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figures de danfeurs de corde, gravées d’après des pierres
antiques. Les Romains nommoient leurs danfeurs
de corde funambuli , & TérenCe en fait mention
dans le prologue de fon Hecyre ; mais pour abréger,
je renvoyé fur ce fujet le ledeur à la differtation d’un
favant d’Allemagne, de M. Grodeek. Elle eft imprimée
à Dantzick (Gedani) en 1701, in-S°. Je me contenterai
d’ajouter que les Cyzicéniens firent frapper
en l’honneur de l’empereur Caracalla une médaillé
inférée & expliquée par M.Spon dans fes recherches
d’antiquités ; & cette feule médaille prouve affez que
les danfeurs de corde faifoient dans ce tems-là un des
principaux amufemens des grands & du peuple.
Bien des gens ont de la peine à comprendre quel
plaifir peut donner un fpedacle qui agite l ’ame, qui
l’importune avec inquiétude, qui l ’effraye , & qui
n’offre que des craintes & des allarmes; cependant il
eft certain, comme le dit-M. l’abbé du Bos, que plus
les tours qu’un voltigeur téméraire fait fur la corde
font périlleux , plus le commun des fpe&ateurs s’ y
rend attentif. Quand ce fauteur, ce voltigeur fait un
faut entre deux épées prêtes tà l é percer fi dans la
chaleur du mouvement fon corps s’écartoit d’un
point de la ligne qu’il doit décrire, il devient un objet
digne de toute notre curiofité. Qu’on mette deux
bâtons à la place des épées , que le voltigeur fafle
tendre fa corde à deux piés de hauteur fur une prairie
, il fera vainement les mêmes fauts & les mêmes
tours, on ne dédaignera plus de regarder, l’attem-
•tion du fpe&ateur celle avec le danger.
D ’oii peut donc venir ce plaifir extrême qui accompagne
feulement le danger où fe trouvent nos
feniblables? Efi-ce une fuite de notre inhumanité ?
Je ne le penfe pas, quoique l’inhumanité n’ait mal-
heureufement que des branches trop étendues : mais
je crois avec l’auteur des réflexions fur la Poéjie & fur
la Peinture , que le plaifir dont il s’agit ici eft l ’effet
-de l’attrait de l’pmotion qui nous fait courir par in-
ftind après les objets capables d’exciter nos pafïïons,
quoique ces objets faffent fur nous des impreflions
fâcheufes. Cette émotion qui s’excite machinalement
quand nous voyons nos pareils dans le péril,
eft une paflion dont les mouvemens remuent l’ame,
la tiennent occupée, & cette paflion a des charmes
malgré les idées triftes & importunes qui l'environnent,
Voilà la véritable explication de ce phénomène
, & pour le dire en paffant, de beaucoup d’autres
qui ne femblent point y avoir de rapport ; comme
.par exemple de l’attrait des jeux de hafard, qui n’eft
-lin attrait que parce que ces fortes de jeux tiennent
-l’ame dans une émotion continuelle fans contention
d’efprit ; en un mo t, voilà pourquoi la plupart des
hommes font affujettis aux goûts & aux inclinations
qui font pour eux des occafions fréquentes d’être occupés
par des fenfations vives & fittisfaifantes. Vous
■ trouverez ce fujet admirablement éclairci dans l’ouvrage
-que j’ai cité, & ce n’eft pas ici le lieu d’en
-dire davantage. Voye^ C o m p a s s i o n . Article de M.
le Chevalier DE J AU COURT.
DANTA, f. m. (Hijl. -nat.des quadrup.) nom que
donnent les Efpagnols du Pérou au plus grand des
quadrupèdes de l’Amérique méridionale. Les Portugais
du Para l’appellent auté. Il eft plus petit & moins
.gros qu’un boeuf, plus épais & moins élancé que le
-cerf & l’élan; il n’a point de cornes, & .a la queue
fort courte ; il eft extrêmement fort & leger à la
courfe , & fe fait jour au milieu des bois les plus
fourrés. Il ne fe rencontre au Pérou que dans quelques
cantons boifés de la Cordeliere orientale ; mais
il n’eft pas rare dans les bois de l’Amazone, ni dans
ceux de la Guiane. On le nomme vagra dans la langue
du Pérou ; tapiira, dans celle du Brefil ; maypou-
jri , dans la langue Galibi fur les côtes de la Guiane.
Comme la terre-ferme, voifine de l’île de Cayenne,
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fait partie du continent que traverfe l’Amazone, &
eft contiguë aux terres arrofées par ce fleuve, on
trouve dans l’un & dans l’autre pays la plupart des
mêmes animaux. Voilà tout ce que M. de la Con-
damine dit du dantadansfon voyage de l’Amérique
méridionale (Mém. de l ’acad.des Sc. ly^S. p . 46#.)',
& je m’en tiens à fa Ample defeription, parce que
celles des autres voyageurs ne s’accordent point en-
femble: Marmol, par exemple, affûre que le danta
d’Afrique a une corne au milieu de la tête courbée
en rond en maniéré d’anneau ; ce n’eft point-là notre
animal qui eft fans cornes. Léry donne au danta d’Amérique
pour défenfes deux dents tournées en rond
comme la corne de Marmol. M. de la Condamine ne
parle ni de ces deux défenfes, ni d’aucune autre fin-
gularité du danta. Il en eût été fans doute inftruit,
mais il n’écrivoit pas fes voyages pour tranfmettre
des faits imaginaires. Article Jaucourt. de M. le Chevalier DE
D AN T ZICK, (Géog. mod.) ville libre & anféa-
tique, & capitale de la Pruffe royale & dé la Pome-
relle en Pologne. Elle eft fituée fur les petites rivières
de Rodauneôt de Morlaw, proche la Viftule &
le golfe d’Angil, fur la mer Baltique. Long.36. 40.
lat. 64. au. C ’eft une ville d’un commerce très-
étendu.
D A N U B E , f. m. (Géog. mod. ) en allemand
Douaw, le plus célébré & le plus grand fleuve de
l’Europe après le 'Wolga. Héfiode eft le premier auteur
qui en ait parié. ( Théog. v. 33$ ). Les rois de
Perfe mettoient de l’eau de ce fleuve & du Nil dans
Gaza avec leurs autres thréfors, pour donner à con-
noître la grandeur & l’étendue de leur empire. Le
Danube prend fa fource au-deflous de Tonefchingen
village de la principauté de Furftemberg, traverfè
la Soiiabe, la Bavière, l’Autriche, la Hongrie, la
Servie, la Bulgarie, &c. finalement fe décharge
dans la mer Noire par deux embouchures. L’abbé
Regnier Defmarais , dans fon voyage de Munich,
dit allez plaifamment fur le cours de ce fleuve :
Déjà, nous avons vu le Danube inconfiant,
Qui tantôt Catholique , & tantôt Protejlant ,
Sert Rome & Luther de fon onde ,
Et qui comptant après pour rien
Le Romain , te Luthérien ,
Finit fa courfe vagabonde
Par n'être pas même Chrétien.
Rarement à courir le monde
On devient plus homme de bien.
Le ledeur curieux de connoître le cours du Danube
, l’hiftoire naturelle & géographique d’un grand
nombre de pays qu’il arrofe , le moderne & l’antique
favamment réuni, trouvera tout cela dans le
magnifique ouvrage du comte de Marfigly fur le
Danube. Il a paru à la Haie en 1726 en 6 volumes
in-folio, décorés d’excellentes tailles-douces. Peu
de gens ont eu des vûes aufli étendues que fon illu-
ftre auteur : il y en a encore moins qui ayent eu affez
de fortune pour exécuter comme lui ce qu’il a fait
Jean ufacvoeuurr dte.s Sciences. Article de M. le Chevalier de
* DAPALIS, ( Myth. ) furnom que les Romains
donnoient à Jupiter, comme confervateur des mets
& intendant des feftins.
* DAPHNÉPHORE, f. m. (Mythî) jeune homme
choifi entre les mieux faits , les plus robuftes,
& les mieux nés, qui pendant les fêtes qu’on céle-
broit en Grece tpus les neuf ans en l’honneur d’Apollon
, avoit la fbndion de porter la branche de
laurier ornée de globes de cuivre, couronné de laurier
& de fleurs i ces fêtes s’appelloiept daphnépho-
ries ; ôc le plus remarquable des globes défignoit le
Soleil ; les. moins çonfidérables étoient desfymboles
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flé la Lune & d’autres étoiles ; les couronnes mar-
quoient les jours de l’année.
DAPHNOMANCIE, f. f. (Divinat.) forte de divination
qui fe faifoit par le moyen du laurier* &
qu’on nommoit ainfi parce que les Poètes feignoient
que la nymphe Dapnné, en fe dérobant aux pour-
fuites d’Apollon, avoit été changée en laurier.
On pratiquoit la daphnomancie de deux manières:
i° . en jettant dans le feu une branche de laurier
; fi en brûlant elle pétilloit & faifoit un certain
bruit , on en tiroit un heureux préfage: c’étoit
au contraire mauvais figne quand elle brûloit tout
Amplement & fans produire aucun fon, comme dit
Properce,
Si tacet èxtincio laurus adufla foco.
L’autre maniéré étoit de mâcher des feuilles de lau-
rier, qui infpiroit, difoit - on, le don de prophétie :
aufli les pythies, les fibylles, & les prêtres d’Apollon
n’omettoient-ils jamais cette' cérémonie ; ce qui
faifoit regarder le laurier comme le fymbole carac-
teriftique de la divination. (G)
.^ DAPIFER, f. m.(Hifl. mod. ) nom de dignité &
d office, grand-maître de la maifon de l ’empereur.
C e mot en latin eft compofé de dapis, qui fignifie
lin mets, une viande qui doit être fervie fur la table ;
& de fero , je porte : ainfi il fignifie proprement porte
mets , porte-viande, un officier qui porte les mets,
qui fert les viandes fur la table.
Ce titre de dapifer f toit un nom de dignité & d’office
dans la maifon impériale , que l’empereur de
Conftantinople conféra au czar.de Ruflîe comme
une marque de faveur. Cet office fut autrefois infti-
tue en France par Charlemagne fous le titre de da-
piferat & fénèchauffée , qui comprenoit l’intendance
fur tous les offices domeftiques de la maifon royale ;
ce que nous nommons aujourd’hui grand-maître de
la maifon du Roi. Les rois d’Angleterre, quoique
fouverains , fe faifoient honneur de pofféder cette
charge dans la maifon de nos rois ; & c’eft en confé-
quence de cette dignité, dont ils étoient revêtus
comme comtes d’Anjou, qu’ils étoient gardiens &
défenfeurs de l’abbaye de S. Julien de Tours. On lit
cette anecdote dans une lettre de Henri I. roi d’Angleterre
, écrite vers les premières années du xij. fie-
c le , & rapportée au tome IF . des mifcellanea de M.
Baluze. Cette charge étoit la première de la maifon
de nos rois , & fes poffeffeurs fignoient à toutes les
charges. Elle fe nommoit en françois fénéchal, & a
été remplacée par celle de grand - maître de la maifon
du Roi. F o y c i Maîtres (grands), (a)
La dignité de dapifer fut beaucoup moins éminente
en Angleterre, puifque dans plufieurs de nos anciennes
chartes, l’officier qui en eft revêtu eft nomme
un des derniers de la maifon royale.
La dignité de dapifer fubfifte encore aujourd’hui
en Allemagne, & l’éledeur palatin l’a poffédée juf-
qu’en 1623^ que l’éiefteur de Bavière a pris le titre
d archi-dapifer de l’empire ; fon office eft au couronnement
de l ’empereur , de porter à cheval les premiers
plats à fa table.
Les différentes fondions de la charge de dapifer,
lui ont fait donner par les auteurs anciens plufieurs
noms différens; comme d\\la.ÇUpoç, eleator, dipno-
cletor, convocator, trapeiopaus , architriclinus , pro- I
gufta, proeguflator , domejlicus , megadomeflicus , oeco- ’
nomus , major do mus, Jènefchallus, fchalcus , gaflal-
dus , affejfor , proefectus ou prcepofîtus menfee , princeps
coquorum & magirus. Chambers. (G)
DARBY ou DERBY, ( Géog. mod, ) ville d’Angleterre,
capitale de Derbyshire. Elle eft fituée fur
le Dervant. Long. , S . ,o. lat. S u . i 4.
, d a r c i n e , b a s s in , c h a m b r e ,
«■ AKADIS, (Manne.') tous ces noms font fynony-
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mes & fe donnent à la partie d’ùri port de méifoît
les batimens font le plus à l’abri & le plus en sûre'-
te. Un donne volontiers ce nom de. darfe à' l’endroit
ou i on mettes galeres, &.qui eft fermé d’une chaf-
ne. Foyei C hambre & Bassin: (Z )
D A R D , (Hiß. nat.) Foyei V andoise.
D a r d , f. ni. ( Hiß. ancAjaculùm , ëpieÜ arme
par un bout; d une pointe de fer, & propre à fe lancer
a la main.
D ards , en Architûlün, Bouts de fléchés , que les
anciens ont introduits comme fymboles de l’amour'
parmi les oves qui ont la forme du coeur.
D ards DE FER, (Serrurerie.) on en voit de placés
fur une grille ou porte de f e r ,, pour fervir de char-
.don & dé défenfe.
D ards À.feu , (Artmilit. & Mar.) c’eft une forte
d artifice qu’on jette dans les vaifleaux ennemis, r
D ard , terme de Pêché ; voyez Fouanne ou T r ident.
D ard , (Jard.) eft le montant, ou le petit brin
droit & rond, qui s’élance du milieu du calice de certaines
fleurs, telles que l ’oeillet. (K)
t mod‘) fort de la baffe Hongrie
iur la Drawe. Long. 3G. 4$. lat. 46. 65.
DARDANARIUS, fub. m. (Hiß. anc.) ufurier.
monopoleur fi l’on pouvoit fe fervir de ce mot. Ce
nom fe donnoit autrefois à ceux qui caufoient la dL-
fette & cherté des denrées, fur-tout du b lé, en les
achetant en grande quantité , & les ferrant enfuit«*
pour en faire hauffer la valeur, & les vendre à un
prix exorbitant. Ces gens ont toûjours été en horreur
dans toutes les nations j & on les a févere-
ment punis, quand ils ont été reconnus. Voyez Monopole.
^
Le mot dardanarius vient de Dardanus, qui, dit-
on , détruifoit les fruits de la terre par une èf'pece
de forcellerie.
Ces fortes de gens font aufli appelles ■ arufeatores ,
direclarii, fitocapeli , annonce flagellatores , & feplatia-
rii. Chambers. (G)
DARDANELLES ( canal ou d é tr o it des)^
Géog. mod. fameux canal qui fépare les deux plus belles
parties de la terre, l’Europe & 1’ A fie. On l’appelle
autrement YHelLefpont, le détroit de Gallipoli, le bras
de S. Georges, les bouches de Conßantinople. Les Turcs
le connoiflênt fous le nom de Boghas ou détroit de la
mer Blanche. Il y a beaucoup d’apparence que le nom
de Dardanelles y ient de Dardane, ancienne ville qui
n’en P3* éloignée, & $ont le nom même feroit
peut-etre aujourd’hui dans l’oubli, fans la paix qui
y fut conclue entre Mithridate & Sylla. Ce canal,
qui joint l’Archipel à la Propontide ou mer de Marmara
, eft bordé à droite & à gayche par de belles
collines affez bien cultivées. L’embouchure du canal
a près de quatre milles & demie de large, & eft
défendue par des châteaux dont nous parlerons dans
l’article fuivant. Les eaux de la Propontide qui pafi
fent par ce canal y deviennent plus rapides ; lorsque
le vent du nord foufïïe, il n’eft point de vaifleaux
qui fe puiffent préfenter pour y entrer , mais
on ne s’apperçoit plus du courant avec un vent du
fud. Tournefort, voyage du Levant, Lettre x j. Article
de M. le Chevalier DE JAUCOURT.
D ardanelles (châteaux des), Géog. Il y a deux
anciens & forts châteaux de la Turquie nommés châteaux
des Dardanelles, l’un dans la Romanie, & l’autre
dans la Natolie. Ils font fitués aux deux côtés du
canal dont nous avons parlé dans l’article précédent.
Ce fut Mahomet II. qui les fit bâtir , &.on peut les
appeller les clés de Conßantinople, dont ils font éloignés
d’environ 6 5 lieues. Ily a deux autres nouveaux
châteaux des Dardanelles à l’embouchure du détroit,
bâtis par Mahomet IV. en 1659, pour s’oppofer aux
infultes des Vénitiens. Ils défendent le paffage du