v iv o itl’an 437 de Rome , fut le premier qui enfei-
gna publiquement la jurifprudence ; mais les ouvrages
ne fubfiftoient plus du tems de Juftinien.
Les autres jurifconfultes les plus célébrés dont on
a rapporté quelques fragmens dans le digejle , ou qui
y font cités , peuvent être diftingués en plufieurs
âges ; fçavoir , ceux qui ont vécu du tems de la
republique jufqu’au liecle d’Augufte ; ceux qui ont
vécu depuis cet empereur jufqu’à Adrien, & depuis
celui ci jufqu’à Conftantin ; ceux qui vivoient du
tems de Théodofe ; & enfin , ceux qui vivoient du
tems de Juftinien , & en particulier ceux qui eurent
part à la compilation des lois de cet empereur , 8c
notament du digefle.
Les jurifconfultes qui fe diftinguerent du tems de
la république , 8c jufqu’au liecle d’Augufte , furent
d’abord les deux Catons, l’un furnommé le cenfeur,
8c auquel on attribue la réglé dite catonienne ; M.
Caton fon fils, le jurifeonfuhe, auquel quelques-uns
attribuent l’invention de cette même réglé ; Junius
Brutus , Publius Mucius, Quintus Mucius Scévola,
le premier qui mit en or.dre le droit civil qu’il distribua
en dix-huit livres, ce fut lui aulïi qui intro-
duifit la caution mucienne ; Publius Rutilius Rufus,
Aquilius Gallus , Lucius Baldus , Sextus Papyrius,
defcendantde l’auteur du code papyrien ; Caius Ju-
ventius, Servius Sulpitius, un de les difciples nommé
Caius, un autre Caius furnommé TrebatiusTejla ;
Offilius , Aulus , Cafcellius , Q. Ælius Tubero, Al-
fenus Varus , Aufidius Tuca 8c Aufidius Namufa,
Atteius Pacuvius, Flavius Prifcus, Publicius Gellius,
8c Cinna Lucius Cornélius Silla, Cneius Pompeius,
connu fous le nom du grand Pompée ; Marc-Antoine
eft mis aulîi au rang des jurifconfultes.
Les réponfes ou confultations de ces jurifconfultes,
foit verbales, ou par éc r it, 8c les décidons qu’ils
donnoient dans leurs commentaires, furent toûjours
d’un grand poids, mais elles acquirent une plus grande
autorité depuis qu’Augufte eut accordé à un certain
nombre de ces jurifconfultes les plus qualifiés le
droit d’interpréter les lois , 8c de donner des dédiions
auxquelles les juges feroient obligés de conformer
leurs jugemens.
Malfutius Sabinus fut le premier auquel il permit
d’expliquer publiquement le droit ; plufieurs autres
obtinrent la même permiflion : les noms les plus célébrés
font dans la loi 2. jf. de orig. jurif. ceux-ci
étoient prefque tous des plus grandes familles de Rome
, amis des empereurs , ou recommandables par
les Services qu’ ils avoient rendus à l’état : leurs dédiions
furent appellées refponfa prudentum ; c’eft de
ces réponfes que le digejle fut principalement formé.
Caligula menaça d’abolir l’ordre entier des jurifconfultes
; ce qui n’eut pas d’effet ; & les empereurs
Tibere & Adrien confirmèrent les jurifconfultes
dans les privilèges qu’Augufte leur avoit accordés.
Sous l’empire d’Augufte , ces jurifconfultes, au-,
torifés à expliquer publiquement le droit, fe partagèrent
en deux feâ e s, ce qui a produit tant de contrariétés
que l’on rencontre dans le digejle.
Atteius Capito , 8c Antiftius Labeo , furent les
chefs de deux fe&es ; le premier fe tenoit ferupu-
leufement aux principes qu’il avoit appris ; l’autre
qui étoit plus fubtil introduifit beaucoup d’opinions
nouvelles.
Les difputes furent encore plus vives entre Sabinus
, fucceffeur de Capito, 8c Proculus , fucceffeur
de Labeo , d’où les deux feftes des fabiniens 8c proculeiens
prirent leur nom, quoique Sabinus 8c Proculus
n’en fuffent pas les auteurs.
La feôe de Capito ou de Proculus fut auflï ap-
pellee cajjienne, du nom d’un autre difciple de Capito
, qui s’en rendit le chef après Sabinus.
Les fe&ateurs de Capito ou proculeiens furent Maf-
furius Sabinus , Çaflîus Longinus , Coelius Sabinus
Prifcus Javolenus, Alburinus Valens,Tufcianus , 8c
Salvius Julianus, qui rédigea l’édit perpétuel, 8c qui
mit.fin a toutes les feéies en adoptant, tantôt le fen-
timent des uns, 8c tantôt celui des autres , félon
qu’il lui paroiffoit le plus jufte.
Labeo eut pour feâateurs Cocceius Nerva le pere,
Licinius Proculus , Pegafus qui fit donner à fa fefte
. le nom de pegafienne, Celfus , Neratius Prifcus.
Il fe forma une troifieme fefte mitoyenne qu’on
appella des hercijcundes , qui tâchoient de concilier
les uns & les autres autant qu’il étoit pofïible : ilpa-
roît que Salvius Julianus, quoique compté parmi les
proculeiens, fe rangea de ce parti ; ce fut aufli celui
qu’embraffa l’empereur Juftinien.
Depuis Adrien jufqu’à Conftantin , les jurifconfultes
les plus fameux font Vindius Varus , Seftus
Coecilius Africanus , Volufius Moecianus , Junius
Mauricianus , Ulpius Marcellus, Claudius Saturni-
nus qui affettoit toûjours d’être d’un avis oppofé à
celui des autres , ce qui a fait donner le nom de fa-
turnini à ceux qui tombent dans le même défaut ;
Tertullus qui donna fon nom au S. C. Tertullien, le
célébré Gaïus ou Caius , Q. Cerbidius Scévola ,
Sextus Pomponius, Ulpien , Julius Paulus, Heren-
nius Modeftinus, 8c quelqu’autres moins connus, tels
que Papyrius Juftus, Calliftrates,Tryphoninus, Arius
Menander, Tarrentenus-Paternus , Macer , Teren-
tius-Clemens , Papyrius Fronto , Furius Anthia-
nus , Maximus , Florentinus , Vonuleius , Marcia-
nus, Julius Aquila , Arcadius Charifius , Puteola-
nus Ruffinus.
Sous le régné de Conftantin, deux jurifconfultes
nommes Grégoire & Hermogenien firent chacun un
code appellé de leur nom, contenant une compilation
des conftitutions des empereurs , l’un depuis
Adrien jufqu’au tems de Valerien Sc Gallien, l’autre
depuis ces empereurs jufqu’à Conftantin.
Les différens jurifconfultes, dont on a parlé juf-
qu’ici , a voient compofé différens commentaires &
traités fur le droit : on en comptoit du tems de Juftinien
plus de deux mille volumes ; depuis le régné
d’Augufte , les écrits des jurifconfultes , auxquels
il étoit permis d’expliquer publiquement le droit,
a voient force de loi ; les parties & les juges étoient
obligés de s’y conformer : ces écrits faifoient partie
du droit romain.
Mais comme dans cette multitude d’écrits il fe
trouvoit beaucoup d’opinions différentes , & par
conféquent d’incertitude , les empereurs Théodofe
le jeune & Valentinien III. voulant lever cet inconvénient
, ordonnèrent que dans la fuite il n’y auroit
plus que les ouvrages de Papinien , de Caïus, de
Paul y d’Ulpien , & de Modeftin qui auroient force
de loi dans l’empire ; que quand ces jurifconfultes
feroient partagés fur quelque queftion, l’avis de Papinien
feroit prépondérant ; mais Juftinien, 8c ceux
qui travaillèrent fous fes ordres à la confeftion du
digefle y ne firent point de femblable diftindion entre
îes anciens jurifconfultes , & les ont tous également
cités dans le digejle.
Theodofe le jeune employa huit jurifconfultes à
la redaûion de fon code qui fut publié en 438. ces
jurifconfultes font Antiochus ^Maximin, Martyrius,
Sperantius , Apollodore, Théodore, Epigenius, 8c
Procope.
Enfin , Juftinien étant parvenu à l’empire , 8c
voyant la confufion que caufoit cette multitude de
lois 8c d’écrits des jurifconfultes, réfolut auffi-tôt
d en faire faire une compilation compofée de ce qu’il
y auroit de meilleur.
Il commença par faire travailler à un nouveau
code
code que l’on tira , tant des trois autres codes qui
avoient été faits avant lui , que des novelles de
Théodofe 8c de fes fucceffeurs ; il confia l’exécution
de ce projet à Tribonien qui avoit été quefteur ÔC
conful, 8c lui aflocia neuf autres jurifconfultes nommés
Jean, Leontius , Phocas , Bafilides , Thomas ,
Conftantin le thréforier, Théophile, Diofcore, 8c
Proefentinus.
Cette première édition du code parut au mois
d’Avril 529 : l’année fuivante, Juftinien fit une ordonnance
adreffée à Tribonien , qu’il chargea de
raffembler de même en un feul corps d’ouvrage les
plus belles décifions qui étoient répandues dans les
ouvrages des anciens jurifconfultes ; d’en faire une
colleâion 8c compilation diftribuée fuivant l’ordre
de l’édit perpétuel , ou fuivant celui du code qui
avoit été publié l’année précédente ; de divifer cette
colleôion en cinquante livres, 8c chaque livre en
plufieurs titres : il y a v o it , comme on l’a déjà dit,
plus de deux mille volumes , 8c plus de trois cents
mille vers , outre le choix qu’il avoit à faire , il fal-
loit concilier les différentes opinions des Sabiniens
8c des Proculeiens, c’eft pourquoi Juftinien permit à
Tribonien de fe choifir quelques-uns de ceux qui ex-
celloient alors dans la Science du droit pour l’aider
dans ce travail ; il ordonna que cette nouvelle compilation
feroit appellée digejle ou pandectes.
Le terme de digejle n’étoit pas nouveau ; plufieurs
jurifconfultes avoient déjà mis ce titre à leurs ouvrages
; il y avoit dès-lors les digejles de Julien,
ceux d’Alphenus Varus, de Juventius, Celfus, Dul-
piùs, Marcellus , de Cerbidius S cévola, 8c de plufieurs
autres. On appelloit digejles tous les livres qui
renfermoient des matières de droit digérées , 8c mi-
fes par ordre quajî digeflee.
A l’égard du nom de pandectes, que Juftinien donna
aufli à cette compilation, ce terme eft dérivé du
grec 8c compofé de nav, qui fignifie omne, 8c de dV^o-
[A.cUyCompleclor\ de forte que pandectes fignifie un recueil
qui comprend tout. Ce nom de pandectes n’étoit pas
non plus nouveau. Gellius rapporte (jiv. X I I I . de
jes nuits attiques, cap. jx.') que Tullius T iro , éleve
de Cicéron, avoit compofé certains livres qu’il intitula
en grec pandecta, comme contenant un précis
de toutes fortes de chofes 8c de fciences. Et Pline
en fa préface de fon hiftoire naturelle, dit que ce titre
avoit paru à quelques-uns trop faftueux. Ulpien,
Modeftinus, 8c autres, intitulèrent aufli quelques-
uns de leurs ouvrages pandectes.
Juftinien ordonna aufli que les mots feroient écrits
tout au long dans le digejley 8c défendit d’y employer
les notes 8c abbréviations qui avoient jetté tant de
doutes 8c d’obfcurités dans lès livres des anciens jurifconfultes.
Enfin il défendit à tous jurifconfultes de
Élire des,commentaires fur le digejley pour ne pas
retoqiberdans la même confufion où l’on étoit auparavant
; il permit feulement de faire des paratit-
Ies ou Sommaires du digejle.
Tribonien s’affocia'féize jurifconfultes, du nom- i
bre defquels furent la plupart de ceux qui avoient j
été employés à la compilation du code. Ces feizé ;
jurifconfultes font les deux Conftkntins, Théophile,
Dorothée, Anatolius, Cratinus, Eftienne, Menna ,
Profdocius., Eutolmius ,Timothée, Léonides, Léon-
tius , Platon, Jacques, 8c Jean.
Le digejle fut parfait en moins de trois années,
ayant été publié le 17 des. calendes de Janvier 5 33.
Juftinien loue Tribonien 8c fes collègues de leur
diligence, 8c parle du digejle comme d’un ouvrage
dont il n’efpéroit pas. de voir la fin avant dix années
; éè qui apparemment a fait croire à quelques
modernes que Juftinien avoit donné dix ans à Tribonien
pour travailler à cet ouvrage , quoique le
tems ne fut point fixé ; quelques-uns ont même pris
Tome I F .
de-là ôceafion d’accufer Tribonien 8c fes collègues
de précipitation ; mais trois années étoient bien luffi-
faxites à dix-fept jurifconfultes des plus habiles, pour
faire unê fimple compilation.
* M faut encore obferver par rapport à la compila-»
tion du digejle.
i° . Que Û on n’y a fait entrer des fragmens des
livres des jurifconfultes , que de ceux qui avoient
I eu permiflion de répondre publiquement mr le droit,
I 8c que les ouvrages des autres jurifconfultes furent
totalement laiffes à l’écart. Mais on ne fe fervit pas
feulement des écrits de ceux qui avoient été autori*
fes par Valentinien I I I . on y a fait aufli entrer des
fragmens de plufieurs autres qui avoient été approuvés
, pour répondre fur le droit,
20. Que les rédafteurs du digefle Ont évité avec
foin toutes les contradiûions des Sabiniens 8c des
Procuiéïens, 8c autres jurifconfultes,
30. Quoique les notes d’Ulpien * de Paulus, 8c de
Marcien , fur les ouvrages de Papinien , n’euffent
point la même autorité que leurs autres ouvrages ,
à caufe de la haute confidération que l’on avoit pour
Papinien ; cependant Juftinien permit aux rédaâeurs
du digefle d’en prendre ce qui feroit néceffaire : 8c la
prérogative que Valentinien III. avoit accordé à Papinien
, que fon avis prévaloit fur celui des autres ,
étant en nombre égal, n’a plus lieu dans le digejle ,
foit parce que l’on n’y a point admis de diverfes opi-»
nions, foit parce que tout ce qui y eft compris ayant
été adopté par Juftinien, eft cenfé émané de lui, 8c
a la même autorité.
Enfin il fut permis aux rédafteurs de corriger 8c
de réformer ce qu’ils jugeroient à-propos dans les
écrits des jurifconfultes ; comme ils le firent en effet
en plufieurs endroits, où il s’agiflbit de concilier l’ancien
droit avec le nouveau.
Le digejle, quoique fait à Conftantinople, a été
rédigé en latin tel que nous l’avons. Dans la fuite,
l’empereur Phocas le fit traduire en grec pat Thalæ- •
leus ; Haloander dit avoir vû cette traduûion ma-
nuferite, mais elle n’a point encore été publiée.
A l’égard de l’ordre que Tribonien a fuivi dans
l’arrangement du digefle, on conçoit aflez celui des
livres & des titres, quoiqu’il eût été facile d’en faire
un meilleur ; mais pour ce qui eft des lois qui font
placées fous chaque titre, il femble qu’elles ayent
été jettées toutes à la fois fans aucun choix ni arrangement
: en effet elles n’ont nulle liaifon entr’elles j.
celle qui précédé devroit fouvent être la derniere ,
8c plufieurs conviendroient beaucoup mieux fous
d’autres titres.
Il y a deux divifions différentes du digefle y qui
font l’une & l’autre de Juftinien.
La première eft en cinquante livres, & chaque livre
contient plufieurs titres, qui font divifés en plufieurs
lois. On a mis en tête de chaque loi le nom du
jurifconfulte, 8c de l’ouvrage dont elle a été tirée ,
afin que le nom de tous ces favans perfonnages ne
demeurât point dans l’oubli. Les lois font la plûpart
divifées en plufieurs parties ; la première appellée
priheipium, 8c les autres nommées paragraphes.
Le premier livre compofé de vingt-deux titres j
dont le premier eft de juflitiâ 6* jure, traite de la juf»
tice en général du droit 8c de fes différentes parties ;
de la drvifion des perfonnés 8c de celle des chofes ;
des fénateurs, 8c autres magiftrats ; de leurs délégués
8c affefleurs.
Le fécond livre divifé en quinze titres, traite du
pouvoir des magiftrats, 8c ae leur jurifdi&ion ; de
la' maniéré de traduire quelqu’un en jugement ; des
conventions 8c tranfa&ions.
Dans le troifieme-livre, qui ne contient que fix
titres , on explique ceux qui peuvent poftuler ; on
traite des infâmes qui font exclus de cette fonûion;
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