’a r t , & qu’elle influe
fur le commerce univerfel, d’ou naît la prospérité
de l’état ; elle eft d’un intérêt plus général
que celle des autres droits qui n’affectent que certains
objets. Cette obfervation nous conduit donc
à confidérer les droits'de traites fous tous les rapports
qu’ils ont, foit avec le gouvernement politique,
foit avec la fociété, 8c à propofer quelques
vues qui ont été infpirées par l’amour du bien
public, en 1780; dans un tems où le miniftre des finances
, occupé de grands projets pour la félicité publique
, invitoit tous les bons citoyens à concourir
à leur exécution. Voye^ l’avertiflèment.
On a vu à l’article. CINQ GROSSES F E RM E S a
comment & pourquoi tout le royaume reçoit dans
le fyftême des droits de traites , trois divifion*
formées :
I®. Par les cinq groffes fermes.
i° . Par les provinces réputées étrangères.
3° Par les pays 8c provinces traitées comme
pays étrangers.
C ’eft ici le lieu d’ajouter que cette divifion s'eft
opérée en France comme dans tous les Etats
d’une grande étendue. Ce royaume n’eft parvenu
que filcceffiyement à acquérir celle qu’on lui voit
aujourd’hui. La Bretagne, la Guyenne, la Franche-
Comté , les provinces méridionales, 8c plufieurs
autres qui en font partie , appartenoient à d’autres
fouveraîns. Elles avoient chacune des droits qui
leur étoient particuliers , 8c une forme propre à
leur perception. V,
Parmi ces provinces , les unes ont été réunies
à la couronne par droit de conquête ; les autres
.par des alliances ou par des traités.. Toutes ont
confervé quelques portions de leurs privilèges,,
8c la nature de leurs impofîtions*.
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■ C ’eft à ceS caufes qu’on doit attribuer en partie
îa diverfité des droits établis dans ces différentes
provinces. Malgré la variété 8c les difficultés
qu’elle produit dans la perception , on les a laiffé
fubfifter jufqu’à préfent, par; rapport à l’inconvénient
de porter atteinte à des ufages que les tems
©nt confacrés , 8c que les peuples confondent le
plus fouvent avec leurs privilèges.
D ’après ces faits confignés dans l’hiftoire , on
doit confidérer la France comme compofée de
provinces qui ont toujours fait le patrimoine de
nos rois depuis l’établiffement de la monarchie ; 8c
de provinces qui n’y ont été fucceffivement réunies
que par des événemens politiques, fruits des armes
ou des négociations.
Sans doute que dans les premiers tems , pour
accoutumer des fujets nouveaux à une nouvelle
domination .. il convenoit de les iaiffer fous les
formes de Faç'miniftration à laquelle ils étoient
habitués.-Mais l’intérêt général dé l’E tat, dont ils
étoient devenus les membres , ne de voit-il pas exiger
auffi que lentement, on fît à ces formes, des chan-
geméns propres à lès concilier avec celles qui
étoient le plus univerfellemént établies , afin d’éviter
les contrariétés qui .en réfultoient pour la
profpérité publique ? Ces changemens pouvoîent
meme s’opérer , non par des moyens de fîfcalké ,
mais par la perfuafion ; de façon à amener les provinces
réputées étrangères, à folîiciter elles-mêmes
leur incorporation aux cinq groffes fermes ; 8c
les droits de traites pouyoient fervir à cette ope-,
ration.
_Ces droits , pour revenir à l’examen que nous
svons promis d’en faire, ont d’abord fait partie
du domaine fouverain , comme étant le prix de la
protection accordée ■ au commerce , ou une forte
d’indemnité des dépenfes faites pour favorifer fes
opérations.
Sous' ce point de vue , les droits de traites n’ont
rien que de jufte 8c de raifonnable. Mais qu’on
fouffre qu’ils mettent des bornes au commerce intérieur
d’un Etat, en gênant la communication de
toutes fes parties; qu’ils.arrêtent l’aceroiffement
des richêffes territoriales , qui feules peuvent
produire la félicité, c’eft un malheiîrcux refte de
l’anarchie féodale , fous laquelle chaque feigneurie
ne connoiffant que fes vaflaux , voyoit dans fes
voifins des ennemis qu’il falloit dépouiller par les
armes, ou tyrannifer par des tributs.
Dans la fuite lès droits de traites devinrent des
inftrumens mis en oeuvre par la cupidité , pour
vexer les citoyens, 8c facrifier leur ai fan ce à l’avarice
ou à l’ambition des princes. La burfalité de
ces droits , l’utilité des prohibitions aux fouverains
qui yendoient la faculté de les enfreindre, furent
les fruits de l’ignorance univerfellc fur les avantages
de la liberté appliquée au commerce.
Ce fyftême vicieux fut heureufement adopté par
toutes les nations de l’Europe, 8c elles n'acquirent
les unes fur les autres , que là fupériorité natu5"
Tellement attachée aux différens degrés de leur
industrie 8c de leur activité. Parce qu’un peuple
faifoit un commerce plus confidérable que celui, de
fes voifins , il n’imaginoit pas qu’il exiitât des
moyens de l’agrandir encore. De-Ià vinrent l’habitude
de confidérer les droits de traites comme
une refîburce ,. 8c la facilité d’en aggraver le
fardeau , fans-voir que l’impôt même détruifoit la
fourçe de l’impôt.
Cplbert fut le premier qui, s’emparant de ces
droits, s’en fervit à former une forte de balance
politique , pour pefer les effets du commerce national,
8c en enlever les fruits aux étrangers , qui
jufqu’alors les avoient recueillis.
Ce fut un rayon de lumière pour le tems ; mais
ce miniftre , docile encore aux .principes adoptés
par-tout, 8c qui fembloient ceux d’une conjuration
contre la liberté , s’appliqua feulement à
empêcher que lç commerce extérieur ne reçût des
entraves dans une partie du royaume par la multitude
des droits.
Peut-être auffi que ce grand homme manqua de
tems pour reconnoître que lès effets de fon opéra-1
tion en faveur du commerce étranger , étoient
contrariés par les droits intérieurs , 8c que l’-oc-
' cafion de détruire les pbftacîe.s qu’ils faifoient à
fes vues bienfaifantes , fut toujours éloignée par
les guerres fucceffivps de 1666 8c 1672. Ce q u i-
eft certain , c’eft que ce miniftre parvint à débrouiller
le chaos-d’une multitude de droits , 8c à
les réduire en un feul, dont îa quotité une fois,
déterminée , 11e laiffoit plus de reffources.à l ’arbitraire
: fuite alors néccffaire de la variété des
- droits 8c de la confufion des loix fur leur per-*
cep tion.
Telle eft l’origine des droits du tarif de 1 66a. 9
qui pouvoir avoir fon exécution par tout le
royaume. Mais plufieurs provinces. qui avoient
leurs droits particuliers , aimèrent mieux les con-
ferver que de fe foumettre aux nouveaux. Par ce
choix , elles continuèrent d’être étrangères entre
elles , 8c aux provinces des cinq groffes fermes
qui avoient reçu le tarif de 1664 ; dès -lors il
fallut les1 féparer par des barrières.
Ainfi l’ignorance ou l ’obftinatkm de ces provinces
diffidentes , caufcrent une obftrudion générale
au. commerce intérieur , 8c devinrent le
fléau de tout le royaume; car, quel autre nora
donner à cette néceffité de diflinguer en plufieurs
cîàffes les. provinces d’un même Etat, 8c de vendre
à des concitoyens la liberté de fe traiter en
frères, quand ils doivent naturellement ne former
qu’une feule famille unie par les befoins 8c par
l’inclination ?
C ’eft fous ect afped défaftreux que fe préfentent
N an n ij