
ports. Aufli cet illuftre auteur n’a-t-il jamais diffé-
rentié des quantités, mais feulement des équations ,
parce que toute équation renferme un rapport entre
deux variables, & que la différentiation des équations
ne confifte qu’à trouver les limites du rapport
entre les différences finies des deux variables que 1 e-
quation renfermé. C ’eft ce qu’il faut éclaircir par
un exemple qui nous donnera tout à la fois l’idee
la plus nette Se la démonftration la plus exaéte de
la méthode du calcul différentiel.
. Soit A 3 . analyf.) une parabole ordinaire
, dont l ’équation, en nommant A P , x , P M ,y ,
& a le paramétré, eft y y =.a x. On propofe de tirer
la tangente M Q de cette parabole au point M.
Suppofons que le problème foit réfolu, & imaginons
une ordonnée p m à une diftance quelconque
finie de P M ; Se par les points M , m, tirons .l'a ligne
m M R. Il eft évident, i° . que le rapportj-g
de l ’ordonnée à la foûtangente, eft plus grand que
le rapport ou ^ , qui lui eft égal à caufe des
triangles femblables M O m, M P R : i°. que plus
le point m fera proche du point M1 plus le point R
fera près du point Q , plus par conféquent le rapport
Y TioxxTTo approchera du rapport que le premier
de ces rapports pourra approcher du fécond
aufli près qu’on voudra, puifque P R pèut différer
aufli peu qu’on voudra de P Q. Donc le rapport p-g
eft la limite du rapport de m O à O M. Donc li on
peut trouver la limite du rapport de mO à O M, exprimée
algébriquement, on aura l’expreflîon algébrique
du rapport de M P à P Q ; Se par conféquent
l’expreflion algébrique du rapport de l’ordonnée à la
foûtangente, ce qui fera trouver cette foûtangente.
Soit donc M O = u , O m = on aura a x = :y y ,&
ax-\- au —y y -}- z y { -J- Donc à caufe de a x
il vient ,<!*= x + C
Donc \ en raPPort de m O à
O M , quelque part que l’on prenne le point m. Ce
rapport eft toûjours plus petit que -£-y ; mais plus 1
fera petit, plus ce rapport augmentera ; & comme
on peut prendre £ fi petit qu’on voudra, on pourra
approcher le rapport aufli près qu’on voudra
du rapport ~ ; donc jL eft la limite du rapport de
a c’eft-à-dire du rapport ^ . Donc ~ eft
égal à ^ que nous avons trouvé être aufli la limite
du rapport de m 0 à O M;■ car deux grandeurs
qui font la limite d’une même grandeur, font néceffairement
égales entr’elles. Pour le prouver, foient
Z Si X les limites d’une même quantité Z , je dis
que X = Z ; car s’il y avoit entr’elles quelque différence
V, foit X — Z + V : par l’hypothèfe la quantité
Y peut approcher de X aufli près qu’on voudra ;
c’eft-à-dire que la différence de Y Se de X peut être
aufli petite qu’on voudra. Donc, puifque Z différé
de X de la quantité V , il s’enfuit que Y ne peut approcher
de Z de plus près que de la quantité V , Se
par conféquent que Z n’cft pas la limite de Y , ce
qui eft contre l’hypothèfe. Voy. Lim it e , ExhaXjs-
tion.
De-là il réfulte que eft égal à Donc P Q
= "lA2 — 2 x. O r , fuivant la méthode du calcul différentiel,
le rapport de M P k P Qeû. égal à celui de
A y à d x ;Sel’équation a x = y y donnea d x z - zy dy
Se Ainfi f i eft la limite du rapport de ^à
u ; & cette limite fe trouve en faifant { = 9 dans la
fraûion 7— -^* Mais > dira-t-on, ne faut-il pas faire
aufli 1 = o 8c u = o , dans la fraftion jj- B§ ~-+ ^, 8c
alors on aura ~ ^ ? Qu’eft-ce que cela fignifie,?
Je réponds, i° . qu’il n’y a en cela aucune abfurdité;
car - peut être égal à tout ce qu’on veut : ainfi il
peut être — . Je réponds, z°. que quoique la limite
du rapport de 1 à a fe trouve quand { = 0 & u = o,
cette limite n’eft pas proprement le rapport de { ==
0 à a = o , car cela ne préfentè point d’idée nette ;
on ne fait plus ce que c’éft qu’un rapport dont les
deux termes font nuis l’ un Si l’autre. Cette limite eft
la quantité dont le rapport approche de plus en plus
en fuppofant £ & a tous deux réels Se décroiffans,
& dont ce rapport approche d’aufli près qu’on voudra.
Rien n’eft plus clair que cette idée ; on peut
l’appliquer à une infinité d’autres cas. Voye^ Lim it
e , Sér ie , Progression, & c.
Suivant la méthode de différentier, qui eft à la
tête du traité de la quadrature des courbés de M.
Newton, ce grand geometre, au lieu de l’équation
a x + a u —y y -f- xy £ + £ ^, auroit .écrit a x - f a 6'
—yy-\~xy o -\-ôo, regardant ainfi en quelque maniéré
1 8c u comme des zéros ; ce qui lui auroit donné
= j-? . On doitfentir par tout ce que nous avons
dit plus haut l’avantage & les inconvéniens de cette
dénomination : l’avantage , en ce que £ étant = o
difparoît fans aucune autre fuppofition du rapport
— — ; l’inconvénient, en ce que les deux termes du
rapport font cenfés zéros : ce qui au premier coup-
d’oeil ne préfente pas une idée bien nette.
On voit donc par tout ce que nous venons de dire
que la méthode du calcul différentiel nous donne
exa&ement le même rapport que vient de nous donner
le calcul précédent. Il en fera de même des autres
exemples plus compliqués. Celui-ci nous paroît
fuflïre pour faire entendre aux commençans la vraie
métaphyfique du calcul différentiel. Quand une fois
on l’aura bien comprife, on fentira que la fuppofition
que l’on y fait de quantités infiniment petites,
n’eft que pour abréger & Amplifier les raifonnemens;
mais que dans le fond le calcul différentiel ne fuppofe
point néceffairement l’exiftence de ces quantités ;
que ce calcul ne confifte qu’à déterminer algébriquement
la limite d’un rapport de laquelle on a déjà l ’ex-
preffion en lignes, & à égaler ces deux limites , ce qui
fait trouver une des lignes que l ’on chercke. Cette définition
eft peut-être la plus précife & la plus nette
qu’on puiffe donner du calcul différentiel; mais elle
ne peut être bien entendue que quand on fe fera
rendu ce calcul familier ; parce que fouvent la vraie
définition d’une fcience ne peut être bien fenfible
qu’à ceux qui ont étudié la fcience. Yoyeç le Difc.
prélimin. page xxxvij.
Dans l’exemple précédent, la limite géométrique
& connue du rapport de { à u eft le rapport de l’ordonnée
à la foûtangente ; on cherche par le eaicid
différentiel la limite algébrique du rapport de \ à
8c on trouve AL. Donc nommant s la foûtangente^
on a - = — ; donc s = ^22 = z x. Cet exemple fuffit
pour entendre les autres. Il fuffira donc de fe rendre
bien familier dans l’exemple ci - deflus des tangentes
de la parabole ; 8c comme tout le calcul différentiel
peut fe réduire au problème des tangentes, il
s’enfuit que l ’on pourra toûjours appliquer les principes
précédens aux différens problèmes que l’on
xefout par ce calcul, comme l’inventiôn desmaxi-
ma & rninima, des points d’inflexion 8c de rebrouf-
fement, &c. Voyez ces mots.
Qu’eft-ce en effet que trouver un maximum ou un
minimum? C ’e fl, dit-on, faire la différence de dy
égale à zéro ou à l ’infini ;mais pour parler plus exactement
, c’eft chercher la quantité 7^ qui exprime la-
limite du rapport de d y fini à d x fini, 8c faire en-
fliite cette quantité nulle ouinfinié. Voilà tout le my-'
ftere expliqué. Ce n’eft point d y çpxon fait = à l’infini
: cela feroit abfurde ; car dy étant prife pour infiniment
petite., ne peut être infinie; c ’eft — : c’eft-
à-dire qu’on cherche la valeur de x qui rend infinie
la limite du rapport de d y fini à d x fini.
On a vû plus haut qu’il n’y a point proprement de
quantités infiniment petites du premier ordre dans le
calcul différentiel ; que les quantités qu’on nomme
ainfi y font cenfées divifées par d’autres quantités
cenfees infiniment petites, 8c que dans cet état elles
marquent non des quantités infiniment petites, ni
même des fraftions, dont le numérateur 8c le dénominateur
font infiniment petits, mais la limite d’un
rapport de deux quantités finies. Il en eft de même
des différences fécondés, 8c des autres d’un ordre
plus élevé. Il n’y a point en Géométrie de d dy véritable;
mais lorfque d d y fe rencontre dans une
équation, il eft cenlé divifé par une quantité d x 1 ,
<?u autre du même ordre : en cet état qu’eft-ce que
} c’eft la limite du rapport ^ , divifée par d x ;
ou ce qui fera plus clair encore, c’e ft , en faifant la
quantité finie j^ = { , la limite de j | . '
Le calcul differentio-différentiel eft la méthode de
différentier les grandeurs différentielles ; 8c on appelle
quantité differentio-différentielle la différentielle d’une
différentielle.
Comme le caraftere d’une différentielle eft la lettre
d , celui de la différentielle l e d x eÇidd x ; 8c la différentielle
de d d x eft d d d x , ou dz x , d* x , 8cc.
ou x , x , 8cc. au lieu de d d y , d* x , Sec.
La différentielle d’une quantité finie ordinaire s’appelle'
une différentielle du premier degré ou du premier
ordre, comme d x.
Différentielle à.u fécond degré ou du fécond ordre
, qu’on appelle aufli, comme on vient de le voir,
quantité differentio-differentielle , eft la partie^ infiniment
petite d’une quantité différentielle du premier
degré, comme d d x i d x d x i o u d x 7- ,d x d y , Sec.
Différentielle du troifieme degré , eft la partie infiniment
petite d’une quantité différentielle du fécond
degré, comme d d d x , d x * , d x d y d { ,8 c ainfi de
fuite.
Les différentielles du premier ordre s’appellent encore
différences premières; celles du fécond, différences
fécondés ; celles du troifieme, différences troifiemes.
La puiffance fécondé d x 1 d’une différentielle du •
premier ordre, eft une quantité infiniment petite du
fécond ordre ; car d x x : dx : : d x . 1 ; donc d x 2 eft .
cenfée infiniment petite par rapport à d x ; de même
on trouvera que d x i ou d x 2 d y , eft infiniment petite
du troifieme ordre , &c. Nous parlons ici de
quantités infiniment petites, Se nous en avons parlé
plus haut dans cet article, pour nous conformer au
langage ordinaire ; car par ce que nous avons déjà
dit de la métaphyfique du calcul différentiel, & par
ce que nous allons encore en dire, on verra que
cette façon de parler n’eft qu’une expreflion abrégée
& obfcure en apparence, d’une chofe très-claire &
très-fimple.
Les puiffances différentielles, comme d x 1 , fe diffé-
reptient de la même maniéré que les puiffances des J
quantités ordinaires. Et comme les différentielles com-
Tome IV %
. pôfees fe multiplient ou fe divifent l’une l’autre, ou
font des puiffances des différentielles du premier degré
, ces différentielles fe différentient de même que
> les grandeurs ordinaires. Ainfi la différence de d x n
eft m ( d x') m 1 d d x , 8c ainfi des autres. C ’eft
pourquoi le calcul differentio-différentiel eft le même
fond que le calcul différentiel.
Un auteur célébré de nos jours dit dans la pré-
’ *ace dun ouvrage fur la Géométrie de l ’infini, qu’il
n a,v?!/t P°^nt trouvé de géomètre qui pût expliquer
précifement ce que c’eft que la différence de ^ d e venue
égale à l’infini dans certains points d’inflexion.
Rien n eft cependant plus fimple ; au point d’inflexion
la quantité ^ eft un maximum ou un minimum ;
donc la différence divifée par d x eft = 0 ou = à l’infini.
Donc , en regardant d x comme confiant, on a
la quantité = à zéro ou à l’infini ; cette quantité
n’eft point une quantité infiniment petite, c’eft
une quantité qui eft néceffairement ou finie, ou
infinie , ou zéro, parce que le numérateur d d y
qui eft infiniment petit du fécond ordre, eft divifé
par d x 1 , qui eft aufli du fécond ordre^Pour abréger,
on dit que d d y eft == à l’infini'; mais d d y
eft cenfee multipliée par la quantité . ce qui
fait difparoître tout le myfterè. En général d d y= z
à l’infini ne fignifie autre chofe que = à l’infini 5
. or dans cette équation oit il n’entre point de différentielle
; par exemple foit y — —F— ; 0n auradyxz
+ (a-xp & d d y — : ddyzz. à l’infini n’eft autre
chofe que j A — à l’infini, c’eft-à-dire =;
à Pinfini, ce qui arrive quand x = a; on voit qu’il
n’entre point de différentielle dans la quantité ^
qui repréfente ^ 2 ou la limite de la limite de
On fupprime le d x 1 pour abréger; mais il n’en eft
pas moins cenfé exiftant. C ’eft ainfi qu’on fe fert
fouvent dans les Sciences de maniérés de parler abrégées
qui peuvent induire en erreur, quand on n’en
entend pas le véritable fens. Voye£ Elémens.
Il réfulte de tout ce que nous avons dit, i° . que
dans le calcul différentiel les quantités qu’on néglige,
font négligées, non comme on le dit d’ordinaire, parce
qu’elles font infiniment petites par rapport à ceiles
qu’on laiffe fubfifter, ce qui ne produit qu’une erreur
infiniment petite ou nulle ; mais parce qu’elles doivent
être négligées pour l’exaâitude rigoüreufe. On
a vû en effet ci-deffus que A- eft la Vraie 8c exa&e
valeur de ff-x ; ainfi en différentiant a x = y y t c’eft
z y d y, 8c non 1 y dy + d y 1 qu’il faut prendre pour
la différentielle d e y a, afin d’avoir, comme on le doit,
5^ = i° . Il ne s’agit point, comme on le dit en*
corè ordinairement, de quantités infiniment petites
dans le calcul différentiel; il s’agit uniquement de limites
de quantités finies. Ainfi la métaphyfique de l’infini
& des quantités infiniment petites plus grandes ou
plus petites les unes que les autres, eft totalementinu-
tile au calcul différentiel. On ne fe fert du terme Y infiniment
petit, que pour abréger les expreflions. Nous
ne dirons donc pas avec bien des géomètres qu’une
quantité eft infiniment petite, non avant qu’elleVé-
vanoüifle, non après qu’elle eft évanouie, mais dans
l’inftant même oû elle s’évanoiiit ; car que veut dire
une définition fi fauffe, cent fois plus obfcure que
ce qu’on veut définir ? Nous dirons qu’il n’y a point
dans le calcul différentiel de quantités infiniment petites,
Au refte nous parlerons plus au long à l’article
l n i i i ij