
qu’elle éleve & applique toujours plus fortement
vers le palais, preffe la pâte molle des alimens , la
détermine vers la racine de la langue, & la pouffe
fous l’arcade du voile du palais à l’entrée du gofier,
par une voie rendue liffe & gliffante par la mucofité
dont elle eft enduite, aufli-bien que toutes les furfa-
ces des autres parties qui fervent à la déglutition.
Foy. Mu c o s it é , G o sier , C rypte. Elle eft portée
contre l’épiglotte, toujours élevée dans fa fitua-
tion naturelle par fon propre reffort*, & quelques
ligamens qui l’attachent à la racine de la langue.
La pâte alimentaire, qui prend une forme arrondie
dans le Canal mentionné , preffe l’épiglotte &
l’abaiffe fur le larynx, dont elle ferme l’entrée &c
fert de pont, par-deffuslequel le bol alimentaire
paffe pour parvenir au fond du gofier. Dans l’inftant
que cela le fait, différens mufcles , & fur-tout les
digaftriques -, .dont la mâcnoire inférieure, qui eft
élevée & fixée, favorife la contraction, & les ftylo-
hyoïdiens, par leur action combinée , élevent l’os
hyoïde , & par conféquent la racine de la langue qui
y eft attachée ; elle eft portée contre le voile du palais
, qui eft tenu élevé par l’action des ftaphilins ou
de l’azygos de Morgagni, des cératoftaphilins & des
ptérigo-ftaphilins. Ce qui fe trouve entre deux, eft
preffé & porté en arriéré, la langue roidie contre la
voûte de la bouche empêchant le retour vers le devant
: le voile étant élevé , ferme le paffage vers
les arriéré-narines. En même tems le génio-hyoï-
dien fe contrâûe, & tire vers le menton l’os hyoïde ;
le géniogloffe tire aufli en-avant la langue, & par
conféquent le larynx eft aufli tiré en-avant, puif-
qu’il eft attaché très • étroitement à l’os hyoïde. La
mâchoire inférieure eft encore portée antérieurement
, enforte que par cette méchanique la cavité
du fond de la bouche s’augmente confidérablement.
Ainfi la bafe de la langue par fon élévation étant
comme renverfée en arriéré, détermine aifément la
pâte alimentaire vers cette cavité, avec le concours
de la preflion du voile du palais, qui s’applique fortement
fur elle & la pouffe vers le pharynx, qui eft
prefque perpendiculairement pofé au-deffous ; parce
que l’os hyoïde, le larynx &. la langue étant tirés
en-avant & en-haut, entraînent la portion antérieure
du pharynx, & l’écartent d.e la poftérieure,
qui eft retenue en arriéré par les céphalopharyngiens
, tandis que les portions latérales font tirées ,
écartées & élevées par les ftylopharyngiens, par les
ftaphylopharyngiens &. les ialpingopharyngiens ; de
façon que le pharynx eft ouvert en tout lèns : fa partie
anterieure fe trouvant donc prefque fous le voile
du palais par fa dilatation, celui-ci eft tiré en en-bas
par les palato-pharyngiens, & fur - tout par les thy-
réo-palatins & les cérato-ftaphilins. Ces mufcles
& les gloffo-palatins abaiffent le voile vers le larynx
& la racine de la langue, ce qui achevé de déter^
miner le bol alimentaire vers le pharynx, & lui ferme
entièrement toute iffue vers la cavité de la bouche
; ainfi l’épiglotte continuant à refter abaiffée
tant qu’il y a des alimens dans le gofier, la fente de
la glotte étant d’ailleurs fermée par les mufcles ari-
thenoïdiens, arithénoépiglotidiens & tiro-arithénoï-
diens, les arriéré -narines étant fermées par le voile
du palais, qui eft affez élevé pour empêcher la communication
avec ces cavités, fans être exactement
appliqué à leurs ouvertures, la trompe d’Euftachi
étant aufli bouchée par le relâchement des ptérigo-
falpingoïdiens, qui fervent à en dilater la partie molle
, & par la contraction des pétro-falpingoftaphilins
qui l’affaiffent, il ne refte de voie libre vers laquelle
les alimens puiffent fe porter, que l’ouverture du
pharynx ; ils y font pouffes par le concours de toutes
les puiffances mentionnées : en même tems le muf-
cle oefophagien, qui eft le même que les laringopharyngiens,
félon quelques anatomiftes, fe relâché
pour donner plus de fond à l’entonnoir, c’eft-à-dire
à la partie fupérieure de l’oefophage , qui en eft la
plus dilatée. Le bol alimentaire reçu dans le pharynx
, eft pouffé ultérieurement jufques dans l’oefophage
, par le concours de plufieurs autres puiffances.
Tous les mufcles qui tenoient le larynx relevé
& porté en-avant, venant à fe relâcher toUt-à-coup,
il eft tiré en-bas & en-arriere par la contraction des
fterno-tyroïdiens, des homohyoïdiens, & des fter-
no-hyoïdiens. Leshio-pharyngiens, les tiro-pharyngiens
& les crico-pharyngiens, concourent aufli
à cet effet ; ainfi tout ce qui eft encore contenu dans
le pharynx, eft pouffé en-avant dans l’entonnoir :
la partie fupérieure étant vuidée, fe laiffe comprimer
& ne permet point de retour, fur-tout avec le
fecours du mufcle oefophagien, qui vient à fe contracter
comme un fphinCter, & refferre entièrement
le canal.
Cependant les fibrês mufculeufes orbiçulaifes de
l’oefophage, étant relâchées au-deffous du bol alimentaire
, celles qui font au-deffus & autour le contractent
, le preffent, & le forcent à fe porter où il
y a le moins de réfiftance, c’eft-à-dire vers la partie
de l’oefophage qui n’eft pas encore refferrée. Celle-
ci fe contracte à fon tour, & fait toujours plus avancer
les alimens vers l’eftomac, & ainfi fucceflive-
ment dans toute la longueur de l’oefophage, jufqu’à
ce qu’ils foient parvenus dans la cavité de ce vif-
cere. Il faut obferver que la déglutition ne peut cependant
pas lui fournir lans interruption des alimens,
quoiqu’on ne difeontinue pas d’avaler, parce que la
partie de l’oefophage qui s’unit au ventricule, paffe
un peu au-deffus de fa fin à-travers le diaphragme,
qui en refferre le diamètre dans le tems de fa contraction
; ainfi le paffage n’eft libre que quand il eft
relâché dans le court intervalle de tems entre l’inf-
piration & l’expiration. Foye^ en fon lieu chacune
des parties, foit mufcles ou autres, mentionnées
dans cet article, pour en avoir la defeription anatomique.
Ce qui vient d’être dit ci-deffus de la déglutition ,
eft l’expofition du méchanifme par lequel on avale
les alimens folides. Il y a quelque différence dans la
déglutition des fluides.Pour avaler ceux-ci, lorfqu’on
veut le faire d’un trait, on infpire l’air qui eft dans
la bouche ; on y forme pour ainfi dire un vuide,
pour que le liquide paffe fans réfiftance jufqu’au gofier
; c’eft ce que font la plupart des animaux qui
boivent ayant la tête plus baffe que la poitrine ; ils
pompent l'a matière de leur boiffon. Si on boit par
fimple effiifion du liquide dans la bouche, lôrfqu’elle
eft faite en fuffifante quantité pour une gorgée £ les
mufcles des joues & des levfes fe contractent fortement
contre les gencives ; & la bouche étant fermée,
la langue difpofee en canal, fa pointe élevée contre
la voûte du palais , la glotte fe ferme exactement,
& le liquide, qui n’eft pas fufceptible d’agir en maffe
contre l’épiglotte pour l’abaiffer, & qui élude la
preflion de la langue pour cet effet, coule le long de
deux efpeces de rigoles pratiquées à la bafe de l’épiglotte
, & la contournent pour parvenir au pharynx.
Le voile du palais refte abaïffé, & la luette qui défi
cend vers la racine de l’épiglotte, d’autant plus que
le larynx eft élevé par fes mufcles à cette fin , fert
beaucoup à détourner le liquide à droite & à gauche
, & à l’empêcher de remonter pardevant & par-
deffus l’épiglotte. Les deux échancrures du voile du
palais, qui font à côté de la luette, femblent indiquer
plus particulièrement l’ufage qui vient d’être
aflïgné à cette derniere partie.
Le voile du palais n’eft vraifferablablement élevé
dans la déglutition des liquides, que dans le cas de
ceux qui boivent ayant la tête perpendiculairement
en-bas ; car il ne paroît pas même néceffaire qu’il
s’élève dans l’attitude où font plufieurs animaux
quand ils boivent. La colomne du liquide s’élève
dans la bouche & dans le gofier d’un cheval, par
exemple, & redefeend dans l’oefophage, pour ainfi
dire , comme dans les deux branches d’un fyphon,
à l’aide cependant d’un peu d’aCtion des fibres fpi-
rales, qui fe trouvent, dans toute la longueur du
canal, différentes de celles de l’oefophage dans
l’homme, qui font orbiculaires.
La facilité avec laquelle les liquides paffent par
les arriere-narines, pour peu que l’on expire en riant
ou en touffant, &c. femble aufli une preuve que le
voile du palais n’eft pas élevé quand on boit comme
quand on mange.
Enfin les liquides portés dans le pharynx élevé
& dilaté, pour les recevoir, entrent dans l’oefopha-
ge par la preflion du larynx porté & comprimant en
arriéré le mufcle oefophagien, qui s’eft relâché pour
admettre la matière de la déglutition, & fe refferre en-
fuite : il fe fait dans l’oefophage la même aétion fuc-
ceflïve que pour les alimens folides, avec cette différence
feule, que les efforts font beaucoup moindres.
Les liquides parviennent ainfi à l’eftomac par
la répétition du même méchanifme, proportionnée
à la quantité de boiffon, tout comme les folides
font avalés peu-à-peu, à mefure qu’ils ont acquis
par la maftication , les qualités convenables pour
être portés dans l’eftomac par le moyen de la déglutition.
(d )
D é g lu t it io n lesée , (Mtdec. Pathol.') Cette
foRÛion peut être viciée de trois maniérés différentes
; favoir par diminution dans fon exercice, ou
par fon abolition, ou par fa dépravation.
Elle peut être diminuée ou abolie, ce qui ne différé
que du plus au moins par rapport aux caufes.
i° . Par le défaut de la langue , lorfqu’elle eft paralytique
, ou raccourcie , ou enflammée, enforte
qu’elle ne puiffe pas faire les mouvemens néceffaires
pour ramaffer les alimens mâchés & les porter vers
le gofier, afin d’exciter à agir les organes de la déglutition
: c’eft ce qui arrive, par exemple, dans la
falivation, lorfque la langue eft enflée.
2°. Par le défaut du gofier, lorfqu’il eft infenfible,
oedémateux, calleux, enforte qu’il ne peut pas être
affeété par les alimens qui y font portés, & qu’il ne
peut pas contribuer à la déglutition par le jeu de fes
parties : c’eft ce qui a lieu dans les apoplectiques,
les carotiques, &c.
3°. Par le défaut des mufcles qui fervent à dilater
le pharynx, à élever le larynx, & de ceux qui entrent
dans la compofition de l’oefophage , lorfqu’ils
font enflammés, ou paralytiques, ou dans un état
de fpafme.
4°. Par le vice du pharynx même, lorfqu’il eft
enflammé, ulcéré, comme dans l’angine ; lorfqu’il
eft comprimé ou refferré par une tumeur, par une
vertebre du cou luxée en-avant, par l’enflure des
amygdales, par le refferrement convulfif du mufcle
oefophagien ; lorfque le pharynx eft defleché & privé
de la mucofité, qui fert à lubrifier fa furface intérieure
, par l’obftruCtion, le skirrhe des glandes qui
la fourniffent ; lorfqu’il eft rendu calleux par le.
grand ufage des boiffons trop chaudes. Dans ce
cas on avale une partie ; mais le bol alimentaire
s’accroche, pour ainfi dire , &: ne peut pas être
pouffé plus avant : il caufe une inquiétude & une
douleur qui forcent à le rejetter par un mouvement
inverfe des fibres mufculeufes.
La déglutition peut être dépravée, lorfqu’elle fe
fait d’une maniéré contre nature.
Comme, i° . lorfque la luette eft allongée , en-
flee, pendante : elle excite à agir les organes qui fervent
à avaler, de la même façon que s’il fe préfen-
Tome IF .
toit au gofier une portion d’alimens. Le méchanifme
de la déglutition s’exerce comme dans l’état naturel
, mais à pure perte & avec des efforts inutiles.
2°. Lorfque le voile du palais eft fendu, ou que
la luette manque entièrement, les alimens paffent
par les arriere-narines, parce qu’ils trouvent moins
de réfiftance vers cette partie-là que vers toute autre
, dans le gofier, étant preffés par la langue & par
le larynx, & ne l’étant par aucune puiffance qui les
écarte des ouvertures du nez. Quand la luette manque
, on touffe aifément en bûvant, par la raifon
donnée ci-devant, que cet organe fert à détourner
les liquides de la cavité du larynx , & par conféquent
de l’ouverture de la glotte, où il ne peut pas
entrer le moindre corps étranger, fût-ce la plus petite
goutte de la it, fans exciter des expectorations
violentes pour l’expulfer.
3°. Lorfque les alimens font fi fecs qu’ils abfor-
bent en paffant par les voies de la déglutition, toute
l’humidité qui s’y trouve, pour les rendre gliffantes ;
alors ils s’arrêtent, & ne peuvent pas céder aux forces
par lefquelles on tente de les avaler. La même
chofe arrive, fi les alimens font rudes ou âpres ; les
membranes du gofier & du pharynx, qui font extrêmement
fenfibles , fe refferrent, & font de violens '
efforts pour fe débarraffer de ce qui les bleffe. Il ne
fera pas hors de propos de rapporter ici quelques
obfervations des différentes maniérés dont la déglutition
peut être léfée.
Le célébré Boerhaave dit avoir vu une parotide
fi fort tuméfiée , qu’elle avoit entièrement aboli
l’exercice de la déglutition.
Ruyfch fait mention d’une tumeur des glandes dor-
fales devenues skirrheufes, qui produisit le même
effet. Il dit en même tems qu’il ne put guérir cette
maladie que par le fecours du mercure.
Boerhaave rapporte qu’ayant été confulté pour un
enfant né avec le voile du palais fendu dans fa partie
moyenne, le long de la luette, enforte qu’il ne pou-
voitpoint avaler, & l’ayant examiné, il s’apperçut
de cette déchirure, & ordonna qu’on lui fermât les
narines quand il feroit en difpofition d’avaler. D e
cette façon la déglutition fe fit bien , & il parvint
même à parler ; mais il ne pouvoit le faire que lorfqu’il
fe fermoit les narines avec les mains. Le même
. obfervateur fait encore mention d’un enfant qui
ayant été furpris par fa mere lorfqu’il portoit un
navet très-chaud à la bouche , & s’étant preffé de
l’avaler, il ne fut pas parvenu à l’eftomac, que le
petit miférable mourut.
J’ai vû moi-même, il n’y a pas long - tems , un
cocher à qui on avoit donne une prife de bétoine ,
qu’il tira par le nez comme du tabac ; il fe mit à
éternuer en conféquence avec violence : fe trouvant
un affez gros morceau de croûte de pain chaud
dans la bouche pendant l’éternûment, il fe preffa
de l’avaler fans l’avoir mâché : un nouvel éternû-
ment furvenu avant que la déglutition fût achevée ,
fixa cette croûte dans l’oefophage , enforte qu’elle
ne put pas être pouffée plus avant ; ce qui caufa à
ce malheureux de fi grandes douleurs, avec des agitations
continuelles , qu’il en mourut en moins de
trois jours, fe plaignant toûjours d’envie de vomir
& d’une douleur fixe à la hauteur du cardia , fans
que le vomiffement ni aucun autre remede pût lui
procurer aucun foulagement confiant. Il étoit obligé
de plier extrêmement fon corps ; & il fentoit redoubler
fa douleur chaque fois qu’il vouloit avaler
une gorgée de liquide, dont là déglutition s’achevoit
cependant, fans doute parce que la croûte n’oc-
cupoit pas toute la cavité du contour de l’oefophage.
Auroit-on pû dans ce cas tenter, félon la méthode
propofée par Rhuyfch dans fa première décade, de