font otliçrifes, on les reftreintaux travaux fervîles
de la campagne : c’eft pourquoi par arrêt rendu en
laitournelle civile l e ^ Août 173 5 , on jugea qu’un'
notaire n’étoit .point: tenu, pendant les jours de c»r-I
yée, tle recevoir à cetitré tous les aôes du feigneur,
quoique l’aveu portât que chaque habitant de voit
trois jours de corvées de ion métier, comme.le laboureur
de là charrue, &c.
i On tient communément en pays de droit écrit,
que toutes corvées y font imprelcriptibles , fi ce n’eft
du jour de la contradiftion. La raifon eft que dans,
ces pays elles font feigneuriales ; mais .pour .leur
donner ce privilège d’être imprefcriptibles, il faut
qu’elles- tiennent lieu de cens, autrement la pref-
cription eft toujours favorable de la part des corv
é a b l e s . • •• - -:--u ■ • \ '
En pays coutumier, les coryées à volonté ne fel
prefcrivent que dû jour de la eôntradiftion, parce
que ce font des droits de pure faculté, qui ne fe per-1
dent point par le non-ufage, à moins que le feigneur.
n’eût été c-ent ans farts en être fervi.
- Pour ce qui ëft des autres corvées > foit réelles ou
pérfoflnëllés, elles fe prefcrivent par trente ou quarante
ans, de même que toutes a étions & droits per-
fonriels OU réels. Les fervitudes font odieufes, la
liberté au contraire eft toujours favorable.
Les corvéables font obligés de fe fournir des outils
& inftrumens nécef&iires à la corvée qu’ils doivent
; ils font auffi-obligés de fe nourrir à leurs dépens
pendant lé tems même de la corvée : tel eft l’u-.
fage le plus général du pays coutumier i à moins)
que le titre ou la coûtume du lieu ne foit contraire,
telles que les coutumes d’Auvergne & de la Marche,
& quelques autres voifines des pays de droit écrit.
Si le titre paroît charger le feigneur, il doit être in-,
terprété favorablement pour les habitans, qui font
déjà affez grevés de travailler gratuitement, pour
qu’il foit jufte de la part du feigneur de les nourrir,
pour peu que la coutume ou le titre y'incline.
A l’égard des chevaux, boe.ufs & autres bêtes de
labour ou de fomme que le corvéable fournit, c’eft
au feigneur à les noiirrir pendant la corvée.-
Les corvées ne doivent être acquittées én général;
que dans les limites de lafeigneurie ou juftice à laquelle
elles font dues ; il y en a cependant quelques-
unes , telles que la dohade ou vinâde que le corvéable
doit faire même hors les limites, mais toujours,
de maniéré qu’elle, fe puiffe faire fans découcher.
Cela dépend au furplus des termes de la coutume,
des titres & de la pofleffion.
Quand les corvées font dues avec charroi & bef-
tiaux, fi les corvéables n’en ont pas, ils font obligés
de les faire avec une bête de fomme, s’ils en ont
une ; ou s’ils n’en ont pas non plus, de faire ce qu’ils
peuvent avec leurs bras.
Toutes les corvées, foit de fief ou de juftice, réelles
ou perfonnelles, ne font point dues qu’elles ne
foient demandées ; elles ne tombent point en arrérages
que du jour de la demande, depuis lequel temS
ôn les évalue en argent : hors ce cas, il n’eft pas permis
au feigneur de les exiger en argent.
Il y a feulement une exception pour le fermierdu
domaine, à l’égard duquel on a évalué les charrois
à zb fols, & chaque manoeuvre ou corvée de bras,
â 5 fols.
Quoique les corvées à merci ou à volonté annoncent
un droit indéfini de la part du feigneur, il ne lui eft
pas permis cependant d’en abufer pour vexer fesfu-
jets; non-feulement il ne peut en demander que
pour fon ufage, mais elles doivent être réglées modérément
, arbitrio boni viri. Si la coûtume n’en détermine
pas le nombre , on les fixe ordinairement à
douze par an. En Pologne les payfahs travaillent
cinq jours' de la femaine pour leur feigneur, & le
dimanche & le lundi pour eux.
Le droit du feigneur, par rapport aux corvées, eft
un ufage perfonnel, de forte qu’il ne peut le çédet
à un autre.
Pour ce qui eft des exemptions qui peuvent avoit?
Heu en faveur de certaines perfonnes, les eccléfiafr
tiques & lés nobles font exempts des corvées perfon-»
nelles, dontle .miniftere eft vil &ç abjeû; mais quant
aux corvées réelles,, perfonne n’en eft exempt, parce
que ceft le fonds qui doit : ainfi les eccléfiaftiques 6ç
les nobles y font fujets comme les autres ; ils doivent
fournir un homme à leur p lace, ou payer l’eftima-
tion, de la corvée en argent.
Il ne .nous rçfte plus qu’à donner dans les fiibdi-
vifions fuivantes, une notion fommaire des différentes
fortes de corvées.
Corvée d'animaux, eft celle où le fujet eft tenu de
fournir fon boeuf, cheval ou âne, foit pour labourée
les terres du feigneur, ou pour voiturer quelque
çhofe pour lui. Le corvéable eft quelquefois tenu
de mener lui-même fes bêtes, & de les faire travailler
: cela dépend du titre.
Corvées artificielles , en latin artificiales feu fabriles ^
font celles qui confiftent à faire quelqu’oeuvre fer-
yile pOjiir le feigneur, comme de faucher ou faner
fes foins, labourer fes terres ou fes vignes, feier
fes bleds, & autres ouvrages femblables.
- Corvées à bras, font celles où le corvéable n’eft
tenu de fournir que fes bras, c’eft-à-dire le travail
dè fes mains, à la différence de celles où le corvéable
doit fournir quelque bête de fomme, ou une
charrette ou autre uftenfile.
Corvée de charroi, eft celle qui confifte à fournir
quelques voitures, & à charroyer quelque chofe
pour le feigneur. Voye% C h arroi.
: Corvées de convention, font celles qui font fondées
fiir une convention expreffe ou tacite , faite entre
le feigneur & les corvéables ; elle eft expreffe ,•
quand on rapporte le titre originaire ; tacite, lorf-
qu’il y a un grand nombre de reconnoiffances conformes
les unes aux- autres, antérieures à la réformation
des coutumes, & foûtenues d’une pofleffion
confiante & non interrompue, qui font préfumer un
titre conftitutifconfenti par les habitans, foit en ac-,
ceptant les claufes d’un affranchiflement, foit en
acceptant des communes , ou pour quelqu’autre
caufe légitime.
Corvées de corps, font celles où le corvéable eft
obligé de travailler de fon corps & de fes bras à quelqu’oeuvre
fervile , comme de faner, labourer, feier,
vendanger, &c. Toutes corvées en général font de
leur nature des corvées de corps ; il y en a néanmoins
où le corvéable n’eft pas cenfé travailler de corps ,
telles que les corvées obféquiales, où il eft feulement
obligé d’accompagner fon feigneur , ou lorsqu'il
eft feulement tenu de lui fournir quelques
bêtes de fommë ou voitures pour faire des charrois.
Corvées fabriles , du latin fabriles , font les mêmes
que les corvées artificielles ou d’oeuvre fervile.
Corvées de fief, font celles qui ont été refervées
par le feigneur par le bail à cens ou autre conceffion
par lui faite aux habitans, à la différence des corvées
de juftice, qui font impofées en conféquence de la
puiffance publique que le feigneur a comme haut-
juftioier.
Corvées d'hommes & de femmes > font celles qui
font dues par tête de chaque habitant, & non par
feu & par ménage, ni à proportion des fonds.
Corvées de jufiiee , ou dues au feigneur à caufe de la
juflice; il y en a en Auvergne , en Languedoc , en
Bourbo’nnois. Voye% ci-devant Corvées de fief-.
Corvées -à merci ou à volonté, font celles que le
feigneur peut exiger quand bon lui femble, & pendant
tout lé tems qu’il en a befoin , fans que le tems
ni le nombre en foit limité. La jurifprudenee des arrêts
les réduit néanmoins à douze par an.
Corvées mixtes,font celles qui font en partie réelles
& en partie perfonnelles ; il y en a peu qui foient
véritablement mixtes : car elles font naturellement
ou réelles, c’eft-à-dire dues à caufe des fonds ; ou
perfonnelles , c’e ft-à-dire dûes par les habitans ,
comme habitans : ^cependant on en diftingue deux •
fortes de mixtes ; favoir, les réelles mixtes, telles
que les corvées à bras, dûes par les détenteurs des
fonds qui en peuvent être chargés ; & les mixtes perfonnelles
, qui font dûes par chaque habitant, comme
habitant, mais par charrois & par chevaux ; ce
qui a toujours rapport au plus ou moins de fonds
qu’il fait valoir.
Corvées obféquiales, font celles qui confiftent en
certains devoirs de; déférence envers le feigneur ,
telles que celles qui étoient dûes aux patrons chez
les Romains , & qui confiftoient à adejfe patrono, co-
jnitari patronum.
Corvées ojficieufes ou officiales, en latin officiales,
font la même chofe que les corvées obféquiales ; elles
font oppofées à celles qu’on appelle fabriles.
Corvées particulières, voyez ci-après Corvées publiques.
Corvées perfonnelles. Toutes corvées font dûes par
des perfonnes-; mais on entend fous ce nom celles
qui font dûes principalement par la perfonne, c’eft-
à-dire par l’habitant, comme habitant, & indépendamment
des fonds, foit qu’il en pofféde ou qu’il
n’en poffede pas. Voyeç ci-devant Corvées mixtes, ôt
ci-aprés Corvées réelles.
Corvées publiques , font celles qui font dûes pour
quelques travaux publics , comme pour conftruire
. ou réparer des ponts, chauffées, chemins, &c. à la
. différence des corvées qui font dûes au feigneur pour
;fon utilité particulière. Voye[ plus bas C o r v é e ,
: Ponts & Chauffées. (^ )
Corvées réelles; font celles que le fujet doit à caufe
- de quelque fonds qu’il poffede en la feigneurie.^bye^
ci-devant Corvées mixtes & perfonnelles.
Corvées feigneuriales, font celles qui font ftipulées
dans les terriers ou reconnoiffances , comme un
droit du fief, ou comme un droit de juftice , à la
différence de celles qui peuvent être impofées par
convention fur des fonds.
Corvées taillablieres, font celles qui procèdent de
. la taille réelle, & que l’on regarde elles - mêmes
comme une taille. Ces fortes de corvées ont lieu dans
: les coûtumes de Boiubonnois & de la Marche. En
- Bourbonnois celles qui procèdent de la taille per-
fonnelle, & fur le chef franc ou ferf, le corvéable
- doit quatre charrois par an ; ou s’il;, n’a point de
charrette & de boeufs, il doit quatre corvées à bras ;
au lieu que les corvées qui procèdent de la taille réelle
& à caufe des héritages, & que l’on appelle tailla-
: blieres, font reglées à trois charrois par an; o u , à
défaut de charrois, à trois corvées à bras.
Corvées à terrier, font les corvées feigneuriales qui
. font établies par le bail à fief, & relatives dans le
terrier.
Corvées à volonté, voyez ci-devant Corvées à merci.
Voye^ la biblioh. de Bouchel, le glofaire de M. de
Lauriere, au mot Corvées, & la conférence .des coûtumes
; le traité des Corvées de M. Guyot , tome I. des
fiefs; Henris, tome I. liv. III. ch. iij, quefi. 3 z
Defpeiffes , tome III. p. a 07-. (-^)
Corvée , (Pontf & Chauffées.) La corvée eft un
ouvrage public , que l’on fait faire aux communautés
, aux particuliers, defquels on demande dans
les faifons mortes, quelques journées de leur tems
. fans falaire. Une telle condition eft dure fans doute
Tony,
pour chacun de ces particuliers ; elle indique par
conféquent toute l’importance dont il eft de les bien
conduire, pour tirer des jours précieux qu’on leur
demande fans falaire le plus d’utilité que l’on peut,
afin de ne point perdre à la fois & le tems du particulier,
& le fruit que.l’état en doit retirer..
On peut donc établir fur cette feule confidéra-
tion, que la perfeâion de la conduite des corvées
doit confifter à faire le plus d’ouvrage poffible dans,
le moins de tems poffible ; d’où il s’enfuit qu’il faut
de toutes les voies choifir la plus prompte & la plus
expéditive, comme celle qui doit être la meilleure.
On n’a déjà que trop éprouvé en plufieurs provinces
, qu’une corvée languiffante étoit un fardeau
immenfe fur les particuliers, & une fervitude dans
l’état, qui fans produire le fruit que l’on avoit en
vu e , fatiguoit fans ceffe les peuples, & gênoit pendant
un grand nombre d’années la liberté civile des
citoyens. Il fuffit, pour en être plus convaincu, de
joindre à un peu d’expérience , quelques fentimens
de commifération pour les peuples. Il ne s’agit donc
que de chercher quelle eft la méthode qui répond le
mieux à ces principes, premièrement pour la diftri-
bution & la conduite des travaux, & enfuite pour
la police avec laquelle on doit régir les travailleurs.
De la conduite & difirïbution des travaux. Toutes
les aftions des hommes ont un mobile ; l’argent 6c
l’intérêt font ceux qui les condüifent aux travaux,
mais ce font des mobiles dont les corvées font privées
; il a fallu y en fubftituer d’autres pour tenir
lieu de ceux -là. Ceux qui ont été reconnus devoir
être employés, font les tâches que l’on donne & qu’il
faut indifpenfablement donner âux corvoyeurs ; on
a vû que c’étoit l’unique moyen de les intéreffer au
.progrès de l’ouvrage, & de les engager à travailler
d’eux-mêmes avec diligence , pour fe décharger
promptement du fardeau qui leur étoit impofé. Ces
tâches font ordinairement naître une telle émulation
au milieu d’un attelier fi ingrat pour celui qui y travaille
, qu’il y-a eu des corvées fi bien conduites, que
.leur progrès l’emportoit même fur celui des travaux
à prix d’argent.
On peut diftribuer ces tâches de différentes maniérés
; & c’eft le choix que l’on en doit faire qu’on
aura ici particulièrement en vûe ; parce que l’on doit
^encore fe fervir de ce moyen avec quelques refer-
ves , la diftribution de tout un ouvrage public en
plufieurs ouvrages particuliers pouvant quelquefois
fe faire de telle forte, qu’au lieu d’y trouver l’avantage
que l’on y cherche, l’ouvrage public languit
& dégénéré, parce qu’il change trop de nature.
Un efprit d’équité qu’on ne fauroit trop loüer,
joint à l’habitude que l’on a de voir les tailles & les
impofitions annuelles réparties fur les communautés
& réglées pour chaque particulier, eft ce qui a fait
fans doute regarder les travaux publics comme une
autre forte de taille que l’on pouvoit divifer de même
en autant de portions qu’il y avoit d’hommes
dans les communautés, fur lefquelles le tout étoit
impofé. Rien ne paroît en effet plus naturel, plus
• fini p le , ôf en même tems plus jufte que cette idée ;
cependant elle ne répond point du tout dans l’exécution
, au principe de faire le plus d'ouvrage poffible
dans le moins de tems poffible , 6c de plus elle entraîne
des inconvéniens de toute efpecç*
Il fuffiroit pour s’en convaincre de confidérer l’état
de la route de Tours au Château-du-Loir ; cette
route a été commencée il y a quinze à dix-huit, ans ,
par conféquent Iong-tems avant l’arrivée de M. l’intendant
& de M. Bayeux dans cette généralité ; elle
a été divifée en plufieurs milliers de tâches, qui ont
été réparties fur.tous les particuliers : néanmoins ce
n’eft encore aujourd’hui qu’avec mille peines qu’on
en peut atteindre lft fin, Orj a dû penfer vraiflem-,
N n ij[