•de deux.piés-de longueur depuis la pointe dit bec jufqu’à
l’extrémité de 1a queue ; l” envergure approchoit
de quatre piés. Le corbeau a le bec noir, épais , pointu,
& fort ; la piece fupérieure eft un peu crochue à
l’extrémité j & celle du bas eft droite; il a la langue
large, fourchue , déchiquetée, & noirâtre pâr-def-
fous : la .-prunelle de l’oeil -eft entourée d’un double
cercle, dont l’extérieur eft mêlé de blanc & de cendré
, & l’intérieur de roux & de cendré. Il y a fur fa
tête des poils rôides qui font dirigés en bas, & qui
. couvrent les narines. Cet oifeau eft entièrement de
couleur noire mêlée d’un peu de bleu luifant, fur-
tout fur la queue & fur les ailes : la couleur du ventre
eft plus pâle, & tire un peu fur le roux. Les
grandes plumes des épaules recouvrent le milieu du
dos, qui n’eft garni en-deffous que de duvet, Il y a
vingt grandes plumes dans chaque aile ; la première
eft plus courte que la fécondé, la fécondé plus que
la troifieme, & la troifieme plus que la quatrième ,
qui eft la plus longue de toutes. Le tuyau des plumes
, à compter depuis la fixieme jufqu’à la dixhui-
tieme, s’étend plus loin que les barbes, & fon extrémité
eft pointue. La queue a neuf pouces de longueur;
elle eft compofée de douze plumes ; celles du
milieu font les plus longues, & les autres diminuent
de longueur par degré jufqu’à la première de chaque
coté,qui eft la plus courte. Les ongles font crochus &
grands, fur-tout ceux de derrière. Le doigt extérieur
tient au doigt du milieu jufqu’à la première articulation.
Cet oifeau ne fe nourrit pas feulement de fruits
& d’infeâes, il mange aufli la chair des cadavres
de quadrupèdes, de poiflbns, d’oifeaux. Il prend les
oifeaux tout v ifs , & il les dévore comme les oifeaux
de proie. On voit quelquefois des corbeaux blancs,
mais ils font très-rares. On trouve des corbeaux dans
tous les pays du monde : ils ne craignent ni le chaud
ni le froid ; & quoiqu’on dife qu’ils aiment à vivre
dans les lieux folitaires, il y en a cependant qui relient
au milieu des villes les plus grandes & les plus
peuplées, & qui y nichent. Ordinairement les tor-
beaux placent leur nid au fommet des arbres ou dans
de vieilles tours ruinées , au commencement du prin-
.tems, dès les premiers jours du mois de Mars, &
quelquefois plutôt. La femelle fait d’une feule ponte
quatre ou cinq oeufs, & quelquefois fix ; ils font par-
femés de plufieurs taches & de petites bandes noirâtres
, fur un fond bleu-pâle mêlé de verd. Pour ce qui
eft de la durée de la vie de cet oifeau, il n’y a pas à
douter que ce qu’en a dit Héfiode ne foit faux : cependant
il eft vrai que les oifeaux vivent long-tems ;
& la vie des corbeaux eft peut-être encore plus longue
que celle des autres» Wilhighby, ornith. Vqyeç
Oiseau. (/ )
Corbeau, (Mat. med. ) Les petits corbeaux réduits
en'cendre font recommandés pour l’épilepfie 6c
pour la goutte.
La fiente de corbeau eft réputée bonne pour la
douleur des dents & pour la toux des enfans, appliquée
extérieurement, ou même portée en amulette.
Les oeufs de corbeau font ordonnés dans l’épilepfie
par Arnauld de Villeneuve. Raies prétend,
d’après Pline, que les oeufs de corbeau mêlés avec de
l ’huile dans un vaiffeau de cuivre, font propres à
noircir les cheveux. Quelques auteurs attribuent la
même vertu à la graille de corbeau.
Le cerveau de corbeau pris en fubftance dans de
l’eau de vervenne, paflfe, félon Gefner, pour un re-
mede éprouvé contre l’épilepfie.
Le coeur du corbeau porté en amulette, eft regardé
par Fernel comme un remede efficace contre la
trop grande pente au fommeil : mais toutes ces vertus
ne font fondées que fur une vaine tradition. (f>)
* Corbeau , (Mythol.) La fable dit qu’il devint
jaoir pour avoir trop parlé,& que ce fut une vengeance
d’Apollon qui fur le rapport que lui. fit le corbeaù
de l ’infidélité de Coronis, tua fa maîtreflè, s’en repentit
, & punit l’oifeau délateur en le privant de fa
blancheur.
C o r b e AV i>E B o i s , voye^ Corneille de
Mer,
Corbeau d’Eau, voye^ Cormoran.
C o r b e a u gallerant ou Gorgalleranï *
voyeç Fruit.
Corbeau de Mer , (Nift. nat. Ichtyol.') ce nom
a été donné, foit en latin foit en françois, à différens
poiflbns, tels que le corp, l’hirondelle de mer, & la
dorée ou poiffon de faint-Pierre.
Corbeau de nuit, voye^ Bihoreau.
C orbeau, (petit') voye^ Bihoreau.
C orbeau, en Agronomie, conftellation de l’hé-*
mifpere méridionale dont les étoiles font au nombre
de fept dans le catalogue de Ptolomée &c dans celui
de Tych o, & au nombre de dix dans le catalogue britannique.
(O)
Corbeau, en Architecture, eft Une groffe confole
qui a plus de faillie que de hauteur, comme la der-i
niere pierre d’une jambe fous poutre, qui fert à fou-
lager la portée d’une poutre, ou à foûtenir par encorbellement
un arc doubleau de voûte qui n’a pas
de dofferets de fonds, comme à la grande écurie du
Roi aux Tuileries. Il y en a en confoles, avec des canaux
, gouttes, & même des aigles, que Paufanias
appelle aquilegice , comme il s’en voit au portique
de Septime Sévere à Rome, & au grand falon de.
Marly , où ils portent des balcons. ( ? )
C orbeau , (Art milit.') c’étoit une machine de
guerre dont les Romains, félon Polybe, fe fervirent
dans le combat naval de Myle entre le conful Duil-
lius &. Annibal. Voici la delcription qu’en donne cet
auteur.
« Une piece de bois ronde, longue de quatre aul-
» nés, grofle de trois palmes de diamètre, étoit plan-;
» tée lùr la proue du navire ; au haut de la poutre
» étoit une poulie, & autour une échelle clouée à
» des planches de 4 piés de largeur fur 6 aulnes de
» longueur, dont on avoit fait un plancher percé au,
» milieu d’un trou oblong qui embraffoit la poutre à
» z aulnes de l’échelle. Des deux côtés de l’échelle fur
» la longueur, on avoit attaché un garde-fou qui
» couvroit jufqü’au genou. Il y avoit au bout du mât
» une efpece de pilon de fer pointu, au haut duquel
» étoit un anneau ; de forte que toute cette machi-
» ne paroifloit femblable à celle dont on fe fert pour
» faire la farine. Dans cet anneau paffoit une corde;
» avec laquelle, par le moyen de la poulie qui étoit
» au haut de la poutre, on élevoit les corbeaux lorf-
» que les vaiffeaux s’approchoient ; & on les jettoit
» fur les vaifleaux ennemis, tantôt du côté de la,
» proue, tantôt fur les côtés, fuivant les differentes
» rencontres. Quand les corbeaux accrochoient un,
» navire , fi les deux étoient joints par leurs côtés r
» les Romains fautoient dans le vaiffeau ennemi d’un
» bout à l’autre ; s’ils n’étoient joints que par les
» deux proues , ils avançoient deux à deux au-tra-
» vers du corbeau : les premiers fe défendoient avec
« leurs boucliers des coups qu’on leur porfoit en-de-
« vant ; & les fuivans, pour parer les coups portés
» de côté, appuyoient leurs boucliers fur le garde-
» fou ». Traduct. de Polybe par D. Thuillier.
Il paroît par cette delcription, que ce corbeau n’é- '
toit autre chofe qu’un pont mobile à l’entour de la
poutre, dont le bout élevé étoit garni de griffes propres
à accrocher ; que ce pilon de fer & fon anneau
étoit attaché au haut du mât du navire ; & que cette
corde paflant par cet anneau & par la poulie de la
poutre, ne fervoit qu’à hauffer & baiffer ce pont,
mobile, pour le laifler tomber fur les vaifleaux ennemis
& fervir.de paffage aux Romains. Polybe confirme
cette vérité, en difant : lorfqu’on fut à Vabordai
t , que Les vaiffeaux furent accrochas les uns aux autres
par Les corbeaux » les Romains entrèrent au-travers
de cette machine dans les vaiffeaux ennemis, & ils Je
battirent fer leurs ponts. Ce qui démontre clairement
que ce corbeau ne confiftoit que dans un pont.
La defeription que fait M. de Folard de ce corbeau,
dans fon commentaire fur Polybe, eft fort differente :
il le repréfente en forme de grue ( machine qui n’é-
toit pas inconnue à Polybe) pofée fur un mât élevé
fur le château de proue ; ce qui ne convient pas avec
la poutre de Polybe. Sur ce mât M. de Folard établit
le rancher d’une grue, au bout duquel étoit un cône
de fer, piece de fonte, dit-il, des plus pefantes ; laquelle
tombant de fon propre poids, perçoit le pont
de proue ; voilà ce que M. de Folard appelle corbeau.
II eft difficile de concilier cette machine avec celle
que décrit Polybe.
M. de Folard parle, dans fon favant commentaire
, de plufieurs efpeces de corbeaux : il y en avoit,
d it- il, tant de divérfes fortes, & ils étoient fi différens
entr’eu x, qu’il ne fait comment les anciens
n’ont pas inventé différens noms pour empêcher qu’on
ne les confondît les 11ns avec les autres. M. de Folard
donne la defeription de ces différens corbeaux,
fa voir du dauphin, - du corbeau démoliffeur, du loup ,
& du corbeau à griffes.
Le premier n’étoit, félon cet auteur, qu’une maffe
de fer fondu fufpendu au bout des antennes des vaiffeaux
: on le fufpendoit à un des bouts des vergues
po.ur le laifler tomber fur les .vaifleaux ennemis,
qu’il perçoit depuis je pont jufqu’au fond-de-cale.
A l’égard du corbeau démoliffeur, Vitruve en fait
mention ; mais on ne peut guere comprendre ce que
c’eft que cette machine. « Ne. feroit-ce point, dit
» M. de Folard, celle dont parle Vegece, qu’il ap-
» pelle tortue, au-dedans de laquelle il y avoit une
» ou deux pièces de bois arrondies & fort longues,
» pour pouvoir atteindre de loin, & au bout def-
» quels il y avoit des crocs de fer ) elles étoient fuf-
» pendues en équilibre comme les béliers, & on les
» pouffoit contre les créneaux pour les accrocher &
»•les tirer à bas, ou les pierres ébranlées par les bé-
»liers». Voye^ Belier.
Cependant Végece en parlant de ce croc fufpen-
dü & branlant, ne fe" fert pas du terme de corbeau,
mais de celui de faux. Voici le paffage de cet auteur.
« On confirait la tortue avec des membrures &
» des madriers, & on la garantit du feu en la revê-
» tiffant de cuirs erads, de couvertures de poil, ou
» de pièces de laine. Elle couvre une, poutre armée
» à l’un de fes bouts d’un fer crochu pour arracher
» les pierres de la muraille : alors on donne le nom
« de faulx à cette poutre, à caufe de la figure de
» fon fer». Nouv. traduct. de Végece.
Pour le loup, M. de Folard prétend que la machine
à laquelle Végece donne ce nom, n’étoit qu’un
corbeau à tenailles ou à griffes, qui confiftoit dans
une efpece de cifeaux dentelés & recourbés en maniéré
de tenailles, ou de deux faucilles oppofées l’une
à l’àufre.
Outre les différens corbeaux dont on vient de parler
, le favant commentateur de Polybe traite encore
du corbeau à lacs-çourans & à pinces > de celui à cage,
appellé aufli le tollenon ou tellenon, & du polifparte
ou corbeau d'Archimede.
Le corbeau à lacs-couràns n’étoit autre chofe qu’une
efpece de levier placé fur les murailles des villes,
de maniéré qu’une partie failloit en-dehors, &
que l’autre plus grande étoit fur le terre-plein : à la
partie extérieure étoit attachée une chaîne ou une
çorde qui avoit un lac avec lequel on effayoit de
• fâifir la tête du bélier, pour le tirer en-haut & empêcher
fon effet.
Le corbeau à pinces étoit à-peu-près la même chofe
, A l’exception qu’au lieu de lacs il y avoit des
pinces pour faifir le bélier. Cette machine ne différé
guere de celle que M. de Folard appelle corbeau à tenaille,
& à laquelle Vegece donne le nom de loup,
«Plufieurs, dit cet auteur, attachent à des cordes
» un fer dentele fait en maniéré de pince, qu’on ap-
, » pelle loup, avec lequel ils accrochent le bélier, le
» renverfent, ou le fufpendent de façon qu’il ne peut
» plus agir ».
Le corbeau à cage ou tollenon eft ainfi décrit par
Végece. « Le tollenon eft une bafcule faite avec
» deux grandes pièces de bois, l’une plantée bien
» avant en terre ; & l’autre qui eft plus longue, at-
» tachée en-travers au fommet de la première, &c
» dans un tel point d’équilibre, qu’en abaiffant une
» de fes extrémités l’autre s’élève. On attache donc
» à l’un des bouts de cette poutre une efpece de caille
» d’ofier ou de bois, où l’on met une poignée de fol-
» dats, & en abaiffant l’autre bout on les éleve & on
» les porte fur les murailles ». Nouvelle traduct. de
Végece.
Refte à parler du polyfparte ou corbeau £ Archimède.
« C ’étoit fans doute , dit M. de Folard, une pou-
» tre ou un mât prodigieufement long & de plufieurs
» pièces, c’eft-à-dire fait de plufieurs mâts joints en-
» femble, pour le rendre plus fort & moins flexible,
» renforcé encore au milieu par de fortes femelles, le
» toutraffuré avec des cercles de fer & d’une heure de
>> cordes de diftance en diftance, comme le mât d’un
» vaiffeau compofé de plufieurs autres mâts. Cette
» furieufe poutre devoit être encore allongée d’une
» autre à-peu-près d’égale force. Ce levier énorme
» & de la première efpece, devoit être fufpendu à
» un grand arbre affemblé fur fa foie, avec fa four-
» cliette, fon échelier, fes moifes, enfin à-peu-près fem-
» blable à un gruau. II devoit être appliqué & collé
» contre l’intérieur de la muraille delà ville,arrêté Sc
» affûré par de forts liens ou des anneaux de fer où
» l’on paffoit des cordages qui embraflfoientl’arbre au
» bout duquel le corbeau étoit fufpendu. Ce levier
» énorme ainfi fufpendu à un gros cable ou à une
» chaîne, & accolé contre fon arbre , pouvoit* pro-
» duire des effets d’autant plus grands, que la puif-
» fance ou la ligne de direâion fe trouvoit plus éloi-
» gnée de fon point fixe, ou du centre du mouvement,
» en ajoutant encore d’autres puiffances qui tirent
» de haut en bas par des lignes de direâion. Il y avoit
» à l’extrémité plufieurs grapins ou pattes d’ancres
» fufpendues à des chaînes qu’on jettoit fur les vaif-
» féaux lorfqu’ils approchoient à portée. Plufieurs
» hommes abaiffoient cette bafcule par le moyen de
» deux cordes en trelingage ; & dès qu’on s’apperce-
» voit que les griffes de fer s’étoient cramponées,
» on faiî'oit un fignal, & tout auffi-tôt on baiffoit une
» des extrémités de-la bafcule, pendant que l’autre fe
» relevoit & enlevoit le vaiffeau à une certaine hau-
» teur, qu’on laifloit enfuite tomber dans la mer en
» coupant le gros cable qui tenoit le vaiffeau fuf-
» pendu ». Comm. fur Polybe.
Quelques critiques fè font exercés fur cette del-
criptiori du corbeau d?Archimede, & fur la figure qu’en
donne M. de Folard, p. 86~. du prem. vol. de fon corn-
men.fur Polybe , édit, de Paris. Voyez une lettre inférée
fur ce fujet dans le cinq. vol. de la bibliot. raifonn.
Mais malgré les difficultés dont peuvent être fufeep-
tibles quelques unes des deferiptions des machines
de guerre des anciens par M. le chevalier Folard, il
faut convenir qu’il falloit la fagaeité & la fcience de
cet habile officier pour éclaircir ce que les auteurs
de l ’antiquité nous ont laiffé fur cette matière. Le
commentaire fur Polybe tiendra toujours un rang di-.