
La collufîon , pour fait d’étoffes prohibées
& de marchandifes de contrebande, a été plus
févérement punie' par des loix poftérieures.
L ’article X de l’édit du mois d’Oétobre 1728,
8c la déclaration du a Août 1725? , article 2 ,
pro'noncent la peine de mort contre 'les commis
8c employés qui font d’intelligence avec les contrebandiers
, favori fent leur paffage , ou font eux-
mêmes la contrebande.
L ’article 9 de cette derniere déclaration porte
que ceux qui auront été ci-devant employés dans
les fermes, en qualité de commis 8c de gardes , 8c
qui feront arrêtés avec du tabac ou des marehan-
difes de contrebande , devront être condamnés
aux galères pour cinq ans, 8c en cinq cents livres
d’amende. V'oyeç COMMIS.
COLONIES, f. f. On donne ce nom à un éta-
bliffement formé par les émigrations d’un peuple
qui , le plus fou v en t, fe propofe d’accroître par
là fa richefle 8c fa force , 8c qui conferve des relations
exclufives avec lui. C ’eft du moins fous cet
afpedt que fe préfentent les colonies modernes.
Comme elles n’ont été établies que pour l’utilité
de la mere-patrie , à fes dépens 8c par fes
* foins , que leur fituation à de grandes diftances
du corps de l’état , les rend plus difficiles à défendre
8c à conferver , il eft de maxime reçue parmi
les nations européennes , que les colonies doivent
être dans une dépendance immédiate de cette
patrie fondatrice ; cependant il y a lieu de croire
qu’elles profpéreroient davantage fous le régime de
la liberté. Voye£ la fin de cet article.
Que la mere-patrie doit les protéger, veiller,
à leurs befoins , 8c faire leur bonheur & leur
profpérité.
Enfin , qu’ellè a feule le droit exclufif de commercer
8c d’avoir de.s relations avec elles.
De ce fyftême, qui paroît fondé fur les mêmes
conventions qui établirent entre une nation & un
prince , l’obéiffance d’un côté, 8c le droit de commander
de l’autre , réfultent les Conféquences fui-
Vantes.
i° . Que les colonies cefièroient d’être utiles , fi
elles ponvoient fe paffer de la métropole,; que la
culture & les arts doivent y être reftreints dns
des bornes convenables aux intérêts de la culture
8c des arts du pays dominant.
2°. Que fi' les colonies entretiennent un commerce
avec dès étrangers 8c confomment leurs manufactures
, elles deviennent coupables envers la
métropole dont elles diminuent la force réelle &
relative , en procurant à des étrangers un bénéfice
qui doit être réfervé uniquement pour elle ;
que dès-lors ce n’eft point attenter à la liberté
de ce commerce , que de le régler de façon à
empêcher tonte infraction au premier principe de
l ’inftitution de ces colonies', leur utilité.
Qu’enfin les colonies rempliront d’autant plus '
furement Ce dernier point, qu’elles feront plus
peuplées 8c mieux cultivées,
Pour remplir ces différentes vues, le gouvernement
a fournis en France les relations réciproques
de la métropole avec les colonies , 8c des
colonies avec la métropole , à une nolice dont
l’objet eft de favorifer leur communication, comme
entre les parties d’un même état ; d’écarf.ir tout
ce'qui pourroit nuire à chacune d’elles dai*s ce
commerce, afin que leur profpérité mutuelle
opérât la -„profpérité -générale.
. Cette police n’eft autre chofe qu’un régime
fifcal qui affranchit de tous droits d’entrée 8c de'
fortie', certaines égarées nécefîàires à l’approvi-
fîonnement des colonies , foit qu’elles proviennent
du royaume , foit qu’elles y aient été amenées
pour en être réexportée*', parce que le royaume
ne pourroit pas les fournir ; ce même régime im-
pofe des droits plus ou moins confidérables fur
les marchandifes étrangères qui ont lalmême def-
tination, fui van f qu’elles font plus abondantes ou
plus rares fur notre fo l, 8c plus ou moins utiles
à la confommation des colonies ; mais en. général ,
les matières de fubfîftance 8c même de commodité,
tout ce qui eft d’origine nationale , jouit d’une
exemption abfolue pour arriver au port où l’em-
Barquement doit s’en faire avec la deftination des
colonies
De même la métropole repouffe par des taxes
prohibitives , les denrées étrangères de-même
efpèce que celles que fourniflent les colonies. Mais
à cet égard, ce régime n’eft pas encore auffi perfectionné
qu’il pourrait l’être. Dans plufîeurs
provinces, les indigos 8c quelques autres marchandifes
de la claffe des drogueries , paient moins
de droits en venant de la Hollande 8c de tout
autre pays étranger, que s’ils font importés des
colonies. Ce vice eft facile à réformer, en affu-
jettiflant à un droit général 8c uniforme les indigos
8c toutes les marchandifes étrangères de la
même efpèce 8c de la même nature que celles que
produifent lès colonies.
II eft vrai que leurs principales productions ,
comme les fucres 8c les cafés , n’ont point à craindre
la concurrence étrangère à leur importation
dans le royaume , car les fucres étrangers doivent
foixante livres par quintal, 8c l ’entrée des cafés
étrangers eft abfolument interdite.
Cette police peut auffi facilement être étendue
à toute autre efpèce de denrée , fi l ’on veut en
encourager la culture dans les colonies. Au cas que
le befoin réel des fabriques nationales exige que
quelques efpèces propres'aux teintures , foient attirées,
pour en procurer l’abondance , il convient
alors, qu’au moins celles que peuvent envoyer les
colonies , ne foient pas plus chargées que les efpèces
étrangèrés ; fi toutefois on ne jugé pas plus
raifonnablè de leur affurër une préférence fur ces
dernieres , par une modération.
En même tems qu’il eft fage de gouverner les
colonies avec beaucoup de douceur , dit un
homme d’état que nous ne'pouvons trop citer ,
il faut entretenir un attrait continuel vers, la
métropole, afin que cette derniere foit toujours
le dépôt des richeffes mobiliaires amaliées
par les colons. Il faut defirer que ces colons, par
les érabliffemens qu’on-offre .à leurs enfans dans
la métropole , ou par d’autres liens agréables oc
volontaires , fe regardent toujours comme membres
du même état ; enforte qu’avec deux terres
différentes , il y a it, s’il fe peut , un même efprit.
( ’Mettes fur Véloge de Colbert).
Au relie, on dillingue dans le régime fifcal,
deux fortes de -colonies, par rapport aux privilèges
dont elles jouiffent ; celles des îles françoifes
de l’Amérique.
Et celles de l’Afrique , parmi lefquelles il faut
placer le s îles de France 8c de Bourbon.
Nous parlerons des premières à leur rang alphabétique.
Tout ce qui a rapport au commerce des
colonies d’Afrique , fe trouvera au mot Guinée.
On traitera de ce qui concerne les îles de France
8c de Bourbon à l’article de l’Inde , parce qu’elles
font, dans leurs relations avec la métropole, affi-
milées au commerce, de l’Inde.
Nous ne'croyons pouvoir mieux terminer ce
qui a été dit fur les colonies , que par l’analyfe
de deux morceaux auffi intéreflans que curieux ,
tirés du dictionnaire univerfel des fciences.
Le premier confifte dans des confidérations politiques
, publiées par un Anglois, vers 1751 , fur
les colonies de fa nation, defquelles il fembloit
dès-lors prévoir la feiffion. L’efprit de ces confidérations
mettra en état “d’apprécier la perte qu’a
faite l’Angleterre.
Le.fécond eft un tableau des richeffes que les
colonies de l’Amérique fourniflent à l’Europe, 8c
d’après lequel on pourra eftimer les reffources
dont elles font pour les finances de chaque état.
« En établi fiant des colonies 3 la nation doit fe
» propofer de former un peuple d’alliés 8c de
» concitoyens. Pour parvenir à ce but , il faut
» que leurs intérêts fe confondent , qu’il y ait
>d fans cefie une harmonie bien cimentée entre
» les colons 8c les habitans de la métropole.
» Nous ne pourrions retirer de nos colonies
» de l’Amérique feptentrionale , tout le bois de
» charpente , le chanvre , le fer 8c autres métaux
>3 dont nous avons befoin, fans avoir recours à
» nos voifins , 8c en les forçant même de venir
» fc fournir chez nous. Par conféquent l’Angïe-
» terre acquerroit , fur la mer, une puiflance
» folide, au lieu d’un pouvoir précaire 8c fujet
» aux caprices des puiflances voifines. Ce projet,
» concerté 8c mis à exécution , avec la prudence
» 8c la fermeté requifos, nous rendroit , en peu
» de tems, maîtres de la mer, 8c du commerce
» du monde entier.
» A dieu ne plaife que je veuille donner à
s? entendre que lorfqu’une de nos colonies fera
» devenue plus forte , elle cherchera à fecouer
33 le joug de la métropole. Je crois cependant
33 qu’on ne fauroit trop prendre de précautions
33 pour prévenir ce malheur, 3c conferver toutes
33 les colonies dans la dépendance de la mère-
os patrie.
• 33 Si pourtant l’on confidere la corruption de
33 la nature humaine , on ne doit pas fc flatter
?3 qu’une nation reftera toujours foumife à une
33 autre , plus long-rems que ne l’exige fon propre
33 intérêt ; 8c elle ne s’embarraffe guere de juftifier
33 ce penchant naturel, dès qu’elle trouve le moyen
» de le fatisfaire. 3»
Il eft fingulier que l’auteur Anglois regarde à-
la-fois l’amour de la liberté 8c de l’indépendance ,
comme une corruption de la nature humaine, 8c
comme un penchant naturel. Certainement on ne
s’attend pas que l’inftinCl inné dans toutes les
créatures , pour fuir la fervitude, 8c pour fe fuf-
fîre librement à elles-mêmes , doive paffer pour
une corruption , 8c que foit uu Anglois qui
calomnie ainfî la mère commune de tous les êtres
auxquels généralement elle donne cet inftinCl.
cc Je conçois qu’il ne peut y avoir que deux
33 moyens d’empêcher les colonies de fe fouftraire
» à la dépendance de la métropole ; l’un , en les
33 dépouillant de leur pouvoir , 8c l’autre, de leur
33 volonté.
sa Le premier ne peut s’exécuter que par la
» force , 8c le fécond, en leur faifant un bon trai-
33 tement ; c’eft-à-dire, en tenant les colons fans
33 cefie occupés aux productions du climat , en
33 établiffant chez eux des manufactures, en leur
» procurant à eux 8c à leur famille, une honnête
33 fubfiftance ; en un mot, en les mettant dans
33 uti état tel que la métropole ne puiffe en rece-
33 voir aucun préjudice.
30 La force ne. peut guere être mife en ufage ,
33 fans détruire les colonies. La liberté 8c les .en-
33 çouragemens font néceffaires poux y attirer
33 des habitans , 8c les y maintenir quand une fois
33 ils font établis. La violence produiroit un
33 effet contraire. Il n’y auroit pas de troupes
33 affez nombreufes pour les intimider , 8c les fou-
33 mettre à l’autorité d’un gouverneur qui ne fe
33 charge fouvent de cette commiffion que pour
I33 faire fa fortune. C ’eft pour cette raifon que les
39 pays arbitraires n’ont pas eu autant de bonheur
38 dans la formation de leurs colonies , que les
33 pays libres. Ils ne font venus à bout d’en foT-
33 mer quelques-unes que par ,1a violence ou par
33 des dépenfes exceffivss , ou en accordant aux
33 colons des privilèges que ne partagent pas les
33 autres fujets.
33 Si l’on n’ufe pas de violence , ni de moyens
» qui y reflemblent, envers nos colonies de l’Âiné-
33 rique feptentrionale, il eft certain qu’elles ne
33 peuvent manquer d’augmenter d’habitans , de