
'fois : il faut avoir vingt-quatre ans pour être admis
au chef-d'oeuvre, dont il n’y a que les fils de maîtres
qui foient difpenfés : les veuves peuvent faire
•travailler, mais elles ne peuvent prendre apprenti.
DISTILLATION, (Chim.) La difiillation eft une
'^opération chimique qui cofiïifte à détacher par le
•moyen du feu , de certaines matières renfermées
-dans‘des vaiffeaux ,'des vapeurs ou des liqueurs, &
à retenir ces derrtieres fubftances dans un vaiffeau
particulier deftiné à les recevoir.
•Les fiibftances féparées du corps foiimis à la dij-
ùlladon, font connues dans Part fous le nom âe produits,
& la partie la plus fixe de ce corps, "celle qui
n’a pas été déplacée par le feu , fous celui de rèjidu :
'•c’eft celle-ci que les anciens Chimiftes dëfighoiettt
•par le nom de caput mortuum (voyez Ca p u T AWR-
tu um ). II paroît qu’on fe feroit une idée plus exact
e des effets de la difiillation, fi on mettoit le réjîdu
au rang de fes produits ' je le confidere toujoursïbus
-ce point de vu e , & je l’appelle produit fixe ; j’appelle
■ les premiers produits mobiles. Au refte il n’eft pas
'eflentiel à une dijlillation de laiffer un réfidu , elle
'peut féparer un corps en divers produits tous vola-
'tils ; c’eft ce qui arrive dans là dijlillation à’une ré-
-fine pure. Voyezrésine.
Les produits mobiles delà difiillation peuvent être
portés par la difpofition de l’appareil, en-haut, à
côté ou en-bas : c’eft pour Cela que la dijlillation a
été divifée en trois efpeces ; favoir la dimllation per
afcenjum, ou droite (rccla) ; la dijlillàtion oblique ou
latérale, per latus; &C la dijlillation vers le bas, per
■ defeenfum. '
C ’eft toùjours fous la forme de vapeur que les
-produits mobiles fe féparent du corps à diftiller,
dans les deux premières efpetes de dijlillation ; car
un corps ne petit s’élever par le feu que fous cette
forme : & l’appareil de la dijlillation latérale même
eft difpofé de façon, que les matières féparées font
obligées de s’élever (voyez Cornue , la Planche &
la faite de cet article.) Aufli ces deux premières efpeces
de difiillation ne different-elles qu’en ce que dans
la première les vapeurs fe condenfent dans le haut
de l’appareil dans un chapiteau à gouttière , & que
dans la fécondé elles ne fe condenfent utilement
que dans le côté. Le produit mobile de la difiillation
per defeenfum, peut fe féparer, & fe fépare même
dans tous les cas où cette difiillation eft pratiquée
fous la forme d’un liquide.
Ces trois efpeces de difiillation ne font dans le
fond, & quant à la maniéré d’altérer les corps traités
par léur moyen, qu’une même opération ; & les
feules raifons de préférence dans l’u fage, font des
commodités de manuel, des vues pratiques, (économiques
, qui feront expofées dans la fuite de cet
article.
Tout appareil de dijlillation eft compofé néceffai-
rement d’un vaiffeau qui contient les matières à diftiller
, & d’un vaiffeau deftiné à recevoir les produits
mobiles. Le premier peut être un vaiffeau d’une feule
pie ce , ou être formé de plufieurs : on multiplie
quelquefois le fécond , pour divers motifs qui feront
expofés plus bas.
• Les vaiffeaux employés à contenir les matières à
diftiller, font pour la dijlillation droite, l’alembic
d’une ou de plufieurs pièces (voyez Alembic , Cu- curbite , Chapiteau) ; le matras recouvert d’un
chapiteau, qui n’eft proprement qu’un alembic très-
élevé (voyez Matras) ; pour la difiillation latérale,
la cornue ordinairement d’une feule piece, la cornue
tubulée, & la cuine, qui eft une cornue d’une
forme particulière (voyez Cornue) ; le tonneau armé
d’un globe de cuivre à fa partie inférieure ; invention
ingénieufe, mais très-peu utile de Glauber
’(fourneaux philo f i page m , voyez \'article Feu) ; &
l’alembic des diftillateurs d’eau-de-vie , qui eff ré*
couvert de là tête de mofe au lieu du chapiteau à
gouttière (voyez Chapiteau); & enfin pour le
defcenfufn, l'entonnoir, lè creuîet à fond percé de
plufieurs trous, & le defeenfoite , defeenforium, de
Géber ’(jvàye{ D e s 'CENSÜM.) Lè vaiffeau contenant
peut encore n’être que le foyer même d’un fourneau
, qui dans ce Cas a le double ufage de fourneau
& de vaiffeau, comme dans cette •efpece de
difiillation inventée par Glauber ( fourneaux philo-
foph. pàgei.) , où le Côrps à diftiller eft immédiatement
placé fur dès & Tourneau. charbons embrafés. Voyez Feu
Le vaiffeau deftiné à recevoir lès produits mobiles,
eft connu fous le nom générique de récipient. Le ba-
lon & le matras font les récipiens fimples les plus
ordinaires, quoique tout vaiffeau à Un feul orifice
propre à recevoir le bèc du vaiffeau contenant -,
puiffe être employé à cet ufage. Les récipiens multipliés
ou compofés , font le doublé balon, la file
de balons, le baloA dè Glauber armé d’un fécond
récipient à fon bec ou ouverture inférieure, l’allonge
jointe au bâlpn (voyez BalON , voyez Matras) ,
&C un affemblage de certains vaiffeaux particuliers ,
propres à la difiillation de l’air. Voyez Récipient.
On exécute des difiillations dans toute la latitude
des degrés de feu employés parlesChimiftes ; Si. on
applique le feu aux matières à diftiller, foit en ex-
pofant à fon aélion immédiate les vaiffeaux qui les
contiennent, foit en interpofant entre le feu & ceS
vaiffeaux, differentes matières connues dans l’art
fous le nom de bain. Voyeç Bain & Feu.
La difiillation eft une des opérations les plus anciennement
connues dans l’art. Geber auteur du plus
ancien traité général de Chimie qui foit parvenu juf-
qu’à nou $(voy. la partie hijlorique de l'article Chimie)>
a très-bien décrit la difiillation droite & le defeenfum
, les effets & les ufages de ces opérations ; il n’a
pas connu la difiillation latérale , invention pofté-
rieure de plufieurs fiecles à ce chimifte, & il a fait
une troifieme efpece de difiillation de la filtration à
la languette (voy. Filtration). C’eft fur quelques
prétendus veftiges de la connoiffance de la difiillation,
que quelques auteurs ont crû voir des traces
de chimie dans les ouvrages de quelques médecins
grecs & arabes. La Chimie a été appellée Fart dif-
tillatoire, & elle a mérité ce titre jufqu’à un certain
point, tant que analyfer & difiiller à la violence du
feu n’ont été qu’une même chofe. Les diftillateurs
d’eau-de-vie, d’eau-forte, de parfums, de liqueurs,
&c. fe qualifient de chimiftes ; & il s’en eft même
trouvé de ces derniers qui fe font vûs placés comme
chimiftes dans la lifte des hommes illuftres d’une
nation ; tant la difiillation, même pratiquée en fim-
ple manoeuvre, peut décorer celui qui s’en occupe.
Mais quoi qu’il en foit de cet honneur fingulier attaché
à Fexèrcice de l’art diftillatoire, il eft fur que
la difiillation eft une opération chimique fondamentale
, un moyen chimique dont l’ufage eft très-étendu
& la théorie très-compliquée, foit qu’on la confidere
en foi & dans fes phénomènes propres, foit qu’on la
regarde relativement aux changemens qu’elle opéré
fur les differens fujets.
Dans toute difiillation on fe propofe de réduire
un corps en deux du en plufieurs fubftances différentes.
Cette vue fuppofe deux conditions effentiel-
les générales dans les fujets de cette opération ; la
première, c’eft qu’ils ne foient pas abfolument fimples
; & la fécondé, que la defunion de leurs principes
puiffe être operée par l’aétion du feu : ce ne feroit
donc que dans une vue très-chimérique qu’on pour-
roit foûmettre à la dijlillation l’eau parfaitement pure
, le mercure exaftement purifié , & en général
tout mixte ou compofé volatil, capable d’éluder par
fa volatilité même l’aélion diffdeiartté dit feu ',-^teI
que l’efprit - de - vin' très - reélifié, &c. ou enfin 1 des'
mixtés Ou des compofés abfolument fixes, tels que
l ’o r , le charbon parfait, le tartre vitriolé ,; &c. Voyez Volatilité , Fixité', Principe , Feu.- -
Les diverfes riiatieres que les Chimiftes foûmet-
tent à la difiillation , éprouvent des changemens
effentiellement differens, qui dépendent de la conjli-
tution fpécifique, de .chacune de ces matières. Je di-
yife à cet égard les fujets de là difiillation eu trois
çlaffes, & je penfe que cette divifîon' eft néceffairé
pour fe procurer des notions précifes , diftin&es &
ràifonnées, une. théorie exadte de cette, opération ,
que j’ai déjà appellée un moy en chimique fondamental*
La première claffe des fujets de la difiillation renfermera
les fimples mélanges, les corps , ou plutôt
les amas formés par -confujîon . ( voye^ CONFUSION
& Chimie), tels qu’une eau troublée par un vrai
précipité, ou toute autre poudre fubtile & infolu-
ble; une réfine précipitée de l’efprit-de-vin par l’eau,
& fufpendue encore dans le nouveau liquide réful-
tant de l’union de ces deux liqueurs ; une mine de
mercure non minéralifé , & fimplement répandu
dans une terre ou dans une pierre ; du mercure
eteint ; les végétaux aromatiques cônfidérés comme
contenant des huiles eflentielles : car ces huiles ne
font pas avec les principes de la compofition du végétal
, une union réelle ; elles y font contenues en
maffes fouvent fenfibles dans de petites véficules
particulières (voye{ Huile essentielle). La dijlillation
d’une huile eflentielle doit donc être regardée
comme démêlantdes fubftances confufes, & point du
tout comme détruifant une combinaifon chimique.
On peut groflîr cette claffe , qui eft peu nombréufe,
des differens corps dont la mixtion eft fi aifément dif-
foluble par l’aélion du fe u , que l’union de leurs
principes, quoique réelle ou chimique, peut être
réputée nulle, aufli-bien que la réfiflance qu’ils ôp-
pofent à leur féparation : telle eft l’union de l’efprit-
de-vin, & d’une certaine portion d’eau du même
efprit, & des réfines ; celle de l’eau furabondante à
la diffolution des fels, avec la diffolution de ces
mêmes fels ; celle de l’efprit reéleur des végétaux à-
leur huile eflentielle, &c.
La difiillation des fubftances de cette efpece eft
donc une fimple féparation de diverfes fubftances
mêlées par confujîon ; féparation fondée fur les differens
degrés de volatilité fpécifique de chacune des
fubftances à féparer : enforte qu’une condition particulière
eflentielle aux amas feparables par la dif-
tillation, c’eft cette diverfité de volatilité fpécifique.
Les produits, tant volatils que fixes des fujets
de notre première claffe, ne fouffrant aucune dé-
compofition, ils reftent intérieurement immués; ils
préexiftoient dans leur fujet commun, tels qu’ils
font après leur féparation : cette derniere propriété
leur eft commune avec les fujets de la claffe fui-
vante.
Cette fécondé claffe s’étend à tous les compofés
formés immédiatement par l’union chimique & la
combinaifon d’un petit nombre de principes étroitement
liés, mais qui peuvent être féparés par la
violence du feu, fans réagir que foiblement les uns
fur les autres, & affez immués pour qu’on puiffe le
plus fouvent, en les réunifiant immédiatement, reproduire
le même compofé : tels font la plûpart des
fels métalliques fixes, les vitriols, le verdet, le fel
de Saturne, quelques autres fels neutres ; favoir le
nitré, la terre foliee , &c. Les anciens chimiftes ont
appellé la difiillation de ces fubftances, édulcoration
philofophique. Les amalgames font encore des fujets
de cette fécondé claffe, qui eft peu étendue, parce
<jue les vrais compofés ne font communs ni dans
là natiiré iii parmi les ouvrages de l’art, !& qu’en-
core faut-il abandonner tous tes compofés volatils
uu abfolument fixés, comme nous l’avons déjà 6b-
lerve ; &-qùé ce n’eft cependant que dans cet ordre
de corps que l’aftion du feu peut opérer une diacrefe
vraie & fimple (voyeç Feu , D iacrese , & ce que
nous allons dire tout-à-l'heuredes fujets delà iroifîeme
clajje.) Or c’eft-là précifément l ’effet de la diflilla-
tionhvc les fubftances diftillables dont je compofé
ma fécondé claffe; c’eft-là auffifon effence, fa propriété
diftinâive.
La troifieme claffe renferme ; i° les tijfus ou les
corps organifés, c’eft-à-dire les végétaux & les animaux
entiers, & leurs parties folides ; z° tous les fui compofés , decompojît'a (voye^ SuRCCiMPOSÉ) ;
3 les compofés que la difiillation ne refont pas feulement
en leurs principes , mais qu’elle altère juf-
que dans la conftitution intérieure dé ces principes.
Ces deux dernieres divifions renferment le plus
grand nombre de fubftances végétales & animales
non organifées ; les extraits , les réfines';les baumes
, Ies gommes, les gommès-réfines, les matières
colorantes, les muqueux , les beurres , les huiles
par expreflion, le fang, la lymphe, la gelée, le lait,
&c. (voyeç ces articles') : 40 enfin ces corps que l’on
peut appeller , quoiqu’avec quelqu’inexaélitude ,
compofés & furcompofés artificiels , c’eft-à-dire les
mixtes ou les compofés naturels traités avec des intermèdes
vrais (voyez Intermèdes : voyez analyfe
menfiruelle, fous le mot Menstruelle , & analyfe
végétale, au mot VÉGÉTAL.) Au refte il faut obfer-
ver que la plupart de ces corps peuvent être regardés
comme fujets de la première claffe dans un certain
cas ; favoir lorfqu’on n’en fépare par la difiil-
lation que des principes très-peu adhérans, une par*
tie aromatique , les huiles eflentielles dont noiis
avons déjà parlé, une certaine portion d’eau ,
& qu’on épargne leur compofition intime , par la
maniéré dont on leur applique le feu. Voyez Feu.
Ce qui fait différer effentiellement la difiillation
de ce genre de matières de celle des deux autres ,
c’eft que les differens principes de ces corps étant
mis en jeu par le feu , s’attaquent diverfement, Sc
que quelques-uns d’entr’eux contra&ent de nouvelles
combinaifons, tandis que d’autres qui auroient
réfifté à l’aâion du feu feu l, ne font dégagés qu’à
la faveur de ces combinaifons nouvelles. Une propriété
particulière à la dijlillation des fubftances de
cette claffe, c ’eft d’échauffer les fubftances combuf-
tibles à un point plus que fuffifant pour les enflammer,
fans qu’elles s’enflamment en effet. On a comparé
les produits de cette dijlillation à la fumée, il
falloit dire à la fumée fans flamme. La dijlillation
dont nous parlons , différé effentiellement par ce
phénomène, de la combuftion à l’air libre , ou inflammation
, qui eft un autre moyen d’analyfe très-
Aefnficaalcyes. éV voyéegz éItnaflleammation, Combustion, f au mot Végétal.
On exécute la difiillation des fubftances des trois
claffes , dans une vue philofophique ou dans une
vue (économique.
La- dijlillàtion des fubftances purement confondues,
eft d’une utilité fort bornée au premier égard ,
parce qu’il eft des moyens plus fimples de reconoître
dans les fujets de cette claffe, les corps qu’on pour-
roit aufli en féparer par la dijlillation, & que les fens
fuffifent pour les y difeerner. Son utilité eft plus
étendue au fécond égard, elle fournit un moyen
prompt & commode de retirer, abfirahere, certaines
liqueurs employées à divers travaux chimiques-, &
qui font d’un prix affez confidérable pour qu’on les
retienne avec profit par ce moyen; tels font les corps
fui vans: l’efprit de vinfuperfluàla diffolution de certaines
matières végétales, dans la concentration des