774 D E î tenant que Dieu fe mêle des affaires des hommes,
s’imaginent qu’il fe plaît dans leurs fuperftitions Sc
dans leurs égaremens : 40. enfin ceux qui reconnoif-
fent que Dieu a donné -aux hommes une religion
pour les conduire , mais qui en réduifent tous les
principes aux fentimens naturels de l’homme, & qui
prennent tout le refte pont fiérion. Traité de la vérité
Se la Religion chrétienne y tome I. fecl. ij. chap. 1. On
peut voir dans le même auteur avec quelle force il
combat ces quatre efpeces de Déifies par les feules
armes de la raifon. Voyeç C h r i s t i a n i s m e .
M. I’abbé de la Chambre doéteur de Sorbonne,
dans un traité de la véritable Religion , imprimé à
Paris en 1737, parle des Déifies & de leurs opinions
d’une maniéré encore plus précife. « On nomme
» Déifies y dit cet auteur, tous ceux qui admettent
» l’exiftence d’un être fuprème, auteur & principe
» de tous les êtres qui compofent le monde, fans
» vouloir reconnoître autre chofe en fait de religion,
» que ce que la raifon laiffée à elle-même peut dé-
» couvrir. Tous les Déifies ne raifonnent pas de la
» même maniéré : on peut réduire ce qu’ils difent à
» deux différentes hypothefes.
» La première efpece de Déifies avance & foûtient
» ces propofitions : Il faut admettre l’exiftence d’un
» être fuprème, éternel, infini, intelligent, créa-
» teur', confervateur & fouverain maître de l’uni-
» vers, qui préfide à tous les mouvemens & à tous
» les évenemens qui en réfultent. Mais cet être fu-
» prème n’exige de fes créatures aucun devoir, parce
» qu’il fe fuffit à lui-même.
» Dieu feul ne peut périr ; toutes les créatures
» font fujettes à l’anéantiffement, l’être fuprème en
» difpofe comme il lui plaît : maître abfolu de leur
» fort, il leur diftribue les biens & les maux félon
» fon bonplaifir, fans avoir égard à leurs différentes
» aérions, parce qu’elles font toutes de même efpece
» devant lui.
» Là diftinérion du vice & de la vertu eft une
» pure chicane aux yeux de l ’être fuprème ; elle
» n’eft fondée que fur les lois arbitraires des fociétés.
» Les hommes ne font comptables de leurs aérions
» qu’au tribunal de la juftice féculiere. H n’y a ni
» punition ni récompenfe à attendre de la part de
» Dieu après cette vie.
» La fécondé efpece de Déifies raifonne tout au-
» trement. L’être fuprème, difent - ils , eft un être
» éternel, infini, intelligent, qui gouverne le monde
» avec ordre & avec fageffe ; il fuit dans fa conduite
»> les réglés immuables du vrai, de l’ordre & du.bien
» moral, parce qu’il eft la fageffe, la vérité, & la
» fainteté par effence. Les réglés éternelles du bon
» ordre font obligatoires pour tous les êtres raifon-
» nables ; ils abufent de leur raifon lorfqu’ils s’en
» écartent. L’éloignement de l ’ordre fait le v ice , 8c
» la conformité à l’ordre fait la vertu. Le vice mé-
» rite punition, 8c la vertu mérite récompenfe.. . .
» Le premier devoir de l’homme eft de refpeéler,
» d’honorer, d’eftimer & d’aimer l’être fuprème, de
» qui il tient tout ce qu’il eft ; 8c il eft obligé par
» état de fe conformer dans toutes fes aérions à ce
» que lui diète la droite raifon.
» Les hommes font agréables ou defagréables à
» Dieu, à proportion de l’exaéritude ou de la négli-
» gence qu’ils ont pour la pratique des devoirs que
» la raifon éternelle leur impofe. Il eft jufte qu’il ré-
» compenfe ceux qui s’attachent à la vertu, 8c qu’il
» puniffe ceux qui fe livrent aux mouvemens deré-
» glés de leurs pallions ; mais comme l’expérience
» montre que l’impie triomphe dans cette vie , tan-
v> dis que le jufte y eft humilié, il faut qu’il y ait
» une autre v ie , où chacun recevra félon fes oeu-
» vres. L’immortalité glorieufe fera le fruit de la
» vertu, l ’ignominie 8c l’opprobre feront le fruit du
D E I » vice ; mais cet état de peine & de douleur ne du-
» rëra pas toujours. Il eft contre l’ordre de la juftî-
» c e , difent les Déifies y qu’on puniffe éternellement
» une aérion d’un moment. V. D a m n a t i o n . Enfin
» ils ajoutent que la religion ayant pour but princi-
» pal la reformation des moeurs, fexaéritude à rem-
» plir les devoirs que la raifon prefcrit par rapport
» à D ieu , à foi-même 8c au prochain , forme les
» vrais adorateurs de l’êtrè fuprème. »
Le même auteur, après avoir expôfe ces deux
fyftèmes, propofe la méthode de les réfuter. Elle
Confifte à prouver, « ï°. que les bornes qui féparent
» le vice d’avec la vertu , font indépendantes des
» volontés arbitraires de quelqu’être que ce foit :
» 20. que cette diftinérion du bien 8c du mal, anté-
» rieure à toute loi arbitraire des légiflateurs, 8c
» fondée fur la nature des chofes , exige des hom-
» mes qu’ils pratiquent la vertu 8c qu’ils s’éloignent
» du vice : 30. que celui qui fait le bien mérite ré-
» compenfe, 8c que celui qui s’abandonne au crime
» mérite punition : 40. que la vertu n’étant pas toû-
» jours récompenfée fur la terre , ni le vice puni,
» il faut admettre une autre vie , oit le "jufte fera
» heureux 8c l’impie malheureux : 50. que tout ne
» périt pas avec le corps, 8c que la partie de nous-
» mêmes qui penfe 8c qui veu t, 8c qu’on appelle
» ame, eft immortelle : 6°. que la volonté n’eft point
» néceflttée dans fes aérions, 8c qu’elle peut à fon
» choix pratiquer la vertu 8c éviter le mal : 70. que
» tout homme eft obligé d’aimer 8c d’eftimer l’être
» fuprème, 8c de témoigner à l’extérieur les fenti-
» mens de vénération 8c d’amour dont il eft pénétré
» à la vûe de fa grandeur 8c de fa majefté : 8°. que
» la religion naturelle , quoique bonne en elle-mê-
» m e , eft infuffifante pour apprendre à l’homme
» quel culte il doit rendre à la divinité ; 8c qu’ainfi
» il en faut admettre une furnaturelle 8c revelée,
» ajoutée à celle de la nature. » Traité de la véritable
Religion, tome II. part. ij. pag. 1. 2. J . 4. 5. & G.
C ’eft la méthode qu’îrfuivie cet auteur dans huit
differtations particulières, 8c l ’on peut dire qu’elle
eft excellente contre les Déifies de la première efpece.
Mais ceux de la fécondé convenant avec nous
d’une partie de ces propofitions , il femble qu’on
pourroit fuivre contr’eux une voie bien plus abrégée
: ce feroit de prouver , i°. l’infuffifance de la
loi naturelle, 20. la néceflité d’une révélation, 30.
la certitude 8c la divinité de la révélation contenue
dans les écritures des Juifs 8c des Chrétiens , parce
que la néceflité d’un culte extérieur 8c l’éternité des
peines font des conféquences faciles à admettre ,
quand ces trois points font une fois démontrés, ((r)
DEITÉ, f. f. divinité, nom donné en général par
les Poètes aux dieux 8c aux déeffes du Paganifme.
Dans notre langue, ce terme n’eft d’ufage qu’en
Poéfie, ou dans les traités de poétique. (<>)
DEIVIRIL, àdj. ( Théol.) terme employé par les
Théologiens pour lignifier en Jefus-Chrift des opérations,
qui tenoient en même tems de la nature divine
8c de la nature humaine ; comme le marque ce
mot compofé de Deus, Dieu, 8c virilis dérivé de
vir, homme. Les Grecs exprimoient la même chofe
par le mot théandrique. Voye^ T h e a n d r i q u e .
C ’eft dans ce fens que S. Denys appellé vulgairement
l’Aréopagite dans fon épître jv . à Caïus, di-
foit : ab Incarnationis tempore non fecundum Deum
divina gefiit Chriflus ; nec Humana fecundum hominem:
verum Deo viro facto novam quamdam THEANDRI-
CAM feu D e i VIR1LEM operationem exprefjit.in vitâ.
Les Monothélites lifoient unam operationem, au
lieu de rwvam, pour établir leur opinion de l’unité
de volonté en Jefus-Chrift.
M. W itaffe, dans fon traité de l’Incarnation y part.
II. quafi. vj. art. 3 . fecl, 3 . remarque que ni les an-
D E K
ciens ni les modernes n’ont jamais eu une notion bien
claire de la vraie fignification de ces mots, opérations
dei-viriles : ca r , dit-il, on peut diftinguer en Jefus
Chrift trois fortes d’opérations ; les unes propres
à l’humanité feule, comme avoir faim, avoir fotf,
manger, &c. les autres propres à la feule divinité ,
comme produire le S. Efprit, confervef la nature
humaine, &c. d’autres enfin communes en quelque
forte à la nature divine 8c à la nature humaine, comme
de reffufciter les morts par fa parole,de guérir les
malades par l’attouchement de fon corps &c. De
toutes ces opérations, continue ce théologien, lef-
quelles appellera-t-on Dei-viriles ? donnera-t-on ce
titre à toutes les opérations de Jefus - Chrift, félon
la maxime reçûe, acliones ou operadones funt fuppo-
fitorum} car cefuppofitum, c’eft-à-dire Jefus-Chrift,
étoit Dieu 8c homme tout enfemble : ne l’accorde-
ra-t-on qu’aux opérations par lefquelles il faifoit des
miracles, parce que fon corps y concouroit avec la
puiffance divine ? Il conclut donc que par ce terme
on doit entendre une nouvelle maniéré d’opérer qui
étoit dans Jefus-Chrift depuis l’Incarnation, parce
que, ajoûte-t i l , ce que le Verbe faifoit de divin, il
ne le faifoit pas fans l’humanité ; 8c ce qu’il faifoit
d’humain, il ne l’opéroit pas fans la divinité. D ’où
il s’enfuit que toutes les opérations du Chrift pou-
voient être appellées en ce fens dei-viriles : ce qui au
refte ne favorife en rien la prétention des Monothélites.
Voye^ M O N O TH E L IT E S . (G) ,
DEKEN D ORF, ( Géog. mod.) ville d’Allemagne
dans la baffe Bavière , entre Straubing 8c Wilshof-
fen , non loin du Danube. Long. J o . 40. lat. 48.
46. . , ;
D E K E R , f. m. ( Comm. ) c’eft la quantité de fix
peaux. Les peaux en Hollande fe vendent par deker,
8c c’eft fur le même pié que les droits d’entrée 8c de
fortie s’en acquittent. * .
DELAI, f. m. (Gramm '.) fe dit en général dû renvoi
d’une aérion qui devroit être faite à un certain
tems, à un téms plus éloigné.
D e l a i , (Juri/p.) eft un tems accordé par la lo i,
ou par la coutume, ou par le juge, ou par les parties
, pour faire quelque chofe, comme pour communiquer
dès pièces, pour faire un payement^
La matière des délais eft traitée dans le droit romain
, au digefte de feriis & dilationibtis, 8c au code
de dilationibus.
Dans notre ufage il y a différens délais accordés
par lès ordonnances 8c par les coûtumes, pour les
ajournemens ou aflignations, pour fournir de défen-
fes, pour prendre un défaut, pour y former oppofi-
tion, pour produire 8c contredire, pour faire enquête
, pour interjetter appel, 8c généralement poùr les
diverlès procédures. 11 y en a aufli pour faire la foi
8c hommage , 8c fournir aveu 8c dénombrement,
pour délibérer, faire inventaire. Il feroit trop long
de détailler ici tous ces différens délais, qui feront
appliqués chacun en leur lieu.
Les principes généraux en matière de délais, font
que l’on peut anticiper les délais , c’eft-à-dire que
celui qui a huit jours pour fe préfenter, peut le faire
dès le premier jour , ce qui n’empêche pas que les
délais ne foient communs aux deux parties : de forte
que celui qui a fourni de défenfes avant la huitaine,
ne peut prendre défaut contre l’autre qu’après la
huitaine.
Dans les délais des aflignations 8c des procédures
, ne font point compris les jours des lignifications
des exploits 8c aéles, ni les jours auxquels échéent
les aflignations : mais tous les autres jours font continus
8c utiles, c’eft-à-dire comptés dans les délais ,
même les dimanches 8c fêtes folennelles, 8c les jours
de vacations, 8c autres auxquels il ne fe fait aucune
expédition de juftice.
D E L 775 . Dans les matières de rigueur , comme en fait de
retraits, de prefcription, de péremption, de lettres
de refçifion, 8c autres feniblables, le jour de l’échéance
du délai eft compté dans le délai : de forte ,
par exemple, que celui qui doit fe pourvoir dans
dix ans, doit le faire au plutard le dernier jour de
la dixième année y 8c qu’il n’y feroit plus recevable
le lendemain, à moins que la loi ne donne encore
ce jour, comme dans les coûtumes qui pour le retrait
lignager donnent le retrait d’an 8c jour. 1
On confond quelquefois ces mots terme 8c délai
comme s’ils étoierit fynonymes , quoiqu’ils ayent
chacun un fens différent : le délai eu un certain ef-
pace de tems accordé pour faire quelque chofe: 8c
le terme, proprement d it, eft l’échéance du délai, le
jour auquel on doit'payer ou faire ce qui eft dûi
On va maintenant expliquer les différentes fortes
de délais , qui font diftingués les uns des autres
par un furnom qui leur eft propre. (A )
D elai d’a v is , dans la province d’Artois, eft'le
tems accordé au feigneur pour délibérer s’il ufera
du retrait ou non. Voye^ Maillart fur Artois, article
D elai ( bref ) , eft celui qui eft plus court que les
délais ordinaires : par exemple une aflignatiôn donnée
à comparoître du jour àu lendemain, ou dans le
jour même, comme cela fe pratique dans les cas qui
requièrent célérité, s’appelle une aflignatiôn à bref-
délai. (A )
D elai pour d élibérer\voyt^Her it ie r ,R en
o n c ia t io n , Su cce ssio n. (A )
D elai f a t a l , eft celui qui eft accordé fans eï*r
pérance de prolongation. ( ^ )
D elai franc , eft celui qui eft accordé pleinement,
fans compter lef jour de la fignificàtion 8c celui
de1 l’échéance, comme liri délai d’une aflignatiôn
à huitaine, qui eft de dix jours, pour fe prélènter ;
au lieu qu’il y a dès' délais1 de rigueur qui fe comptent
de momento ad momentum. (A )
D elais frustratoires , font ceux qui font
demandés par affeéiation de la part d’une partie de
mauvaife foi qui veut éluder. (A )
D elai de g r â c e , eft celui qui eft accordé par
le juge ou par les parties au-delà des délais ordinaires
, par des confidérations d’équité. r(-^)
D elai de l’ordonnance , c’eft le tems dans
léquelTordonnance veut que l’on faffe chaque procédure
: ainfi quand on affigne quelqu’un dans Içs
-délais de l'ordonnance, fans expliquer le jour-auquel
il doit comparoître , cela eft foufentendu & fuffi-
• famment exprimé par ces termes, dans les delais de
l'ordonnance. (A )
D elai peremptoire , eft la même chofe que
délai fatal, c’eft-à-dire celui qui eft préfix, & non
pas Amplement comminatoire. La plupart des délais
font péremptoires : il y en a cependant qui peuvent
être prorogés en connoiffance de eau fe , quand il
ne s’agit pas d’une matière de rigueur. (A )
D elai ", terme d'Horlogerie. Voye£ PiGNON DE
DELAI.
DELAISSEMENT , f. m. ([Jurifpr.) fignifie Va-
bandonnement de quelque chofe, comme le délaif-
fement d’un héritage, & même le délaiffement d’une
perfonne. On dit dans certaines provinces , qu’une
femme efi délai fée d'un tel fon mari: ce qui ne fignifie
pas que fon mari l’ait quittée,mais qu’elle eft veuve.
On diftingue cinq fortès de^ délaiffement de biens ;
favoir la ceflion des biens, qui eft un délaiffement
uiiiverfel que le débiteur fait à fes créanciers ; la
renonciation à une fucceflîon, ou à une communauté
de biens ; le defiftement d’itn héritage ; le déguer-
piffement; & le délaiffement par hypotheque. Plu-
fieurs de ces différentes fortes de délaiffemehs font
déjà expliquées ci - devant : les autres le feront en