même peiné, & la même peine ne doit pas avoir lieti
pour des crimes inégaux.
9°, Les a Res purement intérieurs ne faiiroient être
affujetris aux peines humaines ; ces aRes connus
de Dieu feul, ont Dieu pour juge 8c pour vengeur.
io°. Les aRes extérieurs quoique criminels, mais
qui dépendent uniquement de la fragilité de notre
nature, exigent de la modération dans les peines.
i ï°. Il n’eft pas toûjours néceffaire de punir les
trimes d’ailleurs puniffables ; 8c quelquefois il feroit
dangereux de divulguer des crimes cachés par des
punitions publiques.
ia°. Il feroit de la derniere abfurdité , comme le
remarque l’auteur de YEfprit des Lois, de violer lés
réglés de la pudeur dans la punition des crimes , qui
doit toujours avoir pour objet le rétabliffement de
l ’ordre.
130. Un principe qu’ôn ne peut trop répéter, eft
que dans le jugement des crimes, il vaut mieux rif-
quer de laiffer échapper un criminel, que de punir
un innocent. C ’eft la décilion des meilleurs philofo-
phes de l’antiquité ; celle de l’empereur T rajan, 8c
de toutes les lois chrétiennes. En effet, comme lé
dit la Bruyere, un coupable puni eft un exemple
pour la canaille ; un innocent condamné eft l’affaire
de tous les honnêtes gens.
140. On ne doit jamais commettre de ctime pour
obéir à un fupérieur : à quoi je n’ajoûte qu’un mot
pour détourner du crime les perfonnes qu’un malheureux
penchant pourroit y porter ; c’eft de confi-
dérer mûrement l ’injuftice qu’il renferme, & les fui-'
tes qu’il peut avoir. Article de M. le Chevalier DE Jau-
COURT.
C r im e , (Jurifpr.) prohibition des lois tant naturelles
que civiles, & qui tend à troubler l’ordre public
, de maniéré que la vindiRe publique y eft inté-
reffée; ou qui fait à quelque particulier un grief tel
que le fait mérite punition.
Il y a des aRions qui font réputées criminelles,
félon la religion 8c félon la morale, mais que les lois
civiles ne puniffent pas ; parce que ces aRions font
du reffort du for intérieur, & que les lois civiles ne
règlent que ce qui touche le for extérieur.
Le terme de crime comprend toutes fortes de délits
8c de maléfices : ces deux derniers termes pris
dans une lignification étendue, comprennent aufli
toutes fortes de crimes ; cependant chacun de ces
termes a ordinairement fa lignification propre.
. On entend par crime , les délits les plus graves qui
intéreffent là vindiRe publique.
Sous le nom de délits proprement dits, on n’en-.
tend que les moindres délits dont la réparation n’in-
îéreffe que quelque particulier.
Enfin on appelle proprement maléfices , l’aRion
par laquelle on procure du mal, foit aux hommes ou
aux animaux, & aux fruits de la terre, en employant
le fortilége, le poifon, ou autres choies femblables.
, Tout ce qui eft défendu par la loi meft pas réputé
crime ; il faut que le fait foit tel qu’il mérité punition.
Pour qu’il y ait un crime, il faut que le fait foit
commis par dol 8c avec connoiffance de caufe : ainli
ceux qui fo,nt incapables de dol, tels que les infen-
fés 8c les impubères , ne peuvent être pourfuivis
pour crime , parce qu’on ne préfume point qu’ils
ayent animum delinquendi.
Les crimes 8c délits fe peuvent commettre en quatre
maniérés différentes ; fa voir, re, verbis, litteris >
8c folo confenfu. Re, lorfque le crime eft commis par
effet 8cI par quelque aRion extérieure ; comme les
homicides, affaflînats, empoifonnemens, facriléges,
vols, larcins, battures, excès , & violences, 8c au-
iteschofes femblables Fer bis: on commet des crirnis
par paroles, en proférant des convïces & injures
verbales, en chantant des chanfons injurieufes;’
Litteris : les crimes fe commettent par écrit, en fabriquant
quelque aRe faux, ou en compofant 8c diftri-
buant des libelles diffamatoires. Confenfu: on commet
un crime par le feul eonfentement, en participant
au crime d’un autre, foit par fuggeftion , mauvais
confeils, ou complicité.
Celui qui tue quelqu’un par mégàrde & contre
fon intention, ne laiffe pas d’être puniffable fuivant
les lois civiles ; parce que tout homme qui tue mérite
la mort, mais il obtient facilement des lettres
de grâce;
La volonté qu’un homme peut avoir eu de commettre
un crime dont l’exécution n’a point été commencée
, n’eft point pvinie en juftice, cogitationispce-
nam nemo patitur. La punition de ces crimes cachés
eft réfervée à la juftice de D ieu, qui eonnoît fçul le
fond des coeurs;
Mais celui qui ayant deffein de commettre un
crime s’eft mis en état de l’exécuter, quoiqu’il en
ait été empêché, mérite prefque la même peine que
fr le crime avoit été confommé ; la volonté dans ce
cas eft réputée pour le fait : in maleficiis Voluntas
fpeclatur, non exitüs.
L’ordonnance de Blois , art. lÿô. veut qiie l’on
puniffe de mort ceux qui fe louent pour tuer, outrager
, 8c excéder quelqu’un , enfemble ceux qui
auront fait avec eux de telles conventions , bu qui
les y auront induits : dans ce ca s, on punit la feule
volonté, quoiqu’elle n’ait été fuivie d’aucune exécution
; parce que la convention eft un aRe complet
8c un commencement d’exécution de la volonté :.
tout eft même déjà confommé par rapport à Celui
qui donne charge à un autre d’exécuter le crime ; 8c
celui qui fe charge de le faire, commet aufli un crime
en faifant une telle convention qui blefle l’ordre
de la fociété. Cette convention eft un aRe extérieur
de la volonté, dont on peut avoir la preuve à la différence
d’une fimple volonté qui n’a point été ma-
nifeftée, 8c que par cette raifon l’on ne punit point.
Les crimes font divifés, fuivant le droit romain ,
en crimes privés 8c publics.
Les crimes ou délits privés, font ceux qui ne regardent
que les particuliers, 8c dont la pourfuite n’eft .
permife par les lois romaines qu’à ceux qui y font
intéreffés, 8c auxquels la réparation en eft dite.
Les crimes publics font ceux qui troublent l’ordre
public, 8c dont la réparation intéreffe le public.
Chez les Romains , la ppurfuite en étoit permife à
toutes fortes de perfonnes, quoique non-intéreffées.
Mais parmi nous, la pourfuite n’en eft permife qu’aux
parties intéreflees, ou au miniftere public : mais
toutes fortes de perfonnes font reçues à les dénoncer
.O
n diftinguoit aufli chez les Romains les crimes
publics ou privés , en crimes ordinaires ou extraordinaires.
Les premiers étoient ceux dont la peine étoit
fixée par les lois, 8c qui fe pourfuivoient par la voie
ordinaire ou civile. Les crimes extraordinaires étoient
ceux dont la peine n’étoit point fixée par les lois
8c qui fe pourfuivoient par la voie extraordinaire
de la plainte 8c accufation.
En France on n’obferve point cette diftinRion ÿ
la réparation publique de tous crimes 8c délits ne
peut être pourfuivie que par la voie extraordinaire
: néanmoins les dommages 8c intérêts peuvent
être pourfuivis par la voie civile contre le coupa-*
ble.A
l’égard des peines, on dit communément qu’elles
font arbitraires en France ; ce qui ne fignifie pas
que les juges puiffent prononcer des peines qui ne
font point décernées par la loi contre le crime dont
il s’agit, ils ne peuvent aii contraire prononcer cou*
tre chaque crime üne peine plus grave que celle qui
eft établie par la loi : ainfi ils ne peuvent condamner
à mort dans un cas oii il n’y a point de loi qui
prononce la peine de mort ; mais l’application des
peines plus ou moins rigoureufes eft arbitraire, c’eft-
à-dire qu’elle dépend des circonftances 8c de la prudence
du juge, lequel peut abfoudre ou infliger une
peine plus legere, s’il ne croit pas que l’accufé foit
précifement dans le cas d’une peine plus rigou-
reufe.
On diftingue parmi nous de même que chez les
Romains les crimes capitaux, c’eft-à-dire qui emportent
peine de mort naturelle ou civile de ceux qui
ne le font pas, 8c donnent feulement lieu à quelque
condamnation moins grave.
Les crimes les plus légers que l’on qualifie ordinairement
de délits Amplement, font les injures faites
, foit verbalement, ou par écrit, ou par geftes ,
comme en levant la canne fur quelqu’u n , ou par effet
en le frappant de foufflets, de coups de poing
ou de pié , ou autrement.
• Les autres crimes plus graves qui font les plus conflits
, font les vols 8c larcins , les meurtres, homicides
8c parricides, l’homicide de foi - même , le crime
des femmes qui celent leur groffeffe & fe font
avorter, la fuppofition dë part, le crime de lefe-ma-
jefté divine 8c humaine, les empoifonnemens, les
crimes de concuflion 8c de péculat, les crimes de débauche
publique, adultéré, rapts, 8c autres procédant
de luxure ; le crime de faux, de fauffe monnoie -,
les fortiléges , juremens, & blafphemes, l’héréfie,
& plufieurs autres, de chacun defquels on parlera
en leur lieu.
Nous obferverons feulement ici que les crimes en
général font réputés plus ou moins graves, eu égard
aux circonftances qui les accompagnent : par exemple
, l’inmre eft plus grave lorfqu’elle eft faite à un
homme qualifié,8c par un homme de néant, lorfqu’-
*elle eft faite en public ; 8c ainfi des autres circonftances
qui peuvent atcompagner les différens crimes.
La connoiffance des crimes appartient à certains
juges, privativement à d’autres ; ainfi qu’on le verra
aux mots C om p é t e n c e , Ju g es , LieutenanS-
C riminel s, 'P révôts des Ma r é ch a u x , Prét
e n t io n , & Procédure cr imine lle.
La maniéré de pourfuivrè les crimes ' eft expliquée
aux mots A ccu sa t io n , A ccusateur , A c c
u s é , D é n o n c ia t io n , Pl a in t e , Procédure
Cr im in el le, 8c autres termes qui appartiennent à
la procédure extraordinaire.
' Il y a aufli plufieurs chofes à obferver par rapport
aux preuves néceffaires en matière’ criminelle :
par exemple, que la confefliôn de l’accufé ne fuffit
pas pour Je condamner, qu’il’ faut des preuves très-
claires , ‘fui-tout lorfqu’il s’agit de condamner un
homme à mort. Il y a descrimes qui fe commettent
en fecret, tels q u e l’adultere; l ’incefte, 8c autres
crimes de cette efpece, pour lefquels on n’exige pas
des témoins oculairés ; mais ori à égard aux autres
icirconftàncès qui fcuirtiinent dés indices du crime,
comme la fréquentation 8c la grande familiarité, les
privautés, lés difcoilrs libres tenus verbalement 8c
par éc r it, qui annoncent la débauche. Voye^ In-
JFORMATION & PREUVE.
ü Les différentes peines que l’on peut infliger aux
àccufés félon la qualité des crimes 8c délits, tels que
les amendés, aumônes, peines’du carcan, du foiiet,
d’être marqué, le bànniffement, les galeres, la peine
de niôrt , feront expliqùêès en général au mot
P eines , 8c plus particulièrement chacune au mot
qui leur eft prôpre.
Tous crimes en général font étéints par la mort de
l ’accufé, povir cé qui eft dé .la peine corporelle 8c
île la peine pécuniâiré apptîcàblè au fifc ; mais quant
aiix réparations pécuniaires qui peuvent être dues à
la partie civile, les héritiers de l’accufé font tenus
à cet égard de fës faits.
Il ÿ a même certains crimes dont la réparation publique
n’eft point éteinte par la mort de l’accufé ,
tels que l’homicide de foi-même, le duel, le crime
de lefe-majefté.
La peiné portéé par lé jügément petit être rémife
par des lettres de gracé, qu’il dépend de la clémence
du prince d’accorder. Voye^ Lettres de g r â c e .
Mais fans le fecours d’aucunes lettres, le crime oit
plutôt la peine publique, 8c les condamnations pécuniaires
prononcées pour raifon du crime, fe pref-
crivant au bout d’un certain tems, favoir après 20
ans, lorfque la condamnation n’a pas été exécutée ,
8c au bout de 30 ans, lorfqu’elle a été exécutée foit
par effigie ou par fimple lignification, félon la qualité
du jugement. Voye^ Presc r ip t io n . Voyt^ les livres
XLV II. & X LV I I l. du digeft. 8c le IX . du code ; le
liv. V. des décret. ÔC ACCUSATEUR , ACCUSÉ , 8c ci-
après C r im in e l , Peines , Procédure cr im inelle.
Crime atroce ; eft celui qui blefle griévemént le public
, 8c qui mérite une punition des plus feveres.
Crime capital, eft celui qui emporte peine de mort
naturelle ou civile.
Crime double, les lois Romaines donnent ce nom
aux aRions qui renferment tout à la fois deux crimes
différens, tel que l’enlevement d’une femme mariée,'
dont l’auteur commet en même tems le crime de rapt
8c celui d’adultere. Le crime double eft oppofé au crime
fimple. Vbye^ au Code , liv. IX . tit. iciij. 1. 1.
Crimen duorum, eft celui qu’une perfonne ne peut
commettre feule, 8c fans qu’il y ait deux coupables^
tel que le crime d’adultere.
Crime énorme ou atroce, eft la même chofe.
Crimes extraordinaires, chez les Romains, étoient
oppofés aux crimes qu’on appelloit ordinaires. On en-
tendoit par ceux-ci les crimes qui avoient une peine
certaine 8c fixée par les lois Romaines, 8c dont la.
pourfuite fe faifoit par la voie ordinaire des demandes
8c des défenfes ; au lieu que les crimes extraordi-
nains y tant privés que publics, étoient ceux dont la
peine n’étoit point déterminée par les lois, dont par
conféquent la punition étoit arbitraire , 8c qui fé
pourfuivoient par la voie extraordinaire de la plainte
8c de l’accufation. Parmi nous on fait peu d’attention
à ces diftinRions de crimes privés 8c publics,
8c de crimes ordinaires 8c extraordinaires ; on ne s’arrête
principalement qu’à la diftinRion des crimes qui
font capitaux d’avec ceux qui ne le font pas; 8c quoique
nos lois ayent réglé la peine des crimes les plus
connus , on tient cependant qu’en France toutes les
peines font arbitraires, c’eft-à-dire qu’elles dépendent
beaucoup des circonftances 8c de la prudence
du juge. Quant à la voie par laquelle on pourfuit la
vengeance des crimes, le miniftere public le fait toujours
par la voie de la plainte. Les particuliers inté*'
refles à la vengeance du crime , peuvent aufli prendre
la voie de la plainte ou de la dénonciation ; mais
ils peuvent aufli prendre la voie civile pour les intérêts
civils.
La voie dë la plainte eft bien regardée comme une
Voie 8c procédure extraordinaire: cependant la pro-
cédure criminelle commencée par une plainte, quoiqu’elle
foit fuivie d’information & de decret, n’eft
vraiment réglée à l’extraordinaire que quand il y a
un jugement qui ordonne le recollement 8c la confrontation
, qui eft ce que l’on appelle le réglement
à l'extraordinaire; car jufqu’à Ce reglement l’affaire
peut, fur le vu des charges, être civilifée ou du moins
renvoyée à l’audience. Voye^ au digefie 47 , tit. x j. de
extraùrdinariis criminibus.
- Crime graciabU, eft çelui pour lequel on peut ob*