v u e , & que la liqueur furnageante foit inutile ; foit
enfin que l ’on fe propofe de féparer deux matières
que l’on veut enfuite traiter chacune à part.
La décantation eft mife en oeuvre dans toutes les
défécations pour la première vûe (Voye[ Défécat
i o n ) : au contraire dans la pulvérifation, par le
moyen de l’eau, c’eft la poudre fubtile dépofée par
le repos que l’on fe propofe de retenir, & c’eft l’eau
que l’on doit rejetter. Dans les édulcorations des
précipités vrais', l’eau éclaircie par le repos & fé-
parée par décantation , eft ordinairement inutile.
Le lavage des mines eft une décantation continuelle
de cette fécondé efpece. Voye^ L a v a g e .
Dans le lavage de la chaux d’or départie par l’eau-
forte, & dans la décantation de la diflolution de l’argent
de deflùs cette chaux, la liqueur & le dépôt
font fort précieux, & l’artifte doit les ménager également.
D E C AN US, f. m. {Hifl. a«c.) étoit chez les Romains
un officier qui avoit fous lui dix autres officiers
ou perfonnes fubalternes ; de-là eft venu notre
mot doyen , qui s’exprime en latin par le mot decantes.
Il a été approprié à bien des offices. On l’attribue
au chef d’un chapitre de chanoine ; dans la réglé
il doit y avoir dix chanoines fous fa direction. Et
comme le doyen fe prenoit ordinairement parmi les
plus anciens chanoines, le titre de doyen a été attribué
au plus ancien de chaque compagnie, foit ecclé-
fiaftique, foit féculiere. Le doyen de la faculté de
Théologie, le doyen du confeil, le doyen de chaque
chambre du parlement. Voyeç ci-apr. au mot D oyen
quelques autres lignifications. (a)
D É C A P E R , v. aft. {Chimie.') c’eft enlever le
verd-de-gris avec de l’eau-forte.
DÉCAPITÉ, adj. {Jurifprud.) terme de Blafon.
Poye^ Varticle fuivant.
DÉCAPITER, v. aft. (Jurifpr.) en France c’eft
la peine des nobles que l’on condamne à m ort, lorf-
que le crime n’eft pas allez atroce pour les dégrader
de noblefle. Ce fupplice ne déroge point ; mais il ne
fait pas une preuve fuffifante de noblefle pour attribuer
la noblefle aux defeendans de celui qui a été
décapité. Vbye^ la Roque, tr. de la noblejje. {A)
DÉCAPOLIS, ( Géog. anc. ) petite province de
Cæléfyrie, appellée Dècapolis des dix villes principales
qui la compofoient. Les favans ne font point
d’accord fur ces villes. On prétend que le pays de
Dècapolis étoit fitué à l’orient du Jourdain, & s’é-
tendoit du nord au midi , depuis FAntiliban jufqu’à
la mer de Galilée.
DE C A P R O T I ou D E CE MP R1M I , f. m. plur.
{Hifl. anc.) étoient chez les anciens des officiers qui
recevaient les tributs ou recueilloient les taxes.
Ce mot vient de S'ôta., d ix , & tspuTtjç, premier ;
vraiffemblablement parce que les perfonnes qui fai-
foient ces levées étoient prifes parmi les dix premières
perfonnes de chaque communauté.
•Les decaproti étoient obligés de payer pour les
morts, .ou de répondre à l’empereur fur leurs propres
biens pour la quote-part de ceux qui étoient
morts. Cicéron, dans fon oraifon pour Rofcius, les
appelle, decemprimi.
Et même., fans avoir égard à la finance, c’étoient
lès dix principaux .magiftrats d’une v ille , ou les dix
principaux feigneurs-d’nne province. Chambers. (G)
* DECARGYRE, f. m. {Hifl. anc.) monnoie qu’on
appelle aufli majorina. Elle valoit dix argentei,
ce qu’on évalue à environ 11 liv. 5 L de notre monnoie
aftuelle.
* DECASYLLABIQUE, adj. ( Belles - Lett, ) de
dix fyllabes : c’eft certainement le nom qu’il faudroit
donner à nos vers de dix fyllabes, & non celui.de dif-
Jyllabique, qui lignifie de deux fyllabes. Il me femble
cependant que l’ufage a prévalu contre la raifon, &
qu’on les appelle toujours vers diflyllabiques. Cèux
qui font pour cet ufage devroient au moins écrire
& prononcer dixjyllabe & dixfyllabique ; alors ce
terme feroit un compofé de deux mots françois. La
prononciation en feroit un peu dure, mais il figni-
fieroit ce qu’on lui fait lignifier.
I)ÉCASTYLE,f. m. fignifioit dans l'ancienne Architecture
, un batiment dont le front étoit orné de dix
colonnes. Le temple de Jupiter olympien étoit déca-
ftyle. Ce temple a été bâti à Athenes'par Cofliitius,
archite&e romain, & s’appelloit Hypoethre c’eft-à-
dire découvert & expofé aux injures du ciel, & étoit
pycnoflyle, c’eft-à-dire à colonnes ferrées. Voyt{ Hy poethre
& Pyc n o s t y l e .
Le mot dècaflyle eft formé de S'tx.a. , dix , & ç-o'aoç ,
codonne. (P)
DECEINTRER, v. a&. terme d'Architecture , c’eft
démonter un ceintre de charpente après qu’une voûte
ou un arc eft bandé, & que les joints en font bien
fichés. Foye{ C in tre. (P)
DÉCEINTROIR, f. m. {Maçonnerie?) efpece dé
marteau à deux taillans tournés diverfement, dont
les Maçons fe fervent foit pour équarrifer les trous
commencés avec lé têtu, foit pour écarter les joints
des pierres dans les démolitions.
DÉCELER , DÉCOUVRIR , MANIFESTER ,
RÉVÉLER, fynonymes. {Gramm.) ces mots défi-
gnent en général l’aâion de faire connoître ce qui
eft caché. Voici les nuances qui les diftinguent. On
découvre fon fecret, on révélé celui des autres, on
manifefie fes vertus, on dècele fes vices. {O)
DÉCEMBRE, f. m. {Chron.) c’étoitle dixième
mois de l’année romaine , comme fon nom le défi-
gne allez: & c’eft le douzième de la nôtre, depuis
que nous commençons l’année en Janvier c’eft-à-
dire depuis l’édit de Charles IX. en 1564.
A la fin de ce mois le Soleil entre au figne du Capricorne
, ou plutôt la terre entre réellement au fi«me
du Cancer, oppofé au Capricorne ; ou , pour parler
encore plus jufte, la terre entre dans la conftellation
des Gemeaux, & le Soleil dans celle du Sagittaire ,
qui à caufe de la préceflion des équinoxes {voye^ ce
mot ) occupent aujourd’hui les places que paroif-
foient occuper autrefois le Cancer & le Capricorne.
V?ye{ Zodiaque. (O)
D E C EM PED A , f. m. {Hifl. anc.) verge de dix
piés ; étoit un infiniment dont les anciens fe fer-
voient pour mefurer. Voye^ Mesure & V erge.
Le decempeda étoit une verge ou réglé divifée en
10 piés, c’eft de là que lui eft venu fon nom, qui eft
dérivé de decem , dix, & pes, pedis, pié. Le pié étoit
fubdivifé en 12 pouces, & chaque pouce en 10
doigts. Voye{ Pié .
On fe fervoit de cét infiniment pour la mefure
des terres, comme on fe fert aujourd’hui de la chaîne
, de la toife, ou de la verge. Les Architectes s’en
fervoient aufli pour donner à leurs bâtimens les proportions
& les dimenfions convenables aux réglés
de l’art.
Horace, liv. II. od. 16. fe plaignant de la magnificence
& de la.délicatefle exceffive des bâtimens de
fon tems, dit qu’ils n’étoient pas ainfi du tems de
Romulus & de Caton ; qu’on ne voyoit point alors
dans les maifons des particuliers, des portiques mesurés
avec le decempeda , 8t tournés au nord pour y
prendre-le frais. Chambers. {G)
DÉCEMVIR f. m. {Hifl. rom.) magiftrat des Romains
qui fut créé avec autorité fouveraine pour
faire des lois dans l’état. On le nomma décemvir >
parce que ce grand pouvoir, ne fut attribué qli’à dix
perfonnes enfèmble, & feulement pendant le cours
d’une année. Mais à peine eurent - ils .joui de cet
état de fouveraineté, qu’ils convinrent par ferment
de ne rien négliger pour le retenir toute leur vie.
Rappelions au le&eur les principaux faits de dette
époque de l’hiftoire romaine , & difons d’abord à
quelle occafion les décemvirs furent inftitués.
Dans le feu des difputes entre les patriciens & les
plébéiens, ceux-ci demandèrent qu’on établît des
lois fixes & écrites, afin que les jugemens ne fuflent
plus l’effet d’une volonté capricieufe ou dTun pouvoir
arbitraire. Après bien des réfiftances, le fénat
y acquiefça. Alors pour compofer ces lois on nomma
les décemvirs, l’an 301 de Rome. On crut qu’on
de voit leur accorder un grand pouvoir, parce qu’ils
avoient à donner des lois à des partis qui étoient
prefqu’incompatibles. On fufpendit la fonClion de
tous les magiftrats, & dans les comices ils furent,
élus feuls adminiftrateurs de la république. Ils fe
trouvèrent revêtus de la puiffance confulaire & de la
puiffance tribunjtienne ; l’une donnoit le droit d’af-
fembler le fénat, l’autre celui d’aflembler le peuple.
Mais ils ne convoquèrent ni le fénat ni le peuple, &
s’attribuèrent à eux feuls toute la puiffance des ju-
cemens : Rome fe vit ainfi foûmife à leur empire absolu.
Quand Tarquin exerçoit fes vexations, Rome
étoit indignée du pouvoir qu’il avoit ufurpé ; quand
les décemvirs exerçoient les leurs*Rome fut étonnée
du pouvoir qu’elle avoit donné, dit l’auteur de la
grandeur des Romains.
Ces nouveaux magiftrats entrèrent en exercice
de leur dignité aux ides de Mai ; & pour infpirer d’abord
de la crainte & du refpeft au peuple, ils parurent
en public chacun avec douze liôeurs, auxquels
ils avoient fait prendre des haches avec les faifeeaux,
comme en portoient ceux qui marchoient devant les
anciens rois de Rome. La place publique fut remplie
d e. cent vingt liéleurs, qui écartoient la multitude
avec un fafte & un orgueil infupportable, dans une
ville oii régnoit auparavant la modeftie & l’égalité.
Outre leurs lièleurs, ils étoient en tout tems environnés
d’une troupe de gens fans nom & fans aveu,
la plûpart chargés de crimes & accablés de dettes,
ôf qui ne pouvoient trouver de fureté que dans les
troubles de l’état : mais ce qui étoit encore plus déplorable
, c’eft qu’on vit bien-tôt à la fuite de ces
nouveaux magiftrats une foule de jeunes patriciens,
qui préférant la licence à la liberté, s’attachèrent
Servilement aux difpenfateurs des grâces ; & même
pour fatisfaire leurs pallions & fournir à leurs plai-
ilrs , ils n’eurent point de honte d’être les miniftres
& les complices de ceux des décemvirs.
Cette jeunefle effrénée à l’ombre du pouvoir fou-
verain, enlevoit impunément les filles du fein de
leurs meres ; d’autres fous de foibles prétextes s’em-
paroient du bien de leurs voifins qui fe trouvoit à
leur bienféance : en vain on en portoit des plaintes
au tribunal des décemvirs ; les malheureux étoient
rejettés avec mépris, & la faveur feule ou des vue?
d’intérêt tenoient lieu de droit & de juftice.
On ne fauroit s’imaginer à quel point tomba la
république pendant une femblable adminiftration ;
il fembloit que le peuple romain eût perdu ce courage
qui auparavant le faifoit craindre & refpeûer
par fes voifins.. La plûpart des fénateurs fe retirèrent
; plufieurs autres citoyens fuivirent leur exemple
, & fe bannirent eux-mêmes de leur patrie, &
quelques-uns cherchèrent des afiles chez les étrangers.
Les Latins & ceux qui fe trouvoient aflwjettis à l’autorité
de la république, mépriferent les ordres qu’on
leur envqyoit, comme s’ils n’euffent pû fouffrir que
l’empire demeurât dans une ville où il n’y avoit
plus de liberté ; & les Eques & les Sabins vinrent
Faire impunément des courfes jufqu’aux portes de
Rome.
Quand tous ces faits ne feroient pas connus, on
jugeroit aifément à quel excès les décemvirs portèrent
le fyftème de la tyrannie, par le çaraélere de celui
qu’ils nommèrent conftamment pour leur chef, par
cet Appius Glaudius Craflinus, dont les crimes furent
plus grands que ceux du fils de Tarquin. On
fait, par exemple, qu’il fit aflaflîner Lucius Siccius
Dentatus,ce brave homme qui s’étoit trouvé àfix
vingts batailles, & qui avoit rendu pendant quarante
ans les plus grands fervicés à l’état. Mais on
fait encore mieux le jugement infâme qu’Appius
porta contre la vertueufe Virginie ; Denis d’Haly-
carnaffe, Tite-Live, Florus, Cicéron, ont immor-
talifé cet événement; il arriva l’an de Rome 304:
& pour lors le fpeètacle de la mort de cette fille
immolée par fon pere à la pudeur & à la liberté, fit
tomber d’un feul coup la puiffance exorbitante de
cet Appius & celle de fes collègues.
Cet événement excita la jufte indignation de tous
les ordres de l’état : hommes & femmes, à la ville &
à l’armée, tout le monde fe foûleva : toutes les troupes
marchèrent à Rome pour délivrer leurs citoyens
de l’oppreflïon ; & elles fe rendirent au mont Aven-
tin , fans vouloir fe féparer qu’elles n’euffent obtenu
la deftitution & la punition des décemvirs.
Tite-Live rapporte qu’Appius, pour éviter l’infamie
d’un fupplice public, fe donna la mort en pri-
fon. Sp. Oppius fon collègue eut le même fort ; les
huit autres décemvirs cherchèrent leur falut dans la
fuite, ou fe bannirent eux-mêmes. Leurs biens furent
confifqués; on les vendit publiquement, & le
prix en fut porté par les quefteurs dans le thréfor
public. Marcus Claudius, l’inftrument dont Appius
s’étoit fervi pour fe rendre maître de la perfonne de
Virginie, fut condamné à mort, & auroit été exécute
fans fes amis, qui obtinrent de Virginius qu’il
fe contentât de fon exil. C ’eft ainfi que fut vangé le
fang innocent de l’infortunée Virginie, dont la mort,
comme celle de Lucrèce, tira pour la fécondé fois
les Romains d’efclavage. Alors chacun fe trouva libre,
parce que chacun avoit été offenfé; tout le
monde devint citoyen, parce que tout le monde fe
trouva pere : le fenat & le peuple rentrèrent dans
tous leurs droits.
Le feul avantage qui’ revint à la république de
l ’adminiftration des décemvirs, fut le corps de droit
romain connu fous le nom de lois décemvir aies, 84
plus encore fous celui de lois des dou-^e tables. Les
décemvirs travaillèrent avec beaucoup de zele pendant
la première année de leur magiftrature, à cette
compilation de lois, qu’ils tirèrent en partie de celles
de Grece, & en partie des anciennes ordonnances
des rois de Rome. V T ables.
Je ne doute point du mérite de plufieurs de ces
lois, dont il ne nous refte cependant que des frag-
mens ; mais malgré les éloges qu’on en fait, il me
femble que la vûe de quelques-unes fuffit pour dévoiler
le but principal qui anima les décemvirs \ors
de leur rédaélion ; & cette remarque n’a pas échappé
à l’illuftre auteur de Pefprit des lôis;
Le génie de la république, dit-il, ne demandoit
pas que les décemvirs miffent dans leurs douze tables
les lois royales, fi féveres, & faites pour un peuple
compofé de fugitifs, d’èfclaves, & de brigands : mais
des gens qui al’piroient à la tyrannie n’avoient garde
de fuivre l’efprit de la république ; la peine capitale
qu’ils prononcèrent contre les auteurs des libelles
& contre les poètes, n’étoit certainement pas de
l’efprit d’une république, où le peuple aime à voir
les grands humiliés : mais des gens qui vouloient
renverfer la liberté, craignoient des écrits qui pouvoient
rappeller la liberté ; & Cicéron qui ne defa-
prouve pas cette lo i, en a bien peu prévu les dan-
gereufes conféquences. Enfin la loi qui découvre le
mieux les projets qu’avoient les décemvirs de mettre
la divifion entre les nobles & le peuple, & de rendre
par eet artifice leur magiftrature perpétuelle, eft