pofition qu’on appelle propofition principale. , parce
que celle-ci contient ordinairement ce que l’on veut
principalement faire entendre.
Ce mot incidente vient du latin incidere, tomber
dans : par exemple, Alexandre , qui étoit roi de Macédoine
, vainquit Darius ; Alexandre vainquit Darius,
voilà la propolition principale ; Alexandre en eft le
lu jet ; vainquit Darius, c’eft l’attribut : mais en tre Alexandre
&L vainquit il y a une autre propofition, qui
étoit le roi de Macédoine ; comme elle tombe entre le
fujet & l’attribut de la propofition principale, on l’appelle
propofition incidente ; qui en eft le fujet; ce qui
rappelle l ’idée d’Alexandre qui, c’eft-à-dire lequel Alexandre
; étoit roi de Macédoine, c’eft l’attribut. Deus
■ quem adoramus efi omnipotent, le Dieu que nous adorons
eft toutpuîffant: Deus efi omnipotens, voilà la
propofition principale ; quem adoramus, ç’eft la propofition
incidente ; nos adoramus quem Deum, nous
adorons lequel Dieu.
Ces propofitions incidentes font aufli des proportions
explicatives ou des propofitions détermina-.
tives.
V. Propofition explicite, propofition implicite ou elliptique.
Une propofition eft explicite, lorfque le fujet
& l’attribut y font exprimés.
Elle eft implicite, imparfaite, ou elliptique, lorfque
le fiijet ou le verbe ne font pas exprimés, Sc que
l ’on fe contente d’énoncer quelque mot qui par la
liaifon que les idées acceflbires ont entr’elles, eft
deftiné à réveiller dans l’efprit de celui qui lit le fens
de toute la propofition.
Ces propofitions elliptiques font fort en ufage
dans les devifes & dans les proverbes : en <ces occa-
lions les mots exprimés doivent réveiller aifément
l’idée des autres mots que l’ellipfe fupprime.
■ Il faut obferver que les mots énoncés doivent
être préfentés dans la forme qu’ils le feroient fi la
propofition étoit explicite ; ce qui eft fenfible en latin
: par exemple, dans le proverbe dont nous avons
parlé, ne fus Minervam ; Minervam n’eft à l’accufa-
tif, que parce qu’il y feroit dans la propofition explicite
, à laquelle ces mots doivent être rapportés ;
fus non douât Miner van, qu’un ignorant ne fe mêle
point de vouloir inftruire Minerve. Et de même ces
•trois mots Deo optimo màximo, qu’on ne défigne fou-
vent que par les lettres initiales D . O. M. font une
propofition implicite dont la confiruBion pleine eft,
hoc monumentum, on thefis hoec, dicatur, vovetur, con-
fecratur Deo optimo maximo.
Sur le rideau de la comédie Italienne on lit ces
mots tirés de l’art poétique d’Horace ,fublatojure no-
cendi, le droit de nuire ôté. Les circonftances du
lieu doivent faire entendre au leCteur intelligent,
que celui qui a donné cette infcription a eu deffein
défaire dire aux comédiens, ridemus vitia, fublato
jure nocendi, nous rions ici des défauts d’autrui, fans
nous permettre de bleffer perfonne.
La devife eft une repréfentation allégorique, dont
on fe fert pour faire entendre une penfée par une
comparaifon. La devife doit avoir un corps & une
ame. Le corps de la devife, c’eft l’image ou repréfentation
; l’ame de la devife, font les paroles qui
doivent s’entendre d’abord littéralement de l’image
ou corps fymbolique ; & en même tems le concours
du corps Sc dè l’ame de la devife doit porter l’efprit
à l’application que l’on veut faire, c’eft-à-dire à
l ’objet de la comparaifon.
L’ame de la devife eft ordinairement une propofi-
tion elliptique. Je me contenterai de ce feul exemple
: on a repréfeté le foleil au milieu d’un cartouche,
& autour du foleil on a peint d’abord les planètes ; ce
qu’on a négligé de faire dans la fuite : l’ame de cette
devife eft nec pluribus impar ; mot à mot, il ri efi pas
infuffifimt pour plufieurs. Le roi Louis XIV. fut fobjet
de cette allégorie : le deffein de l’auteur fut de faire
entendre que comme lé foleil peut fournir affez de
lumière pour éclairer ces différentes planètes, &
qu’il a affez de force pour furmonter tous les obfta-
cles, & produire dans la nature les différens effets
que nous voyons fous les jours qu’il produit ; ainfi
le Roi eft doiié de qualités fi éminentes, qu’il feroit
capable de gouverner plufieurs royaumes ; il a d’ailleurs
tant de reffources Sc tant de forces, qu’il peuf
réfifter à ce grand nombre d’ennemis ligués contre
lui Sc les vaincre : de forte que la confiruBion pleine
eû,ficutfol non efi impar pluribus orbibus illuminan-
dis , ita Ludovicus decimus quarms non efi impar pluribus
regnis regendis, nec pluribus hofiibus profiigandis.
Ce qui fait bien voir que lorfqu’il s’agit de confiruc-
tion, il faut toujours réduire toutes les phrales Sc
toutes les propofitions à la confiruBion pleine.
VI. Propofition confédérée grammaticalement,propofition
confédérée logiquement. On peut confidérer une
propofition ou grammaticalement ou logiquement :
quand on confidefe une propofition grammaticalement
, on n’a égard qu’aux rapports réciproques qui
font entre les mots ; au lieu que dans la propofition
logique, on n’a égard qu’au fens total qui réfulte de
l’affemblagé des mots : enforte que l’on pourroit dire
que la propofition confidérée grammaticalement eft
la propofition de l’élocution ; au lieu que la propofition
confidérée logiquement eft celle de l’entendement,
qui n’a égard qu’aux différentes parties, je
veux dire aux différens points de vûe de fa penfée :
il en confidere une partie comme fujet, l’autre comme
attribut, fans avoir égard aux mots ; ou bien il
en regarde une comme caufe, l’autre comme effet ;
ainfi des autres maniérés qui font l’objet de la pen-
fée: c’eft ce qui va être éclairci par des exemples.
Celui qui me fu it , dit Jefus-Chrijl, ne marche point
dans les ténèbres : confidérons d’abord cette phrafé
ou cet affemblage de mots grammaticalement, c’eft-
à-dire félon les rapports que les mots ont entr’eux ;
rapports d’où réfulte le fens : je trouve que cette
phrafe, au lieu d’une feule propofition, en contient
trois.
i° . Celui eft le fujet de ne marche point dans les te-
nebres ; & voilà une propofition principale ; celui
étant le fujet, eft ce que les Grammairiens appellent
le nominatif du verbe.
Ne marche point dans les ténèbres, c’eft l’atribut *
marche eft le verbe qui eft au fingulier, & à la troi-
fieme perfonne, parce que le fujet eft au fingulier,
& eft un nom de la troifieme perfonne, puifqu’il ne
marque ni la perfonne qui parle, ni celle à qui l’on
parle; ne point eft la négation, qui nie du fujet l’action
de marcher dans les ténèbres.
Dans les. ténèbres, eft une modification de l’aCtion
de celui qui marche, il marche dans les ténèbres; dans
eft une prépofition qui ne marque d’abord qu’une
modification ou maniéré incomplète ; c’eft-â-diré
que dans étant une prépofition, n’indique d’abord
qu’une efpece,une forte de modification; qui doit être
enfuite fingularifée, appliquée , déterminée par un
autre mot, qu’on appelle par cette raifon le complément
de la prépofition : ainfi les ténèbres eft le complément
de dans-; Sc alors ces mots, dans les ténèbres,
forment un fens particulier qui modifie marche, c’eft-
à-dire qui énonce une maniéré particulière de marcher.
2°. Qui me fu it , ces trois mots font une propofition
incidente qui détermine celui, Sc le reftreint à
ne fignifier que ledifiiple de Jefus-Chrifi, c’eft-à-dirô
celui qui réglé fa conduite & fes moeurs fur les maximes
de l’Evangile : ces propofitions incidentes énoncées
par qui, font équivalentes à un adjeCtif.
Qui eft le fujet de cette propofition incidente; me
fuit eft l’attribut ; fuit eft le verbe ; me eft le dé*
fer rfti'rtant oti‘ terme de FaCtion' de fuit : car félon
l’ ordre de là penfée Sc des rapports, trie éft après
fuit ; mais félon l’élocution ordinaire ou confiruBion
■ ufüelle, ces fortes d’é pronoms précèdent le verbe.
Nôtre langue à côïïfervé beaucôùp plus d’inverfions
latines qù’on ne pénfe»
3°. Dit Jefùi-Chrifi, c’eft uné fro'ifiéme propofition
qui fait uneinçife où fens détaché ; c’eft un adjoint
: en ceS occafîons la confiruBion ùfuelle met le
fujet de la propofition après le verbe : Jefus-Chrifi
ôft le fujet, St ait eft l’attribut.
Confidérons maintenant cette propofition à là maniéré
des Logiciens : commençons d’abord à en fé-
parer l’incife dit Jefus-Chrifi; il ne nous reliera plus
qu’une feule propofition, celui qui me fuit : ces mots
lie forment qu’un feris total ; qiâ eft le fujet de la
propofition logique , fujet complexe ou compofé ;
car on ne juge de celui, qu’entant qu’il eft celui qui
me fuit : voilà le fujet logique ou de l’entendement.
C ’éft de ce fujet que l’on penfe & que l’on dit qü'il
ne marche point dans les ténèbres.
Il en eft de même de cette autre propofition ; Ale- 1
xandre , qui étoit roi de Macédoine, vainquit Darius»
Examinons d’abord cette phrafe grammaticalement.
J y trouvé deux propofitions : Alexandre vainquit
Darius, voilà une propofition principale; Alexandre
en eft le fujet ; vainquit Darius, c’eft l’attribut.
Qui étoit roi de Macédoine, c’eft une propofition incidente
; qui en eft le fujet, & étoit roi de Macédoine,
l’attribut. Mais logiquement ces mots, Alexandre
qui etoit roi de Màcedoine, forment un fens total équivalent
à Alexandre roi de Macédoine .* ce fens total eft
le fujet complexe de la propofition ; vainquit Darius,
c’eft l’attribut.
Je crois qu’un Grammairien ne peut pas fe difpen-
fer de connoître ces différentes fortes de propofi*
tiorts, s i! veut faire la confiruBion d’une maniéré
raifonnable»
Les divers noms que l’on donne aux différentes
propofitions y & fôuvènt à la même, font tirés des
divers points de vûê fous lefquels on les confidere;
nous allons raffembler ici celles dont nous venons
de parler, & que nous croyons qu’un Grammairien
I doit connoître.
Ta b l e des divers noms que Von donne aux propofitions , aux fujet s , & aux attributs»
ƒ»
Dïvïfion.
Proposition le mode indicadtifi.recte énoncée pat
Elle marque un jugement-.
Proposition oblique exprimée
par quelqu’autre mode du verbe.
Elle marque non un jugement, mais quelque
confidétatioïi particuliere de l’ef-
pric. On l’appelle énonciation
i. Simple tant au pluriel qu’au fingulier.
2-. Multiple, lorlqu'on applique le me-
nie attribut à différens individus»
j» Complexe.
4. Enoncé par plufieurs mots qui for*
ment un lens total, & qui fpncéqui*
valens à un nom.
Simple,
Compofé, c’eft-à'dire, énoncé par plu*1
fieurs mots»
//»
tiivifion.
Proposition absolue ou p ie t t e ,
Proposition relative ou
tielle» On les appelle auffi correlatives»
lit. 5 Propolition explicative.
Divifiom c Propofition déterminative»
IV. 5 Propofition principale.
Dïvijîon. I Propofition incidente.
COML’enfemble
dès propofitions C Lapériode “J De membres feulement»
corrélatives au. partielles v efi cotnpo- > D’incifes feulement,
formp la' périgde» l fée , ou J De membres & d’incifes»
V. . S Propofitioh explicite.
Divijion. c Propolition implicite ou elliptique.-
VI. S Propofition confidérée grammaticalement»
Dïvifion. c Propofition confidérée logiquement.
Il faut obferver que lés Logiciens donnent le nom
de propofition compofée à tout lens total qui réfulte du
rapport que deux propofitions grammaticales ont
entr’elles ^rapports qui font marqués par la valeur
des différentes conjon&ions qui uniffent les propofitions
grammaticales.
Ces propofitions compofées ont divers noms fe**
Ion la valeur de la conjonction ou de l’adverbe conr
jon£tif,oudu relatif qui unit les fimples propofitions
partielles, & en fait un tout. Par exemple, ou, aut,
vel, eft une conjonétion disjonétive ou de divifion.
On raffemble d’abord deux objets pour donner en-
fuite l’alternative de l ’un- ou celle de l’autre. Ainfi
après avoir d’abord raffemblé dans mon efprit l’idée
du foleil & celle de la terre, je dis que c’eft ou le foleil
qui tourne, ou que c’eft la terre : voilà deux propofitions
grammaticales relatives dont les Logiciens
ne font qu’une propofition compofée, quïls appellent
propofition disjonBive.
Telles font encore les propofitions conditionnelles
qui réfultent du rapport de deux propofitions par
la conjonction' conditionnelle f i ou pourvu que : f i
vous étudie{ bien , vous deviendrez favant ; voilà une
propofition compofée qu’on appelle conditionnelle.
Ces proppfitions font compofées de deux propofitions
particulières , dont l’une exprime une condition
d’où dépend un effet que Fautre énonce. Celle
ou eft la condition s’appelle Vantécédent ,fi vous étu-
diez bien ; celle qui énonce l’effet qui fuivra la condition,
eft appellée Iç conféqucnt, vous deviendrez fuyant,
1 * ~ x
I l efi efilmé parce qîtil efi favant & Vertueux. Voilà
une propofition compofée que les Logiciens appellent
caufale, du mot parce que qui fert à exprimer la
caufe de l’effet que la première propofition énonce.
I l efi eflimé, voilà l ’effet ; & pourquoi ? parce qu'il
efi favant & vertueux, voilà la cauie de l’eftime.
La fortune peut bien ôter les richeff es , mais elle ne
peut pas ôter la vertu: voilà une propofition compofée
qu’on appelle adverfative pu diferétive, du latin
diferetivus (Donat), qui fert à féparer, à diftinguer,
parce qu’elle eft compofée de deux propofitions dont
la fécondé marque une diftinétion, uné féparation,
une forte de contrariété & d ’oppofition, par rapport
à la première ; & cette féparation eft marquée paf
la conjondion adverfative mais.
Il eft facile de démêler ainfi les autres fortes de
propofitions compofées ; il füffit pour cela de connoître
la valeur des conjonctions qui lient les propofitions
particulières, & qui paf cette liaifôn forment
un tout qu’on appelle propofition compofée. On fait
enfuite aifément la confiruBion détaillée de chacune
dès propofitions particulières, qu’on appelle auffi
partielles ou corrélatives»
Je ne parle point ici des autres fortes de propofitions
, comme des propofitions univerfelles . deà
particulières, des fingülieres, dés indéfinies, des
affirmatives, des négatives, des contradictoires , &e.
Quoique ces connoiffances foiertt très-utiles, j’ai-
crû né devoir parler ici de la propolition:, qu’autant-
qu’il eft néceflaire de la connoître pouf avoir de»
principes sûrs de confiruBion,