cette matière ; je l’ai tiré principalement de l’hiftoi-
re des révolutions de la république romaine & de
l’efprit des lois, & alors j’ai confervé dans mon extrait
, autant que je l’ai pû , le langage de ces deux
écrivains : irois-je à l’éloquence altérer fon parler,
comme difoit Montagne ? Article de M. le Chevalier
DE JAUCOURT.
D ICTA TU RE, f. f. (Droit public & Hift.mod.)
On donne ce nom en Allemagne, dans la ville oii
fe tient la diete de l’empire , à une affemblée des
fecrétaires de légation, ou cancellijtes des differens
princes & états , qui fe tient dans une chambre au
milieu de laquelle eft élevé un fiége deftiné pour le
fecrétaire de légation de l’éleâeur de Mayence. Ce
fecrétaire diète de-là aux fecrétaires de légations des
princes à qui il appartient, les mémoires , aétes ,
protections ôc autres écrits qui ont été portés au
directoire de l’empire, & ils les écrivent fous fa
dièlée.
La dictature eft ou publique ou particuliere. La dictature
publique eft celle dans laquelle on diète aux fecre-
taires des légations de tous les princes & états de
l ’empire, qui fontaflis & écrivent fur des tables particulières.
La dictature particuliere eft celle dans laquelle
la diètée ne fe fait qu’aux fecrétaires des états
d’un certain collége de l’empire, c’eft-à-dire à ceux
des éleèteurs, ou à ceux des princes, ou à ceux des
villes libres.
On nomme encore dictature particuliere, celle dans
laquelle ou les états catholiques ou les états protef-
tans ont quelque chofe à fe communiquer entr’eux
en particulier. (—)
DICTÉE, f. f. ( Belles-Lett. ) terme d’école, qui
lignifie les leçons que les étudians écrivent & que le
profeffeur leur difte. On appelle aufli dictée, l’aètion
du profeffeur qui lit à haute voix & très-pofément
la partie de fes cahiers que les écoliers copient. On
prend des dictées ou des cahiers en Philofophie, en
Sorbonne, en Droit & en Medecine. ([G)
* D i c t é e , adj. (Mythol.) furnom qu’on donne
à Jupiter, d’un antre de Crete où il naquit & fut
élevé par Rhéa fa mere.
DICTION, f. f. (Belles-Lett.) maniéré de s’exprimer
d’un écrivain ou d’un auteur : c’eft ce qu’on
nomme autrement élocution & ftyle. Voyez É l o c u t
i o n G S t y l e .
On convient que les differens genres d’écrire exigent
une diction différente ; que le ftyle d’un hifto-
rien, par exemple, ne doit pas être le même que
celui d’un orateur ; qu’une differtation ne doit pas
être écrite comme un panégyrique, & que le ftyle
d’un profateur doit être tout-à-fait diftingué de celui
d’un poète : mais on n’eft pas moins d’accord fur les
qualités générales communes à toute forte de diction,
en quelque genre d’ouvrages que ce foit. i° . Elle
doit être claire, parce que le premier but de la parole
étant de rendre les idées, on doit parler non-
feulement pour fe faire entendre , mais encore de
maniéré qu’on ne puiffe point ne pas être entendu.
i ° . Elle doit être pure, c’eft-à-dire ne confifter qu’en
termes qui foient en ufage & correèls, placés dans
leur ordre naturel ; également dégagée & de termes
nouveaux, à moins que la néceflité ne l’exige, & de
mots vieillis ou tombés en diferédit. 30. Elle doit
être élégante , qualité qui confifte principalement
dans le choix, l’arrangement & l’harmonie des
mots ; ce qui produit aufli la variété. 40. Il faut
qu’elle foit-convenable, c’eft-à-dire affortie au fujet
que l’on traite.
L’Éloquence, la Poéfie , l’Hiftoire , la Philofo-
•phie, la Critique 9&c. ont chacune leur diction propre
& particuliere, qui fe fubdivife & fe diverfifie encore
, relativement aux differens objets qu’embraf-
fent & que traitent ces Sciences. Le ton d’un pané*
gyrique & celui d’un plaidoyer font aufli differens
entr’eux, que le ftyle d’une ode eft différent de celui
d’une tragédie, & que la diction propre à la comédie
eft elle-même différente du ftyle lyrique ou
tragique. Une hiftoire proprement dite ne doit point
avoir la féchereffe d’un journal, des faites ou des annales
, qui font pourtant des monumens hiftoriques,
& ceux-ci n’admettent pas les plus limples ornemens
qui peuvent convenir à l’Hiftoire , quoique pour le
fond ils exigent les mêmes réglés. On trouvera fous
les /»ottHiSTOiRE, Poesie, G-c. ce qui concerne plus
particulièrement le ftyle propre à chacune ; & fous
les mots Élo cu tio n 6* Sty le , des principes généraux
développés, & applicables à toute forte de diction.
V ^ o y e z Élo qu en c e, Élé g an c e , &c.(G )
DICTIONNAIRE, f. m. (Ordre Encycl. Entend.
Raifon. Philof. ou fcience de C homme ; Logiq. Art de
communiquer, Grammaire , Dictionn.) ouvrage dans
lequel les mots d’une langue font diftribués par ordre
alphabétique , & expliqués avec plus ou moins
de détail, félon l’objet qu’on fe propofe.
On peut diftinguer trois fortes de dictionnaires ;
dictionnaires de langues, dictionnaires hiftoriques, &
dictionnaires de Sciences & d’Arts : divifion qu’on
pourroit préfenter fous un point de vue plus général
, en cette forte ; dictionnaires de mots, dictionnaires
de faits, & dictionnaires de chofes : néanmoins
nous retiendrons la première divifion, parce qu’elle
nous paroît plus commode & même plus précife.
En effet, un dictionnaire de langues, qui paroît
n’être qu’un dictionnaire de mots, doit être fouvent
un dictionnaire de chofes quand il eft bien fait : c’eft
alors un ouvrage très-philofophique. Voyez G r a m m
a i r e .
Un dictionnaire de Sciences ne peut & ne doit être
qu’un dictionnaire de faits , toutes les fois que les
caufes nous font inconnues , c’eft-à-dire prefque
toujours. Voyez PH Y S IQ U E , M É T A PH Y S IQ U E , &C.
Enfin un dictionnaire hiftorique fait par un philo-
fophe, fera fouvent un dictionnaire de chofes : fait
par un écrivain ordinaire, par un compilateur de
Mémoires & de dates, il ne fera guere qu’un dictionnaire
de mots.
Quoi qu’il en foit, nous diviferons cet article en
trois parties, relatives à la divifion que nous adoptons
pour les différentes efpeces de dictionnaires.
D ic tionnaire de Langues. On appelle ainfi
un dictionnaire deftiné à expliquer les mots les plus
ufuels & les plus ordinaires d’une langue ; il eft diftingué
du dictionnaire hiftorique, en ce qu’il exclut
les faits, les noms propres de lieux, de perfonnes,
&c. & il eft diftingué du dictionnaire de Sciences, en
ce qu’il exclut les termes de Sciences trop peu connus
& familiers aux feuls favans.
Nous obferverons d’abord qu’un dictionnaire de
langues eft ou de la langue qu’on parle dans le pays
où le dictionnaire fe fait, par exemple, de la langue
françoife à Paris ; ou de langue étrangère vivante,
ou de langue morte.
Dictionnaire de langue françoife. Nous prenons ces
fortes de dictionnaires pour exemple de dictionnaire
de langue du pays ; ce que nous en dirons pourra
s’appliquer facilement aux dictionnaires anglois
faits à Londres, aux dictionnaires efpagnols faits à
Madrid, & c .
Dans un dictionnaire de langue françoife il y a
principalement trois chofes à confidérer ; la figninca-
tion des mots, leur ufage , & la nature de ceux
qu’on doit faire entrer dans ce dictionnaire. La lignification
des mots s’établit par de bonnes définitions
(voyeç D éfinition) ; leur ufage, par une
excellente fyntaxe (voyez Syn taxe) ; leur nature
enfin, par l’objet du dictionnaire même. À ces trois
objets principaux on peut en joindre trois autres
fubordonnés à ceux-ci ; la quantité ou là prononciation
des mots, l’orthographe, & l’étymologie.
Parcourons fuccéflivement ces fix objets dans l’ordre
que nous leur avons donné.
Les définitions doivent être claires, précifes, &
aufli courtes qu’il eft poflible ; car la brièveté en ce
genre aide à la clarté. Quand on eft forcé d’expliquer
une idée par le moyen de plufieurs idées ac-
ceffoires, il faut au moins que le nombre de ces
idées foit le plus petit qu’il eft poflible. Ce n’eft
point en général la brièveté qui fait qu’on eft obf-
cur, c’eft le peu de choix dans les idees, & le peu
d’ordre qu’on met entr’elles. On eft toujours court
& clair quand on ne dit que ce qu’il fau t, & de la
maniéré qu’il le faut ; autrement on eft tout-à-la-fois
long & obfcur. Les définitions & les démonftrations
de Géométrie, quand elles font bien faites, font une
preuve que la brièveté eft plus amie qu’ennemie de
la clarté.
Mais comme les définitions confiftent à expliquer
un mot par un ou plufieurs autres, il réfulte nécef-
fairement de-là qu’il eft des mots qu’on ne doit jamais
définir, puilqu’aiitrement toutes les définitions
ne formeroient plus qu’une efpece de cercle vicieux,
dans lequel un mot feroit expliqué par un autre mot
qu’il auroit fervi à expliquer lui-même. De-là il s'enfuit
d’abord que tout dictionnaire de langue dans lequel
chaque mot fans exception fera défini, eft né-
ceffairement un mauvais dictionnaire, Sc l’ouvrage
d’une tête peu philofophique. Mais quels font ces
mots de la langue qui ne peuvent ni ne doivent être
définis ? Leur nombre eft peut-être plus grand que
l ’on ne s’imagine ; ce qui le rend difficile à déterminer
, c’eft qu’il y a des mots que certains auteurs
regardent comme pouvant être définis, & que d’autres
croyent au contraire ne pouvoir l’être : tels font
par exemple les mots ame , efpace, courbé, &c. mais
il eft au moins un grand nombre de m ots, qui de l’aveu
de tout le monde fe refufent à quelqu’efpece de
définition que ce puiffe être ; ce font principalement
les mots qui défignent les propriétés générales des
êtres, comme exiftence, étendue, penj'ée, fenfation,
ttms, & un grand nombre d’autres.
Ainfi le premier objet que doit fe propofer l’auteur
d’un dictionnaire de langue, c’eft de former, autant
qu’il lui fera poflible, une lifte exaèle de ces
fortes de mots, qui feront comme les racines philo-
fophiques de la langue : je les appelle ainfi, pour les
diftinguer des racines grammaticales, qui fervent à
former & non à expliquer les autres mots. Dans
cette efpece de lifte des mots originaux & primitifs,
il y a deux vices à éviter : trop courte-, elle tomberait
fouvent dans l’inconvénient d’expliquer ce qui
n’a pas befoin de l’être, & auroit le défaut d’une
grammaire daus laquelle des racines grammaticales
feroient mifes au nombre des dérivés ; trop longue,
elle pourroit faire prendre pour deux mots de lignification
très-différente, ceux qui dans le fond enferment
la même idée. Par exemple, les mots de durée
& de tems9 ne doivent point, ce rne femble, fe trouver
l’un & l’autre dans la lifte des mots primitifs ; il
ne faut prendre que l’un des deux, parce que la même
idée eft enfermée dans chacun de ces deux mots.
Sans doute la définition qu’on donnera de l’un de
ces mots, ne fervira pas à en donner une idée plus
claire, que celle qui eft préfentée naturellement par
ce mot ; mais elle fervira du moins à faire voir l’analogie
& la liaifon de ce mot avec celui qu’on aura
.pris pour terme radical & primitif. En général les
mots qu’on aura pris pour radicaux doivent être tels,
que chacun d’eux préfente une idée abfolument différente
de l’autre ; &c c’eft-là peut-être la regie la
plus fûre & la plus fimple pour former la lifte de
fes mots : car après avoir fait l’énumération la plus
éxacié de foiis les mots d’une langue, on pourra former
des efpeces de tables de ceux qui ont entr’eux
quelque rapport. Il eft évident que le même mot fe
trouvera fouvent dans plufieurs tables ; & dès-lors
il fera aifé de voir par fa nature de ce mot, & par
la comparaison qu’on en fera avec ceux auquel il fe
rapporte, s il doit être exclus de la lifte des radicaux,
ou s il doit en faire partie. A l’égard des mots qui ne
fe trouveront que dans une feule table, on cherchera
parmi ces mots celui qui renferme ou paroît ren-
feimer 1 idee la plus fimple ; ce fera le mot radical z
je dis q u i p a r o î t renfe rm e r ; car il reliera fouvent un
peu d’arbitraire dans ce choix ; les mots de tem s & c
de d u r é e ÿ dont nous avons parlé plus haut, fuffiroient
pour s’en convaincre. Il en eft de même des mots
ê t r e , e x if t e r ; i d é e , p e r c e p t io n , & autres femblables.
De plus, dans les tables dont nous parlons, il faudra
obferver de placer les mots fuivant leur fens
propre & primitif, & non fuivant leur fens méta-
phorique- ou figuré ; ce qui abrégera beaucoup ces
différentes tables : un autre moyen de les abréger
encore, c’eft d’en exclure d’abord tous les mots dérivés
& compofés qui viennent évidemment d’autres
mots, tous les mots qui ne renfermant pas des
idées fimples, ont évidemment befoin d’être définis j
ce qu’on diftinguera au premier coup d’oeil : par-ce
moyen les tablés fe réduiront & s’éclairciront fenfi-
blement, & le travail fera extrêmement fimplifié. Les
racines philofophiques étant ainfi trouvées, il fera
bon de les marquer dans le d ic t io n n a ir e par un cara-
èlere particulier.
Après avoir établi des réglés pour diftinguer les
mots qui doivent être définis d’avec ceux qui ne doivent
pas l’être, paffons maintenant aux définitions
mêmes. Il eft d’abord évident que I4 définition d’un
mot doit tomber fur le fens précis de ce mot, & non
fur le fens vague. Je m’explique; le mot d o u le u r ,
par exemple, ‘s’applique également dans notre langue
aux peines de l’ame, & aux fenfations defagréa-
bles du corps : cependant la définition de ce mot ne
doit pas renfermer ces deux fens à la fois ; c’eft-là
ce que j’appelle le f e n s v a g u e , parce qu’il renferme
à la fois le fens primitif & le fens par extenfion:
le fens précis & originaire de ce mot défigne les fenfations
defagréables du corps, & on l’a étendu de-là
aux chagrins de l’ame ; voilà ce qu’une définition
doit faire bien fentir.
Ce que nous venons de dire du ferts précis par
rapport au fens vague , nous le dirons du fens propre
par rapportai! lens métaphorique ; la définition
ne doit jamais tomber que fur le fens propre, & lé
fens métaphorique ne doit y être ajouté que comme
une fuite & une dépendance du premier. Mais il
faut avoir grand foin d’expliquer ce fens métaphorique
, qui fait Une des principales richeffes des langues
, & par le moyen duquel, fans multiplier les
mots, on eft parvenu à exprimer un très-grand nombre
d’idées. On peut remarquer, fur-tout dans les
ouvrages de poéfie & d’éloquence, qu’une partie
très-confidérable des mots y eft employée dans le
fens métaphorique, & que le fens propre des mots
ainfi employés dans un fens métaphorique, défigne
prefque toujours quelque chofe de fenfible. Il eft même
des mots, comme aveuglement, bajfejfe, & quelques
autres, qii’on n’employe guere qu’au fens mé-1
taphorique : mais quoique ces mots pris au fens propre
ne foient plus en ulage, la définition doit néanmoins
toujours tomber fur le fens propre, en aver-
tiffant qu’on y a fubftitiié le fens figuré. Au refis
comme la lignification métaphorique d’un mot n’efi
pas toujours tellement fixée & limitée, qu’elle ne
puiffe recevoir qiielqu’extenfion fuivant le génie de
celui qui écrit, il eft vifible qu’un d ic t io n n a ir e ne peut
tenir rigourement compte de toutes les lignifications