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par exemple , qu’en répartiflant fur cous les ré-
fraétaires ces frais , qui montent ordinairement
à douze, quinze, pu dix-huit francs , on ait égard
aux divers cfpaces de tems que les particuliers
auront été fans travailler , au plus ou au moins
d’exa&itude avec laquelle ils y feront revenus, en
conféquence des ordres dont le cavalier aura été
le porteur ; enfin , fur la quantité de la tâche qu’ils
redoivent chacun , & fur la nature qui confifte
ou en déblais, ou en remblais, ou en fofle, ou
en tirage , ou en voiture des pierres , & qui ,
quelquefois, eft compofée de plufieurs de ces objets
enfemble. Ces calculs fe font avec la plus
grande précifion , 8c l’on m’a même renvoyé un
jour une de ces répartitions à calculer de nouveau
, parce qu’il y avoit erreur de quelques fols
fur un ou deux particuliers. Une telle précifion
eft fans doute fort belle : mais qui ne peut juger
cependant que de tels problèmes font beaucoup
plus compofés qu’ils ne font importais ; & que,
quoiqu’ils foient propofés par efprit de détail 8c
d’éq uité, on s’attache trop néanmoins à cette
juftice minutieufe dont j ’ai parlé , que ne fup-
portent point les grands travaux, à des fcrupules
qui choquent la nature même de la corvée , & à
des objets fi multipliés, qu’ils font perdre de vue
le grand 8c véritable objet de la police générale ,
qui eft l ’accélération des travaux dont la décharge
du peuple dépend ? Leur bien, en ce qui regarde
les corvées qu’on leur fait faire , confifte, autant
que mes lumières peuvent s’étendre, à faire en
forte que le nom du roi foit toujours refpeété,
que l’autorité publique, repréfentée par l’intendant
& dans les ordres, ne foit jamais compro-
mife,qu e fes plus petites ordonnances aient toujours
une exécution ponétuelle , & que le cor-
voyeur obéiffe enfin fans délai , 8c fe rende fur
l ’atelier à l’heure 8c'au jour indiqué. D e telles
attentions dans des bureaux, font les feuls foins
8c les feules vues que l’on doit y avoir , parce
qu’ils vifent directement à la décharge des peuples,
par la prompte exécution des travaux qu’on leur
ïmpofe.
Comme on n’a point encore vu en cette généralité
une telle police en vigueur , on pourra
peut-être penfer d’avance qu’ un fervice aufli cxaCl
8c aufli militaire , doit extrêmement troubler la
tranquillité des paroifles. & la liberté des particuliers
, & qu’il eft indifpenfable, dans la conduite
des corvées , de n’ufer, au contraire, que
d’une police qui puifle fe prêter au tems , en fermant
plus ou moins les yeux fur. les abus qui s’y
paffent. Le peuple elt fi miférable, dit-on : je
conviens à la vérité de fa mifere ; mais je ne
conviens point que, pour cette raifon , la police
puifle jamais fléchir , & qu’elle doive' être dans
des tems plus ou moins exaCte que dans d’autres;
elle ne peut être fujette à aucune foupleflc , fans j
ie détruire pour jamais. Ain fi ce ne doit point
être quant à l’exaétitude 8c à la précifion du fer- 1
v ic e , qu’il fauthnodérer la corvée j c’eft feulement
quant à fa durée. Dans les tems ordinaires , le
travail peut durer deux mois, dans le printems ,
8c autant dans l’automne : fi fe tems eft devenu
plus d ur, on peut alors ne faire que' fix femaines
ou qu’un mois de corvée en chaque faifon, 8c ne
travailler même que quinze jours s'il le faut;
mais pour la difeipline , elle doit être la même,
auffi fuivie pour quinze jours, que pour quatre
mois^ de trav a il, parce que l ’on doit tirer proportionnellement
autant de fruit de la corvée la plus
courte , que de la corvée la plus longue. Enfin
il vaut mieux paffer une campagne ou deux fans
travailler , fi les calamités le demandent, que de
faire dégénérer le fervice.
Il ne faut pas quitter l ’article des corvées, fans
y placer ce qui en eft dit dans le compte rendu
en 1781. L ’opinion de l’homme d’éta t, qui ad-
miniftroit alors les finances, eft d’un grand poids
dans les affaires publiques.
« On a trop fouvent développé à votre majefté
» les^ principes fur cette matière , pour que je
» doive m’étendre à cet égard. Je dirai feulement
» que plus j ’ai examiné cette importante difeuf-
» fion, 8c plus je me fuis convaincu qu’il eft à
» defirer que les moyens de fupprimer la' corvée
» foient favorifés.
» Cette queftion , en derniere analyfe 9 n’cft
» qu un débat entre les pauvres 8c les riches; car
» il eft aifé d’appercevoir , d’un coup d’oeil ,
» l’avantage du pauvre à la fuppreflîon de la cor-
» vee. Un homme fans facultés, un journalier donc
» on ex ige, par an , fept ou huit jours de cor-
» vee , n’auroit à payer que douze ou quinze fols
» pour fa part, à l’impofirion des chemins , fi elle
» étoit établie au marc la livre de la taille , 8c
» il retrouveroit encore bien amplement le dé-
» dommagement de cette petite contribution , par
» 1 mtroduélion de nouveaux ouvrages à prix d’àr-
» gent, au bénéfice defquels il participeroit par
» fon travail. JShû doute donc que la corvée ne
» foit évidemment contraire aux intérêts de
» cette claffe de vos fujets , vers lefquels la main
» bienfaifante de votre majefté doit fans ceffe
i> s’étendre , afin de tempérer , autant qu’il eft
» polfible , le joug impérieux de la propriété 8c
» de la richeffe.
» D ’ailleurs , la répartition 8c la perception
» d’un impôt en argent font fourni fes à des règles
.» certaines ; au lieu que la diftribution de la cor—
» vie 8c la furveillance fur fon exécution multi-
» plient les décifions 8c les punitions arbitraires,
» 8c obligent à remettre un grand pouvoir entre
p des mains fubalternes.
» Cependant , car il faut toujours confidérer
» les objets d’adminiftration fous leurs difterens
» rapports , la diverfîté des droits 8c des impo-
» fitions facilitent leur étendue. Un impôt en tra-
4 v a i l , ou autremement dit, la corvee , eft peut-
» être une heureufe idée fifcale , c eft-a-dire un
» moyen nouveau de multiplier, entre les mains
» du fouverain , les efforts 8c les facrifices dé fes
» peuples. Mais de pareilles combmaifons ne pou-
» vant plaire à votre majefté, qui eft fur - tout
» jaloufe de faire fervir fon autorité au bonheur
» de fes fujets ; j ’ai cru féconder fes intentions,
» en favorisant avec ménagement la fuppreflîon des
» corvées ; 8c , par - tout où elles fubfiftent , j ’ai
» excité MM. les intendans à veiller fur leur
» jufte répartition , 8c à ne rien négliger
» pour Soumettre ces travaux à des règles
» fixes.
» Enfin , dans plufieurs généralités , on laiffe
» aux paroifles la liberté d’opter entre les deux
» maniérés de pourvoir à la confe&ion des rou-
» tes ; mais cette liberté , cette option, qui femble
» au premier coup d’oeil fi raifonnable , n’eft pas
» à l ’abri d’inconvéniens, lorfque ceux qui doivent
» délibérer ont un intérêt fi diftinél. Cependant
» dès que ces lo ix générales , fur cette matière ,
» ont rencontré fi fouvent des obftacles qu’on n’a
xl.pu vaincre, les modifications lentes 8c douces,
» tout imparfaites qu’elles font, deviennent pré-
» férables," »|
Un homme très-verfé dans les matières de finance,
8c depuis long-tems occupé de projets relatifs
à la Amplification de la levée des droits des fermes
, a conçu un moyen de pourvoir aux réparations
8c à l’entretien des chemins , non-feulement
fans corvées ; mais d’une maniéré avanta-
geufe pour toutes les clafles de citoyens.
V o ic i quel eft fon plan.
i° . D e fupprimer tous les droits de traites intérieures
, qui fe perçoivent fur les objets tranf-
portés d’une province en une autre ; comme de
l ’Anjou dans la Bretagne , de la Picardie dans
la Flandre , 8cc. 8cc. Voye\[ CINQ Cr o s sES-
F e r m e s .
20. D ’établir un tarif unique , 8c uniforme à
toutes les entrées Sc forties du royaume , foit par
mer , foit par terre.
3°. D ’abolir toute efpèce de droit de péage ,
tant par terre , que fur les rivière s , où ils font
très-multipliés.
Comme ce nouveau tarif fera rédigé dans des
principes très-favorables à l’agriculture, au commerce
8c à l’induftrie ; que fes produits feront
conféquemment infuffifans pour remplacer les revenus
, que donne la ferme de tous les droits
de traite ; il a penfé qu’ un modique d ro it, perçu
fur le commerce intérieur, ne pourroit y porter
aucun préjudice, puifque la quotité de ce droit
feroit très-inférieure à celle des droits cumulés ,
qui fe paient dans l’état a&uel des chofes , 8c
dont la perception , divifée en différens lieux ,
caufe des retards, 8c une perte de tems infiniment
précieux pour le commerce.
Dans cette vue , il propofe l ’etabliflement du
droit de cabotage , fur les relations par mer ,
entre les différentes provinces du royaume ; droit
fixé à raifon d’un pour cent de la valeur, lorf-
qu’il fera queftion de changer de province , 8c de
demi pour cent , fur le paflage d’un port en un
autre de la même province.
En même tems , on établiroit, fous le nom de
péage-général, un droit léger , fur toutes efpèces
de voitures , qui tiendroient les diverfes routes
dont le royaume eft traverfé ; 8c un droit de navigation
fur tous bateaux , feryant au tranfport
des marchandifes ainfi que des voyageurs, fur les
rivières ou canaux navigables.
Ces droits font tellement combinés , que leur
perception ne fait qu’un'objet de douze à quinze
fols par quintal , fur une route de cent lieues
communes. Cette modique augmentation du prix
des tranfports des marchandifes , qui ne fera que-
momentanée , puifqu’ elie difparoîtra néceflaire-
ment, lorfque le bon entretien des routes aura fait
baifler le prix même, ne fera-t-elle pas bien avan-
tageufement compenfée par l’économie du tems,
par la fuppreflîon de tous autres droits de péages 8c
de circulation, enfin par l ’abolition des corvées 1
Pour répandre plus de jour fur ce plan , 8c
fur les moyens d’exécution dont il eft fufceptible ,
il convient de faire connoître la nature 8c la quotité
des droits de péage général, foit fur terre,
foit fur l’eau ; d’indiquer les formes de fa perception
; d’en montrer les produits, 8c d’en fuivre
la deftination.
Les routes font fréquentées pap quatre clafles
de citoyens : par des particuliers qui voyagent
à cheval ; par ceux qui fe fervent de chevaux de
pofte ; par ceux qui ont leurs chevaux ou des
chevaux à loyer; enfin par les meffageries royales ,
ou par les voituriers ou rouliers de profeflîon.
Tous ceux qui pafferont dans les routes , excepté
les voyageurs à cheval ou à pied , les bef-
tiaux 8c les bêtes non atelées à une voiture , acquitteront
le d ro it, à raifon d’un fol par cheval,
par chaque lieue 5, ou deux fols par pofte , par
chaque cheval , pour ceux qui feront en pofte.
Le droit fera payé au lieu du départ , pour
tout le voyage ; les maîtres de pofte ne pourront
donner des chevaux, qu’après qu’il leur aura été
juftifié de l ’acquit de ce dro it, à raifon du nombre
de chevaux qui leur feront demandés, à peine
d’en répondre en leur propre 8c privé nom.
Mais les fourgons, les groffes voitures de meffageries
, celles des rouliers paieront un fol fix deniers
par lieue , par chaque cheval ou bête de
t r a i t , lorfque ces voitures feront chargées , 8c
de fix deniers feulement quand elles feront à vuide*
à la charge, dans ce dernier cas, par les conducteurs
des voitures , de fe charger gratuitement,
des pavés , pierres 8c autres matériaux , néceflaires
ou à l’entretien des routes, ou à la confection de
nouveaux chemins. Dans les cas de contravention