47^ C R I redoublement ou un accès extraordinaire, qui termine
la maladie d’une façon ou d’autre.
La crife fe fait ou elle finit par un tranfportdê matière
d’une partie A l’autre, o u par line excrétion ;
ce qui établit deux différentes elpeces de crifes. Les
crifes different encore en tant qu’elles font bonnes ou
mauvaifes-, parfaites ou imparfaites, fûtes ou dan-
gereufes»- - • • ^
j Les bonnes crifts font celles qui font an moins ef-
pérer que le malade fe rétablira ; & les mauvaifes *
celles qui augmentent le danger. Les crifes parfaites
font celles qui enlèvent, qui évacuent ou qui tranfi
portent toute la matière morbifique ( voyt{ C o c -
t i o n ) ; & les imparfaites, celles qui ne l’erilevent
qu’en partie. Enfin lâ crife fûre ou afjuree, eft celle-
qui fe fait fans danger ; & la dangereufe eft celle
dans laquelle le malade rifque beaucoup de fuccom-
ber dansi’effort de la crife même. On pourroit encore
ajouter à toutes ces efpeces de crifes, Yinfenfible, ap-
pelléè folution par quelques auteurs , & qui eft celle
dans laquelle la matière morbifique fe diffipe peu-à-
peu. .
Chaque efpecè de crife a des lignes particuliers,
& qui font différens, fuivant que. la crife doit fe faire
par les voies, de la fueur > par celles des urinés, par
les felles, par les crachats , ou par hémorrhagie ;
c’eft à la faveur de ces lignes que le-médecin peut
juger du lieu que la nature a choili pour la crife. On
trouvera dans tous les articles qui regardent les différens
organes fecrétoires-, & notamment aux mots
U r i n e , C r a c h a t , -Su e u r , H é m o r r h a g i e ,
& c . les moyens de connoître l’événement dé la maladie
, relativement aux différentes excrétions critiques
, ou la détermination de la crife.
Les anciens ne fe font pâflfcontentés d’avancer &
de foûtenir qu’il y a une crife dans la plûpart des maladies
aiguës, & de donner des réglés pour déterminer
l’organe, ou la partie fpéciale dans laquelle ou
par laquelle la crife doit fe faire ; ils ont crû encore
pouvoir fixer le tems de la crife : c’eft ce. qui a donné
lieu à leur doCtrine fur les jours critiques, que nous '
allons expofer, en nous attachant feulement à ce
qu’il y avoit de plus communément adopté parmi la
plûpart des anciens eux-mêmes ; car il y en avoit
qui ofoient douter de la vertu des réglés les plus re-
çûes. Ce font ces réglés qui furent autrefois les plus
reçûes, que nous allons rapporter. Les voici :
Toutes les maladies aiguës fe terminent en quarante
jours, & fouvent plûtôt ; il y en a beaucoup
qui finiffent vers le trentième , & plus encore au
vingt, au quatorze ou au fept. C ’eft donc dans l’ef-
pace de fept, de quatorze, de vingt ou de quarante
jours au plus, qu’arrivent toutes les révolutions des
maladies aiguës, qui font celles qui ont une marche
marquée par des crifes & des jours critiques, ou
du moins dans lefquelles ce caraCtere eft plus fenfi-
ble , plus obfervable.
Les jours d’ime maladie dans lefquels les crifes fe
font, font appellés critiques, & tous les autres fe
nomment non-critiques. Ceux-ci peuvent pourtant
devenir critiques quelquefois, comme Galien en
convient lui-même; mais cet événement eft contraire
aux réglés que la nature fuit ordinairement.
De ces jours critiques il y en a qui jugent parfaitement
& favorablement, & qui font nommés principaux
ou radicaux parles Arabes, ou bien Amplement
critiques ; tels font le feptieme, le quatorzième, le
vingtième. Il en eft d’autres qui ont été regardé
comme tenant le fécond rang parmi les jours heureux
; ce font le neuvième, le onzième & le dix-
feptieme : le troifieme, le quatrième & le cinquième
jugent moins parfaitement : le fixieme juge fort four
vent, mais il juge mal & imparfaitement ; c’eft
pourquoi il a été regardé comme un tyran ; au lieu
que le feptieme, qui juge pleinement & favorablement
, a été comparé à un bon roi. Le huitième Si
le dixième jugent mal atifli, mais ils jugent rarement.
Enfin le douzième, le feizieme & le dix-hui-
tieme ne jugent prefque jamais.
. [Nota. Tout leCteur entendra parfaitement le fens
de ce mot juger que nous venons d’employer, &
qui eft technique, s’il veut bien fe rappeller la
lignification propre du mot crife, que nous avons
expliquée au commencement de cet articlé.]
On voit par ce précis quels font les.hons & les
mauvais jours dans une maladie aiguë ;'les éminemment
bons font le feptieme, le quatorzième & le
vingtieme.Galien dit avoir remarqué dans un fèulété
plus de quatre cents maladies parfaitement jugées au
feptieme ; & quoiqu’on trouve dans les épidémies
d’Hippocrate des exemples de gens morts au feptieme,
ce n’eft que par un accident rare, & dû à la
force de leur tempérament1 qui a fait que léur maladie
s’eft prolongée jufqu’à ce terme, qu’elle ne
devoit pas atteindre dans le Cours ordinaire. C’eft
toûjours Galien qiii parle , & qui veut fauver fon
feptieme jour, qu’il a comparé a un bon prince qui
pardonne à fes lujets ou qui les retire du danger,
comme nous l’avons déjà obfervé. Le quatorzième
eft le fécond dans l’ordre des jours falutaires ; il eft
heureux, & juge très-fouvent : il fupplée au feptieme
, il a même mérité de lui être préféré par quelques
anciens. Quant au vingtième, il eft auffi vraiment
critique & falutaire; mais il n’eft pas en poffeffion
paifible de fes droits Archigene, dont nous parlerons
dans la fuite de cet.article, lui a préféré le
vingt-unieme.
Tous les jours, excepté les trois dont nous venons
de parler, font plus ou moins dangereux & mauvais
; ils jugent quelquefois , comme nous venons
de le dire, mais ils ne valent pas les premiers, en
tant que critiques ; ils ne font pas même précifement
regardés comme tels : c’eft pourquoi on leur a donné
des dénominations particulières , & oh les a diftin-
guées en indices-, en intercalaires , & en vuides.
Lès jours indices, ou indicateurs, qui forment le
premier ordre après les trois critiques, & qu’on appelle
auffi contemplatifs y font ceux qui indiquent ou
qui annoncent que la crife fera parfaite, & qu’elle fe
fera dans un des jours radicaux : de cet ordre font le
quatrième, le onzième St le dix-feptieme. Le quatrième
qui eft le premier des indices, comme le
feptieme eft le premier des critiques , annonce ce
feptieme, qui n’eft jamais auffi parfait qu’il doit l’être,
s’il n’eft indiqué ou annoncé. Ceux qui doivent
être jugés au feptieme , ont une hypojlafe blanche dans
l'urine au quatrième, dit Hippocrate dans fes Apho-
rifmes. Ainfi le quatrième eft, par fa nature, indice
du feptieme, fuivant Galien, pourvû qu’il n’arrive
rien d’extraordinaire; car il peut fe faire non-feulement
qu’il foit critique lui-même (comme nous l’a-
vons'remarqué ci-deffus, & comme il eft rapporté
dans les épidémies d’Hippocrate, de Périclès qui
guérit par une fueur abondante au quatrième} ,
mais encore qu’il n’indique rien, foit par la pâture
de la maladie, lorfqu’elle eft très-aiguë, foit par les
mauvaifes manoeuvres du médecin, ou par quel-
qu’autre caufe à laquelle il ne faut pas s’attendre ordinairement.
Enfin le quatrième indique quelquefois
que la mort peut arriver avant le feptieme ; & c’eft
ce qu’il faut craindre, lorfque les changemens qu’il
excite paflent les bornes ordinaires. Le onzième eft
indice du quatorzième ; il eft moins régulier, moins
exaCt que le quatrième, & , comme lui, il devient
quelquefois critique, & même plus fouvent: car Galien
a obfervé que tous fes malades furent jugés au
onzième dans un certain automne. Le dix-feptieme
eft indice du vingtième.; mais il perd "apparemment
cette
cette prérogative pour la céder au dix-huîfieme, fi
fi le vingtième ceffe d’être critique, ainfi que nous
avons dit qu’Archigene l’a prétendu.
Les jours qu’on nomme intercalaires ou provocateurs,
font le troifieme, le cinquième, le neuvième, le
treizième & le dix- neuvième ; ils font comme les
lieutenans des critiques, mais ils ne les valent jamais
: s’ils font la crife , on doit craindre une rechû*-
te ; Hippocrate l’a dit nommément du cinquième,
qui fut mortel à quelques malades des épidémies. Le
neuvième fe trouvant entre le feptieme & le quatorzième
, peut être quelquefois heureux ; Galien le
place entre les critiques du fécond ordre, & cela
parce qu’il répare la crife du feptieme, ou qu’il avance
celle du quatorzième. Le treizième & le dix-neu-
vieme font tres-foibles, le dernier plus encore que
le premier.
Les jours vuides, qu’on nomme ainfi parce qu’ils
ne jugent pour l’ordinaire que malheureufement,
parce qu’ils n’indiquent rien, & qu’ils ne fauroient
fuppléer aux critiques, font le fixieme, le huitième,
le dixième, le douzième, le feizieme, le dix-huitie-
me, &c. Galien n’épargne pas fa rhétorique contre
féfixieme ; il fait contre ce jour une déclamation véhémente
: d’abord il le compare à un tyran, comme
nous l’avons déjà rapporté; & après lui avoir dit
cette injure, il defeend de la fublimité du trope,
pour l’accufer au propre de caufer des. hémorrhagies
mortelles, des jauniffes funeftes, des parotides malignes
, ce en quoi ACtuarius n’a pas manqué de le
copier. Le huitième eft moins pernicieux que le fixieme
, mais il n’en approche que trop, ainfi que le
dixième. Le douzième ..eft , fi on peut s’exprimer
ainfi, un jour inutile ; il n’eft bon qu’à être compté,
non plus que le feizieme & le dix-huitieme.
Tous les jours, excepté le redoutable fixieme,
fon t, comme on v o it , de peu de conféquence, relativement
à la figure qu’ils font dans la marche de
la nature ; mais ils font par cela même très-précieux
aux médecins, auxquels ils préfentent le tems favorable
pour placer leurs remedes: auffi ces jours-là ont-
ils été appellés médicinaux ; ce font pour ainfi.** dire
les jours de l’A r t, qui n’a prefqu’aucun droit fur tous
les autres, pïiifqu’il ne lui eft jamais permis de déranger
la nature , qui partage fon travail entre les
jours critiques & indicateurs, & qui fe repofe ou
prend haleine les jours vuides.
Nous n’avons parlé jufqu’ici que des maladies qui
ne paflent pas le vingtième jour ; mais il y en a qui
.vont jufqu’au quarantième, & qui ont aüffi dans la
partie de leur cours qui s’étend au-delà du vingtième
, leurs crifes & leurs jours critiques : de ce nombre
font le vingt-feptieme, le trente-quatrième., & le
quarantième lui-même. On compte ceux-ci de fept
en fept, au lieu que depuis le premier jour jufqu’au
vingtième, on les compte non-feulement p a r fept
ou par feptehaires, mais encore par quatre ou par
quartenaires. Le feptieme, le quatorzième, le vingtième
ou le vingt-unieme, font les trois feptenaires
les plus importons ; le quatrième , le huitième, le
douzième, le feizieme & le vingtième, font les quartenaires
les plus remarquables, & lesfeuls auxquels
on faffe attention. Quelques anciens ont appellé
ces derniers jours demi-feptenaires; ils ont auffi divifé
les jours en général, en pairs & en impairs. Les uns
& les autres avoient plus ou moins de vertu, fuivant
que les maladies étoient fanguines ou bilieufes, les
bilieufes ayant leurs mouvemens aux jours impairs
& les fanguines aux jours pairs.
Il paroit que c’eft à ce précis qu’on peut le plus
raifonnablement réduire tout ce que les anciens nous
ont Iaiffe au fujet de la différence des jours ; il
.feroit fort inutile de relever les contradictions dans
lefquelles ils font tombés quelquefois. & de les fui-
Jomt IV*
vre dans toutes les tournures qu’ils ont tâché de
donner à leur fyftème. Nous ne nous attacherons ici
qu à parler dé quelques-uns de leurs principaux em-
barras, & ces confédérations pourront devenir inté-
rettantes pour l’hiftoire des maladies.
Les anciens ne font pas d’accord fur la maniéré
dont on doit fixer le jour. Qu’eft-ce qu’un jour
en Medecine, ou dans une maladie ? Voilà ce que
les anciens n’ont pas affez clairement défini. Ils fe
font pourtant affez généralement réduits à faire un
jour qu’ils appelloient medical ou médicinal, & qui
etoit de vingt-quatre heures, comme le jour naturel.
La première heure de ce jour medical étoit la première
heure de la maladie, qui ne commençant pas
toûjours au commencement d’un jour naturel, pouvait
n’être qu’à fon fécond jour lorfqu’on comptoit
le troifieme jour naturel depuis fon commencement.
&c.
Mais il ne fut pas auffi aifé de fe fixer à l’égard de
ce qu il faut prendre pour le premier jour dans une
maladie. En effet, s’il eft des cas dans lefquels une
maladie s’annonce fubitement & évidemment pat-
un friffon bien marqué, il eft auffi des maladies où
le malade traîne deux & trois jours , & quelquefois
davantage, fans prefque s’en appercevoir. On
fe bornoit dans ces cas à compter les jours de la-maT
ladie du moment auquel les fonftions étoient décifi-
vement lefees ; mais ce moment-là même n’eft pas
toûjours aifé à découvrir. La complication des maladies
eft encore fort embarraffante pour le compte
des jours. Par exemple, une femme groffe fait fes,
couches ayant a&uellement la fievre ; une autre eft
faifie de la fievre trois ou quatre jours apres fes couches
: ou faudra-t-il alors prendre le commencement
de la maladie ? Hippocrate s’eft contredit fur cetté
matière, &: Galien veut qu’on compte toûjours du
moment de l’accouchement, ce en quoi il a été fuivi
par Rhazès, Amatus Lufitanus, &c. Il y en a eu
qui pretendoient faire marcher les deux maladies à
la fois, & les compter chacune à part. D ’autres ,
tels qu’Avicenne, Zacutus Lufitanus, &c. ont dif-
tingué l’accouchement contre nature d’avec le naturel,
ôc ils ont pris celui-ci pour un terme fixe, ôc
pour leur point de partance dans le compte des
jours, en regardant l’autre comme un fymptome de
la maladie. Mais tout cela n’éclaircit pas affez la
queftion, parce que les explications particulières ne
font fouvent que des reffources «nie chacun fe ménage
pour éluder les difficultés. L’hiftoire des rechûtes,
' & celle des fievres aiguës entées fur des maladies habituelles
ou chroniques, embrouillent encore da«*
vantage le compte des jours ; & ce qu’il y a de plus
fâcheux pour ce fyftème, c’eft qu’une crife durant
quelquefois trois & quatre jours, on ne fait à quel
jour on doit la placer. Il faut l’avoiier, toutes ces
remarques que les anciens les plus attachés à la doctrine
des crifes, avoient faites, & dont ils tâchoient
d’éluder la force, rendent leur doôrine obfcure, vague
, & fujette à des mécomptes qui pourroient être
de conféquence, & qui n’ont pas peu contribué à décrier
les crifes & les jours critiques. Il y a plus, c’eft
que Galien lui-même eft force de convenir (ch. vj.
des jours critiques) qu’on ne fauroit difimuler, f i on ejl
de bonne foi , que la doctrine d’Hippocrate fur les jours
critiques ne foit très-fouvent fujette à erreur. Si cela eft ,
fi on rifque de fe tromper très-fouvent, à quoi bon
s’y expofer en admettant des dogmes incertains ?
D ’ailleurs on trouve des contradictions dans les livres
d’Hippocrate, au fujet des jours critiques. (Ces
contradictions ont été vivement relevées par Marfi-
liusCagnatus.) Cequ’Hippocrate remarque dans fes
épidémies, n’eft pas toûjours conforme à fes pro-
gnoftics&à fes aphorifmes. Galien a fenti de quelle
conféquence étoient çe$ contradictions ; il tâche
O o o